[x Wyatt] ­─ différence de longueur d'ondes

Il s'était passé un bon nombre de choses, la soirée dernière. Et certains évènements sur lesquels je n'avais pas envie de revenir. Cela dit, à sept heures du matin, j'étais dehors, marchant seule dans un parc, les arbres faisant frissonner leurs feuilles au rythme de la brise. Il fait frais. Mais pas froid. L'air est même agréable, empli d'odeurs de toutes sortes en pleine matinée. Et je marche, ne sachant réellement où je vais. J'hésite entre rentrer à mon appartement, ou aller prendre un café quelque part. Le parc est plutôt vide, je dois l'admettre. Peu sont ceux qui font la tournée des parcs à une heure aussi peu avancée de la journée, ce serait presque une heure encore propice aux viols. Enfin, je m'emporte, il y a déjà de la lumière et les lampadaires s'éteignent un à un. Et je continue de marcher, passant devant un banc, puis deux, puis trois, le talon de mes bottines résonnant dans le silence ambiant. Aujourd'hui, il fera soleil. C'était ce qu'annonçaient les nuages, inexistants dans le ciel. N'empêche, de là où je suis, j'ai une bonne vue sur le parc, et les grands immeubles qui l'entourent. La ville endormie, et qui va se réveiller peu à peu. Alors que je continuais ma route, un bruit de pas attira mon attention quelques secondes. Cela dit, étant normal que quelqu'un d'autre soit présent, je n'y prêta alors plus attention, et continua ma route sur le même rythme.

Courir était l’un des rares remèdes que j’avais trouvé pour mieux réfléchir. Vêtue d’un jogging, je courrais dans le parc de Cambridge. Il était tôt, mais je ne réussissais pas à dormir. Depuis le bal, j’avais pris la décision de faire une pause avec Torrey. Cela ne voulait pas dire que je l’abandonnais elle et le bébé. J’avais juste besoin de temps pour réfléchir et me ressourcer. En allant au parc ce si bonne heure, je pensais être seul. A part les joggeurs itinérants, je ne voyais pas quelle autre personne pouvait venir aussi tôt. C’est ainsi, que je fus surpris en voyant Despe, arpentant les chemins dégagés des lieux. Arrivé à sa hauteur, je m’arrêtais. Reprenant mon souffle, je la saluais avec le sourire. « Salut. Despe, c’est ça ? » En disant son prénom, je me rappelais la comparaison vaseuse, que je lui avais faite hier soir. Je pouvais vraiment dire des conneries parfois. J’étais surpris de la voir seul à cette heure-ci. Surtout, après la soirée d’hier soir. Avec trois films, le cinéma en pleine air, avant duré longtemps.

Les bruits de pas se rapprochaient, puis ralentissait, puis une voix s'éleva dans l'air, et je me retournais. « Wyatt. » dis-je comme si son nom ne m'était pas venu en tête. « Hey! » continuai-je avec un sourire. C'est vrai que je ne m'attendais pas forcément à le voir ici, surtout si tôt le matin. « Du sport, hein. » devinais-je alors à sa respiration et sa tenue. Je n'avais jamais eu le courage de courir en matinée. J'étais plutôt une sportive du soir. Etrangement, je me sentais éveillée, alors que je n'avais pas dormi de la nuit. J'étais peut-être trop énergique pour le sentir, cela dit, cette énergie n'était pas visible physiquement, avec ma façon de parler si calme et détendue. Je ne sais même pas si j'étais surprise de le voir ici si tôt, après tout, j'étais bien là, moi. Dans un sens, il est assez drôle de constater que nous nous rencontrions par coïncidence après s'être connus la veille, alors que jamais dans mes deux années à l'université je ne l'avais croisé.

