(+Thais) Un Weyss peut en cacher un autre.

La retrouver après tout ce temps passé loin d’elle était comme boire de l’eau pure après une traversée du désert. J’avais cette même impression. Je me souvenais de tout à la fois de mon désarroi face à ce mariage mais également de ma frustration devant sa tristesse et son amour pour moi. Oh, je taisais bien sûr la honte que j’avais d’avoir embrassé une autre femme et sûrement devrais-je vivre avec cette culpabilité mais pour l’heure, je voulais oublier une nouvelle fois tout ce qui n’était pas ma femme, notre famille.  Aussi, je n’attendis pas qu’elle comprenne, l’entrainant plutôt dans une valse sur cette chanson qui nous liait depuis maintenant dix ans. Je ne pus m’empêcher à un moment de chantonner le refrain tant il était criant de vérité dans notre histoire « Maintenant que deviennent que deviennent les valses de Vienne ? Dis-moi qu'est-ce que t'as fait pendant ces années ? Si les mots sont les mêmes, dis-moi si tu m'aimes... ». Sur les dernières notes de la musique, je la fis tournoyer lentement avant de l’attirer une nouvelle fois contre mon torse, dans un geste purement de protection. « Est-ce qu’il t’aurait embrassé ainsi ? » murmurais-je avant de prendre ses lèvres dans un baiser tendre où mon amour se faisait sentir. « C’est moi Thaïs… C’est moi… Je suis là, de retour »

Cette chanson… rien que le fait que Caleb lui chantonne le refrain mit le cœur de Thaïs au supplice et lui offrit une sensation de béatitude proprement divine. Était-ce la fin du tunnel ? « Peut-être… mais je crois que je finissais par détester ce séducteur désintéressé… » avoua-t-elle en murmurant, non sans reprendre ses lèvres dans un baiser bien plus pressé, chargé en passion comme si elle avait ce besoin viscéral de le toucher, de l’atteindre enfin. Surtout qu’il venait de lui dire qu’il était de retour, et c’est pourquoi elle ne se sépara de lui qu’une fois à bout de souffle… pour péter un plomb. « J’ai cru que je t’avais perdu à jamais bordel Caleb !! Est-ce que tu as la moindre idée du nombre de malaises que j’ai fais ? De combien je me suis inquiétée pour toi et pour le bébé ? J’ai cru que c’était fini, que je ne pouvais rien faire ! Tu me parlais avec désintérêt, comme si j’étais une proie que tu voulais avoir comme trophée !! Et tu as embrassé une autre femme ESPÈCE DE SALAUD EST-CE QUE TU SAIS COMBIEN JE T’AIME !?! »

Thaïs n’osait semble-t-il pas y croire mais je voulais bien passer l’entièreté de ma vie pour la convaincre qu’il s’agissait bien de moi. Mon dieu qu’elle m’avait manqué, elle ne pouvait pas savoir à quel point. Enfin, je ressentais cet amour qui me transportait depuis six mois, cette force, cette chaleur. Je me sentais enfin complet et lorsqu’elle reprit mes lèvres, c’est naturellement que mes bras se refermèrent sur elle, accompagnant son baiser avec la même ferveur, la même passion mais aussi le même désespoir qui me collait au corps depuis que j’avais vu les papiers du divorce. « Je t’aime, je t’aime tellement… » murmurais-je durant toute sa tirade, déposant des baisers sur ses lèvres, son visage. « Je suis désolé, je ne voulais pas te laisser, tu m’as tellement manqué…Je ne voulais pas te faire souffrir, pardonne moi mon petit bourgeon en fleur, sans toi, je suis vide. Tu me rends tellement meilleur Thaïs… Sans toi, je ne suis rien qu’un salaud » murmurais-je avant de la serrer presque convulsivement dans mes bras pour mieux tomber à genoux devant elle. « Et pardonne moi mon petit bout, promis, papa prendra soin de maman » parlais-je à mon fils tout en déposant un baiser sur son ventre légèrement rebondi.

