(flashforward) Calis + but you did go away !

Cela avait manqué à Thaïs aussi de quitter son rôle de carpette et de femme parfaite pour redécouvrir la lave irlandaise coulant toujours au sein de ses veines. Fondamentalement, rien n’avait changé en elle. Son caractère était toujours aussi trempé et sa douceur toujours la même. Ce qui avait évolué, c’était son mariage et la capacité à dire à son ex-mari qu’elle l’aimait toujours à en crever. Thaïs pensait cependant surtout à sa main douloureuse lorsqu’une voix tant chérie arriva jusqu’à ses oreilles et qu’elle vit Caleb apparaître, lui arrachant un sourire par ses dires. « Je crois que je manque décidément de pratique, heureusement que je ne me suis pas casser quelque chose parce que pour jouer… quoi que j’aurais été capable, douée comme je suis ! Mais ça fait du bien… un bien indéfinissable de casser la gueule à ce connard, tu n’as pas idée » avoua-t-elle sans honte et sans retirer sa main blessée des siennes. « Je ne savais pas que tu étais là… ce smoking te va bien d’ailleurs, tu as appris à attacher un nœud papillon tout seul ou tu as dû demander à quelqu’un ? »

« Tes chevilles vont bien ? » la taquinais-je tandis que je massais cette main meurtri pour essayer de faire passer la douleur. Elle aurait peut-être un léger bleu mais rien de bien grave ou qui pourrais l’empêcher de jouer du piano. Ce serait dommage car j’adorais l’écouter jouer même si c’était dans le plus grand secret. Il n’y avait bien que Caine qui le savait vu le nombre de fois, où il avait fini par râler de se taper les albums à n’en plus finir. « Oh si j’ai bien une petite idée mais te voir lui en coller une, c’était quand même jouissif, je veux bien l’avouer » rétorquais-je par la suite sans cesser pour autant mon massage, grimaçant par la suite à sa question. « Je voulais t’inviter mais le capitaine m’a devancé alors bon… Pour le smoking tu parles, j’ai l’air d’un pingouin mais pour le nœud, je ne suis toujours autant pas doué. C’est Quinn qui me l’a attaché quand je suis arrivé à la soirée sans quoi, je l’aurais laissé dans ma poche » haussais-je les épaules. Au moins, mon amour de ces soirées était resté le même au grand dam de mes parents. D’ailleurs, mon père s’envolait dans une semaine pour devenir l’ambassadeur d’Allemagne en Genovia. « Tu es magnifique dans cette robe »

« J’ai frappé avec mon poing pas avec mes chevilles donc oui elles vont bien ! » s’amusa-t-elle à rétorquer aussitôt car Caleb était très bien placé pour savoir que Thaïs n’était pas une vantarde, loin de là même. « Je ne savais pas que tu étais ici mais c’était ça ou tu la lui collais toi-même, faut pas croire, j’ai à cœur de préserver tes poings chéri » fit-elle avant de se rendre compte du surnom affectueux dont elle venait de l’affubler et qui la troubla un long moment. Pourquoi était-ce si naturel et difficile en même temps ? « Tu voulais m’inviter ? Et du coup tu es venu accompagné ou seul ? Je crois qu’il faudrait définitivement que je t’apprenne à nouer ces horreurs et non, tu n’es pas un pingouin… tu n’imagines pas comment je suis serrée dans ma robe alors bon au moins, tu peux bouger ! Mais… merci pour le compliment » fit-elle en rougissant doucement. Troublée, oui elle était troublée et pas qu’un peu.

Je relevais rapidement la tête face au surnom affectueux dont elle m’affubla mais je ne trouvais rien à rétorquer si ce n’est qu’un sourire bien plus heureux étira mes lèvres. Je me sentais rarement à l’aise lors de ce genre de soirée mais là, pour le coup, je me sentais bien. « C’est adorable de ta part de prendre soin de mes poings » répondis-je en douceur avant d’hausser les épaules. « Pourquoi j’apprendrais à les nouer alors que je trouve toujours une bonne âme pour me les attacher. Je suis venu seul, je ne viens jamais accompagné lors des soirées officielles… Je ne veux pas qu’on s’imagine des choses sur mon invitée et moi. Je préfère rester célibataire à défaut d’autre chose » répondis-je calmement sans oser croiser son regard. J’essayais de lui avouer qu’elle était la seule avec qui je désirais m’afficher mais je craignais qu’elle comprenne tout de travers. « Tu.. enfin.. Ça te dirait de m’accorder une danse ? » lui demandais-je maladroitement.

