"Lost and insecure, you found me." |Billie&Julian|

Après le feu de camp et la conversation qu'il avait eu avec Roxanna, Julian avait décidé qu'il était temps de mettre un terme à sa conduite de crétin en puissance. Comment il en était arrivé à faire ce choix? Quand elle l'avait salué, qu'il lui avait balancé un bonsoir bien sec en pleine face et qu'elle s'était éloignée directement après.
S'il s'était inscrit c'était bien pour la retrouver, non? Et en se conduisant comme ça, il n'y arriverait certainement pas.

Alors deux jours plus tard, il avait envoyé un texto, lui demandant de le rejoindre à la plage. Comme la veille Junkee avait passé la journée à courir comme un fou sur le sable, aujourd'hui il était tellement fatigué que Julian l'avait laissé dans la chambre et voulait en profiter pour parler tranquillement avec Billie.
Le jeune brun s'empara de sa serviette et prit la direction de la plage. En passant par la réception, il demanda si le panier-repas qu'il avait commandé était prêt.
Et c'est avec le fameux panier qu'il se réconcilierait avec sa meilleure amie. Andrews arriva le premier sur le lieu du rendez-vous. Il étala sa serviette, jeta un coup d’œil à son portable et commença à appréhender, cherchant de quelle façon il allait pouvoir bien s'excuser lui aussi.

« On peut se retrouver à la plage dans 30 min ? » Je lus et relus le texto que Julian m'avait envoyé quelques minutes plus tôt pour m'assurer, d'abord qu'il était bien réel, et ensuite que j'avais bien compris le sens de la question. J'appréhendai complètement ce rendez-vous. Est-ce qu'il voulait me voir pour me dire qu'il repartait définitivement à New York ? Que je n'en valais pas la peine et qu'il ne comprenait même pas pourquoi il avait essayé ? L'ongle de mon pouce coincé entre mes dents, je le mâchouillai inlassablement jusqu'à finir par me faire mal ; c'est alors que je décidai de taper une réponse plus vite que l'éclair afin de ne pas me laisser le temps de me défiler. Puis je me laissai tomber complètement sur mon lit, mes deux mains couvraient mon visage et je pris une grande inspiration pour tenter de calmer les battements affolés de mon cœur. Puis je me levai, m'habillai d'un simple bikini et d'un paréo, attrapai mon téléphone et sortis de ma chambre d'hôtel comme un zombie.

Quelques minutes plus tard, le soleil s'appliquait à réchauffer ma peau agréablement et cela aida à me détendre même si plus j'avançais, plus je me rapprochais de l'inévitable. J'avais un mauvais pressentiment. Le sable brûlant frappait de façon délicieuse mes mollets à chacun de mes pas et je décidai de me concentrer sur cette sensation plutôt que sur la silhouette du jeune homme brun que je vis installé sur une serviette à quelques mètres de là où je me trouvais. Après une longue hésitation, je finis par m'asseoir à ses côtés, les yeux plongés dans l'horizon. « Salut .. » soufflai-je. À croire que je n'étais bonne qu'à lui dire ça en ce moment.

Plus les minutes passaient et plus Julian avait envie d'envoyer un autre message pour annuler. Mais ça ne pouvait pas continuer comme ça. Depuis deux ans il se sentait vide, Billie lui manquait énormément. Ils avaient sombré chacun de leur côté mais ils avaient remonté la pente ensemble.
Ce qu'ils avaient vécu à N-Y, rien ne pouvait leur faire oublier combien ils avaient été présent dans la vie de l'un et de l'autre. C'était ensemble qu'ils avaient grandi, découvert les premières expériences de la vie, refait leurs premiers pas dans la haute société. Rien ne pouvait les séparer, ces deux dernières années n'avaient été que du temps perdu.

