ADRUZY + my heart is afraid that it will have to suffer

Personne n'a eu une enfance toute rose, ceux qui ont eu droit à un semblant de celle-ci sont d'ailleurs les plus vulnérables. Puisqu'ils ne connaissent rien des véritables enjeux de la vie. J'hochais simplement la tête lorsqu'il me dit que j'ai eu de la chance. Oui effectivement, j'en ai eu. Puisque j'aurais pu subir pire, on peut parler dans ces termes là. Entreprenant la suite de mon récit, je lui avais posé cette fameuse question. Cette question qui faisait marcher l'imagination, et qui.. faisait toujours tomber la mauvaise réponse. En même temps, c'était évident, la bourgeoisie se lie peu au petit-monde en temps normal. Secouant la tête, je reprenais la parole. « Justement.. non. » soupirais-je. « Ma famille est riche mais préserve ses richesses. Ce qui fait que j'ai été scolarisée dans une école publique, mais vraiment celle qui ne couterait rien dans tout les cas. » L'endroit était tellement abjecte que mon manoir me semblait être un palace à côté, d'ailleurs. « Forcément, une riche chez les pauvres, ça fait tâche. Et disons que j'ai pas vraiment été appréciée. Ni intégrée. J'étais.. complètement à l'écart. » J'avais été rejetée, insultée, on avait déjà levé la main sur moi, d'ailleurs. Et ce n'est pas comme si j'avais pu répliquer. « Alors je me suis dit.. que tout serait beaucoup plus simple si je m'adaptais à toutes ces personnes sans faire de différences. Être celle qui plait aux autres, pour ne jamais revivre ça. » ajoutais-je plus bas. C'était sûrement, après la confession de la mort de ma soeur, celle qui me tenait le plus à coeur. Parce que cette facette de moi est, je le réalise aujourd'hui, bien détestable sur beaucoup de points.

Tout cela m'intriguait. Vraiment. Je ne comprenais pas pourquoi elle me parlait de sa scolarité, sur le coup, je me demandais bien quel rapport cela avait. Alors je l'écoutais parler et plus elle avouait les choses, plus ma bouche s'entrouvrait. Elle était devenue comme cela pour cette raison ? C'était complètement dingue ! Je m'étais toujours dit que les riches n'avaient pas ce genre de soucis à l'école, justement car ils étaient riches. Il fallait croire que je m'étais totalement trompé.. « D'accord.. Je veux bien comprendre que tu as fait cela pour ça au début mais.. » Je m'arrêtais quelques secondes, réfléchissant le plus rapidement possible. En fait, même après ses explications, j'avais encore dû mal à comprendre. J'avais vraiment dû mal à m'faire à l'idée que les gens pouvaient devenir.. Comme ça. Peu importait les raisons. « Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi tu n'es pas redevenue toi-même après. Tu ne risquais plus d'avoir ce soucis une fois à Harvard par exemple ! » disais-je en relevant la tête vers elle, plantant mon regard dans le sien. Après tout, ce n'était que dans cette école qu'elle avait dû agir ainsi. Après, elle pouvait être elle-même, être la fille la plus riche de la planète, qu'elle s'adapte ou non aux gens, cela n'aurait rien changé pour moi..

Je me demandais si quelqu'un, un jour, serait capable de me comprendre. D'accepter chacune de mes chutes et de me féliciter pour m'être relevée. Parfois, c'est ce que j'espère le plus, et puis je me dis que ce n'est qu'une illusion. Je ne mérite pas une personne comme ça, ce serait indigne de moi-même. Sa question me laissa un instant silencieuse. Comment expliquer ça. « Disons que.. je trouvais que c'était plus facile comme ça. J'avais.. j'ai peur de déplaire aux autres. » me repris-je alors en laissant mon regard divaguer dans la pièce. « La simple idée que quelqu'un puisse agir de cette manière avec moi.. disons que ça me pousse à continuer. » Et puis de cette manière là, c'était plus simple d'obtenir tout ce que je voulais, puisque j'étais appréciée. Mais cette manipulation constante n'était pas un trait de caractère, c'était presque aussi naturel que de respirer, alors autant ne pas y prêter attention. « Et puis, ça me permet.. d'avoir une carapace, disons. J'ai l'air confiante en moi, comme ça. Sociable, confiante, forte aussi si l'on veut. J'ai pas l'air de la gamine faible que je suis. » Egh, ça me faisait presque mal de prononcer ces mots sur ma propre personne. L'avouer, juste l'avouer. Que je suis faible. Et que je n'ai aucun moyen de survivre à cette faiblesse tant elle est présente partout en moi.