(fb) x WYATT ─ la psychologie des poissons

« Ne le soit pas. Les choses ne peuvent pas tout le temps être comme on le voudrait » Ah ça, il était sûr que c'était le cas. Combien de fois j'ai rêvé que quelque chose n'aille pas au moins une fois dans le sens inverse de ce que je souhaitais? Encore était-il que pour une fois, je n'accumulais pas trop les problèmes. « T’inquiète. » Bon, j'avais peut-être pas non plus gaffé au possible, mais.. disons que je n'aimais pas tant ce genre de situations non plus. Wyatt partit ensuite s'assoir sur la banquette, tandis que je restais adossée au mur où je me trouvais. « Et toi ça va mieux avec ta famille ou pas du tout ? » Mon regard centré sur un point fixe, je soupirai. « Je leur ai pas adressé la parole depuis, et je pense pas que ça n'arrive à nouveau un jour. » Non, même pour Noël ou mon anniversaire, nous n'avions aucun contact. Enfin eux, si bien sûr, tentant désespérément de m'envoyer en médecine ou en droit, mais j'étais contre ça, et contre le fait qu'on ne m'achète, évidemment. Je me demandais où aller mener cette conversation, au final.

« Je leur ai pas adressé la parole depuis, et je pense pas que ça n'arrive à nouveau un jour. » La dernière fois que nous nous étions vus, je m’étais dit qu’il me serait impossible d’être en froid avec ma famille. Pourtant, c’est ce qui m’arrivait en ce moment. Bien sûr, mes parents me disaient le contraire, mais je sentais bien le froid qu’il y avait entre ma mère et moi. Mon père avait mieux pris la nouvelle, parce qu’il avait conscience en moi. Tandis que ma mère, avait un autre avis. J’étais beaucoup trop jeune pour être père et elle avait peur que je rate mon année. Déjà que j’avais réussis mes examens à ma plus grande surprise. « La famille c’est pas toujours facile, mais bon, on ne peut pas toujours faire ce qu’ils nous demandent » Jamais encore, je n’aurais pensé tenir ce discours.

« La famille c’est pas toujours facile, mais bon, on ne peut pas toujours faire ce qu’ils nous demandent » Je croisais mes bras, regardant un peu ce que je pouvais voir d'où je me trouvais. « Dans un sens.. c'est normal qu'ils ne puissent pas accepter tous les choix que font leurs enfants, ils ont pas la même mentalité, alors ils ont pas la même vision de ce qui est bien ou mal pour nous. Pour prendre moins de risques, ils essaient de nous faire suivre une ligne distincte, mais.. personnellement, je suis incapable de la suivre à la trace. » Je n'étais pas partie si loin de ce qu'ils souhaitaient non plus; la psychologie restait dans le domaine du médical, et si je décidais de pratiquer ce métier en Pologne, nul doute qu'en un rien de temps j'aurais leur notoriété et je reviendrais à cette vie qu'ils souhaitaient pour moi. Quelle boucle vicieuse. En fait, je me demandais si Wyatt avait parlé de son enfant à ses parents, et quel genre de réactions ils avaient pu avoir, mais sachant la question trop personnelle, je la gardais pour moi. Après tout, j'étais mal placée pour parler de ce genre de sujets, et je le savais très bien.

« Dans un sens.. c'est normal qu'ils ne puissent pas accepter tous les choix que font leurs enfants, ils ont pas la même mentalité, alors ils ont pas la même vision de ce qui est bien ou mal pour nous. Pour prendre moins de risques, ils essaient de nous faire suivre une ligne distincte, mais.. personnellement, je suis incapable de la suivre à la trace. » J’étais assez d’accord avec ce qu’elle disait. Même si pour ma part, tout me tombait dessus à cause de la malchance. Oué, ça devait être le roi des démons ou une connerie dans ce genre. Sinon, comment cela serait possible ? « C’est vrai. J’espère juste qu’ils finissent par comprendre qu’on ne peut pas être parfait » Ma famille était très ouverte, mais avoir un enfant à mon âge était une option peu négociable pour ma mère. Baissant mon regard sur la vitre, mon champ de vision fut soudain envahi par une multitude de poissons multicolores. « Regarde ! » Sans retenu, je me mettais à genoux sur la vitre pour admirer se spectacle. La cabine fut envahie d’une couleur turquoise encore plus dense. Ne venant pas d’une famille riche, ce genre de spectacle était pour moi, quelque chose d’extraordinaire. D’ailleurs, ce voyage m’offrait tout une panoplie de rêve que je n’aurais jamais pu accomplir sans Harvard.

