PRIALYA ► Leave me alone

Plus j'écoutais Priape parler et plus je me disais que j'étais surement un peu cinglée dans ma tête, que je devais avoir un sérieux problème que de faire tout cela en connaissance de cause. J'avais passé la nuit avec lui en sachant très bien que ce n'était pas une promesse de nouveau départ, je l'avais embrassé de nombreuses fois en sachant très bien que ce n'était pas une volonté pour lui que de me donner de l'espoir. Je savais tout cela, je savais très bien que ça ne reprendrait pas entre nous, pas maintenant en tout cas mais je m'en fichais complètement de tout cela parce que je l'aimais simplement et j'étais prête à l'accepter. Je le laissais donc parler, de notre nuit ensemble, de CS du fait que ça ne lui plairait pas qu'on dise cela sur nous, ce qui me confirmait donc que ça lui barrerait surement des opportunités parce que s'il n'avait pas encore compris que l'espoir était éteint en moi, c'est qu'il y avait surement un souci. « Priape... Tu sais que tout ce qu'il se passe entre nous c'est en connaissance des conséquences... Je sais très bien que quand je t'embrasse tu ne vas pas me dire - je t'aime - quand nos lèvres se seront séparées et je sais aussi que quand on couche ensemble tu ne me promets pas de me demander en mariage dans les années qui arrivent... Je sais tout ça, je sais qu'il n'y a rien derrière que c'est simplement un.... Moment de faiblesse ? » Mes yeux se plantent dans les siens. Je sais mettre des mots là dessus, sur mes moments de faiblesse à moi aussi parce que si c'est une faiblesse pour lui de craquer si ça montre toujours l'étendu de ses sentiments, c'est aussi une faiblesse pour moi car cela montre à quel point je suis faible et ridicule face à lui. « Je crois que mes amis seraient beaucoup moins dur à ton égard si justement ils ne se rendaient pas compte que je fais tout ça en connaissance du vide dans les secondes qui suit mais que ça ne m'empêche pas de le faire... » Matthéo... Sienna, tous les deux détestaient le fait que je ne puisse contrôler mes sentiments comme Priape arrive à contrôler sa manière d'accorder son pardon ou non.

Je m’en voulais malgré tout, pour cette nuit au SC mais également pour toutes les autres fois où l’on s’était embrassés, ou j’avais été à deux doigts de craquer. Mais Talya reprit la parole pour affirmer une chose : elle savait déjà tout ça. Que c’était fini, qu’il n’y avait rien, aucune promesse, aucun espoir derrière nos rapprochements, nos baisers, notre nuit ensemble, qu’elle regroupa de manière assez juste sous le terme de –moment de faiblesse- Son regard croisa alors le mien. J’hochai simplement la tête. Je l’écoutais poursuivre, elle me confia alors que ses amis me jugeait durement à cause de ça, de mes moments de faiblesse et à cause du fait que Talya les laisse se produire alors même qu’il n’y avait pas d’espoir entre nous. « Ils pensent que je profite de toi c’est ça ? Que tu devrais me repousser ? Me sortir de ta vie une bonne fois pour toute ? » Et pas besoin de mettre des prénoms sur ce –ils-, je devinais assez bien de qui il s'agissait. Je sentais que certains proches de l’entourage de Talya avait pris le parti de me détester, espérant peut être même recaser la blondinette avec un autre que moi. « Tu sais qu’ils ont raison, tu devrais pas me laisser faire ça… » soufflai-je, mes yeux toujours plantés dans les siens, ma main venant un instant caresser son visage. Empêche moi de te dévorer des yeux, arrête ma main dans son geste, stoppe mes doigts qui effleurent ta peau…

Bien sur, elle défendit le point de vue de ses amis, me corrigeant pour clarifier leur avis : selon eux, ce n’était pas sain, ça allait détruire Talya. Et mon regard se posa sur ma main venue au contact de la peau de son visage… Ce n’était pas sain. Et il n’y avait pas que ses amis pour le penser, les miens aussi étaient d’accord là dessus. Même moi au fond de moi, je le savais. Mais la blondinette ajouta qu’elle était bien assez grande pour gérer sa vie comme elle l’entendait. Ses doigts s’entrelacèrent dans les miens, nos regards s’interceptèrent et je sentis comme trop souvent ces derniers temps, les battements de mon cœur s’accélérer sensiblement. Elle réduisit un peu la distance, déjà bien trop faible, entre nous. Son front vint se poser contre le mien. Nos nez se frottèrent, un bisou d’esquimau… Mais on était loin d’être sur la banquise : pas de glace entre nous, bien au contraire, malgré notre nouvel accrochage on se retrouvait à nouveau dans une situation bien trop ambiguë. Mais si elle ne pouvait pas m’en empêcher, c’était à moi de me raisonner, à moi d’être sage. C’était une torture mais finalement, je relâchai sa main, m’écartai d’elle pour me lever du lit. « Tu sais quoi ? On devrait faire un jeu… Les petits chevaux c’est bien ça, les petits chevaux. On a le plateau en pédia, je vais nous le chercher… » enchainai-je de manière un peu confuse, me dirigeant vers la porte de sa chambre que j’ouvris pour m’échapper sans lui laisser le temps de donner son avis. Une fois refermée, je me retrouvais dans le couloir et je restais un moment immobile avant d’enfouir mon visage dans mes mains. Qu’est-ce que j’étais en train de faire ? Ce n’était clairement pas la bonne attitude d’être aussi proche de mon ex, je le savais pourtant. Après quelques minutes à reprendre mes esprits, je montais réellement dans le service pour ramener des jeux de société pour distraire la jeune femme, peut être aussi pour me distraire moi également, m’empêcher de penser à l’appel irrépressible que ses lèvres semblaient exercer sur les miennes.