Elle semblait être légèrement surprise de me voir. Ce qui n’était pas vraiment étonnant. « Wyatt. » Elle se souvenait de mon prénom, c’était déjà ça. « Hey! Du sport, hein.» J’abaissais mon regard pour regarder ma tenue, car c’était à cela qu’elle faisait référence. « Oui, je cours souvent le matin » C’était le seul moyen que j’avais trouvé pour me défouler. Il y avait ça et la natation. « Et toi, ça t’arrive souvent de marcher seule ici ? » ça craignait un peu pour une fille. Je ne connaissais pas le parc par cœur, mais il y avait des dingues partout et les jeunes femmes, étaient facilement plus menacées que nous. Plongeant ma main dans une de mes poches, j’éteignais mon iPod. C’était assez étonnant de tomber sur une personne que j’avais rencontré la veille. Je me demandais, depuis combien de temps, connaissait-elle Théo.

« Oui, je cours souvent le matin » Le peu de sport que je faisais, c'était uniquement pour garder la forme. Je n'avais pas ni la force, ni le courage de me lever de mon lit tous les matins afin d'aller dégourdir mes jambes. Bien que cela fasse le plus grand bien. « Et toi, ça t’arrive souvent de marcher seule ici ? » Le parc, j'y passais très peu de temps. Parfois je le traversais, parce qu'il me fallait aller au bar où je travaillais, d'autre fois pour aller en cours, cependant, j'y marchais la plupart du temps seule, et insouciamment des dangers qui m'entouraient. « J'y passe peu de temps, cela dit, quand j'y viens, c'est rarement à cette heure-ci. » répondis-je avec un sourire. J'avais peu l'habitude des nuits blanches, rattrapant souvent les soirées tardives par de longues et agréables siestes sous ma couette, ou à flemmarder devant une série. Pourtant, preuve était que je tenais suffisamment bien sur une longue durée sans me fatiguer. J'avais les pensées en vrac, par rapport à la journée précédente, et toutes les réflexions que je m'étais faite sur moi même. J'étais un peu déprimée, intérieurement, cela dit, je me sentais particulièrement bien, ce matin-là. Plus détendue, plus propice à être joyeuse. Ce doit être l'air matinal qui veut ça. Je ne sentais plus mes jambes, à force de marcher. Je ne sais même pas depuis combien de temps exactement je marche, n'ayant pas fait attention au temps qui passait. Je levais alors les yeux vers Wyatt, capturant son regard. J'aimais bien lire dans les yeux des gens. C'est là où ils sont le plus sincères.

« J'y passe peu de temps, cela dit, quand j'y viens, c'est rarement à cette heure-ci. » C’est vrai, que ce n’était pas habituel de voir des gens s’y balader à cette heure-ci. On y voyait les gens passer pour aller travailler, mais ce sentier était peu utilisé. « Je comprends mieux, pourquoi je ne t’ai jamais vu ici » Je tentais un brin de conversation, n’étant pas très à l’aise. Rencontrer une personne dans le contexte d’une soirée, était différent, que d’en rencontrer une dans un lieu familier. La jeune femme levait son regard vers ma personne, plongeant ses yeux dans les miens comme si, elle tentait de sonder mes pensées. Je soutenais son regard durant plusieurs secondes, avant de le détourner. Devant nous, un joggeur passait et nous saluait. « On marche ? » Ce n’était pas bon qu’après avoir couru, je m’arrête. Il fallait que je marche pour ne pas risquer de lourde courbature.

Wyatt n'était pas à l'aise, ça se sentait à l'intonation de sa voix. En même temps, je peux le comprendre, nous nous sommes rencontrés seulement hier, et à l'occasion d'un évènement organisé par la confrérie dont il est président. Lorsqu'il détournait mon regard, je baissais le mien, tournant la tête afin de balayer les alentours des yeux. C'était si calme. Le silence en était presque pesant. Je suis sociable, très sociable. Mais je ne savais pas quoi dire, à ce moment précis. « On marche ? » Je lui répondis d'un signe de la tête, et nous avançâmes donc, dans le parc encore embaumé de sa lumière matinale. « C'est comment, d'être le président des Winthrops? » demandai-je alors, tentant le moindre sujet de conversation. Marcher dans le silence, comme ça, c'était oppressant, et clairement pas agréable, ni pour moi, et je supposais que pour lui non plus. Je passai alors une main dans mes cheveux, chassant les quelques mèches qui se voulaient absolument dans mon visage à cause de la légère brise. Nous marchions vers où, au fait? A part suivre le chemin, où est-ce que ça menait? Non pas que ça ne me dérange de n'aller nulle part, étant donné que je n'étais pas forcément sûre d'où j'allais à la base, mais.. ce serait plus bizarre de faire trois fois le tour du parc, à regarder les arbres, non?

