Le message envoyé par Caleb avait fait paniquer Thaïs. Autant dire qu’elle avait pris le premier taxi pour revenir à la maison en trombes, ouvrant la porte d’entrée à la volée. « Qu’est-ce qui se passe chéri, dis-moi tu m’as fait peur dans ton message ! » s’exclama-t-elle sans s’imaginer une seule seconde qu’un huissier était passé et que par conséquent son tendre mari était au courant de ses dettes… colossales.
Trente mille dollars de dettes et elle gardait ça pour elle comme si c’était la mer à boire ! Franchement, elle se foutait de ma gueule ou pas ?! Bien sûr, j’avais aussitôt fait un chèque à l’huissier pour éponger le trou abyssal qu’était son compte banque. J’étais donc à la fois en colère mais aussi emmerdé car je ne savais pas si je devais lui passer un savon ou au contraire la fermer. Nous commencions à peine à nous retrouver, je craignais qu’elle m’envoie paitre en me rappelant que dernièrement, elle avait été le cadet de mes soucis –à tort. « Si je te dis huissier à la maison…Cela te dit quelque chose ?! »
Et merde. La procédure était si avancée que ça ?! Thaïs perdait la notion du temps dernièrement et fatalement, elle baissa la tête aussitôt. « Ben… oui… » murmura-t-elle, honteuse, sachant pertinemment qu’elle risquait de se prendre un savon mais cette fois, elle ne l’aurait pas volée. « J’ai perdu mon emploi chez l’ambassadeur d’Irlande et du coup je me suis retrouvée sans rentrée d’argent d’un coup d’un seul avec pas mal de dépenses parce qu’il fallait que je paye ma chambre d’hôtel, etc. J’ai cherché un autre boulot d’appoint mais sans succès et j'étais toute seule, et du coup bah… c’était la dégringolade » renifla-t-elle sans oser le regarder. « Tu peux m’engueuler hein… je l’ai mérité. »
Je n’avais pas réalisé en partant que je la plaçais dans les ennuis en lui dégageant une route royale dans laquelle, elle pourrait s’engouffrer. « Je n’ai pas l’intention de t’engueuler »soupirais-je. J’aurais aimé qu’elle m’en parle mais je ne pouvais pas trop lui jeter la pierre car j’étais celui qui était parti. Je n’osais même plus m’imposer à elle de peur de me prendre un reproche ou qu’elle m’en veuille. Je marchais littéralement sur des œufs partagé entre mon désir de reprendre le contrôle de notre couple et celui, de me faire petit pour être certain de pouvoir toujours appartenir à ce couple. « Nous irons demain à la banque, il est grand temps que nous faisions compte commun et que tu ais une carte bleue »lui dis-je après coup avant de la serrer dans mes bras.
Thaïs tremblotait face au stress car elle ne voulait pas qu’il la haïsse pour cette cachotterie mais d’un autre côté, elle avait tenté de faire au mieux même s’il fallait admettre qu’elle avait lamentablement échoué. « Tu veux que l’on ait un compte commun ? » murmura-t-elle en le serrant délicatement contre elle, fermant les yeux en humant son odeur apaisante. Thaïs se calma pendant quelques minutes en caressant son dos pour mieux s’écarter et le regarder avec un air extrêmement sérieux. « Caleb Weyss, ça va pas du tout ça ! » s’exclama-t-elle, sourcils froncés. « J’ai pas envie que tu t’accroupisses parce que tu as peur que je t’envoie une remarque méchante dans la tête, je veux retrouver mon homme ! Je veux que tu m’engueules si je fais de la merde, que tu t’opposes à moi, que tu n’aies pas peur de t’imposer parce que c’est toi le mâle dominant et que flûte, je ne vais pas partir !! J’ai limite pris des actions chez UHU… » murmura-t-elle avant de laisser échapper un petit rire face à sa gueulante à peine crédible.