Thaïs s’enlisait plus encore dans sa gêne mais elle tentait tout de même de garder à peu près le contrôle de ses pulsations cardiaques notamment car il n’aurait plus manqué qu’elle souffre d’hyperventilation avec toutes ces conneries. « C’est effectivement une façon de voir les choses… mais je peux me permettre de demander quelle est cette autre chose ? » Justement, l’irlandaise était bien trop vaccinée de ses suppositions. Elle ne voulait pas se tromper cette fois, malgré son trouble, malgré cette folle envie de l’embrasser sans qu’elle n’ose pour autant faire un pas. Mais Caleb la prit de cours en lui demandant une danse, chose qui la fit déglutir avec un brin de difficulté tandis qu’elle essayait de lui sourire pour qu’il ne prenne pas ça pour un rejet. « J’ai souvent rêvé que tu me poserais cette question un jour Caleb… mais je risque de te faire honte car cela fait des années que je n’ai plus valsé ou dansé un tango. »

Je sentais bien que c’était à moi de faire le premier pas mais ce n’était pas évident. J’ignorais si je serais capable de me relever si jamais elle me rejetait. Je ne pourrais pas lui en vouloir après tout, j’étais le responsable de tout ce gâchis et de son malheur. Elle était en droit de ne plus vouloir de moi mais quand même, je ne pouvais pas m’empêcher d’espérer. « A défaut de t’avoir à mon bras » répondis-je néanmoins avant de lui proposer de danser avec moi. Je n’avais qu’une envie, c’était de reprendre nos habitudes. « Je n’ai pas dansé depuis des années non plus alors nous serons sur le même terrain d’égalité » lui dis-je avant d’attraper sa main et de la conduire sur la piste de danse où une valse se jouait. Je ne pensais pas que danser avec elle reviendrait aussi rapidement mais c’était comme si, nos deux corps n’avaient pas oublié comment danser ensemble. « Tu vois… Rien ne s’oublie totalement »

Peut-être Thaïs avait-elle simplement besoin d’entendre ces mots, de se rendre définitivement compte qu’ils avaient merdé autant l’un que l’autre mais que l’envie de s’offrir une seconde chance n’en n’était pas moins présente. « Si tu veux m’avoir à ton bras Caleb tout ce que tu as à faire c’est me le demander… » lui avoua-t-elle en toute simplicité, pour lui faire comprendre qu’elle ne le repousserait pas et ne comptait pas davantage le rejeter. Ceci dit son ancien cher et tendre décida pour elle en s’emparant de sa main, l’emmenant sur la piste de danse où une valse était jouée. Son corps savait encore comment se positionner contre Caleb afin que leur cadre soit parfait, tels les partenaires idéaux qu’ils avaient toujours étés… « J’y arrive pas Caleb… » murmura-t-elle subitement, les yeux humides, les membres tremblants même si elle dansait toujours comme si sa vie en dépendait. « J’arrive pas à rester aussi proche et aussi loin en même temps, c’est une torture. Nos corps se souviennent de tout mais je n’arrive pas plus à oublier. J’arrive pas à faire semblant, je suis désolée. Je t’aime toujours à en crever… j’y arrive pas. Je me demande s’il vaudrait pas mieux je ne sais pas… que je me trouve un appart, je resterais sur New York, tu verrais plus souvent Raph mais… je peux plus. »

