(flashback) Calis + you can't be that cold !

Thaïs pensait qu’en réfléchissant quelques secondes à ce qu’elle pouvait lui répondre afin d’éviter une nouvelle vague d’attaque était une bonne idée mais ce fut pire en vérité : elle n’eut pas le temps de se remettre de ses premières paroles que déjà, il lui sciait littéralement les pattes en lui déchirant le cœur au passage. Elle esquissa un petit sourire nerveux avant de baisser le regard, tentant de maîtriser les larmes qui y montaient mais c’était trop tard, celles-ci coulèrent sans que la jolie blonde ne puisse rien y changer. Finalement, elle ouvrit fébrilement la bouche sans chercher à planter ses yeux dans les siens. « Tu n’as vraiment rien compris… mais peut-être qu’il vaudrait mieux que tu te trouves une autre partenaire qui ne sera pas fragile ni blessée par ta froideur, qui acceptera peut-être juste de coucher avec toi sans conséquences mais moi ça, je ne sais pas faire. C’est peut-être mon tort et je m’excuse sincèrement auprès de toi si je t’ai insulté ou blessé mais… je ne peux pas. » Thaïs tourna les talons, quittant la salle sans même chercher sa canne, éclatant en sanglots tandis qu’elle s’engouffrait dans le couloir glacial. Merdé. Elle avait clairement merdé.

Eh merde. Voilà ma pensée alors que je voyais des larmes glisser le long de ses joues. Je n’avias jamais voulu la faire pleurer ni même m’en prendre à elle. Tout ce que je voulais, c’était simplement pouvoir être tranquille dans ma bulle mais Thais s’évertuait à la percer de toute part et je prenais l’eau. Or, je ne pouvais pas me le permettre, pas maintenant. C’était trop tôt mais en même temps, je savais que je ne pourrais pas danser avec une autre qu’elle. La jolie blonde avait peut-être l’impression que j’étais froid avec elle mais en réalité, c’était juste une putain de réserve. Seulement, même si plusieurs personnes s’étaient données le mot pour me mettre en rogne, elle n’avait pas en pâtir si bien que je m’élançais à sa poursuite. « Thais attends ! » l’interpellais-je avant de tapoter maladroitement son épaule. « Je te présente mes excuses. Je n’aurais pas du m’emporter de la sorte et je ne voulais pas dire non plus que je voulais coucher avec toi enfin pas de cette manière… C’est juste que j’étais énervé et quand je suis dans cet état, je m’emporte facilement. Tu es une bonne danseuse et je n’ai pas l’intention d’en changer »

Vraiment, s’il avait fallut que Thaïs prenne le pari, elle n’aurait pas prédit que Caleb la rattraperait. Pourtant, entendre sa voix dans le couloir la fit accélérer la cadence, comme si elle voulait l’éviter à tout prix mais il lui fallait se rendre à l’évidence : sans ses yeux ou à défaut, sans sa canne, elle n’irait pas bien loin. La jolie blonde ne se tourna pas vers lui pour autant, incapable qu’elle était de cesser de pleurer ou de ne pas avoir honte. Pour qui était-elle passée dans la salle de danse ? Elle frémissait de dégoût de le savoir. « Ce n’est rien… d’ordinaire mon seule ambition dans la vie est d’être invisible et c’est fou ce que je suis douée, alors tu ne seras pas le premier ni le dernier à m’envoyer péter. Mais tu as sûrement besoin d’une nénette qui tienne le choc pour être ta partenaire, qui ne ressente rien et ne soit que programmée pour la danse. Mais ce n’est pas moi. »

« Ce n’est pas ce que je te demande ! » m’exaspérais-je car Thaïs ne comprenait pas que je n’étais pas comme elle. Par contre, parler à un dos ne m’intéressait que moyennement alors je la fis se tourner pour lui faire face, posant ma main sur son épaule. « Ecoute, je ne suis pas comme toi, je ne sais pas être proche des gens d’un claquement de doigts. Je ne sais pas leur sauter au cou, me montrer tactile ou leur raconter des conneries. J’ai besoin de temps pour me faire à la personne et me lâcher mais tout ce cirque, ça ne me donne pas envie du tout. Je veux dire, j’ai l’impression d’être épié de partout, que le moindre de mes faits et gestes est scruté par un jury. Je sais que tu n’y aies pour rien mais moi ça me bloque et ça me donne franchement pas envie » soupirais-je avant de me passer une main sur la nuque. « Ecoute, si tu veux vraiment arrêter de danser avec moi, je te forcerai pas mais ne me sors pas cette excuse foireuse. Je te demande pas d’être un robot mais me demande pas d’être comme toi… Je crois qu’on peut trouver un juste milieu non ? »

« Mais pourquoi tu ne veux pas comprendre ?! » reprit-elle d’une voix plus forte alors qu’il la faisait tourner pour l’assaillir de paroles dont elle connaissait déjà la moitié par avance. Il ne faut pas croire, même aveugle, rien n’empêchait Thaïs d’être observatrice justement. « Ce n’est pas tant que je veux arrêter c’est juste que je ne pense pas être le meilleur des choix » articula-t-elle avec difficulté alors qu’elle balayait progressivement ses larmes, traîtresses, sans que celles-ci s’arrêtent de couler pour autant. « Je n’ai pas envie de te changer, de te forcer ou quoi que ce soit… j’étais juste mal quand je me suis confiée et tu n’étais pas le seul à être froid avec moi. C’était un tout et je ne savais pas bien exprimer la chose, du coup je leur ai sûrement donné envie de t’emmerder avec ça et pourtant dieu sait combien j’ai insisté pour qu’ils ne le fassent pas mais… je suis fatiguée. Fatiguée d’être traitée comme un boulet ou rejetée merde tu ne sais pas ce que c’est Caleb, pas comme ça du moins ! Et je crois juste que là, je ne pourrais pas le supporter. Je n'ai pas de balais dans le cul on ne me veut pas, c'est tout. »