« Oui, je crois que c’est mieux ! » lui dis-je avec un léger sourire. Au moins, j’étais certain qu’elle n’aurait plus de souci financier car avant qu’elle n’arrive à vider le compte en banque, elle allait avoir du temps devant elle et moi aussi. Je la serrais donc dans mes bras avant de la sentir s’écarter et me passer une soufflante. C’était la meilleure, elle faisait la connerie et elle voulait en prime que je l’engueule. « Tu as conscience que c’est limite si tu me demandes pas que je te mette une déculottée parce que tu as fait une connerie ?! Tu sais, ce n’est pas évident, j’essaie de reprendre mes marques mais je me dis que je n’ai rien à t’imposer. Tu m’as déjà offert la chance de reprendre une vie de couple avec toi, je me vois pas en prime, t’engueuler pour quelque chose que j’ai moi-même provoqué. Si je n’étais pas parti, tu n’aurais pas eu tous ces frais »
« J’ai le droit de dire que j’ai hâte ? » Cela signifiait que le jeune couple Weyss officialisait, au cours d’une nouvelle étape, leur mariage. Certes, c’était avant que Thaïs ne se décide à lui passer une soufflante ou en tout cas essayer car elle n’arrivait pas à lui en vouloir plus de cinq secondes d’à filée et en l’occurrence, elle souhaitait surtout qu’il réagisse. « Ben mets-moi une déculottée ! Hurle ! Crie ! Arrête de penser que tu dois te faire tout petit car Caleb Weyss, tu restes mon mari et toi et moi, on va faire une longue route ensemble alors mets-toi-le dans le crâne. Si tu n’étais pas partie, j’aurais quand même perdu mon travail, ne prends pas tous les évènements extérieurs pour ton compte. Je n’avais pas envie d’être un boulet, j’ai voulu me débrouiller solo et j’ai eu tort… ne fais pas mon erreur. Je t’aime trop pour continuer à te laisser couler de cette façon… sinon c’est moi qui te mets une fessée, fais gaffe ! »
« Dans tes rêves pour la fessée ! » grognais-je avant de me passer la main sur la nuque, signe que je réfléchissais. « Ok… je vais arrêter de craindre que tu vas me glisser entre les doigts si jamais je te gueule dessus comme avant mais merde, trente mille dollars ! Pourquoi tu m’as rien dit ?! Tu sais très bien que je te signais un chèque et le tour était joué ! »lui dis-je avant de rajouter. « Même si par le plus grand des hasards, nous nous séparerions, tu sais que tu pourrais toujours venir me voir pour me demander de l’aide. Arrête de te débrouiller toute seule… il va quand même falloir que je t’apprenne à gérer ton budget ». Je sentais que j’avais du pain sur la planche mais qu’importe, je voulais bien passer toutes les heures de ma vie à lui expliquer.
« Me disais aussi… » tenta-t-elle de plaisanter avant d’émettre une petite moue, préférant limite qu’il lui crie dessus plutôt qu’il reste à craindre que Thaïs allait partir en claquant la porte au moindre mot de travers. « Je suis nulle avec les finances et puis je pensais vraiment retrouver tout de suite un travail. Mais je suis nœud aussi, j’aurais dû retourner à la Cabot au lieux de prendre une chambre d’hôtel qui m’a coûté les yeux de la tête… je suis catastrophique, je sais, mais pour une fois je voulais t’épargner d’avoir à sortir le chéquier parce que ta femme est une cata ! »
« Je me fiche bien de sortir le chéquier ou non ! Tu sais très bien que je n’ai jamais été très enclin à me préoccuper de l’argent quand bien même je n’en aurais pas » soupirais-je avant de relever son menton pour mieux l’embrasser avec tendresse. « N’empêche, puisque tu insistes, j’exige un remboursement en nature… Après tout, autant que j’en ai pour mon argent »plaisantais-je pour refaire venir un sourire sur ses lèvres et puis, même si je ne l’engueulais pas aujourd’hui, je savais que Thaïs me fournirait toujours une très bonne raison de le faire un prochain jour. Je la soupçonnais d’aimer me mettre en rogne. « Dis.. t’es comme Mallo ? T’aime les fessées ? »rigolais-je de ma connerie.