« Je le voulais mais on m’a devancé » répondis-je avant de la conduire sur la piste de danse où nous arrivions fatalement à danser à nouveau ensemble. Nous ne pouvions pas oublier la manière de danser, la façon dont nos corps savaient tellement bien se placer pour s’accorder à merveille mais le charme fut rompu par les paroles de Thais. Je l’écoutais, le cœur battant car chaque mot qu’elle prononçait me rendait heureux. Elle m’aimait toujours et je n’avais qu’une envie, lui dire que je l’aimais aussi. « Viens » murmurais-je pour la conduire ailleurs, loin de tout ce monde car je voulais à tout prix, parler à cœur ouvert et je savais que je ne serais pas aussi à l’aise en public. « On sera tranquille ici » lui dis-je une fois que j’ai trouvé une pièce pouvant nous accueillir. « Je veux que tu m’écoutes ! Je t’aime.. Je sais que j’ai demandé le divorce mais je n’en pouvais plus, je ne supportais plus cette tension, je ne savais plus quoi faire. J’ai cru qu’en demandant le divorce, ça déclencherait un électrochoc, ou un truc comme ça mais tu n’as rien dit, tu as signé les papiers et je me suis retrouvé comme un con pris au piège d’un engrenage que je ne maitrisais plus mais il ne se passe pas un seul jour sans que je ne le regrette, sans que je ne pense à toi ! Je t’aime comme un dingue Thaïs »

Ce fut bientôt à Thaïs d’avoir le cœur battant la chamade, alors que Caleb venait de s’emparer de sa main pour l’emmener à nouveau dans un coin tranquille. Elle craignait d’avoir déclenché une tornade mais non, il lui rendait ses sentiments, lui arrachant à la fois une expression de surprise mais avant tout de tendresse. Oui, elle était attendrie, touchée par ses propos alors qu’elle ne se permettait même plus d’en rêver lors des rares songes positifs qu’elle faisait encore. « Je ne me suis pas battue parce que je pensais que tu ne m’aimais plus et je ne voulais pas que l’on se haïsse. Je savais que tu avais pris cette décision en pensant que c’était la meilleure chose à faire, même si ça m’a brisé le cœur et que ça me le brise encore. Je sais que j’ai beaucoup de tort, que j’ai été souvent absente mais ces disputes c’était ma seule façon à moi de te dire que Raph était petit, que j’avais peur qu’il t’arrive un sale truc et que je voulais juste que tu me rassures. Que tu me dises que tu savais ce que tu faisais, que tout irait bien. » Thaïs prit une grande inspiration avant de s’emparer du visage de Caleb. « On a merdé tous les deux et on s’est fait du mal mais ces derniers jours tout m’a porté à croire que nos deux cœurs ne se souviennent pas des épreuves, juste de ce que l’on ressent l’un pour l’autre. Rien que la danse de ce soir, ou la façon si passionnée dont tu m’as fait l’amour… je t’ai dit un jour que tu étais ma famille, celle que j’avais choisie et que je voulais construire et je n’ai jamais cessé de le penser. Tu es ma lumière dans les ténèbres Caleb… je t’aime et je voudrais qu’on s’offre la seconde chance que moi, personnellement, je n’arrête pas de désirer depuis qu’on a signé ces foutus papiers à la con. Et je crois que Raphaël le veut aussi… »

L’impression d’être au bout du tunnel me soulageait. Cela faisait deux ans que je vivotais plus que je ne vivais parce qu’il me manquait ma femme, mon fils, ma famille. Je ne savais pas comment vivre sans eux. Ils étaient mon souffle, ma raison de vivre et même mon boulot bien que passionnant et prenant, n’arrivait pas à compenser le manque. Combien de fois le Capitaine m’avait foutu dans un bureau pour éviter que j’aille me foutre en l’air sur une intervention ?! Je ne les comptais plus. « Cette seconde chance, je la veux Thaïs, j’ai envie qu’on forme à nouveau une famille mais sans faire les mêmes erreurs. Je veux ma femme auprès de moi et non uniquement la mère de mon fils. Quant à moi, je tâcherai d’être plus présent en tant que père et d’apprendre à devenir un mari patient » murmurais-je en la serrant dans mes bras, déposant une multitude de baisers sur le sommet de son crâne. Je me sentais si bien, comme si le cauchemar prenait fin ce soir. « Je sais que je fais un métier dangereux mais je te promets que je ne prendrais plus jamais de risque, que je ne serais plus cette tête brûlée… J’ai retenu la leçon, je veux que dans quelques années, nous coulions une retraite paisible tous les deux… J’ai cru que j’allais mourir sans toi et je l’ai voulu au point de faire des conneries mais c’est fini, tu es là maintenant »