Thaïs lui avait déjà pardonné depuis des siècles mais elle avait besoin d’exploser, de lui faire comprendre toute la panique qu’elle avait ressentie, c’était primordial ou elle allait perdre la raison. Le simple fait d’avoir cru le perdre la rendait folle, c’était bien simple, il n’était pas question qu’elle vive sans Caleb, non pas question… elle n’en n’était pas capable. « Ne me laisse plus jamais Caleb je ne pourrais pas survivre… je ne sais même pas comment j’ai fais jusqu’ici alors je t’en prie, je t’en supplie, ne me laisse pas ! Cette vie ne vaut pas la peine d’être vécue si tu n’en fais pas partie… » fit-elle en se blottissant dans ses bras, laissant ses larmes couler en faisant fi de son maquillage avant de le sentir s’agenouiller et parler à leur fils, ce qui lui arracha un fin rire au milieu de ses sanglots. « C’est vrai, tu es venu pour prendre soin de moi ? » demanda-t-elle d’une voix secouée par l’émotion avant de prendre les deux mains de Caleb afin de les placer contre son ventre arrondi : là, il pouvait sentir leur enfant commencer doucement à bouger…

« Promis, je ne te laisserai plus ! Je n’ai pas survécu à une grand-mère hystérique pour t’abandonner aussi facilement… C’est grâce à toi que j’ai pu retrouver la mémoire mon petit cœur. Si tu n’avais pas demandé le divorce jamais je n’aurais eu aussi mal. L’idée même de te perdre a fait sauter le verrou entourant ma mémoire » lui expliquais-je avec tendresse en la berçant dans mes bras avant de me laisser aller à genoux devant elle car je n’oubliais pas notre fils. Notre petit Raphaël, la prunelle de mes yeux. Ne pas me sentir père m’avait tellement manqué, je me sentais tellement vide sans eux. A un moment donné, ma femme attrapa mes mains pour les placer sur son ventre et c’est émerveillé que je sentis les premiers coups de notre fils. « Je ne suis pas revenu uniquement pour ça. Je suis là pour prendre soin de toi, de t’aimer et offrir une famille à notre fils. Si tu savais combien je me sentais vide durant ce temps passé près de toi sans me souvenir. Je devenais dingue… Tu étais si triste et je ne trouvais pas les mots ni les gestes pour te rassurer ou te soulager » murmurais-je avant de me relever pour la serrer dans mes bras. « Je t’aime tellement… Thaïs… Pour cette femme.. Si tu savais combien je m’en veux »

« Je ne voulais pas demander le divorce mais je ne savais plus quoi faire et rester dans ces conditions étaient impossibles, j’avais peur de finir par perdre le bébé à force de ressentir tant de stress, de tristesse, j’allais devenir marteau à force ! Mais je ne veux pas divorcer Caleb, jamais… autant me tirer une balle dans la tête ! » expliqua-t-elle tout en serrant ses mains dans les siennes, tout contre son ventre qui avait pris récemment pas mal d’ampleur, dévoilant plutôt aisément le petit habitant grandissant sous son nombril. « C’est tout ce que je veux, que l’on forme une famille toi, Raphaël et moi, que plus rien ne nous sépare parce que tu as déjà bien assez enduré… si tu savais comme je suis désolée de ne pas avoir eu la force de rester, j’ai honte et je m’en veux tu n’imagines pas à quel point ! » Thaïs le serrait fortement contre elle, caressant son dos en s’imprégnant de son odeur, de sa voix et des battements de son cœur avec délectation. Comme il lui avait manqué… « J’ai envie de la tuer, c’est mal ? Je ne dis pas que ça ne m’a pas fait mal… j’en ai énormément pleuré, j’avoue, et tu sais que j’ai fini par en faire un malaise mais… je veux que l’on soit suffisamment forts pour mettre ça derrière nous et que demain on retourne voir le doc ensemble… je veux reprendre là où on s'en est arrêtés mari de moi. »

« Je ne te laisserai pas faire. Si je suis là, c’est parce que je veux sauver notre mariage mon petit épouvantail. Il est hors de question que je te laisse filer. J’en suis tout bonnement incapable, vivre sans toi, c’est comme mourir tous les jours dans d’atroces souffrances » répliquais-je aussitôt tandis que je caressais presque machinalement son ventre où grandissait le fruit de notre amour. « Tu n’as pas à t’en vouloir, tu as pris la bonne décision. Ecoute moi mon cœur, je n’ai jamais eu qu’un seul souhait : te savoir heureuse et tu ne l’étais pas. Tu devais protéger notre fils et je ne t’en voudrais jamais pour ça alors ne t’en veux pas comme je refuse que tu t’en veuille pour mon accident. Tu n’es responsable de rien ! » martelais mon discours de baisers avant de prendre son visage en coupe. Ma culpabilité par contre mettrait des années et des années à s’effacer tant j’avais l’impression de l’avoir trahi. Je ne pouvais pas oublier que j’avais failli coucher avec une autre femme. « Aucune femme ne peut rivaliser avec toi Thaïs, même amnésique, je n’ai désiré et aimé que toi. Tu es la seule à me faire vibrer, à me porter aussi haut. Tu fais de moi l’homme que je suis actuellement »déclarais-je d’une voix rauque avant de lui mettre mon alliance dans sa main. « Je crois que pour reprendre notre mariage, le mieux serait que tu commences par me remettre mon alliance non ? » souriais-je avec tendresse en déposant un baiser sur son front.

