(+ Caleb) Le jour se lève sur ma peine...

Thaïs se surprit à prier qu’il parte pour ne pas avoir à expliquer ce qu’elle cachait depuis quelques jours mais malheureusement Caleb en décida autrement, lui relevant le visage en glissant deux doigts sous son menton. « Parce que j’ai mal… » murmura-t-elle avant de prendre sa main délicatement dans la sienne pour lui faire lâcher son visage. Elle mit quelques secondes avant de la lui rendre pour mieux pousser un soupire. « Ça va sûrement passer, tu devrais vaquer à tes occupations, ne t’occupe pas de moi. »

« Je n’ai pas pour habitude de tourner le dos à une personne en souffrance alors dis-moi ce qui se passe… C’est en rapport avec ton dos, n’est-ce pas ? » l’interrogeais-je alors que je mourrais d’envie de lui enlever son haut pour voir véritablement le problème en question. Quelque chose me poussait à vouloir prendre soin d’elle mais je ne pouvais pas le faire contre son gré après tout. « Si tu veux parler, tu peux… Je suis pas là pour te juger loin de là »

D’un côté l’irlandaise n’avait aucune envie de se confier, et de l’autre Thaïs ne parvenait pas à se soigner comme il faut et se sentait en confiance en compagnie de Caleb. Elle se releva donc, présentant son dos blessé au bel allemand pour mieux cacher sa poitrine à l’aide de sa chemise tandis qu’elle enlevait le pansement d’une main, révélant des coups de fouets particulièrement incrustés dans ses chairs blessées. « Je n’ai pas envie d’en parler mais je n’arrive pas à me soigner toute seule. Je sais que je te demande beaucoup alors que tu ne me connais pas mais je me sens en confiance… tu accepterais de m’aider ? J’ai peur que cela s’infecte. »

Je ne pus décemment retenir le juron allemand qui s’échappa de mes lèvres en voyant son dos labouré de coups de fouet. Comment pouvait-on faire cela à un être humain. Je m’estimais chanceux que mon bourreau m’avait simplement violé et roué de coups. « Viens… Je vais te soigner »lui dis-je en prenant une de ses mains dans les miennes pour la conduire dans ma chambre. « Allonge toi sur le ventre, je vais m’occuper de ton dos » lui demandais-je en douceur presque avec tendresse. Je ne posais pas de question car je savais qu’elle ne voulait pas en parler mais il était certain qu’à partir de maintenant, elle m’aurait sur le dos et que je la protégerai du mieux que je pourrais.

« Pas la peine d’être en colère tu n’y es pour rien » lui fit-elle remarquer face à son juron en allemand car il se trouvait que Thaïs le parlait couramment. Elle serra néanmoins sa main dans celle de Caleb avec douceur, acceptant son aide bien volontiers car au moins, elle n’aurait plus à craindre que sa blessure ne s’infecte. Un gigantesque poids de moins même si dès qu’elle s’allongea sur le ventre, elle se mit à trembler face à la souffrance. « N’hésite pas à y aller, je tiendrai. Il faut bien désinfecter » avoua-t-elle même si ses yeux s’humidifiaient déjà d’appréhension.

« Je ne suis pas en colère… C’est juste que je comprends pas comment on peut faire endurer ce calvaire à un être humain » répondis-je calmement tout en la conduisant dans ma chambre, lui demandant de s’allonger. Je me rendis quant à moi dans ma salle de bain pour réunir tout ce que je trouvais pour la soigner, revenant après vers ma nouvelle patiente. « Je vais essayer d’être le plus doux possible mais si tu veux, je peux te filer un truc contre la douleur » murmurais-je en posant ma main sur ses cheveux, les caressant rapidement comme pour la rassurer. Techniquement je ne devrais pas avoir ce genre de médicaments à portée de main mais j’en gardais pour me rappeler mes propres travers.

« Je ne comprends pas non plus… mais je crois que je ne comprends pas grand-chose concernant les êtres humains » avoua-t-elle d’un ton mi soupirant mi sarcastique car à sa décharge, Thaïs était considérée comme un rebut depuis tellement d’années qu’elle n’était pas sûre d’avoir un jour connu autre chose, hormis lorsqu’elle avait treize ans. « Ça va aller, je ne préfère pas prendre trop d’antidouleurs… il faut que je tienne, ce n’est qu’un mauvais moment à passer ! Je crois que je ne te remercierai jamais assez pour ton aide… »

« C’est normal. Je n’aime pas voir une femme souffrir et puis t’as l’air sympa comme nana » haussais-je les épaules avant de poser sur le bord du lit tout le nécessaire. « Si tu veux m’insulter, tu as le droit, nous sommes seuls ici alors tu peux te défouler » lui précisais-je pour mieux commencer mes soins essayant d’être le plus doux possibles car je m’en voulais par avance de lui apporter cette nouvelle dose de souffrance même si celle-ci était plus salutaire qu’autre chose pour Jennelynn. « Y en a plus pour longtemps »

« Si ça se trouve je suis une blonde insupportable tu ne me connais pas… ceci dit je ne vais pas t’insulter tu n’y es pour rien » fit-elle remarquer avant de prendre une grande inspiration et de se contracter face à la douleur. Ah elle lâcha un nombre incalculable de jurons en gaélique, aucun tourné vers Caleb qui n’était pas responsable de cette folie mais autant dire qu’elle fut soulagée lorsque la séance de torture fut terminée. Elle se redressa pour serrer l’allemand contre elle en un réflexe qu’elle ne put contrôler, même s’il ne lui avait pas encore fini son pansement.

« Je ne pense pas. Je suis plutôt bon pour me faire une idée de la nature profonde des gens » haussais-je les épaules pour mieux poursuivre mes soins. Elle était irlandaise notais-je dans ma tête. Comment je le savais ? Tout simplement parce que lorsque j’avais quatorze ans, j’étais tombé profondément amoureux d’une irlandaise et que le soir même de notre rencontre, j’avais commencé à apprendre sa langue. Une connerie puisqu’elle n’était jamais revenue. Jennelynn me surprit alors avec une étreinte qui me fit me crisper contre elle. Je n’avais pas l’habitude que l’on me touche et surtout qu’on vienne se blottir contre moi. Je ne supportais pas ce genre d’attention. « T’es soignée. Je referais ton pansement ce soir avant que tu te couches »marmonnais-je.