Qu’est-ce que je ne voulais pas comprendre ?! J’étais totalement perdu. Elle disait ne pas être le bon choix puis après, elle me parlait de ne plus vouloir être prise pour un boulet. Cette fille n’était pas logique et pourtant, je trouvais ça adorable même si elle racontait que des conneries. « C’est toi qui parle de ne pas être un bon choix alors ne dis pas après que tu ne veux pas être prise pour un boulet. Tu es ma partenaire de danse point barre alors je prends la décision pour deux, tu restes ! Je ne suis pas du genre à m’embarrasser des boulets alors si je te gardes, c’est qu’il y a une raison » haussais-je les épaules avant de détourner légèrement le regard. « Pour ce qui est du reste, je ne pense pas que les hommes ne te désirent pas. Là pour le coup, désolé de te le dire mais t’es vraiment aveugle ! » marmonnais-je car déjà, je pouvais parler de mon cas personnel : Thais ne me laissait guère indifférent. « Bon… C’est le moment où je te fais un câlin pour te réconforter, je présume ? » tentais-je un brin d’humour made in me.

Là était tout le problème. Thaïs peinait énormément à mettre des mots sur ses émotions, ses sentiments alors les expliquer à un tiers… autant lui demander de danser la lambada complètement nue un soir d’hiver à Moscou. « Tu veux vraiment que je reste ? Tu m’as pourtant dit d’aller chier tout à l’heure » fit-elle remarquer car fondamentalement, Thaïs avait été blessée dans l’affaire. Cela ne se voyait pas mais dans son esprit et son cœur, c’était le capharnaüm le plus complet. « Ah oui, je suis vraiment aveugle ? Désolée de te contredire mon cher Caleb mais quand tu te prends dans la gueule que tu es anti glamour, ce n’est pas la meilleure façon de faire comprendre que l’on te désire ! » Mais elle avait prononcé ces mots d’un ton tellement désespéré que cela se sentait qu’au bout du compte, elle finissait par s’en foutre. Cela valait mieux… pourtant, elle leva un regard pétillant vers lui lorsqu’il lui proposa un câlin, s’avançant sans vraiment oser poser ses mains sur lui. Quelle merde…

« Tout à l’heure, j’étais énervé ! » râlais-je pour seule défense avant d’arquer un sourcil. Attends, on lui avait sorti ça ?! Le type était gay ou bourré voire les deux. Ce n’était pas possible autrement, elle était tout ce qu’il y a de plus désirable, même son handicap ne lui enlevait rien à son charme, au contraire, cela lui donnait une aura fragile qui me plaisant tant. J’avais toujours été bien trop protecteur à mon goût alors résister à une demoiselle en détresse, c’était quasi mission impossible. « Ce type était un connard fini ! Tu es désirable et crois-moi, de temps en temps, danser la rumba avec toi et un parcours du combattant car ce n’est pas évident de rester de marbre à ton contact… » avouais-je à demi-mot avant de l’attraper par le col pour la flanquer dans mes bras, entourant ses épaules d’un bras. « Câlin » marmonnais-je un peu maladroitement mais c’était ma façon de lui faire comprendre qu’elle pouvait se laisser aller.

Thaïs émit une petite moue face à son explication mais ne renchérit pas : ce n’était pas son genre de chercher à tout prix à obtenir le dernier mot et elle préférait éviter de le blesser à nouveau. Loin d’elle cette envie. En revanche, elle esquissa un petit sourire, timide mais non moins présent lorsqu’il reprit la parole, car il ne pouvait pas savoir à quel point ses paroles lui faisaient du bien… au même titre que l’étreinte qu’il lui offrit juste après. Thaïs demeura tendue quelques secondes avant de se blottir totalement dans ses bras comme si sa vie entière en dépendait. « Tu éprouves du désir pour moi quand nous dansons une rumba ? » demanda-t-elle timidement sans pouvoir s’en empêcher. « C’est réciproque… et je voulais partir parce que je pense que tu n’as pas besoin de quelqu’un attiré par toi, tu dois en avoir suffisamment qui t’emmerdes et je ne veux pas déranger. »

Qu’est-ce que je n’avais pas dit ?! Des fois, je mériterai de m’encastrer la tête la première dans un mur avant d’ouvrir ma gueule car je ne venais ni plus ni moins que d’énoncer à Thais que je la désirais pour m’entendre répondre qu’elle aussi. Et je faisais quoi maintenant ? Ah il jouait aux grandes gueules le Caleb mais après, plus personne pour assurer le service après-vente songeais-je avec une certaine panique. Je n’étais pas dans la merde. « Ouais enfin… T’es belle, intelligente, drôle et désirable, je crois qu’un mec saint d’esprit ressentirait de l’attraction pour toi » tentais-je de noyer le poisson mais inconsciemment, je resserrais mon étreinte autour d’elle. « Tu sais, je crois que je peux survivre à ça » plaisantais-je comme si je désirais désamorcer le problème. Elle était attirée par moi, la belle affaire, au moins, elle n’était pas amoureuse, c’était déjà ça.