« Alors ne me laisse pas filer… » murmura-t-elle en esquissant un frêle sourire, frêle mais bien présent tandis que Thaïs prenait de plus en plus conscience que tout ceci n’était pas un rêve, que Caleb venait de lui être rendu et qu’ils allaient sûrement pouvoir reprendre une vie des plus paisibles et heureuses. C’était son souhait le plus cher. « J’ai essayé de le protéger du mieux que je pouvais… il est encore là, il faut croire que c’est un petit gaillard à la tête aussi dure que son papa ! Mais je ne peux pas m’empêcher de me dire que si tu n’étais pas sorti pour m’acheter des douceurs tout ça ne serait pas arrivé… désormais je vais m’occuper de mes envies débiles de femme enceinte, d’accord ? Il n’est pas question que tu me sois arraché de nouveau, je refuse, je n’y survivrai pas… » fit-elle en secouant négativement la tête de droite à gauche, non sans caresser les deux mains de Caleb tenant son visage du bout des doigts. « Ne regarde que moi Caleb… n’aime que moi et ne désire que moi, je ne veux personne d’autre. Mais tu avais enlevé ton alliance ? Tu avais dit que je t’enfermais dans notre mariage… » énonça-t-elle d’une voix plus brisée, non sans prendre son alliance, la lui renfilant avec assurance pour mieux embrasser sa main à plusieurs reprises.

« Aucune chance. Tu es à moi Madame Weyss » murmurais-je avec assurance. Je ne laisserai personne m’enlever ma famille même si je devais en mourir. « Chérie, écoute-moi attentivement. Si c’était à refaire, je le referais sans hésiter car prendre soin de toi est tout ce que je désire. Tu n’es pas responsable, j’aurais très bien pu repousser cette vieille dame ou me détourner de cette enfant. Je ne l’ai pas fait et j’en assume les conséquences… J’aurais très bien pu avoir cet accident en moto ou même en traversant la rue. Tu n’es pas responsable et je compte bien éviter que tu te fatigues » lui assurais-je car il était hors de question de ne pas palier à toutes ses envies, de ne pas prendre soin d’elle. « Je ne regarde que toi, je n’aime et ne désire que toi… Mon cœur, j’ai prononcé tellement de conneries durant mon amnésie tout simplement parce que je n’avais pas ton amour pour me guider. Je n’étais qu’un crétin qui ne mesurait pas sa chance, qui n’avait pas le bonheur d’être aimé de toi. Je ne plaisante pas quand je te dis que tu es celle qui m’a révélé à moi-même…. Je n’ai jamais quitté mon alliance. Je ne la portais plus à mon doigt mais elle ne m’a jamais quitté.. En fait, je la portais en pendentif »

« Je crois que le fait que tu m’appelles Madame Weyss et la plus jolie chose que tu m’aies dites ces dernières semaines ! » avoua-t-elle en agrandissant d’autant son sourire car cela lui prouvait définitivement que la fin du tunnel était enfin arrivée et qu’elle pouvait relâcher l’insupportable pression ayant pesé si lourd contre ses frêles épaules. « Je sais que tu aurais pu avoir cet accident ailleurs mais j’ai quand même peur qu’il t’arrive encore une bricole… je crois qu’on a assez soupé des drames, je voudrais juste un peu de calme et s’il faut que je maîtrise mes envies pour éviter les catastrophes alors je le ferai plutôt deux fois qu’une ! » Même si Thaïs devait admettre qu’il lui tardait de le sentir à nouveau prendre soin d’elle… cela lui avait diablement manqué, tout comme le fait de caresser sa joue en déposant son front contre le sien lui avait diablement manqué. « N’enlève plus ton alliance… c’est la preuve de notre amour au même titre que notre fils et je n’ai plus envie qu’il y ait le moindre ombrage sur notre mariage. Je vais tenter d’oublier tout ce qui m’a fait si mal et fait douter ces dernières semaines, je te le promets… »