SAY SOMETHING (+) NEMHAM

Ton argument semblait faire mouche, au moins pour ce soir. Peut-être que plus tard il rétorquerait avec véhémence que les jugements du Doyen ne sont pas tous à suivre les yeux fermés, pas juste parce que c'est une décision du mec le plus haut placé. Qu'il faut surement se construire son propre avis. Mais t'avais pas envie d'imaginer ce qu'avait pu faire Graham, et t'avais pas envie de changer d'opinions sur lui du tout au tout. Tu ne voulais pas que ta vision de lui soit tâchée par son passé tumultueux, mais il ne semblait une nouvelle fois pas que tu aies quelconque choix ou dire en la matière. Quand il te le dira, si il te le dira, il n'y aura que toi et que tes ressentis de ses actes, et tu verrais bien s'il gâche à son tour cette rencontre, telle que tu l'avais gâchée le premier soir. Tu finissais par t'allonger, ton dos frissonnant contre les carreaux froids, et tu t'arrangeais un peu en position fœtale, espérant passer une nuit correcte dans un environnement plutôt original. Tu levais tes yeux au ciel, lui tirant presque la langue si seulement vous n'étiez pas dans le noir le plus total. « Te mooooques pas. J'suis en phase d'endormissement, j'sais plus c'que j'dis d'abooord. » Tu grognais un peu pour la forme, avant d'entendre le silence et de fermer les yeux pour te détendre un peu plus. Tes bras se collaient l'un à l'autre, et tu essayais d'oublier un instant le froid tétanisant presque tes muscles, inconfortable et pourtant inéchangeable. Quelques longues secondes plus tard, tu entendais à nouveau la voix de Graham qui résonnait. « T'en fait pas pour moi C'ptain. Toi aussi tu dois dormir limite à poil. » Tu répondais puisqu'il n'avait que ta chemise comme couverture, et encore.

   

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Le bruit de nos échanges laisse place au silence le plus complet. A la limite d’être supportable, je ressens pourtant sa présence puisqu’il gesticule de temps en temps. Il a le souffle tantôt normal, tantôt plus court et entrecoupé. C’est ainsi que je repère qu’il a froid, ne me demandez pas où j’ai appris à repérer ce genre de signaux, toujours est-il que j’ai repéré qu’il se caillait les miches. Avant de prendre la moindre décision, je lui demande néanmoins de me confirmer cette impression, ce à quoi il répond, taquin, comme à son habitude. « T'en fait pas pour moi C'ptain. Toi aussi tu dois dormir limite à poil. » Il n’a pas tort, je suis également à la limite de la nudité et j’ai un peu froid moi aussi. Il n’y a pas la moindre couverture dans le coin, rien du tout à se mettre sur le dos, je ne vois donc qu’une seule option qui pourrait nous permettre de nous réchauffer un minimum. « Bon, je te préviens tout de suite, c’est Noël aujourd’hui ! Viens par-là ! » Je pourrais attendre qu’il se ramène par lui-même, effectivement, mais je ne suis pas patient et j’ai finalement très froid. Je me hisse donc de sorte à être allongé de profil pour pouvoir me glisser jusque dans son dos contre lequel je me colle, lui apportant la chaleur de mon propre corps. « C’est mieux comme ça ? »

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S'endormir entouré d'une personne avec qui on a pas l'habitude de dormir n'était déjà pas facile, mais le faire en plus sur une surface dure et froide n'arrangeait rien de cela. Tu savais pourtant que tu n'avais pas le choix, que vous seriez ici pour toute la nuit, et qu'il allait falloir que tu trouves une bonne position pour arriver à fermer l'oeil plus de deux minutes – à part si tu attendais patiemment que le marchand de sable passe et que tu t'endormes d'épuisement. Pas la meilleure des solutions, mais solution tout de même. Tu le rassurais quand Graham te demandait si tu avais froid, t'imaginant bien qu'il devait être à peu près dans le même état que toi sinon pire, et tu fronçais les sourcils quand il te disait que c'était Noël, ne comprenant pas bien où il voulait en venir avant que tu le sentes se rapprocher jusqu'à ce que, warning, vos peaux se touchent. Ça devrait le rebuter, mais bizarrement ça me faisait s'approcher encore plus, et bientôt ton dos fut collé de son torse, un petit soupir d'aise s'échappant de tes lèvres en silence. Graham, ou comment chauffer Nemo en deux secondes, ça y eeeeest, t'étais surement aussi bouillant qu'un radiateur là, merci pour le service buddy. Le pire c'est qu'il osait demander si c'était mieux comme ça. T'as limite ton membre collé à mes fesses mais nooon, j'aime pas du tout, tu me connais. « Comme par hasard, c'est moi qui fait la petite cuillère. Tu m'déçois Gramgram : t'avais la chance de pouvoir faire taire tous les stéréotypes sur les mecs musclés et les mecs fins, mais nooooooon, of course not. T'étais trop bien pour ça. » Tu disais dans un rire en secouant un peu ton visage, faussement déçu.

