(+) A côté de nous, Roméo & Juliette passe pour une comédie. w/ Elisandra

"Notre fils"lâchais-je de but en blanc. Archi était la seule personne qui m'importait et tout l'avenir que je me construisais, c'était pour lui. Du moins, cela avait eu de l'importance alors qu'elle était dans le coma mais maintenant, quoiqu'il se passe, mon fils ne finirait jamais comme moi. J'oubliais rapidement cette conversation pour me laisser aller au jeu des relations sociales, répondant, souriant comme si de rien n'était allant même jusqu'à rigoler et complimenter de nombreuses femmes mariées pour entretenir l'égo de leur mari mais je sentais comme un malaise avec Elisandra si bien que je terminais par la conduire à l'écart. "Pourquoi n'affiches-tu pas le même naturel avec moi qu'avec les autres hommes?! Dois-je comprendre que ma compagnie t'es beaucoup moins agréable?"

« Alors je suis rassurée » répondit-elle car sûrement était-ce la réponse qu’Elisandra avait besoin d’entendre. Elle savait déjà qu’Hyppolite s’en occupait bien mais l’entendre de sa bouche avait un côté rassurant cependant. Cela ne l’empêcha pas de faire preuve d’une galanterie dont il ne faisait aucunement preuve avec elle pour mieux l’emmener à l’écart au bout d’un long moment, lui posant une question qui lui fit écarquiller les sourcils. « Pourquoi, t’es jaloux ? La gentillesse appelle la gentillesse Einstein et vu l’accueil que tu m’as réservé tout à l’heure ça m’a pas spécialement mis en grande disposition. Mais je vais te répéter la même chose que toi : si tu veux que je fasse semblant, pas de soucis, je peux tenter le coup. Même si après tout, je suis que ton bouche trou. »

Jaloux? A en crever. J'avais toujours été très voire trop possessif à mon égard. Elisandra m'appartenait et rien ni personne ne changerait cet état de fait. Je retins tout de même le "tu es à moi" qui voulait franchir la barrière de mes lèvres pour me contenter d'un "Je t'ai complimenté et tu m'as renvoyé mon compliment par une mesquinerie". Après tout, c'était l'exacte vérité et cela ne m'avait guère donné envie de reproduire la manœuvre. "J'ai bien conscience que tu ne désires pas ma présence dans ta vie mais il faudra t'y faire... Après tout, fais ce que bon te semble, tu ne seras pas la première à être fausse en ma présence, j'y suis habitué alors une de plus ou une de moins, quelle différence?" lâchais-je avec ironie avant de la conduire auprès d'autres invités comme si de rien n'était.

« Tu voulais que je saute de joie alors que grosso modo, tu venais de me dire qu’il valait mieux que j’évite la robe qui fait pute et que j’étais ton seul choix possible en matière de cavalière ? Désolée mon chou mais t’a été mufle en premier, ne t’en déplaise. » S’il voulait qu’elle lui fasse l’historique, manque de bol, Elisandra avait une excellente mémoire. « J’ai pas envie d’être fausse c’est juste que tu m’agaces avec tes grands airs… sérieux, débloque toi la centrale que t’as dans le fion, ça te fera du bien ! » soupira-t-elle avant d’être conduite comme une jolie poupée de personne en personne jusqu’à ce qu’elle ne chope une bribe entre deux architectes. Oh bordel c’était excellent ! « Vous êtes architectes ? Quelle chance, vous auriez quelques minutes pour que je vous embête ? Je suis passionnée ! » fit-elle avant de se voir offrir une coupe de champagne et de passer un agréable moment avant de revenir vers Hyppolite. « Pas fatigué de serrer des paluches, tu veux danser ? »

"Encore une fois, je te faisais part de mes exigences vestimentaires, je n'insinuais rien du tout te concernant" soupirais-je ayant la désagréable impression d'être un disque rayé à ce sujet. Elisandra était une femme bornée, je commençais à me dire que j'aurais aimé pouvoir oublié ce détail. "Je ne suis pas coincé mais de tout de manière, peu importe, nous ne sommes pas obligés de nous entendre après tout" lâchais-je sans douceur avant de la laisser s'échapper pour aller parler à deux hommes. Bien sûr, cela m'enragea de la voir si adorable avec d'autres hommes mais qu'importe, c'était mieux ainsi. Pour ma part, je conversais avec deux clients potentiels avant de prendre des nouvelles de quelques uns de mes anges présents à cette soirée. Tout se passait admirablement bien si ce n'est mes propres rapports avec Elisandra. "Tiens, ma centrale nucléaire ne t'indispose plus à moins que tu ne sois pas comblée par tes deux soupirants?"rétorquais-je en la trainant sur la piste de danse.

