A Long Time ||| Socrate.

Socrate rit en m’entendant parler ainsi. « C’est quoi cette question ? Bien sûr que je te vois avec une femme, une belle femme soit dit en passant, du genre classe et distinguée ! Alors quoi, tu préfères les garçons ? » J’avais posé la question avec tant de malice qu’en voyant son regard, j’en riais d’avance. Socrate avait tant fait pour moi. C’était mon frère, mon grand frère et je voulais le voir heureux. C’était à présent l’une des choses qui m’importait le plus : voir chaque jour Socrate, un sourire sur les lèvres. Mais le mien s’effaça lorsqu’il rétorqua une chose à propos d’Andrew. J’avais parlé d’un garçon qui avait l’air de bien m’aimer mais cela semblait insuffisant aux yeux du professeur qui pensait que je méritais mieux. Je le toisai du regard. « Peut-être que tu me sur estime. » Je n’avais pas dit ça méchamment mais plutôt sur le ton de l’inquiétude. Et s’il disait vrai ? Et si, bien m’aimer ne suffisait pas ? Et si Drew aimait toujours Prudence bien plus que moi ? En réalité, je n’en doutais pas une seconde, ils venaient de se quitter. Mais ce baiser, ce regard, ces paroles… Je fronçai les sourcils revenant m’assoir sur l’un des lits. « Je ne sais pas à quel point il m’aime en réalité. Mais est-ce que ça compte vraiment tant que ça ? »

Je lui lançais un petit regard noir sans que ce soit méchant, elle aimait bien me taquiner. Pourtant, j'étais loin de préférer les hommes, j'étais juste trop timide pour m'engager avec quelqu'un. J'hochais négativement la tête sans pour autant donner de la voix à ma réponse. Je préférais ne pas trop parler de mes histoire de coeur avec Amber. Ou qui que ce soit d'autre à vrai dire. La jeune fille s'assit sur un des lits, moi je m'asseyais sur le mien en face d'elle. Et, je la regardais alors qu'elle me demandait si tout ça comptait vraiment. Je soupirais. « Amber ! Bien sur que tu le mérite, tu dois avoir quelqu'un qui t'aime. Qui t'adore. Non pas qui t'aime bien, c'est tout. Après, tu le verras bien vite. La manière dont il t'aime. » répondis-je alors. Et, je faisais le professeur d'amour alors que je n'y connaissais rien du tout.

Socrate s’assit face à moi, répétant que j’avais besoin de quelqu’un d’aimant.  M’aimant pour ce que je suis. Mais qui étais-je ? Une quincy qui s’était droguée une partie de son année et qui n’était connue que pour ça ? Je n’y pensais jamais, mais cette période m’avait complètement… changé et déchiré. Je voulais être la même, celle que Socrate avait connu quelques années auparavant. Mais je ne m’en sentais pas capable. Je tentais de repousser ces pensées hors de mon esprit pour le moment. « Je verrais bien oui. Pour l’instant j’ai juste l’impression qu’il va renouer avec celle qui vient de le quitter. » J’avais dit cela d’un ton assez passif, comme si ça ne me gênait pas des moindres. Le fait est que j’avais horreur d’y penser. S’il s’avérait qu’il retourne avec Prudence, qu’adviendrait-il des regards et des mots qu’il me portait comme si j’étais l’une des personnes les plus importantes de sa vie ? Je ferais face, je lui tournerai le dos et reprendrai un nouveau départ. Seulement, je ne savais pas si je supporterai encore une fois de tout recommencer… Je m’éclaircie la voix. « Pourquoi on te chercherait pas une femme ? Je te connais Socrate, avant que tu en finisse avec ta timidité, c’est pas d’main la veille. » Ca m’amusait, mais plus autant que tout à l’heure. Je repensais à ce que disais Socrate. Je repensais à Andrew, ça me faisait mal de trop y réfléchir. « Tu te rappelles quand tu venais à la maison ? On discutait souvent sur nos balançoires et tu mettais toujours à terre Charlie quand il venait nous embêter et te défier. Mon père, quand il parle de toi répète souvent qu’on est rien sans personne. » Je me levai et m’installai à côté de lui, posant ma tête sur son épaule. « Je suis sûre que quelque part, et surement bien plus près qu’on ne l’imagine, il y a une personne pour toi, qui reste là à t’attendre. Et toi t’es trop réservé et préoccupé pour t’en rendre compte. Je levai les yeux sur lui. Tu crois pas ? »

