(+ Caleb) Everything was so perfect... but it's over now.

« Tu crois vraiment qu’il a besoin de moi pour se comparer à Dieu ? Il le fait très bien tout seul ! Ceci dit je n’ai pas vraiment de leçons à te donner niveau incident » avoua-t-elle en levant les yeux au ciel. Elle avait bien perdu l’équilibre dans les escaliers et manqué de tomber, sans compter son malaise en pleine bibliothèque… en bref, elle s’était fait peur à de nombreuses reprises, même si ce soir, c’était Caleb qui l’inquiétait. Elle abdiqua en le suivant à l’intérieur, respirant profondément pour s’assurer de ne pas avoir les jambes qui se mettraient à flageller. « Je te laisse me guider hein… »

« Tu as eu des accidents ? » m’inquiétais-je en sortant une pince du coffre pour couper la chaine du cadenas car je n’avais pas les clés. En fait, je n’avais pas remis les pieds depuis des années dans ce manoir mais je ne sais pas, je n’avais pas voulu que cette maison soit habitée par quelqu’un d’autre. « Chaton, respire… Tu es complétement stressée si vraiment tu te sens pas bien, nous ne sommes pas obligés d’y aller… Je peux t’amener ailleurs sans aucun problème » lui dis-je en posant mes mains sur ses épaules. A la voir, c’était bien plus éprouvant pour elle que pour moi.

« Rien de grave » coupa-t-elle rapidement sans avoir envie de revenir dessus. Tout ce qui s’était passé était avant tout dû au fait que Thaïs ne savait plus vivre toute seule et surtout pas sans Caleb. Mais rapidement, elle calma son stress crevant le plafond en prenant ses mains dans les siennes. « Ça va aller. Je suis juste trop émotive pour mon propre bien… foutues hormones ! Allons-y. »

« D’accord… mais si je vois que tu te sens pas bien, on ira ailleurs » lui dis-je et vu mon regard, elle pouvait être certain que j’allais la scruter au microscope. Je liais donc nos doigts ensembles avant de remonter l’allée bordée d’arbres jusqu’à déboucher sur un imposant manoir. « La première fois que je suis venu ici, c’était quelques mois après notre première rencontre. J’avais hurlé à mon père que je le détestais car il n’était pas devenu ambassadeur en Irlande. J’avais toujours dans l’espoir de te retrouver »lui dis-je avec émotion avant de m’approcher de l’imposante fontaine. « Ma petite sœur avait coutume de dire qu’elle était magique et que si tu lançais une pièce, elle exauçait tous tes vœux… J’ai compris plus tard que c’était surtout pour ramasser les dites pièces qu’elle sortait ça à tous nos visiteurs »

Thaïs s’attendait tout à fait à se faire scruter au millimètre mais cela n’était pas bien important. Les propos de Caleb alors qu’il commençait à la faire visiter occupèrent bientôt toute son attention. « Tu as détesté ton père parce qu’il n’était pas ambassadeur d’Irlande ? Je ne sais pas si je dois plaindre ton père ou trouver ça irrésistible, je suis un peu partagée… » laissa-t-elle échapper un petit rire de souris avant que celui-ci ne peuple carrément l’atmosphère sonore. « Ta sœur ne perdait pas le nord au moins c’est l’avantage ! Tu crois que je peux mettre une pièce et faire un vœu ? J’en ai un en tête. »

« L’idéal serait que tu trouves cela irrésistible, cela m’arrangerait beaucoup »rigolais-je avec elle « mais oui, je me rappelle lui avoir dit : franchement, tu sers à rien, je peux même pas te demander une seule chose et je me fiche bien que c’est la chancelière qui t’a demandé d’aller aux Etats-Unis » ajoutais-je avec un sourire amusé. « Avec le recul, je devais avoir l’air d’être totalement taré pour mes parents ». Je continuais les anecdotes pour lui prouver par A+B que ce lieu n’était pas uniquement le lieu où j’avais connu l’enfer. « Bien sûr, tu peux faire tous les vœux que tu le souhaites »lui dis-je en déposant un baiser sur sa tempe.

« Le jury va délibérer » reprit-elle avec malice pour mieux secouer légèrement la tête face à l’élan de colère que Caleb avait fait subir à son père à ce moment là. « Pas taré… juste amoureux ! » Et ça, c’était irrésistible, même si Thaïs ne le dit pas à voix haute. Son regard parlait pour deux, surtout lorsqu’elle mit une pièce dans la fontaine pour mieux joindre ses deux mains ensemble en fermant les yeux. « Qui sait, peut-être qu’un jour tu découvriras mon vœu. »

« Très amoureux »murmurais-je en la regardant et cet amour n’avait fait que croitre dans mon cœur à l’abri des regards indiscrets. Je la laissais faire son vœu me demandant bien ce qu’elle avait souhaité : du bonheur ? Des enfants en bonne santé ? La paix dans le monde ? Aucune idée. « J’espère qu’il se réalisera avant que je ne le découvre sinon tu sais ce qu’on dit : un souhait avoué ne se réalisera pas » répondis-je avant de reprendre sa main et de pénétrer à l’intérieur du manoir. « Je me rappelais pas qu’il était aussi grand » murmurais-je tandis que je me revoyais adolescent en train de faire le con avec Stefen et Anya. « Stefen et moi avions le devoir de nous occuper de notre sœur et bien souvent, on se faisait une partie de cache-cache. Le jardin est immense… Je me rappelle de la joie que j’ai éprouvé quand mon père m’a dit que mon meilleur ami emménageait à côté de chez nous » lui expliquais-je tout en lui faisant visiter. Le manoir était encore meublé de nos anciennes affaires. « Papa ne voulait rien emporté et ma mère n’a jamais su pourquoi. C’est la première fois que j’ai vu mon père se disputer avec elle. Elle n’aurait jamais supporté la vérité »

Thaïs avait souhaité qu’il veuille l’épouser à nouveau un jour. Si cela se trouvait, Caleb n’y consentirait pas à nouveau mais comme il venait de le dire, elle espérait de tout cœur que son vœu ne se réalise avant qu’il n’apprenne ce dernier… « C’est tout ce que je souhaite » avoua-t-elle dans un petit sourire timide alors qu’elle le suivait toujours aveuglément. « Tu as aimé cet endroit mais tu l’as détesté aussi… pourquoi l’avoir racheté ? Pour… lui donner une dimension positive car tu y as vécu de belles années ? »

« Je ne sais pas vraiment pourquoi je l’ai racheté. Je crois que c’était comme une relique du passé. Une façon comme une autre de me rappeler et de rendre hommage à mon meilleur ami mais aussi de ne pas oublier qu’un adulte n’a pas le droit d’abuser d’un gosse. J’avais dix-sept ans mais je n’étais encore qu’un gosse insouciant qui pensait qu’on pouvait tout résoudre avec de belles paroles. Lorsque mon meilleur ami m’a avoué ce que son père lui avait fait, j’ai cru bêtement qu’en allant lui parler, en le menaçant j’arriverai à le faire changer, à arrêter les sévices sur son fils mais je me suis jeté dans la gueule du loup » murmurais-je tout en grimpant les marches pour aller à l’étage où se situait mon ancienne chambre. « C’est à partir de ce moment qu’il a fait une fixation sur moi. Il disait à mes parents que j’avais une voix d’ange si bien que ma mère me demandait de chanter pour lui dès qu’il venait. J’ai fini par avoir peur de chanter en public… »avouais-je donnant peu à peu les pistes à Thaïs pour comprendre certains de mes blocages.