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Il fait relativement froid dans le gymnase, logique puisqu’il ne doit pas être chauffé, surtout en été puisqu’il y fait très chaud en plein jour. Dommage que la température ne suive pas à partir d’une certaine heure. Si nous étions tous les deux normalement habillés, surement que nous aurions plus chaud, hélas mes fringues sont trempées et je dors donc avec une chemise enroulée autour de la taille en guise de sous-vêtement. De son côté, Nemo est torse-nu, le petit mec frêle grelotte et il serait inhumain de ne pas faire quelque chose pour le réchauffer. Pour nous réchauffer tous les deux. Je me rapproche donc pour coller mon torse musclé et bouillant, car oui, ma peau est en permanence bouillante que je sois gelé ou non, mes bras se fraient un chemin entre ceux de Nemo. Il y a plus confortable, dans un lit bien moelleux c’est tellement mieux, mais on se contentera de cela. De toute manière, si nous étions dans une chambre avec un lit, je ne serais certainement pas dans cette position. « Comme par hasard, c'est moi qui fait la petite cuillère. Tu m'déçois Gramgram : t'avais la chance de pouvoir faire taire tous les stéréotypes sur les mecs musclés et les mecs fins, mais nooooooon, of course not. T'étais trop bien pour ça. » Je ris et, à défaut de pouvoir me servir de mes mains pour le frapper, je le mords à l’épaule. « Tu ne serais même pas capable de m’entourer avec tes bras, je suis trop large pour toi mon enfant ! » Et je ne plaisante pas, vous avez vu la différence entre nos deux carrures ? Nous sommes vraiment très proches tous les deux, physiquement, je ne l’ai jamais été de la sorte, j’ai bien expérimenté la partie sexuelle, de force mais ça n’a jamais été doux, ça n’a jamais été aussi… Appréciable ! Je me sens bien contre lui, contre sa peau parfumée par le chlore de la piscine. Le gymnase est à nouveau plongé dans le silence, quelques minutes s’écoulent. « J’ai été condamné pour avoir assassiné mon père. » Tact, vous avez dit tact ?

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Wtf. Cette soirée finissait d'une manière plutôt inattendue, c'est le moins que tu puisses dire. Si tu te souvenais de quelques heures auparavant, de sa froideur et sa raideur face à ta simple présence dans le même bâtiment, et si tu comparais avec sa nouvelle attitude, entre confusion de ton ancien baiser et rapprochement physique même quand tu n'étais pas celui qui l'initiait, c'était comme le jour et la nuit. Faudrait peut-être que tu te poses de nouvelles questions, genre que tu te renseignes pour savoir s'il était pas finalement un lunatique bipolaire. T'en profitais quand même, même si tu restais presque choqué de son initiative, et tu te sentais vraiment mieux, la chaleur humaine t'aidant à redevenir plus confortable malgré l'endroit. Tu lui faisais tout de même remarqué que biiiiiiiiiizarrement c'était son torse contre ton dos et pas l'inverse, et t'étais pas la meuf dans ce duo ok ? Nooooon. Que des clichés qu'il s'évertuait à entretenir, à ton plus grand malheur. Il riait, et un frison te parcouru quand le con se mettait à te mordre l'épaule. Il avait pas intérêt à se plaindre si tu te réveillais le lendemain avec une érection matinale proéminente. Ce serait de sa faute et seulement la sienne. « Un jour j'te prouverais le contraire. Mais tu devrais éviter de m'appeler 'mon enfant' si tu veux pas non plus te faire passer pour pédophile. » Tu répondais en souriant en coin, avant de laisser tes yeux se fermer, et ton esprit se calmer, comme pour se préparer à enfin aller dormir dans de meilleures conditions. Tu te faisais au silence qui vous entourait, à son souffle contre ton dos, à ses bras autour de toi, et tu sentais Morphée t'attirer quand Graham gâchait tout – again. « J’ai été condamné pour avoir assassiné mon père. » Tu te tendais sous lui, et tu ne t'attendais vraiment pas à ça. Pourquoi il disait ça d'abord ? Tu pensais en avoir fini pour la soirée à être faussement effrayé par son passage en prison, mais finalement... Shit just gone real. Ton coeur se mettait à battre follement, et tu tentais de te calmer, fermant tes yeux forts face à sa révélation. « Rrooooo... pschiiiiiiiiiiiit... rRROOoon... Psccchhhhhiit... » Et voilà que tu te mettait à faire du Nemo tout craché, parce que meeeerde, tu savais pas si tu pouvais t'occuper de ça maintenant, c'était tellement... Improbable.

