(fb) mais qu'est-ce que tu fous là ? (agathe)

Je reprenais espoir nous concernant. Je me disais que maintenant, en faisant des efforts, on pouvait réussir à redevenir comme avant. On pouvait retrouver notre amitié, notre complicité. Je l'espérais de tout mon coeur en tout cas. J'allais m'asseoir à côté d'elle, comme elle me proposait de boire. Et tout le monde savait que je ne disais jamais non à de l'alcool, mais alors jamais. « Oh, ce point commun restera à vie je pense. » rétorquais-je en riant légèrement. Après tout, on était comme ça et on ne changera que quand on sera vieux. Et encore, j'me vois bien avec une petite bouteille de tequila, quand j'aurais 70 ans, devant la télé. Pourquoi pas, après tout ? Je lui parlais ensuite de Walter, parce que j'étais curieux, parce que je voulais toujours tout savoir. J'étais surpris de sa réponse. « Je veux bien ne pas lui dire, si tu ne veux pas lui reparler.. » disais-je doucement, même si ça me faisait chier. Je voulais pas mentir à mon meilleur ami. Même si, en soit, cela ne serait pas réellement comme un mensonge, étant donné qu'il ne sait pas qu'elle est revenue. « Mais de toute façon, il va finir par le savoir. Harvard c'est peut-être grand, mais les rumeurs circulent vite. » rajoutais-je en relevant les yeux vers elle.

À mon tour j'éclatai de rire en l'entendant, pas que ce soit la chose la plus drôle qui soit mais l'alcool commençait à faire ses effets je crois bien. Pour la première fois depuis longtemps je me sentais simplement bien. Pas de prises de tête ou de sentiments cachés non tout ce qui importait c'était de rire, discuter et boire avec mon meilleur ami. Ce ne serait pas parfait mais je sentais qu'on y tenait assez tous les deux pour faire en sorte que ce le soit presque. Je n'avais rien de plus à demander finalement. « On sera les doyens des AA. » À condition que je commence par intégrer ce programme ce qui n'est pas pour demain la veille. J'avais conscience d'avoir un problème avec ma consommation, juste à voir l'heure qu'il était présentement, mais au fond c'est pas comme si j'étais cleptomane ou meurtrière. J'arrivais à contrôler ce problème. Par contre pour ce qui est de Walter alors là je n'avais aucun contrôle et c'est ce qui me faisait peur dans tout ça. « Je sais bien qu'il va le savoir... Mais je ne me vois pas aller le voir pour lui dire que je me suis sauvée de lui exprès. » Déjà je n'étais vraiment pas certaine qu'il le prenne bien et c'était normal. Ce n'était pas que je ne tenais pas à lui, bien au contraire le problème était justement là. Une histoire qui allait si bien s'était compliquée en un rien de temps : foutu sentiments. J'étais juste incapable de gérer ça sans tout gâcher.

L'alcool rapprochait les gens, l'alcool soignait le coeur, l'alcool faisait oublier les problèmes, l'alcool était notre meilleur ami à tous. Et ce lien avec l'alcool, la fête, la débauche, on le partageait tout les deux. C'était l'un de nos points communs et entre meilleurs amis, c'est toujours bien de faire la fête et de s'éclater, non ? Cela me faisait du bien de parler simplement avec elle, de rire, de boire. Comme avant, avant que tout ce qui s'est passé, se passe. Il fallait tourner la page et passer à autre chose, c'était la meilleure chose à faire, non ? « Je suis totalement pour ! » disais-je en riant. Pourquoi pas, après tout ? Puis, la conversation divaguait en direction de mon meilleur ami, de Walter. Parce que j'étais curieux, parce que je voulais savoir. Ce qui était un défaut ça tiens, de toujours vouloir tout savoir. Enfin, en tout cas, elle ne voulait pas voir Walter apparemment, elle ne voulait pas lui dire qu'elle était revenue mais ça, ça risquait d'être compliqué. Très compliqué même. « Je me doute, mais il va bien falloir que tu parles avec lui, que vous régliez les choses ! Comme on l'a fait nous deux et regarde, je trouve que ça a plutôt bien réussi, non ? » disais-je en la regardant, un petit sourire aux lèvres.

