Prends-moi comme un sens interdit (Aaron)

« Peut être que t’auras pas besoin d’alcool pour me faire tourner la tête… » Clairement non… Ses lèvres pourraient suffire. Comme ce baiser qu’on échangea sur la piste de danse, d’abord timidement puis beaucoup plus intensément. Mon pouls s’affola, mes lèvres en redemandaient, mes yeux papillonnèrent quelques instants alors que nos bouches se séparaient et je finis par accrocher son regard, sans me reculer, restant tout proche de lui. Conquise par ce moment, j’en laissais échapper ce compliment, et sur sa manière de danser et sur sa manière d’embrasser. On m’avait vendu la mather house comme un nid à problèmes, on m’avait soufflé l’interdiction de m’y rendre, coucou Abé, et moi comme une téméraire têtue j’avais voulu tester et tenter l’expérience. A cet instant précis, dans les bras d’Aaron, le cœur tambourinant encore sous l’effet de notre rapprochement, j’étais loin de regretter. Je souris en l’entendant me retourner à demi mot le compliment avant de glisser l’idée d’une suite, de se revoir… « J’aime cette idée… » Le revoir ou être encore surprise ? Peut être les deux. Un petit frisson me parcourut sous l’effet de ses doigts, alors qu’ils se perdaient sur mon visage, venant effleurer ma peau avec douceur. « Est-ce que la visite se termine ainsi Aaron ? » Sur un baiser, belle fin me direz vous… Mais mon ton laissait sous entendre que je voulais encore en voir. C’était moi qui avais déclaré que je devais rentrer quelques minutes plus tôt pourtant, et là, maintenant, je ne semblais plus avoir envie de m’en aller. Faible…

 L’alcool qui me grisait, pas un instant je ne pouvais imaginer ce qui se jouait dans la tête du garçon. Moi j’avais dansé, et j’avais aimé ça, je l’avais embrassé, et j’avais adoré ça… Alors oui, peut être qu’avec l’ambiance de la soirée, les verres pris, je me laisserais bien tenter de rester encore un peu, peut être même que l’idée de partir c’est complètement évaporer de mon esprit. Et puis, il ne semblait pas insistant, ni dans une voix ni dans l’autre. Pour cela aussi, que je me sentais aussi à l’aise, autant en confiance. Il n’était pas en train de me peloter et d’insister pour que je le suive dans sa chambre ou dans un coin sombre… Il avait cette douceur, cette prévenance. J’en souriais, complètement conquise. Mais dans un sursaut de raison, surement je finis par reprendre : « Raccompagne moi à la Cabot House… » Et mes lèvres retournèrent se poser au coin des siennes, doucement, quelques secondes, de manière tout à fait furtive et je lui glissai : « L’intérieur de la confrérie, l’étage, tout ça, tu me le montreras lors d’une prochaine visite guidée… » Sourire amusé. Je venais de trouver un prétexte parfait pour le revoir ainsi.  

 Valser des heures dans ses bras, voilà l’idée que moi j’avais en tête, loin de me douter des danses plus horizontales qui pouvaient traverser l’esprit du garçon. Il avait ce côté prévenant, respectueux, doux, du genre qui vous ferait baisser votre garde en moins de deux. Alors forcément, quand il me demande mon téléphone, je lui tendis sans hésitation, souriant, ravie de cette presque promesse de rendez vous que l’on se livrait à demi mot. Sa main dans mon dos alors qu’il m’entrainait vers l’intérieur, vers le hall pour quitter la mather, cela me provoqua un léger frisson dont j’essayais de faire abstraction. L’alcool me rendait surement trop sensible, trop réactive, trop tactile… D’ailleurs, j’acquiesçai à sa question : « Marchons oui… Si je fatigue, on échangera nos chaussures ? Puisqu’apparemment tu maitrises la marche en talon… » Petite référence à ses confessions sur son déguisement pour infiltrer la cabot, riant rien qu’en y repensant. « Merci pour ce soir Aaron, t’as été un guide parfait. » glissai-je ensuite, alors qu’on prenait la direction de ma confrérie.  

 J’avais son numéro, l’assurance de le revoir, et rien qu’à cette idée j’avais le sourire. Il avait été parfait mon guide de la soirée. Il m’avait apporté tout ce que je souhaitais, et même plus. Pendant quelques heures, je m’étais évadée, j’avais oublié mes sœurs, mes parents, ‘l’étiquette’, j’avais laissé de côtés les préjugés et les remontrances de frères de Belgique, j’avais juste pensé à moi et je m’étais amusée… Alors c’était un peu pour tout ça que je remerciais. « Je note alors, attends toi à avoir de mes nouvelles. J’suis newbie ici, je me sens vite perdue. » Souriante, après quelques pas dans mes escarpins, je devais bien reconnaître que mes pieds m’élançaient un peu. Puisque monsieur ne voulait pas qu’on échange nos souliers, je pris sa proposition au pied de la lettre et attrapai son cou, sautant dans son dos pour me hisser sur lui… « Tu le dis si j’suis trop lourde. » rigolai-je en m’agrippant à lui, alors que la Cabot n’était plus très loin, histoire de ne pas filer un mal de dos au garçon. Je préférais qu’il garde un bon souvenir de moi plutôt qu’un lumbago.