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Je ne sais pas ce qui me prend. Ah si, attendez, je me souviens, il meurt de froid et je n’ai pas envie qu’il soit malade demain à cause de mes bêtises et de mon besoin essentiel d’avoir quelque chose à me mettre sur le cul. Je me sentirais coupable s’il attrapait un virus par ma faute, et puis merde, moi aussi j’ai froid même si mon corps ne le laisse pas entrevoir puisqu’il est toujours en mode surchauffe le con. Deux heures en arrière, jamais je ne l’aurais ne serait-ce que laissé me toucher, et là je me retrouve à m’enrouler autour de lui pour le réchauffer, c’est dingue à quel point tout peut très rapidement partir en cacahuète et se modifier. Tant mieux, je me suis très mal comporté avec Nemo et j’en prends seulement conscience à présent, je n’ai pas la moindre raison de me méfier, je pense qu’il a compris la leçon, il m’a déjà suffisamment perturbé en m’embrassant après tout, il ne tentera pas le diable davantage. « Un jour j'te prouverais le contraire. Mais tu devrais éviter de m'appeler 'mon enfant' si tu veux pas non plus te faire passer pour pédophile. » Pour un pédophile ? Je m’apprête à m’enfoncer dans ma bêtise en hurlant au scandale, faudrait-il déjà qu’il soit dans mon viseur pour que je sois appelé pédophile… Gardons cette réplique au chaud, j’ai atteint mon quota de bêtise pour la soirée. « Okay, Minus ! » Je marque une brève pause, oubliant l’essentiel. « J’attends de te voir à l’œuvre, alors ! » Le silence me permet de réfléchir, de peser le pour et le contre, je lâche ma petite bombe sans sourciller, sans faillir et même si je me sens plus léger je ne peux que ressentir la réaction de Nemo qui se raidi contre moi. « Il faut savoir que… Mon père était alcoolique, de la plus horrible des races. Ma mère, ma sœur et moi avons été les victimes de ses accès de colère. J’ai été admis une trentaine de fois à l’hôpital sur deux années avant de dire stop… Ce soir-là, il est rentré en état d’ivresse, il m’a poursuivi dans toute la maison avec un couteau, m’a poignardé. Il était sur le point de me poignarder une deuxième fois, dans la poitrine cette fois-ci, lorsque je l’ai repoussé. Il a traversé la terrasse, on s’est battu et… Le couteau a ripé sur lui… » Chaque mot que je prononce me renvoi à cette soirée, un nœud prend forme dans ma gorge, il m’en fait baver. Mon bras me démange, c’est là que se trouve la cicatrice du coup de couteau qu’il m’a mis ce soir-là, une longue et épaisse trace blanche orne à présent mon bras, tout comme mon torse où l’on peut deviner chacun des coups plus sévères que j’ai pris sans jamais me défendre. « Je n’ai jamais voulu le tuer… Mais quelque part, je nous ai sauvé, ma famille et moi ce soir-là ! »