Si jamais nos vies dégénéraient et qu'on se trouvait dans une impasse, voilà qu'on avait trouvé ce qu'on allait bien pouvoir faire en guise de plan B. Je crois qu'en fait je me verrai bien faire carrière chez les AA, plus que toutes les carrières qu'on apprend ici du moins. C'est juste que j'allais pas trop pouvoir compter sur ce job pour vivre. La suite de la conversation était un peu moins joyeuse en ce qui me concernait et pourtant je ne pouvais m'empêcher d'avoir envie de sourire. Adriel était vraiment un mec bien pour essayer comme ça de faire en sorte que je parle avec Walter alors que je me doutais que ça ne lui plairait pas tant que ça qu'on se remette ensemble. Il avait toujours un aussi grand coeur. « La différence c'est qu'avec toi je peux tout dire alors que je ne peux pas expliquer à Walter la raison pour laquelle j'ai si peur de m'engager avec lui...» Parce que ça voudrait dire que je dois lui avouer que l'on s'est embrassé quand j'étais encore avec lui et c'est la dernière chose que je dois lui dire. À moins que... « Tu ne lui en a pas parlé, pas vrai ? » dis-je en me noyant de nouveau dans la vodka, inquiète de la réponse. Je ne pouvais pas croire qu'il l'est fait car ça aurait probablement ruiné leur amitié pour rien au final. J'étais juste insécure une fois de plus il fallait que je sache exactement à quoi m'attendre.

Il fallait bien que je parle de Walter. Je m'en sentais obligé, parc qu'il restait un sujet important entre nous deux. Puis, je ne voulais pas mentir à mon meilleur ami, mais je ne voulais pas non plus foutre dans la merde ma meilleure amie. C'était une situation bien compliquée, n'est-ce pas ? J'avais le cul entre deux chaises. Je fixais le sol, me disant que je n'aurais jamais dû me mettre dans une situation aussi compliqué. Mais bon, maintenant c'était fait et il n'y avait pas de retour en arrière possible. « Tu es amoureuse de lui ? » demandais-je en ne lâchant pas le sol du regard. Je ne pouvais pas lui demander cela en la regardant en face, c'était juste impossible. Parce qu'au fond, même si je voulais le meilleur pour Agathe, ainsi que pour Walter, je ne me sentirais pas bien s'ils étaient ensemble. Je n'aurais rien à dire, juste à fermer ma gueule, mais ça me ferait chier et je le vivrais mal, je le sais déjà. Je relevais les yeux vers elle après sa question, surpris. « Evidemment que non ! Je ne suis pas suicidaire tu sais ! S'il est au courant un jour, je perds mon meilleur ami et j'me fais tuer, j'ai pas spécialement envie que cela arrive. » répondais-je avec un léger rire nerveux.

Étais-je amoureuse de Walter ? Je n'avais pas la réponse à cette question. Je ressentais de l'attachement pour lui, j'avais certes eu des sentiments à son égard, j'en avais encore de très forts d'ailleurs. Mais j'ignore ce qu'est le véritable amour car jamais dans ma vie je n'en ai eu la moindre démonstration donc je ne pouvais pas affirmer en ressentir moi même.« Ça n'a aucune importance. » Réponse vague sans oui ni non mais qui est pourtant la seule qui compte. Je ne me remettrai pas avec Walter, pas après que l'on se soit avoué que ce baiser entre nous n'avait rien d'une erreur de parcours. On ne sera jamais ensemble non plus Adriel et moi mais ce n'est pas pour autant que j'ai envie de me lancer dans cette pente glissante. Je ne serais tout simplement pas à l'aise car ce serait de jouer avec deux personnes qui ont une énorme place dans mon coeur. « Voilà donc un autre point commun ! » Je me blottis contre lui sans trop réfléchir, parce que j'ai la tête qui tourne et que sa présence me réconforte. Ce sera à jamais notre petit secret et ça me convenait parfaitement, j'aimais cette idée d'avoir ce petit moment rien que pour nous.

Je ne savais pas pourquoi j'avais posé cette question. Je voulais pas savoir la réponse au fond de moi, car si la réponse était positive, je savais que ça allait me faire quelque chose. Putain que je me détestais. Je ne pouvais donc pas avoir de relation normal avec mes meilleurs amis ? Non. J'avais couché avec Emma, c'était bizarre entre nous maintenant, et j'avais embrassé Agathe, ce qui fait que c'était aussi bizarre entre nous. Je demandais juste une fille, une relation normal de couple comme tout le monde. Cela devait être trop demander, certainement. « D'accord.. » disais-je simplement. Bon, je n'avais pas de réponse clair, mais c'était pas plus mal comme ça. Elle me demandait alors si j'avais dit à Walter pour nous deux. Mais si je l'avais déjà dit, si je lui avais avoué, je ne pourrais pas lui parler en ce moment car je serais certainement mort. Et j'étais beaucoup trop jeune et beau pour mourir maintenant. Elle se blottit contre moi et je ne réfléchis pas, j'enroule juste mes bras autour d'elle pour la serrer contre moi, bien content de retrouver ma meilleure amie. « C'est grâce à tout ces petits points communs que l'on est meilleurs amis. » rétorquais-je avec un léger rire, la serrant encore plus contre moi, fermant les yeux quelques secondes pour profiter du moment présent.