« C’est vrai. J’espère juste qu’ils finissent par comprendre qu’on ne peut pas être parfait » J'aimerai aussi, qu'ils comprennent cela. Pourtant, cela semblait être peine perdue. Je n'avais jamais répondu à leurs appels et leurs lettres, mais je savais cela inutile, bien qu'il n'y en plus eu depuis un mois. « Regarde ! » Wyatt semblait si admiratif devant le spectacle qu'on aurait dit un enfant, ce qui me décocha un sourire. Je m'approchais également, regardant le banc de poissons qui semblait composé d'espèces diverses et variées. Ce n'étaient pas les même que j'avais pu voir à l'aquarium à Haïti en compagnie de Joshua, non, c'était encore de nouvelles espèces de poissons tout à fait inconnues, mais aussi très jolies. « Celui-ci est magnifique. » dis-je en pointant un poisson qui semblait aussi lumineux qu'un néon. Bien qu'il existe des poissons particulièrement laids, ceux qui s'approchaient des bateaux étaient plutôt mignons. « Dis, c'est la première fois que tu voyages? Enfin, en mer et dans les caraïbes, je veux dire. » Personnellement, j'étais habituée aux vacances en France, mais je n'avais jamais vu plus loin que la Pologne, la France, et Cambridge. C'était la première fois que je voyageais autant en deux mois, et j'avouais que c'était plutôt plaisant, car je n'aurais sûrement pas découvert tant d'endroits merveilleux. Et le mieux était bien sûr de partager ce voyage avec les personnes que j'avais rencontré à l'université.

« Celui-ci est magnifique. » Du bout de ses doigts, elle me montrait un poisson lumineux. C’était incroyable de voir à quel point la nature faisait bien les choses. « Dis, c'est la première fois que tu voyages? Enfin, en mer et dans les caraïbes, je veux dire. » Surpris par cette question, je tournais mon visage vers elle. Pendant un instant, j’observais son profil. C’est vrai qu’elle venait d’un milieu plus aisé que le mien. Sans compter qu’Harvard était rempli d’héritier fortuné. « Non, jamais. C’est pas l’envie qui manque, mais on a pas vraiment les moyens dans ma famille » Je lui avais répondu sincèrement, sans aucune gêne. Je ne venais pas d’une famille pauvre, loin de là. Bien sûr, on pourrait considérer que leur revenu était moyen, mais pour moi, nous avions toujours grandis sans manquer de rien. Mes parents gagnaient bien leur vie. Ils n’étaient pas riche, mais ils avaient une maison. « Et toi ? Je suppose que oui ou alors, je me trompe ? » Autant ne pas faire de supposition hâtive. Elle avait peut-être visité d’autre pays. Après, c’était une question de préférence.

Quand j'étais petite, mes parents me promettaient des voyages aux quatre coins du monde. Et finalement, ils partaient seuls, "pour le travail", me laissant dans le grand manoir sombre de Varsovie. « Non, jamais. C’est pas l’envie qui manque, mais on a pas vraiment les moyens dans ma famille » Certains étaient à Harvard uniquement parce que c'était "la" faculté élitiste américaine, d'autres parce qu'ils songeaient réellement à y étudier. Et tout le monde n'avaient pas les mêmes moyens, également. « Et toi ? Je suppose que oui ou alors, je me trompe ? » Cela paraissait logique, la plupart des familles riches disposaient de résidences secondaires aux quatre coins du monde et passaient sûrement leurs vacances dans des endroits différents chaque année, alors je comprenais que Wyatt suppose ainsi. « Le seul endroit que j'ai jamais visité.. c'est Cannes, en France. Enfin, seulement dans un petit périmètre, parce que je n'avais pas vraiment le droit de m'éloigner de la maison, en fait. » Ah.. Je parle peut-être un peu trop. Moi, je rêvais d'Australie, de Nouvelle-Calédonie, de la Louisiane et de l'Islande, et j'en avais vu des milliers de photos et reçut des dizaines de carte postales. Et pourtant, je n'y avais jamais mit un pied, seuls mes parents profitaient de ces vacances. Même pour ce qui était de mon pays natal, je n'étais jamais sortie de sa capitale. Je faisais parti d'une famille de riche, mais je n'avais pas réellement grandi dans cette optique. Les yeux rivés vers la vitre, j'observais les poissons qui passaient les uns après les autres, semblant se suivre comme s'ils allaient au même endroit. J'aimerais bien être un poisson, juste pour être libre de faire ce que je veux. Bien que cela semble assez irrationnel du fait que j'ai une peur bleue des profondeurs.

