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10 jours. Cela faisait 10 longues journées qu'il t'ignorait. Tu parlais bien sûr de William qui, depuis la soirée surprise qu'il avait organisé, semblait t'éviter le plus possible. Et toi, ça te faisait un mal de chien... surtout que tu savais que c'était de ta faute. Il avait certes organisé un jeu d'Action et Vérité, vous aviez certes fini ivres à force de boire des shots, mais c'était toi qui avais cédé, toi qui l'avais embrassé sur la bouche de manière plus que... subjective. Tu avais simplement penser lui faire une plaisanterie, même si tu te rendais compte que ce n'était pas drôle en étant sobre, mais pourquoi avait-il fallu que tu ressentes un peu trop de... plaisir à faire cela ? Le tout mixé à l'alcool, cela t'avait donné une belle tempête d'émotions qui t'avait fait le laisser en plan là-bas, dans ce bar. Tu aurais bien voulu qu'il oublie tout cela, vu qu'il avait plus bu que toi, mais tu avais pu constater que ce n'était pas le cas. Il t'avait ignoré au réveil, mais semblait absolument tout faire pour ne pas te parler le reste du temps. Autant dire que tu étais certain qu'il n'avait absolument rien oublié, et qu'il n'avait pas apprécié. Mais bon sang, tu n'arrivais pas à faire le premier pas et t'excuser... car tu ne savais pas vraiment si t'excuser aurait été sincère.
Tu n'avais que trop cogité pendant ces derniers jours, à t'en donner des maux de tête intenables. Tu voulais te persuader que William n'était qu'un ami, ton meilleur ami certes, mais rien de plus. D'un autre côté, tu n'arrivais pas à te voiler la face sur les sensations ressenties, même bourré comme tu l'avais été : tu avais apprécié, même sacrément. Tu savais être attiré autant par les hommes que par les femmes, mais que cela pouvait tomber sur William ne t'avait jamais traversé l'esprit avant ce baiser. Tu avais envie de te cogner la tête contre un mur, en espérant presque te faire assez mal pour devenir amnésique et oublier tout cela, mais tu n'étais pas de cette trempe. Non, tu préférais souffrir, encore et encore, revoir cette scène en boucle dans ta tête, te rappeler tous les bons moments avec lui et te demander comment tu avais pu passer à côté de ça. En vérité, tu avais déjà la réponse : William était ton ami depuis si longtemps que c'était ton plus proche ami, et tu avais dû penser que ce que tu ressentais n'était que l'expression de cette grande amitié. Après tout, tu n'avais jamais fait de rêves étranges sur lui, ni rien ne s'approchant de ce que tu pensais être le sentiment d'amour. Fallait croire que tu n'étais vraiment pas doué pour cela.
A ces pensées, tu ne pus t'empêcher d'en rire douloureusement. Ouais, tu n'étais vraiment qu'un sinistre imbécile, mais un imbécile bien blessé et fragilisé à l'extrême. William avait toujours été ton roc depuis que vous étiez ami, et le seul qui te restait depuis le décès de ta grand-mère, le seul aussi avec lequel tu t'ouvrais volontiers, lui faisant entièrement confiance et ce de manière apparemment réciproque. Le voir s'éloigner aussi brutalement de toi... Cela avait cassé quelque chose dans le mécanisme de fermeture de ta carapace, et tu te sentais encore plus vulnérable que d'habitude. Tu avais l'impression d'avoir un coup de poignard à chaque fois qu'il esquivait ton regard ou changeait de chemin quand tu arrivais, quand il sortait d'une pièce du bateau alors que tu y entrais, et tu en avais marre. Ce ne devrait pas être permis de subit cela, bon sang ! Tu en avais honte, mais tu avais même chialé par moments, quand tu te savais seul dans un endroit et que tu avais l'impression de totalement rompre les amarres. Toi qui te voulais fort et solide, tu te retrouvais aussi faible, lâché et déprimé que lors de tes périodes les plus sombres. Tu aurais voulu éviter de promener ce putain de regard de chiot trempé sur le monde du Summer Camp, redresser la tête et faire comme si cela ne t'affectait pas, mais tu ne pouvais tout simplement pas. Tu avais l'impression que tous tes nerfs lâchaient un par un, et tu allais finir dans un état pitoyable à la fin.