L'avis de mes amis n'allait pas dans le sens de Priape, c'était logique, aussi logique que le fait que les amis de Priape n'allaient pas dans mon sens. Tout le monde défendait son proche et voulait le mieux pour lui se mêlant un peu trop parfois de nos histoires, de notre histoire. J'étais assez grande pour décider ce que je voulais pour moi, pour ma vie, même si cela me faisait souffrir. Oui ce n'était pas agréable d'écouter Priape me dire qu'il avait dormi avec une fille même sans rien faire alors qu'on avait passé une nuit ensemble peu de temps avant, une nuit qui ne disait pas que tout allait recommencer, une nuit qui n'était pas un pardon mais une nuit qui signifiait un tant soit peu quelque chose au fond de lui quand même alors s'il ne veut pas me pardonner, qu'il respecte au moins ce petit quelque chose qu'il ressent au fond et reste le mec respectueux qu'il est. Je ne veux pas qu'il change à cause de moi et ce que j'ai fait, mes amis diront surement que je mérite mieux mais moi je pense juste qu'il ne méritait pas cela. Le moment de tendresse que nous partagions fut interrompu par le jeune homme qui se levait pour aller chercher les petits chevaux. Je ne pus pas m'empêcher de rire lorsqu'il sortit de la chambre en trombe et qu'il revint plusieurs minutes plus tard avec le plateau de petits chevaux, mon sourire ne m'avait pas quitté et je ne pus pas me résoudre à ne pas sortir cette phrase qui voulait tout dire : « Tu me fais rire Zacharias, t'as plus d'un tour dans ton sac, j'aime ça. » Je le regarde en le taquinant, il est encore mal à l'aise et pourtant moi la situation me fait rire vilaine que je suis. « Tu sais que je joue le jeu qu'avec une carotte moi. J'ai quoi si je gagne ? » Il devait surement souvenir de notre première soirée où je lui avais déjà demandé une carotte pour jouer aux fléchettes.

Ma réaction ne sembla pas vexer Talya, qui se mit à rire alors que je m’éclipsais rapidement de la chambre. Le coup des petits chevaux, fallait que je retienne que ça marchait bien pour se sortir de situation délicate. Peut être que j’aurais du proposer une partie pendant le SC, ça nous aurait évité notre dérapage… Quand je revins, je n’étais toujours pas très à l’aise mais Talya, souriante, me taquina avant de me réclamer ce qu’elle remporterait en cas de victoire, petit clin d’œil à notre première rencontre et à notre première partie de fléchette. « Tu auras le plaisir de m’avoir battu ? » proposai-je tout en sachant très bien qu’elle n’allait pas se contenter de cela. Je posais le jeu sur l’adaptable avant de le faire rouler et de m’asseoir au bout du lit, face à elle, le plateau entre nous. Je plaçai les pions en forme d’équidés, attrapai les dés avant de relever le regard vers Talya, sentant mon malaise se dissiper peu à peu alors qu’une distance plus raisonnable nous séparait. « Bon, dis moi directement ce que tu veux mettre en jeux… » lui demandai-je puisque je me doutais que ma première réponse ne l’avait pas convaincue. « Mais je refuse que tu me traites encore de profiteur après ça. On voit bien que c’est clairement toi la plus profiteuse de nous deux. » la taquinai-je à mon tour.

Sa réponse ne me convenait pas, pas plus maintenant qu'elle ne m'avait convenu il y a de cela plusieurs mois et il le savait. Cependant, il avait l'air de se donner un peu de temps de réflexion en installant doucement mais surement le plateau de jeu sur la table roulante qui me servait à prendre mes repas, ou faire des jeux seule d'habitude. Il l'installa entre nous deux et se mit assis à son tour au bout du lit. Cette situation me fit sourire une nouvelle fois mais je ne fis pas de commentaire, je me contentais de l'écouter me dire qu'il fallait lui dire directement ce que je voulais, qu'on irait plus vite ainsi. « T'as rarement des idées toi hein ? » La première fois peut être avait il eu peur parce qu'on ne se connaissait pas assez, maintenant il avait peur de me blesser, ou que ce ne soit pas conforme à mes attentes surement. « Si je gagne tu dors avec moi pour que le bébé me laisse tranquille et que je puisse fermer l'oeil de la nuit. » Je plante mon regard dans le sien, est il prêt à accepter de nouveau cette proximité, je n'en sais rien, mais j'ai besoin de dormir, même si avant qu'il arrive j'avais pressenti que j'aurais bien du mal à rejoindre les bras de morphée. « Si tu gagnes c'est toi qui choisi ! » J'étais profiteuse, joueuse mais il ne fallait pas que ça aille que dans un sens non plus voyons ! « Je crois qu'un dunster pas mal physiquement m'a filé son virus de profiteur l'année dernière dès ma première soirée... Le virus a dû un peu trop se développer en moi, je pense qu'il devrait chercher un remède ça peut être dangereux. »