Je pouvais le répéter des milliers de fois, Amber méritait le meilleure. Je la connaissais depuis longtemps maintenant et elle faisait comme partie de ma famille, elle méritait qu'on l'aime réellement. Et pas juste un peu. En tout cas, la discussion partit bien vite sur moi et mes relations amoureuses. Oh ma vie, c'était plus catastrophe. Récemment, j'avais tout gâché avec Athina alors que j'aurais pu passé un cap. Je riais un peu lorsqu'elle me déclara qu'elle a cherché une femme. Elle avait raison, c'était pas demain que j'allais ne plus être aussi timide et gêné avec les femmes. Elle s'assit à mes côtés, posant sa tête sur mon épaule. Je déposais un baiser sur ses cheveux, content qu'elle soit proche de moi. « Oui, tu as surement raison... Mais, ça n'est pas que pour moi. Pour toi aussi, tu le sais non ? », répondis-je alors en la serrant un peu plus fort près de moi.

Socrate m'embrassa les cheveux et je souris, la réalité me sautant à nouveau aux yeux. J'étais avec Socrate, j'avais retrouvé mon grand frère de coeur, je pouvais mourir en paix. Je levai la tête sur lui. "Comment ça pour moi aussi ? Ah. Euh.. Oui, surement, on verra bien. Mais mon cas est loin d'être aussi urgent, je te rappelle. Si tu continues tu vas mourir vieux et célibataire." Le taquinais-je en souriant de toutes mes dents. "Mais tu ne veux pas que ça arrive, n'est-ce pas ? Alors on va la trouver cette femme !" Puis je me levai pour m'agenouiller devant Socrate, tel un chevalier :"J'en fais la promesse solennelle mon seigneur, je vous la ramènerai." J'étais encore à terre lorsque je me demandais comment j'allais bien pouvoir m'y prendre pour trouver la demoiselle. J'avais beau rire lors de mon serment, je n'en étais pas moins sérieuse et ça Socrate n'avait pas l'air de le comprendre. Puis je me relevai passant à autre chose avec naturel, comme si j'étais la championne des changements de sujet. "Bon, on va se baigner ? Est-ce que votre équipe est aussi folle que la mienne pour sauter du haut de bateau ? Pour les sensations, c'est juste extra !" J'enlevai mon tee-shirt dévoilant un maillot de bain, esquissant un sourire empli de malice. "Socrate, pour nos retrouvailles, je t'interdis de refuser !"

La conversation se dirigeait à nouveau autour de moi, et je remarquais que Amber était douée pour faire ça. Mais, elle avait raison. Si je continuais comme cela, j'allais finir par être un vieux con célibataire. Elle s'agenouillait face à moi, un genou à terre, jurant alors de me trouver une compagne. Je rigolais, je me disais qu'elle prenait ça pour rire. « N'importe quoi ! », avais-je dit tout en riant. Puis, la demoiselle proposait d'aller se baigner dans la mer. C'était une bonne idée, mais pas pour moi. Elle s'était mise en maillot de bain, et m'interdisait de refuser la proposition. « Juste pour toi alors hein ! », répondis-je en me mettant à mon tour en short de bain. « C'est parti ? »

Je tendis la main à mon grand frère, celui en qui j'avais pleinement confiance, celui dont jamais plus je ne pourrais me séparer et réussis finalement à le convaincre après un court temps d'hésitation. Je commençais à très bien connaître Socrate, il fallait toujours le pousser un peu pour ce genre de chose. S'amuser n'était pas toujours son fort. Lui c'était le professeur d'histoire d'Harvard, une vraie tête et auteur en plus de ça. Je ne pouvais qu'être trop fière et cela me volait comme à chaque fois, un petit sourire de gamine semblable à ceux que je lui avais toujours offert. "Génial !" M'écriais-je, surexcitée. Enfin en tenue, je m'emparai de lui sans tarder et sortis de sa chambre. Risquant quelques regards aux environs, je finis par tout mettre de côté. Que l'on me voit ou pas, j'en avais que faire maintenant. Socrate était là, à mes côtés. Il ne restait plus qu'à trouver mon frère et mes soeurs, et mon bonheur en serait comblé. Elle était là, ma vraie famille. Je m'élançai sur le pont, la main du professeur toujours dans la mienne et me dressai devant le vide que formait la taille du navire. C'était vraiment haut. Je me mordis les lèvres. "On y va ensemble ou tu as trop peur pour me devancer ?" J'avais une envie folle de le pousser mais sa corpulence comparée à la mienne ne me laissait aucune chance. J'aurais pu jouer sur la surprise, mais ma tentative n'en serait que trop flagrante. J'espérai simplement que lui ne décide pas de me jeter par dessus bord, il savait de toute façon que ma vengeance serait terrible.