Le jeune brun avait posé son téléphone devant lui, il avait remonté ses jambes contre lui et posé son menton sur ses avant-bras qu'il avait mit sur ses genoux. La voix d'O'Connell s’éleva à côté de lui. Julian tourna la tête et murmura à son tour un "Salut" timide. Il n'était pas fier de son comportement des derniers jours, pas du tout même et avant qu'elle ne dise quoi que ce soit, il préféra tout déballer tant qu'il en avait encore le courage.

« - Je pensais pas que tu répondrais aussi vite.»

Oui, enfin, il avait quand même un caractère pourri. Des excuses. D'accord. S'il lui pardonnerait en fin de compte? Bien sûr. Quand? Quand l'envie le prendrait. Il ne fallait pas pousser quand même, un abandon c'était quelque chose, surtout venant d'une personne qui occupait toute notre vie depuis quelques années.

Le nœud dans mon estomac ne cessait de se rappeler à mon bon souvenir dès que je prenais une nouvelle inspiration. J'expirai de façon hachurée, me battant pour que le son n'arrive pas jusqu'aux oreilles de Julian. Je me mis à jouer avec le sable de chaque côté de mes cuisses, m'amusant à le laisser tomber sur ma peau bronzée avant de recommencer la manœuvre. Sa voix brisa le silence ; sans vraiment d'émotion particulière, ce qui ne m'aida pas à savoir pourquoi j'étais là, pourquoi il m'avait fait venir. Doucement, je tournai la tête vers lui, croisant réellement son regard pour la première fois depuis que nous nous étions revus au parc quelques semaines plus tôt à Cambridge. L'absence de Junkee se fit ressentir ; il était toujours là pour aboyer joyeusement lorsque l'atmosphère se faisait trop lourde. Aujourd'hui, nous ne devions compter que sur nous-même.

« Tu pensais que j'allais te laisser attendre tout seul sur la plage ? » Ma main glissa jusqu'au panier repas qui se trouvait entre nous et j'attrapai une tomate cerise que je glissai dans ma bouche rapidement, stoppant ma main dans l'air en remarquant ce que je venais de faire. C'était l'habitude de tout partager avec lui, de ne pas avoir à se demander « Est-ce qu'il va bien vouloir me prêter ça ? Est-ce que je peux toucher ça ? Est-ce qu'il va me tuer si je mange la moitié de ses frites ? » qui m'avait fait agir de la sorte. Mais c'est vrai que les choses étaient différentes désormais entre nous. « Désolée .. » murmurai-je en baissant le regard.

La réponse de Billie ne se fit pas attendre. Au moins, elle avait arrêté de jouer avec le sable, ce qui avait rendu Julian encore plus stressé et s'il ne lui avait pas adressé la parole pour lui faire part de ses pensées, il l'aurait sûrement fait pour lui demander d'arrêter.

« Tu pensais que j'allais te laisser attendre tout seul sur la plage ?
- Plutôt que tu allais m'envoyer voir ailleurs si tu y étais.»

Par habitude, elle attrapa une tomate cerise dans le panier et croisa le regard de l'étudiant qui la regarda faire silencieusement. Lorsqu'elle se rendit compte de ce qu'elle venait de faire, elle s'excusa et baissa les yeux, gênée et honteuse. C'est vrai que lorsqu'on a partagé la vie de quelqu'un plus de 5 ans, certaines habitudes restent.
Julian lui offrit enfin un petit sourire sincère et poussa un peu plus le panier vers elle en détournant aussi les yeux.

« - Je l'ai commandé pour nous deux...,lui fit-il remarquer, dans un souffle.Ecoute, je... je ne t'ai pas demandé de venir pour te conter fleurette Billie. J'aimerais qu'on parle, sérieusement. De nous deux, surtout...»