Pour tout dire, tu avais même imaginé quitter le Summer Camp et revenir à Harvard, mais qu'allais-tu y faire de plus ? La seule différence serait que tu ne verrais pas William avant septembre, mais tu te doutais que la rentrée serait encore pire. Là, tu conservais un faible espoir, celui-ci s'amenuisant chaque jour, qu'il revienne vers toi et que vous puissiez redevenir amis, comme avant... même si tu doutais que votre amitié changerait de toute façon, en bien peut-être, mais surtout en mal. Bon sang, il était hétéro, tu étais son meilleur pote et avais neuf ans de plus que toi, tu devais bien rêver à autre chose que toi, non ? Enfin, tu ne voulais pas savoir ce à quoi il pensait en ce moment même, tu y pensais déjà trop souvent à ton goût. Et puis, tu avais pris la décision de passer le moins de temps possible sur le bateau : tu visitais les îles d'escale de fond en comble, tu dormais à la belle étoile voire chez l'habitant quand il arrivait à certains d'avoir pitié de cette asperge seule (ce qui te rappelait de cruelle manière la liste de défis de cette soirée-là). Tu ne revenais finalement au bateau que pour prendre une douche et te changer, histoire de tenter de cacher tous tes problèmes aux yeux des autres étudiants. Oh, l'équipe, et surtout votre chambré, devait bien se douter de quelque chose, mais tu ne voulais pas qu'ils sachent, il n'en avait pas le droit. Ceci ne concernait que William et toi, et tu serais capable de démolir toute autre personne au courant sans ton accord.
En attendant, tu t'étais calé dans les cachots de ce bateau, à l'abri de tout regard, recroquevillé sur toi-même dans l'ombre d'une de ces salles sombres, comme tu l'avais fait durant la dernière traversée. Tu te sentais plus en sécurité ici, sans source de lumière, comme un réflexe de proie blessée. Tu avais fermé les yeux, mais tu ne dormais pas, même si le manque de sommeil commençait franchement à être visible : rien que sur ton visage, les cernes que tu affichais étaient carrément flippantes. Sachant que tu avais dû dormir dans votre chambre cette nuit-là, autant dire que tu n'avais pas fermé l’œil du tout, contrairement à d'habitude où tu parvenais généralement à glaner une voire deux heures de sommeil si tu avais de la chance. Tu savais que cette traversée allait être encore longue de quelques heures que la précédente, et tu avais presque manqué bousculer tout le monde pour en sortir la dernière fois. Là, tu avais décidé de ne pas renouveler l'expérience, tu devais être plus calme sous peine de passer pour un timbré. Inspirant et exprimant de manière la plus calme et régulière possible pour tenter d'arrêter, ou au moins de diminuer le tremblement de tes mains, histoire d'attraper convenablement la boîte se trouvant dans la poche de ton bermuda. Tu finis par y arriver avant de l'observer, hésitant toujours à t'en servir. Oui, tu avais volé une boîte d'anxiolytiques, c'était mal. Mais là, tu ne te sentais plus capable de faire face sans aucune aide, et c'était franchement hors de question d'en obtenir une du côté humain. Tu te traitais d'abruti, de lâche, de faible, de victime en cédant, mais tu te persuadais tant bien que mal que cela serait mieux. Tu n'allais pas te suicider aux médocs non plus, tu ne faisais rien de mal. Tu t'étais simplement juré de ne pas reprendre ce genre de substance depuis que tu avais arrêté en arrivant ici, même si tu n'en prenais plus tant que cela deux bonnes années avant d'arriver à Harvard. C'était quand même con de rechuter 8 ans après, non ? Tu n'en avais même pas parlé à William, cela n'aurait pas servi à grand chose, ce n'était que pour calmer ton anxiété et toutes ces conneries. Et là, de l'anxiété, tu en ressentais à mort... par sa faute. A force, tout se mélangeait tellement dans ta tête que tu ne savais même plus si tu pouvais l'aimer ou si tu le haïssais de t'avoir fait ça pour tout dire. Sortant deux des petites gélules de la boîte, tu les avalas rapidement, avant de changer d'avis, puis laissas tranquillement le tout faire son effet. Tu avais plusieurs heures devant toi de toute façon, et le temps qu'elles agissent et que tu te détendes vraiment, il ne tarderait pas à être l'heure de descendre. Au moins, si elles te faisaient effet comme avant en étant au calme, tu ne tremblerais plus comme une feuille en croisant son regard et tu semblerais relativement normal, pas une pile électrique qui bougeait dans tous les sens et parlerait trop vite. Enfin ça, en tout cas, c'était le plan. Fermant les yeux pour tenter de penser à autre chose qu'à William, tu ne pris pas garde aux bruits de pas qui se rapprochaient de toi.
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