Un simple short rouge à la Alerte à Malibu, j'étais simple. Je n'aimais pas trop me faire remarquer, mais j'avais un corps qui ne passait pas inaperçu malheureusement pour moi. Je ne faisais pas de sport mais je mangeais sainement et j'avais juste le corps tracé. Pas de musculation. Sans perdre de temps, ma protégée me prit la main et nous sortîmes des cabines pour arriver sur le pont. On était près du bord, et la hauteur me faisait légèrement peur. Je ne l'aurais jamais fait si Amber n'avait pas été là, ce n'était pas mon genre. Il n'y avait quasiment personne sur le pont encore heureux, au cas où si je me dégonflais. Non, je ne pouvais pas me dégonfler. Pas devant Amber. Je pris une grande inspiration et sans attendre, je serrais la main de la jeune fille avant de sauter. Autant prendre les devants. Je sautais en faisant la bombe. Mon corps s'enfonçait dans l'eau et je remontais à la surface. « Allez ! A toi ! », criais-je pour qu'elle puisse bien m'entendre. L'eau était tellement bonne ici.

Je crois que si je ne voyais pas autant Socrate comme un grand frère, si je ne le connaissais pas du tout, je n’aurais fait qu’une bouchée de lui, malgré mon jeune âge. Il semblait parfois l’ignorer, mais il avait de nombreux atouts. En plus d’être intelligent, expérimenté et de nature calme et posée, le professeur avait pour un ainsi dire un corps des plus attirants. Un torse bien tracé et tout ce qui va avec. Il suffisait de mettre tout ça en avant pour qu’il se trouve la femme de sa vie. Rien de plus facile. Il me serra la main plus qu’il ne fallait avant de me prendre au dépourvu en sautant le long du bateau. J’éclatai de rire en le voyant voler quelques infimes secondes et s’enfoncer dans l’eau avant de réapparaître à la surface. A son appel, je fis mine de prier en exécutant le signe de croix puis, prenant un peu d’élan, je m’élançai à plusieurs mètres au dessus de l’eau, prise d’une soudaine montée d’adrénaline. Lâchant un cri d’excitation je disparaissais à mon tour dans les tréfonds marins, enveloppée par toute la fraîcheur de l’océan. Ce que c’était bon de se sentir aussi vulnérable, entourée d’une chose qu’on ne contrôlait pas. Après de longues secondes d’émergement, je ressortis la tête de l’eau, tout sourire. « Je pourrais passer ma vie à faire ça ! » M’exclamais-je en riant.« Bon maintenant qu’on est sûrs de ne pas être entendus, dis moi en plus sur tes futurs proies. Je suis persuadée qu’il y a au moins une femme parmi les nombreuses qui doivent te tourner autour qui t’intéresse… Et détourne pas l’sujet, je te connais maintenant. »

J'avais sauté en premier, l'eau était bonne et fraîche. Parfaite pour se baigner, en réalité. Amber m'avait rejoint rapidement dans l'eau et je riais lorsqu'elle sauta. Elle remonta à la surface et j'étais d'accord en tout point avec elle. J'avais également envie de recommencer à sauter. Encore, et encore. J'avais l'impression d'être libre en sautant. Amber me parla à nouveau des femmes. J'avais pas spécialement envie d'en parler, et je pensais directement à Athina. Ainsi que Danae. « Ah, pourquoi tu veux gâcher de si bons moments, Amber ? », lui demandais-je. Je tentais d'éviter le sujet du mieux que je pouvais, mais avec elle, ça n'allait pas être facile. « On re-saute ? », proposais-je alors, faisant comme si elle ne m'avait rien demandé.