« C’est toi qui as besoin d’une carotte pour jouer. Moi je suis bon joueur, je joue pour le plaisir… » Regardez donc qui était le plus profiteur de nous deux maintenant ? J’installai tout pour notre partie tout en écoutant Talya poser ses conditions. Je secouais la tête pour refuser : « Talya, non je peux pas faire ça. On peut pas rester dormir ici, les visites s’arrêtent à 20h normalement… » Genre j’étais interne, je m’étais déjà faufilé une nuit ici pour l’aider à fuguer, mais me glisser dans ses draps ce soir je pouvais pas… Excuse bidon bonjour. Et si je gagnais, c’était à moi de choisir ce que je voulais d’elle. « Que t’accouches pas avec 34 semaines d’aménorrhées… » Comme si elle pouvait contrôle une telle chose. « Un dunster pas mal physiquement tu dis ? Je vois pas de qui tu parles… A mon avis t'étais alcoolisée ce jour là. Et le remède je le connais : tu vas te prendre une grosse défaite contre le roi des petits chevaux et ça va te passer l’envie de profiter… » lançai-je alors avec un regard de défi. Je lui tendis les dés : « Allez aux dames l’honneur… » J'oubliais volontairement de révéler qu'en fait, le roi des petits chevaux se prenait régulièrement de grosses branlées face aux petits patients de pédia...

« Eh ! Je joue aussi pour le plaisir mais avec des petites carottes c'est mieux ! » Je lui souris et la carotte que j'ai demandé n'a pas l'air de lui plaire. Il tente de se défiler mais après un rapide coup d'oeil à mon téléphone j'ajoute. « Le temps passe vite à mes côtés, tu ne le vois pas passer je pense, il est 22h je te signale... Et tu as pu sortir et rerentrer dans ma chambre sans que personne ne te dise rien. S'il te plait... Je te demande pas ça si je gagne ou si je perds... Juste... Vraiment... » J'en ai besoin, j'ai besoin de sa présence de ses bras réconfortant, rassurant, c'est si dur à comprendre ? J'ai besoin qu'il soit là pour le bébé, que je puisse oublier tout ça l'espace d'un instant. « Pour ta carotte, je te promets de serrer les fesses et de tout faire... » Mais ça il n'avait pas besoin de le demander pour que j'en ai autant envie que lui. « Le mec pas mal s'avérant être le roi des petits chevaux et non le roi des ânes donc n'aimant pas les carottes, m'a bien encouragé à boire et m'a suivi dans l'alcoolisation ce soir là, mais fort heureusement, la vodka étant de chez moi, j'ai gardé des souvenirs bien précis de cette soirée. » Je lui prends les dés des mains et op je les lance, un six et un autre chiffre, je sors l'un de mes petits chevaux. Je suis bien partie.

 Excuse d’autant plus bidon qu’il était déjà 22heures, ce que Talya me fit remarquer après un coup d’œil sur son téléphone. Je n’avais vraiment pas fait attention à l’heure, et bien sûr personne ne m’avait rien dit puisque j’étais interne dans cet établissement, je pouvais circuler assez librement dans tous les services… Talya ajouta qu’elle voulait que je reste, quelque soit l’issue de la partie. « Je peux pas dormir dans ton lit Talya… Je ne peux plus faire ça. Pas après ce qui s’est passé l’autre fois. » Parce que je savais désormais que j’étais incapable de lui résister et que tout pouvait très vite déraper à nouveau. Et ça m’effrayait. « Mais si tu veux je reste dormir là, dans le fauteuil. » fis-je en désignant le siège inclinable situé dans un coin de la pièce. Talya promit que de son côté, elle ferait tout pour maintenir bébé au chaud un max de temps. Et puis, un petit rire s’échappa de mes lèvres en entendant la suite de ses paroles. « Je m’en souviens plutôt bien aussi… » C’est pas une petite ukrainienne de 50 kilos toute mouillée qui allait me coucher à la vodka, je tenais quand même mieux qu’elle. La jeune femme commença à jouer et avança l’un de ses pions. Je tirais à mon tour : un dé affiché un, l’autre deux. J’avançai donc l’un de mes pions de seulement trois cases en ronchonnant : « Le roi s’échauffe là… »