« Avec la douceur d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, faut-il préciser ! » lâcha-t-elle avec amertume car il n’avait rien du prince charmant à ce sujet, bien au contraire. Elisandra ne répondit même pas sur le fait qu’ils puissent s’entendre, car de toute manière il n’était disposé à faire aucun effort. Le pire fut lorsqu’elle tenta une dernière main tendue et se la prit en pleine tronche avant d’être traîner dans la piste de danse. « Si je t’indispose tant que ça, pourquoi ne pas être venu seul ? Franchement t’aurais eu meilleur compte à faire ça ! A croire que je suis pas un ange, tu me traites même pas avec un sourire. Tu sais quoi Hippolyte, j’arriverais jamais à être fausse avec toi parce que t’es qu’un con, c’est tout. » Elle esquissa un sourire pour ne pas lui faire une scène, le raccompagna hors de la piste de danse et s’éclipsa le plus discrètement du monde pour ne pas qu’il le lui reproche. Mais pour elle, la plaisanterie et l’humiliation avaient assez duré.

J'avais poussé le bouchon trop loin et à peine s'était éclipsée que je m'en rendais compte. La jalousie s'était exprimée à ma place et pour la première fois, je m'étais laissé dominé par mes émotions. Elisandra n'imaginai pas combien il était dur pour moi d'être près d'elle et de faire comme si nous n'avions eu aucune histoire ensemble, comme si notre fils n'était pas son portrait craché. Une des raisons qui m'avait empêché justement d'être proche de notre fils était qu'il me rappelait que trop durement sa propre absence. "Elisandra... Attends" l'appelais-je avant de la rattraper dans le hall désert. "Je te présente mes excuses... Je n'avais pas à te parler ainsi ni même à te rabrouer de la sorte...J'étais jaloux de ces hommes que tu regardes avec ce sourire que tu ne réservais qu'à moi par le passé. Le passé, notre histoire est vieille de quatre ans et je n'arrive pas à te considérer comme un ange tout simplement parce que nous avons eu un fils ensemble et qu'il m'est difficile de te vendre à des hommes alors que je souhaiterai te garder pour moi seul" lui expliquais-je avant de détourner le regard. "Je vais t'appeler un taxi"

Elisandra se retourna vers Hyppolite sitôt qu’il l’eut rejointe en conservant un air sérieux. « Tu crois que tu m’as donné envie de te sourire Hyppo ? T’es aimable comme une porte de prison avec moi, et pourquoi ? Soit disant que tu as un standing à respecter, je t’en foutrais du standing » soupira-t-elle lassée. « Je te signale que tu ne me vends pas à ces hommes, ils ne m’ont pas au bout du compte, ils n’obtiennent rien de moi si ce n’est trois sourires ! Tu dis me vouloir mais tu ne fais pas ce pas vers moi. J’ai dis que je n’arrivais pas à faire semblant avec toi, ça ne veut pas dire que je ne sais pas le faire avec les autres. » La blondinette s’avança pour mieux lui caresser la joue, tentant un frêle sourire. « T’embête pas pour le taxi, ça va aller. Bon courage pour le reste de ta soirée. »

Elisandra ne pouvait pas comprendre la peur qui me tenaillait. Elle m’avait abandonné comme les autres avec pour seule consolation, le fruit de notre amour. Un enfant auquel je n’avais jamais su réellement interagir avec parce qu’elle n’était pas là. Je savais bien qu’elle n’avait jamais voulu cet abandon mais le résultat restait inchangé et je peinais à faire ce pas –surtout qu’elle ne m’encourageait pas à le faire. Elisandra ne cherchait même pas à me séduire bien au contraire. Que devais-je penser ? Aucune idée mais il était clairement hors de question qu’elle rentre à pieds. « Je te ramène en voiture » eue-je tôt fait de la rattraper en attrapant son bras. « S’il te plait, il est hors de question que je te laisse rentrer seule habillée ainsi… Les rues ne sont plus aussi sûres qu’avant alors s’il te plait…Viens avec moi »

A la décharge d’Elisandra, elle se réveillait après quatre ans de coma sans repère, sans famille, sans rien. Hyppolite n’avait jamais été si froid ni distant et le fait de savoir qu’il ait commencé à refaire sa vie la tuait à petits feux à vrai dire. Voilà pourquoi elle se moquait bien d’être escort, car rien n’avait plus d’importance. Avait-elle seulement quelque chose à perdre ? « Très bien… » murmura-t-elle sans volonté avant de se retrouver bientôt dans cette même voiture luxueuse à ne pas savoir comment réagir. « Tu ne devais pas rester pour serrer d’autres paluches ? Tu sais Hyppo, tu avais commencé à reconstruire ta vie, pourquoi ne pas continuer ? »