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T'étais pas un minus. Ni une crevette, ni un nain, tu faisais un mètre quatre vingt huit merde, un peu de respect quoi. Tu levais tout de même tes yeux au ciel, amusé, alors qu'il continuait en te disant qu'il avait hâte de te voir à l'œuvre. Peut-être pas ce soir mais plus tard, plus tard ce sera toi qui l'enlacerait en mode grande cuillère. Tu allais donc après cela pour dormir, l'ambiance paisible aidant, et au moment où tu te laissais emporter par le sommeil, Graham te réveillait puissance 2000 par de nouvelles révélations. Révélations que, peut-être, tu aurais préféré qu'il taise, maintenant que vous aviez été déjà émotionnellement touchés par sa précédente histoire, et que vous alliez enfin dormir dans un noir et un endroit très loin de ton lit moelleux. Il semblait peut-être parti pour vider tous ses sacs en ta présence, mais ce sac-là... T'étais pas sûr de la manière à laquelle il fallait que tu réagisses. Meurtre, on parlait d'un meurtre, sur une personne de sa famille, sur quelqu'un qui l'a mis au monde. Tu tentais de retourner dormir, de faire semblant de ronfler pour lui faire croire que tu n'étais déjà plus de ce monde et que tu ne l'avais pas entendu, mais le mec il savait pas lire des signaux et voilà qu'il reprenait la parole, et qu'il commençait à t''expliquer le pourquoi du comment. T'aurais tellement préféré le voir, observer ses réactions, les petits tics de son visage et les émotions que cela devait lui faire remonter à la surface. Au lieu de ça tu n'avais que sa voix, tentant de ne pas se briser, alors qu'il t'expliquait un nouvel épisode de « La vie merdique de Graham ». T'étais mal, très mal, de savoir qu'avant même de se faire enfermer en prison c'était pas la joie, et qu'il ne faisait finalement qu'aller d'enfer en enfer, d'un endroit horrible à un autre d'une horreur comparable. On aurait même pu croire que la prison aurait pu être un petit cocon tranquille après s'être échappé des abus de son père, mais même pas. Tu restais silencieux, ayant toujours du mal à l'imaginer plus jeune et chétif, sans cette imposante présence qu'il avait aujourd'hui, et tu mordais ta lèvre, l'une de tes jambes tremblant un peu sur les carreaux. Tu laissais un blanc, après la dernière de ses paroles, te donnant le temps de procéder tout ça, ce scénario digne d'une série à dix saison. Tu te serais bien retourné pour lui faire face, mais t'étais pas en couple avec lui, vous étiez pas intime, alors tu restais dos à lui, avant de bouger ta main et d'attraper l'un de ses avant-bras avec. « P-pourquoi tu me dis tout ça ..? » Tu répondais finalement, d'une petite voix presque imperceptible.

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Pourquoi suis-je en train de parler, encore et encore ? Pourquoi Nemo, pourquoi ce soir ? Je n’ai jamais éprouvé la moindre tentation de me confier sur le sujet et pourtant, après trois ans de prison il y a certainement une tonne de psychologues qui auraient été heureux de m’accueillir. Je n’ai jamais failli, je me suis créé une carapace que je pensais solide et durement fortifiée pour me protéger de toutes ces merdes qui ont fait de ma vie un enfer, qui ont ruiné mon adolescence et pourtant, il aura suffi d’une ambiance étrange, d’un moment d’égarement pour que tout ce casse la gueule. Pire encore qu’un château de cartes, il aurait tenu plus longtemps sous une tornade. Les phrases s’enchainent sans que je ne puisse réellement me targuer de les avoir préméditées, je vide simplement mon sac, avec une franchise et une spontanéité qui me caractérisent déjà au quotidien. Exprimer tout cela à l’oral me fait mal, pire encore que si une lame de couteau s’amusait à mutiler ma peau déjà bien marquée par tous ces événements, pourtant, lorsque je marque une pause pour m’assurer de ne pas flancher, ma première impression c’est d’être léger. Il est agréable de ressentir cela, aussi inhabituelle puisse être cette sensation. Nemo ne moufte pas, je ne sens même plus son dos crispé, il se détend au fur et à mesure que je lui explique ce qui m’a poussé à accidentellement prendre la vie d’un autre humain, de ma propre chair. Mon récit arrive à sa fin et le silence replonge à nouveau le gymnase dans une sphère douce et amer. « P-pourquoi tu me dis tout ça ..? » Si seulement je le savais. « Je n’en ai pas la moindre idée. Tu me donnes envie de le faire, de mettre des mots sur ce que je n’ai jamais avoué à haute voix… J’en ai besoin ! Et puis... Je ne veux pas te mentir. »