J'aurais aussi pu lui poser la question pour savoir ce qu'il en était de sa vie à lui, il avait peut-être une petite-amie dont j'ignorais l'existence et qui allait me tuer. Je ne voulais pas le savoir. Tout ça c'était des sujets qu'il serait bien difficile d'aborder l'un avec l'autre sans que ça ne vire en crise de jalousie : dieu seul sait combien je peux être possessive. Je le remerciais du regard de ne pas argumenter d'avantage et surtout de me couvrir face à son meilleur ami car je savais qu'il le ferait. « Le fait qu'on veuille tous les deux que tu restes en vie ça aide certainement ouais. » J'éclate de rire, putain ce que je pouvais être idiote parfois pour balancer ce genre de conneries. Encore heureux qu'il ait l'habitude. « Tu crois que... » Non Agathe ne t'aventure pas dans cette conversation, t'es bien là, il sourit, il te sert dans ses bras. T'as même son t-shirt sur le dos depuis tout à l'heure et personne n'en fait vraiment de cas. Ne gâche pas tout. « Que Maxine va trouver ça bizarre ? » c'est mieux comme ça. Maintenant que j'y pensais, elle allait certainement avoir du mal à comprendre ces hauts et ces bas entre son coloc et sa soeur.

J'étais bien content de pas avoir de réponses. Certes, j'aimais tout savoir, être au courant de tout, mais parfois, il fallait mieux rester dans l'ignorance. Et là, je devais rester dans l'ignorance. Elle se blottissait dans mes bras et je vais avouer que j'en profitais, que je la serrais fort contre moi, car ça me faisait du bien. J'étais bien avec elle, malgré tout ça, malgré notre relation compliquée. Puis, ça restait ma meilleure amie et mon dieu ce qu'elle m'avait manqué. Je m'en rendais réellement compte maintenant. « Je suis heureux de savoir que tu ne veux pas ma mort. » rétorquais-je en riant avec elle. Bah oui, c'était quand même un bon de savoir que ma meilleure amie voulait bien que je continue de vivre, non ? Si Walter savait tout ça, meilleur ami ou non, il voudrait sûrement pas me voir encore vivant. Tristesse. Je fronçais les sourcils, alors qu'elle avait commençait une phrase sans la finir, ce qui attisait évidemment ma curiosité. J'attendais quelques secondes avant qu'elle ne reprenne la parole. « J'en ai aucune idée.. Cela dit, ça va mieux entre nous maintenant qu'on a réglé les problèmes, alors il y a pas de raison qu'elle soit au courant et qu'elle se doute de quoique ce soit, non ? » demandais-je perplexe. J'espérais surtout qu'on allait pas de nouveau se prendre la tête, sinon là oui, Maxine pourrait ne pas comprendre et se poser des questions.

Durant cette année où j'étais partie d'ici, je pouvais affirmer que j'avais été bien heureuse. Comment ne pas l'être en même temps ? Alcool et drogues à profusion, aucun attachement ni de relations compliquées, j'avais juste à faire mes deal et me défoncer. Certes parfois il y avait un ou deux cadavres au pied de mon lit ou des doigts qui trainaient mais ça allait encore. Le truc c'est que maintenant que je retrouvais mon meilleur ami je réalisais à quel point la liberté n'était rien si on la compare avec le bien être qu'un proche nous procure. C'est une chose que j'avais oublie, volontairement ou non. Donc c'était on ne peut plus évident que je voulais qu'il reste en vie maintenant et j'étais la dernière personne qui allait faire quelque chose pour la mettre en danger. Sur une autre ordre d'idée je me demandais ce que Maxine allait penser de ça, de lui et de moi. Je les savais tout aussi proche que nous pouvions l'être et jusqu'à un certain point ça me faisait peur car je me confiais très peu à elle. Foutu orgueil. « Je suis totalement d'accord, de toute façon on l'a dit ça appartient au passé. Elle ne me semble pas au top en ce moment, j'ai pas envie qu'elle se fasse plus de soucis... » Ouais l'état déprimé de ma soeur je l'avais remarqué en quelques secondes à peine hier soir. On était pas proche sentimentalement mais elle avait mon sang, je la connaissais par coeur.