« Plutôt que tu allais m'envoyer voir ailleurs si tu y étais. » Je ne pus m'empêcher de rire doucement même si ça ne venait pas vraiment du cœur. Je remontai mes genoux contre ma poitrine et les entourait de mes bras en posant mon menton dessus. Je ne savais pas trop quoi lui répondre .. « Je suis celle qui veut arranger les choses, Julian. Alors si tu me proposes qu'on se voit, même si je n'ai pas la moindre idée de la raison pour laquelle tu m'as amenée ici, j'accepte .. » D'un geste fluide et calme, j'attrapai une nouvelle tomate cerise en offrant un petit sourire timide à Julian. Il savait que je raffolais de ces petits machins et le fait qu'il ait pensé à en amener m'allait droit au cœur même s'il ne s'agissait que de nourriture. Je poussai un long soupir lorsqu'il brisa à nouveau le silence, pensant que cela me donnerait du courage. Mais non .. Alors ce fut en sentant les battements de mon cœur gagner un rythme affolant que je me tournai pour m'asseoir en tailleur face à lui. « Je me doute .. mais franchement après hier, je pensais que c'était la dernière chose qui occupait ton esprit .. de vouloir parler, je veux dire. »

« - Je suis celle qui veut arranger les choses, Julian. Alors si tu me proposes qu'on se voit, même si je n'ai pas la moindre idée de la raison pour laquelle tu m'as amenée ici, j'accepte .. »

C'est vrai qu'elle avait fait le premier quand elle l'avait aperçut depuis la fenêtre de sa chambre quelques jours après qu'il soit arrivé à Harvard. Mais vu la façon peu concluante dont ça s'était terminé, elle n'avait pas insisté. Elle avait sûrement voulu lui laisser le temps de bien s'intégrer et de se faire à son nouveau quotidien. Mais le début de soirée de la veille avait été la cerise qui avait fait déborder le vase.
Julian sourit légèrement pendant qu'elle piochait une autre tomate et se mettait en tailleur face à lui.

« - Je me doute .. mais franchement après hier, je pensais que c'était la dernière chose qui occupait ton esprit .. de vouloir parler, je veux dire.
- Je me suis conduit comme un con hier donc forcément j'y pense..., il s'arrêta net dans sa lancée, prit une inspiration et repartit d'une voix peu assurée et rauque en plongeant son regard dans celui de Billie, et je te demande pardon.»

L'étudiant attendit quelques secondes que ses mots fassent leur petit chemin dans la tête d'O'Connell avant de tendre le bras pour poser sa main sur l'une des siennes, sans la quitter des yeux. Il avait tellement de choses à lui dire que tout se mélanger dans son cerveau.

« - Mais pas seulement pour le feu de camp, pour tout. Pour la façon dont je t'ai accueillie quand je suis arrivé à Harvard, la façon dont je t'ai laissé t'éloigner quand tu es partie... J'aurais du... j'aurais du m'accrocher à toi Billie.»

Julian venait tout juste de m'offrir des excuses et la seule chose que j'arrivais à faire était de rester bouche bée face à lui, les yeux écarquillés. Ça, pour une surprise .. C'était un choc, premièrement parce que je ne m'attendais pas à ce que la conversation prenne ce genre de tournure ; mais également parce que Julian ne m'avait jamais fait d'excuses. Tout simplement parce que nous fonctionnions comme ça .. étrangement. Lorsque je vivais encore avec lui à New York, nous nous engueulions comme tous les amis le font sur cette planète. Mais nous revenions naturellement l'un vers l'autre. Il n'y avait pas de « pardon » échangés, en un regard nous comprenions la peine de l'un et les excuses de l'autre. Bien sûr, la donne avait changé lorsque j'étais partie de New York pour m'installer à Cambridge. J'avais appris à m'excuser d'abord auprès de Roxy, puis ravalant ma fierté, j'avais commencé à offrir mes excuses à Julian. Un petit peu, puis toutes les semaines, puis plus du tout. Jusqu'à ce jour où il avait débarqué comme une fleur à Harvard et que j'avais éclaté en sanglots, m'excusant au moins cent fois toutes les deux phrases. Mais l'entendre lui s'excuser, c'était une première. Lorsque sa main frôla la mienne, j'eus un soubresaut et je l'agrippai dans la foulée. Je le laissai parler, puis je baissai le menton, m'enfonçant un peu plus dans mes songes. Une flopée de minutes passèrent probablement, je ne faisais plus attention au temps. « Tu sais .. Je ne suis pas sûre qu'il y ait grand chose à dire de plus .. Je me suis excusée. Je ne peux rien faire ou dire de plus en attendant que tu me pardonnes. Tu t'es excusé, c'est donc pareil de ton côté .. Maintenant c'est soit on essaie de reconstruire notre amitié morceau par morceau, soit .. soit on arrête tout maintenant. » fis-je d'un ton à la fois ferme et apeuré.