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C'était pas facile pour toi de prendre tout ça en compte. Graham devait surement être en train de t'avouer tous ses plus grands et profonds secrets, et toi tu ne savais juste pas comment réagir, comment répondre à cela. C'était un peu comme si on te mettait un couteau sous la gorge et qu'on te demandait maintenant de parler, de juger, de sortir les bons mots qui pourraient tout arranger, et toi tu savais bien que quoi que tu sortes ne serait pas assez bien et que chacune de tes mauvais agissements te plantait un peu plus le pied dans la tombe. Graham s'est fait battre. Graham à tué son père pour se sauver. Graham est allé en prison trois ans. Graham s'est fait une nouvelle fois tabassé là-bas et s'est surement aussi fait violé si tu avais tout bien compris. Et t'étais censé faire quoi toi ? Tu pensais au fait qu'il avait lui-même initié le contact ce soir, que tu n'avais rien fait de grave, mais t'avais des petits hauts le coeur maintenant que tu te souvenais de votre rencontre, du moment où tu l'as embrassé alors que tu savais bien qu'il n'en avait pas envie. T'avais finalement été comme ces mecs, tu t'étais emparé de lui et de ses lèvres pour tes propres fins, sans même imaginer que ça puisse le toucher bien plus que cela. T'avais encore plus mal agis que tu le pensais. Tu comprenais surtout pas pourquoi il t'avouait ça, alors tu préférais lui poser cette question plutôt que d'annoncer à chaud ce que tu pouvais penser d'un père qui battait sa propre famille. Ta main était posée sur son avant-bras, comme une petite pression, reposant-là, alors qu'il te répondait quelques secondes après. Tu hochais doucement la tête, même si t'avais envie de pousser, de percer le pourquoi tu ressens cette envie de ne pas me mentir et c'est peut-être juste l'effet du noir complet, ne vas-tu pas plutôt être totalement déçu d'avoir raconté tout ça à moi demain matin ? « D'accord. Je te remercie de m'avoir dit tout ça. » Tu disais sincèrement, ta voix toujours basse dans cette ambiance seuls au monde. Tu serrais doucement son bras, avant de refermer tes yeux. « Il faut... Que j'essaie de m'endormir avec tout ça en tête. » C'était peut-être pas la réaction qu'il attendait, mais t'étais censé lui dire quoi ? T'avais peut-être cette envie de le protéger qui te venais en toi, de le garder prêt de toi et de l'éloigner du monde, mais t'étais pas sûr que ce soit apprécié de lui.

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« D'accord. Je te remercie de m'avoir dit tout ça. » Il n’y a pas pire réaction que celle que Nemo est en train d’avoir. Vous n’avez pas idée de la douleur que ça me procure de l’entendre me remercier avec une neutralité à s’en faire dresser les poils sur tout mon corps. Je n’aime pas cela, à quoi pouvais-je bien m’attendre cela dit ? Je viens de lui avouer que je sors de trois ans de prison, que j’ai passé autant de temps là-bas parce que j’ai tué mon père. Il était peut-être violent, il a peut-être failli me tuer plusieurs fois, cette fameuse soirée comprise dans le tas, mais toujours est-il que j’ai ôté la vie à quelqu’un. Je suis coupable, je le sais, je l’ai toujours assumé et le fait que je ne regrette qu’à moitié le fait d’avoir indirectement sauvé ma famille de son emprise ne me fait surement pas gagner des points. Comment lui en vouloir d’être… Distant ! Je ne pouvais attendre mieux et je me contenterai donc de cette main vaillamment posée sur mon avant-bras. « Il faut... Que j'essaie de m'endormir avec tout ça en tête. » Avec le fait que je suis un monstre ? Touché coulé ! Étrangement, je ne trouve rien d’autre à ajouter, rien à balancer pour ma défense. A quoi bon ? Je n’ai rien pour jouer en ma faveur, il n’y a rien qui excuse un meurtre. Une part de moi ne peut dissimuler sa déception, j’espérais une autre réaction. Je cligne des yeux… Je m’endors surement puisqu’au moment où j’ouvre de nouveau les yeux il fait déjà jour. Pas depuis longtemps, mais la luminosité augmente progressivement et les portes doivent donc être à nouveau ouvertes. Je tourne la tête en direction de Nemo, toujours contre moi. Il respire calmement, sereinement… Il est toujours endormi, mes yeux ne peuvent se résigner à abandonner son corps, attendris. Pourtant je dois y aller, c’est maintenant ou jamais, je ne veux pas lui imposer une nouvelle confrontation dès le réveil. Sans faire trop de bruit, le plus tendrement possible, je retire mes bras, recule et me relève. Un petit tour par les sanitaires où je récupère mes vêtements encore humides mais moins trempés que précédemment, je les enfile, un dernier regard vers Nemo et me voilà en train de prendre la fuite… Pendant qu’il est temps ! Cette soirée a été intense, révélatrice, différente, je ne serais plus jamais comme avant. Je le ressens, quelque chose a changé en moi.

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