« Le seul endroit que j'ai jamais visité.. c'est Cannes, en France. Enfin, seulement dans un petit périmètre, parce que je n'avais pas vraiment le droit de m'éloigner de la maison, en fait. » Une histoire de périmètre ? C’était à cela que sa vie se réduisait ? « Comment ça ? T’avais un périmètre à respecter ? » J’étais un peu choqué par ce qu’elle me disait. On aurait dit un chien que l’on tient en laisse ou alors, un prisonnier avec un bracelet électronique. Quand on y pensait, c’était plutôt horrible comme comparaison. Quelle vie avait-elle pu bien mener ? Maintenant, je comprenais un peu mieux pourquoi elle ne voulait pas avoir de contact avec eux. Comment pouvait-on vivre dans une telle atmosphère. Tandis qu’elle regardait les poissons, je posais mon regard sur sa silhouette. Plus je la connaissais et plus je me demandais quelle genre de vie, elle avait pu bien mener. Etait-elle une rescapée ou n’était-ce qu’une erreur de la part de ses parents ? Allez savoir.

« Comment ça ? T’avais un périmètre à respecter ? » Je n'étais pas du genre à parler de moi, pour différentes raisons, la principale étant que je n'avais jamais considéré ma propre histoire comme étant intéressante. En réalité, tout ce qui m'importait était ce qu'il se passait depuis que j'étais arrivée à Harvard. « Lorsque nous allions en vacances, nous n'avions aucun.. personnel dans la résidence, et comme mes parents n'étaient jamais présents, je devais respecter un certain périmètre pour ne jamais être trop loin de la maison et risquer.. de me perdre ou je ne sais quoi d'autre. » Ainsi, je n'avais jamais appris à me repérer et j'étais désormais assez lamentable même lorsqu'il s'agissait de lire une carte. Mon regard se perdit dans le vague quelques instants, songeant à de nombreuses choses que j'étais bien heureuse d'avoir pu changer moi-même, avant que je ne me reconcentre sur la vitre bleutée où n'apparaissait plus aucun poisson. « Enfin bon, tout ça, c'est pas important. » dis-je finalement en adressant un sourire à Wyatt. De toute manière, je ne suis ni à plaindre ni à blâmer pour quoi que ce soit, ma vie a énormément changer depuis, alors pourquoi s'attarder dessus? Et puis, je ne vais pas m'étaler sur mes problèmes alors que lui en a sûrement de bien plus importants que moi, apparemment. Parfois j'aimerais que la vie soit facile pour tout le monde, mais malheureusement c'est un rêve un peu trop compliqué à réaliser.

« Lorsque nous allions en vacances, nous n'avions aucun.. personnel dans la résidence, et comme mes parents n'étaient jamais présents, je devais respecter un certain périmètre pour ne jamais être trop loin de la maison et risquer.. de me perdre ou je ne sais quoi d'autre. » Est-ce que j’avais bien compris ? Apparemment, ses parents la laissaient souvent seul, mais a l’instant, elle me parlait de vacance. « T’étais toute seule pendant les vacances ? » Merde, j’allais peut-être un peu trop loin. Gêné, je me passais une main dans les cheveux. « Pardon…Je suis trop curieux » Elle n’était pas obligé de me raconter quoi que ce soit. Pourtant, elle le faisait. En contrepartie, je me devais de ne pas trop la brusquer. « Enfin bon, tout ça, c'est pas important. » Dans ses mots, je comprenais qu’elle ne voulait pas s’attarder dessus. Me contentant d’acquiescer la tête, je fus soudain attiré par une mince plus sombre. Bordel, c’était un vrai requin gris. Heureusement, ce n’était pas un requin blanc. En même temps, ils se trouvaient plus loin. « T’as vu ! Ils sont pas aussi gros que ça en fait » J’observais le requin avec une certaine admiration. Leur regard était froid et on les accusait souvent d’être des monstres, mais je n’étais pas d’accord. Dans le fond, ils étaient comme tout être qui peuplait la terre. En apparence, ils paraissaient froids, mais cela ne voulait pas dire qu’ils l’étaient intérieurement. « T’as pas soif ? Il doit y avoir un bar sur le bateau, je peux nous ramener des trucs si tu veux ? »