VIKEY | one day, i was happy

« Je ne crois pas que ce soit la peine de me forcer, mais oui, tu peux m’appeler. » Heureusement que tu n'avais pas besoin de la forcer, sinon tu aurais abandonné l'idée bien vite. Tu pouvais être insistant, mais pas quand mademoiselle disait "non." Que ce soit n'importe quelle femme, tu les respectais toutes et chacune. "Je t'appelerai." C'était une promesse. Du moins, ça en avait tout l'air. « Une simple question… » Comme sur tes gardes, tu fronces les sourcils, te redressant sur ta chaise. Quel genre de questions? Tu ne t'ouvres pas beaucoup, et pourtant.. tu t'ouvrirais bien un peu, là. Étrangement, elle te stressait à te poser un suspense comme ça, alors que tu cherchais qu'est-ce qu'elle pourrait bien te demander. "Oui, bien sûr? De quoi il s'agit?"

"Je t'appellerai." Je souris en l’entendant dire ça. Oh, il me semble que je n’avais plus souris autant depuis longtemps maintenant. Certes mes enfants me faisaient constamment sourire, mais ce n’était pas la même chose. Ce n’était pas comme de sourire parce qu’un inconnu vous approche dans un café, un bel inconnu qui plus est, et qu’il vous fait rire, sourire, rougir même. Non, c’était totalement différent. Je lui demandai donc si je pouvais lui poser une question. Apparemment, il ne s’y attendait pas puisqu’il prit tout de suite un air inquiet. Je n’en souris que d’avantage, il avait l’art de détendre l’atmosphère sans même s’en rendre compte. "Oui, bien sûr? De quoi il s'agit?" Je me mordillai l’intérieur de la joue, tentant de me concentrer sur la formulation de ma phrase. Je ne voulais ni le faire fuir, ni semblait trop détaché. Mais alors comment lui demander ça? Autant y aller d’un coup sans trop réfléchir. « Tu.. Tu n’as jamais été en couple, mais… est-ce une éventualité pour toi… j’veux dire… dans un futur lointain…. » je terminai ma phrase en decrescendo. J’étais mal à l’aise de lui demander ça, mais j’avais besoin de savoir à quoi m’attendre. Il me serait bien inutile de nourrir un espoir quelconque s’il ne voulait que coucher avec moi, pas vrai? Mais qu'est-ce que je faisais là à lui poser cette question alors que nous nous étions rencontré une demi-heure plus tôt?!

Tu te tortillais presque sur ta chaise, soudainement inquiet de la question ou des questions qu'elle pouvait bien vouloir te poser. Tu redoutais qu'elle t'annonce qu'elle est enceinte d'un troisième gosse, ou un truc dans le genre. Plus sérieusement, pourquoi étais-tu si nerveux? Car elle-même semblait mal à l'aise de te demander ce truc... Ce truc, qui, après l'avoir entendu, te fit comprendre sa nervosité. « Tu.. Tu n’as jamais été en couple, mais… est-ce une éventualité pour toi… j’veux dire… dans un futur lointain…. » Encore une fois : que répondre? Tu te détends sur ta chaise et pourtant, il n'y a pas de quoi mettre la panique à off. C'est quoi, cette question? Une question piège? L'amour.. Le couple. La notion simple te fiche la trouille. Si tu venais à être en couple... comment ça fonctionne? Tu n'sais même pas, en fait. Il faut offrir des fleurs et des chocolats? Ou bien est-ce seulement à la St-Valentin? Fallait-il se poser des restrictions sur le nombre de fois à faire l'amour? Euh.. fallait-il dire des mots doux à longueur de journée, comme dans les filles à l'eau de rose? Putain, ça t'stressait tellement cette notion de couple, d'amour, que t'es à peu près certain que tu devrais un jour considérer l'idée d'engager un spécialiste pour t'apprendre à être en couple, advenant le cas.. "Wow, euh..." Tu bégayes nerveusement, pris de court. Te passant une main au niveau de la nuque, tu enchaînes : "J'sais pas... Peut-être. J'aurais peur de tout faire foirer. Mais.. on ne peut jamais dire jamais à rien, alors pour être une future éventualité, je dois avouer que ça pourrait en être une.." Que répondre d'autre? Tu avais tenté d'être le plus clair possible dans ton explication. "Pourquoi ça, Torrey?" Tu aimais bien dire son prénom en roulant les "r", à la manière russe.

"Wow, euh..." J’suis stupide, tellement stupide. "J'sais pas... Peut-être. J'aurais peur de tout faire foirer. Mais.. on ne peut jamais dire jamais à rien, alors pour être une future éventualité, je dois avouer que ça pourrait en être une.." Je n’aurais pas dû lui poser la question. Parce qu’apparemment, il ne sait même pas lui-même quoi répondre à cette question. Se l’ait il même déjà posé? J’en doute. "Pourquoi ça, Torrey?" Je secouai la tête, me relevant rapidement de la table en ramassant mes affaires. Tout ça était ridicule et c’était plus que certainement une perte de temps pour nous deux. Je me mordis la lèvre en essayant d’éviter son regard. « Rien, pour rien. T’en fais pas avec ça. » Je fourrai mes livres dans mon sac avant de le refermer. « Je devrais y aller.. j’ai de l’étude et des devoirs à faire. » Je passai mon sac sur mon épaule relevai finalement la tête vers lui pour un dernier regard avant de partir vers la porte sans demander mon reste. Au final, je ne l’avais pas fait fuir et il ne m’avait pas fait fuir non plus. Je m’étais fait fuir moi-même.

« Rien, pour rien. T’en fais pas avec ça. » Pourquoi tantôt te semblait-elle si près de toi, si souriante, si redoutable à la fois, alors qu'actuellement, elle te donnait l'impression de vouloir fuir, de s'éloigner? C'est l'impression que donnait son regard, du moins. Même ses gestes la trahissaient. Tu prends un peu peur, disons-le franchement. "Tu fais quoi, là?", demandes-tu en la voyant ramasser ses livres pour les fourrer dans son sac, s'lever et tout ça, en une fraction de seconde, à la vitesse de l'éclair. « Je devrais y aller.. j’ai de l’étude et des devoirs à faire. » Tu as à peine le temps de réfléchir, de comprendre qu'elle est déjà à la porte de sortie. Waouh.. As-tu dis un truc de mal? Tu crois l'avoir froissée, vexée, t'en sais rien, en fait.. Tu la suis du regard, admirant tout de même sa silhouette, la trouvant très belle, même vue de loin. Tu sors ton cellulaire tout aussi vite qu'elle s'est éloignée de toi, tu sors le bout d'papier avec son numéro de téléphone dessus en même temps, et tu tapes rapidement son numéro pour l'enregistrer dans tes contacts. Tu lui envois alors un message : "Studieuse comme toi, je me doutais bien que tu m'abandonnerais pour tes bouquins à un moment ou à un autre.. Je t'appellerai bientôt, beauté." Tu l'aurais bien suivie, tu l'aurais rattrapée avec plaisir, mais.. à quoi bon? Si tu l'as vexée, tu ne veux pas en rajouter sur ton cas, pas vrai? Ce sera à elle de choisir si oui ou non elle veut t'répondre, après tout.. Quelle rencontre étrange.. Mais quelle belle rencontre.