Sentir la main de Billie qui s’agrippait à la sienne dans la fraction de seconde qui suivit rassura Julian. Au fond, ils étaient tous les deux fautifs. Elle pour son départ et lui pour la façon dont il lui avait fait part de son mécontentement prononcé pour la décision qu’elle avait prise.
Quelques minutes s’écoulèrent pendant lesquelles ils restèrent silencieux jusqu’à ce qu’elle prenne de nouveau la parole :

« - Tu sais .. Je ne suis pas sûre qu'il y ait grand chose à dire de plus .. Je me suis excusée. Je ne peux rien faire ou dire de plus en attendant que tu me pardonnes. Tu t'es excusé, c'est donc pareil de ton côté .. Maintenant c'est soit on essaie de reconstruire notre amitié morceau par morceau, soit .. soit on arrête tout maintenant. »

Andrews ne prit pas la peine de réfléchir à la suite. S’il avait autant prit sur lui pour s’excuser, c’était pour une seule et unique raison : la retrouver. Alors il décala le panier qui se trouvait entre eux et se mit à genoux pour rapprocher son visage du sien sans la quitter des yeux. Le jeune homme posa sa paume contre la joue de Billie et colla doucement son front au sien en soufflant quelques mots qu’il n’aurait jamais cru sortir un jour, surtout à elle.

« - Si je suis venu, c’est pour toi et uniquement toi Billie. Ma vie a été vide pendant deux ans, ça suffit maintenant, j’ai trop besoin que tu la remplisses comme toi seule sait le faire. »

J'attendais anxieusement de voir quelle option il allait choisir. S'il décidait de tout arrêter maintenant, ça me tuerait probablement. Je ne pouvais pas le perdre une seconde fois, même si nous ne nous étions pas encore retrouvés. Mon regard était ancré au sien et je me perdis dans leur profondeur et cette lueur de sincérité. Puis il parla .. et je trouvai un second souffle. Enfin j'allais pouvoir retrouver mon meilleur ami ; il venait de décider de s'imposer à nouveau dans ma vie, et dieu sait combien je l'y autorisais avec entrain et dévotion. Il posa sa main contre ma joue et j'eus une sensation étrange au creux de l'estomac. Une que je n'avais pas sentie depuis mes seize ans. Je sentis le souffle de Julian effleurer mes lèvres et instinctivement je passai le bout de ma langue sur les miennes. Mes yeux se posèrent sur sa bouche le temps d'une fraction de seconde, puis je relevai un regard incandescent vers mon meilleur ami. « Je veux que tu fasses partie de ma vie aussi. » soufflai-je d'une voix un peu étranglée par l'émotion. Je posai une main fébrile sur son torse, soupirant de sentir ses muscles pressés sous mes doigts. J'avais quitté un adolescent et aujourd'hui je retrouvai un homme. Ma main glissa jusqu'à sa nuque et j'appliquai une légère pression, presque fantomatique pour le rapprocher un peu plus de moi. Son odeur emplit mes narines et j'inspirai en fermant les yeux. Il était si familier à mes sens et à mon corps. Enfin, je me laissai guider par mes instincts et j'effleurai sa lèvre supérieure avec les miennes. « Julian... » murmurai-je avant de presser tendrement ma bouche contre la sienne.