Après plusieurs secondes de réflexions, je lui proposais de marcher ensemble. Autant rentrer ensemble à Harvard, du moins, si elle en avait l’intention. Sur le coup, j’avais un peu honte de mon apparence. J’avais couru une bonne demi-heure et par ce fait, je n’étais pas vraiment présentable. « C'est comment, d'être le président des Winthrops? » C’était une question plutôt inattendue. Je voulais dire par là, qu’on ne me l’avait jamais réellement posé. Être président de la Winthrop House, était une expérience passionnante. Certes, cela me rajoutait du travail en plus, mais j’adorais ce que je faisais. Être Président d’une fraternité, ne se limitait pas à organisé des évènements. A côté de cela, il fallait accorder du temps pour les autres et gérer certaines paperasses. « J’adore ça. En fait, je ne me sens pas différent de mes autres frères. Disons, qu’il y a pas mal de truc à gérer, mais c’est génial comme poste. » Je parlais avec un certain engouement. J’adorais être chez les Winthrop. Nous étions la seule fraternité du campus et nous arrivions à être soudés comme de vrai frère, malgré certaines frictions inévitables. « Et toi, je ne t’ai même pas demandé. Tu fais partie d’une confrérie ? »

J'avais erré toute la nuit dehors, alors je commençais presque à y prendre goût. Tandis que nous marchions, je sentais la caresse du soleil à peine levant qui teintait le monde d'une couleur orangée. « J’adore ça. En fait, je ne me sens pas différent de mes autres frères. Disons, qu’il y a pas mal de truc à gérer, mais c’est génial comme poste. » Sa façon de parler montrait qu'il appréciait ce qu'il faisait. Cela me fît sourire. J'aimais entendre des gens parler de manière passionnée, plutôt que de manière monotone. « Et toi, je ne t’ai même pas demandé. Tu fais partie d’une confrérie ? » « Je suis chez les quincy. Enfin, pas officiellement, mais je suis en période de test, disons. » ris-je doucement. Qu'importe quel rôle je jouais dans cette confrérie, elle me plaisait. Parce que tous étaient dans un état d'esprit qui était plutôt loin de l'égocentrisme, à quelques exceptions près. Bien sûr, je n'aime pas tout le monde dans la confrérie, parce qu'il n'y a pas un endroit où l'on peut s'entendre avec autant de personnes. Mais j'aimais à passer du temps avec eux, et pour la plupart des membres, le courant passait. J'espérais vraiment y rester, le reste de ma scolarité ici.

« Je suis chez les quincy. Enfin, pas officiellement, mais je suis en période de test, disons. » Ce n’était pas facile à deviner, mais j’aurais dû m’en douter. Elle semblait être le genre de personne assez posé et calme. Cela était une particularité des Quincy, non ? Ça et leur altruisme. [color=#761919] « Tu t’y plais ? »[/i] Je m’entendais bien avec le vice-président. J’avais même assisté à son mariage avec la belle Nevada. « Tu dois certainement travailler bénévolement dans une association, non ? » demandais-je poliment, tout en continuant de marcher. Après tout, la plupart des Quincy étaient des bénévoles. C’était même, les qualités mis en avant par la maison. Plus je marchais et plus je me remémorais la soirée d’hier. Il y avait eu une altercation avec mon meilleur ami. J’avais bien envie de connaitre sa version de l’histoire. « Au fait, il s’est passé quoi avec Théo hier ? »