(+ Anna) On a mis mon cœur en quarantaine

« Ah ce n’est pas mon corps d’Appolon qui t’a plu en premier ? Remarque, la première fois que je t’ai vu, moi, c’est ton caractère qui m’a séduit. Enfin, au départ pour être honnête, je te prenais pour une pète couille bonne qu’à jouer avec les sentiments de ton collègue mais rapidement, j’ai compris combien tu étais merveilleuse » lui avouais-je même si je ne voulais pas me résoudre à analyser les tenants et aboutissants de cette conversation. Cela sonnait trop comme les derniers aveux d’un condamné. Non, je voulais rester optimiste. « Il faut bien, tu noircis toujours le tableau petit cœur » plaisantais-je doucement avant qu’elle ne commence à craquer de nouveau. Je pouvais le sentir dans sa façon de me regarder, de me supplier de changer de sujet. Elle recommençait à perdre espoir. « Pourquoi pas Tic et tac ? Hansel et Gretel ? boule et Bill ? Tom et Jerry ? Je sais pas… Dis moi tu as toujours ton portable avec toi ou pas ? » lançais-je dans un premier temps des conneries avant de redevenir légèrement sérieux avec cette question. Bon, en même temps, je désirais connaitre la réponse pour savoir si je pouvais lui envoyer des sextos durant la nuit histoire de l’aider à tenir le coup.

« Je m’efforçais justement de ne pas regarder ton corps d’Apollon car je ne savais que trop bien à quel point toutes les femmes devaient courir après… tu te rappelles que j’étais fan de l’écrivain avant de connaître l’homme ? Ceci dit tu n’avais pas totalement tort, je peux être aussi casse-couilles » avoua-t-elle sans même une trace de honte dans la voix, et pour cause, Anna appelait ça être lucide. Même malade et affaiblie, cette qualité ne lui était décidément pas enlevée. « J’essaye de ne pas le noircir mais je sais que s’il m’arrive de le faire tu es là pour me reprendre avec ton optimiste » reprit-t-elle avant de froncer les sourcils à ses propositions de prénom. « Dommage que je n’ai pas de coussin sous la main… tu as oublié Minus et Cortex ! J’aimerais bien appeler notre fils Gabriel, comme le meilleur ami de l’héroïne dans ton roman… sinon oui j’ai mon portable, pourquoi ? Ça me fait penser que je n’ai même pas pu t’offrir ton cadeau d’anniversaire, il est toujours dans mon bureau ici… je suis une mauvaise épouse, enfin fiancée. »

« Il est vrai qu’à l’époque, j’accumulais autant les pintes de bière que les conquêtes… Et je n’ai pas totalement tort ? J’ai entièrement raison. Je me rappelais combien il te baisait les pieds et combien tu râlais parce que j’étais présent. Le pauvre, il n’arrivait même pas à te parler. Tu crois qu’on doit lui envoyer un fairepart de mariage avec le guide de la séduction pour les nuls ? Non parce que je lui ravis la femme de sa vie… et j’ai même pas honte » rétorquais-je avec un sourire des plus séducteurs car repenser à ce bon vieux temps était pour le moins agréable. Ce qui l’était beaucoup moins, c’était cette épée de Damoclès au-dessus de sa tête. « Ah oui, Minus et Cortex, pas con ! Et moi tu vois, je suis bien content que tu n’aies pas de coussin car je peux dire autant de connerie que je veux… La classe ! Alycia… Tu en penses quoi plus sérieusement ? Et ton portable ? Tout simplement pour te faire l’amour par procuration » lâchais-je sérieusement comme si je venais de dire le ciel était bleu. « Rahhh on avait dit pas de cadeau pour mes trente-neuf ans ! Déjà que ça me dézingue d’être dans ma quarantième année » râlais-je.

« J’avoue ne même pas savoir comment j’ai fais pour t’ôter cette envie d’aller courir tout ce qui porte jupons… mais je me serais ennuyée avec quelqu’un comme Christopher. Aucune raison d’avoir honte, c’est la vie. Je suis peut-être un peu cruelle, qui sait… » nota-t-elle non sans une petite once d’amusement dans la voix, tout en sachant qu’elle-même n’avait pas honte. Leur relationnel n’avait pas toujours été tout beau tout rose mais Samuel lui avait montré le bonheur et rien que pour cela, elle l’en était reconnaissant à vie. « N’en profite pas trop car tu oublies que je connais du monde ici qui sera ravi de te faire subir tout un tas d’examens désagréables si je le commande ! Tu regretterais le coussin, crois-moi ! Alycia… c’est magnifique, d’où te viens ce prénom ? » Par contre Anna écarquilla les yeux de façon énorme avant d’éclater de rire. « Tu peux m’expliquer comment tu vas faire ? Je n’ai pas le droit aux appels cela déforme les appareils… quant à ton cadeau, il est dans mon bureau à l’étage du dessus, en chirurgie. Demande à ma secrétaire de t’ouvrir, et tu le trouveras dans le tiroir de mon armoire à droite. » Le cadeau en question ? Un bon pour un striptease qu’elle avait réalisé et décoré elle-même de ses blanches mimines ainsi qu’un autre nettement plus sérieux : leurs alliances gravées avec le message « Annuel love forever ».

« L’amour petit cœur ! L’amour ! Christopher n’avait aucune personnalité, il était bon pour épouser une nana du coin pas quelqu’un de ta trempe, tu l’aurais castré avant l’heure ! Il te faut un homme, un vrai, un pas tatoué comme moi » plaisantais-je en prenant plaisir à évoquer le bon vieux temps. Au moins pendant ce temps-là, Anna oubliait ce cirque autour de nous même si elle n’hésita pas une seule seconde à me menacer. « J’y crois pas, tu serais capable de me livrer à une ordre de toubib en blouse blanche ? Pour Alycia… Disons qu’elle me fait penser à une femme de mon passé et je suis certain que notre fille lui fera honneur et avant que tu ne te poses la question, non, je n’ai pas couché avec elle ! » préférais-je prévenir que guérir, sait-on jamais avec ma future femme. « Quoi tu n’as même pas le droit aux sms ? L’arnaque ! Mon plan tombe à l’eau… Décidément, cette soirée s’annonce pourrie, je vais dormir dans des draps froids sans bouillotte » répondis-je avant que la curiosité ne me tiraille. J’hésitais entre aller voir et rester près d’elle mais je sentais qu’elle m’encourageait du regard alors je cédais pour revenir avec un sourire niais aux lèvres. « Tu es la meilleure… Je t’aime femme »

« Castré ? Comme si j’étais aussi violente… c’est faux et pure calomnie ! » Bien qu’Anna l’aurait probablement broyé quand même vu qu’il avait un tempérament beaucoup plus soumis que le sien. Mais ce n’était qu’un détail vu que Samuel lui avait très rapidement tapé dans l’œil, il fallait dire ce qui est. « Mais parfaitement ! Si tu n’es pas sage tu sais à quoi tu t’exposes… je peux me permettre de te demander tout de même qui c’est ? N’y voit pas de la jalousie juste de la curiosité. Ça ne donnera que plus de valeur au prénom de notre fille, ceci dit tu ne m’écoutes pas, j’ai dis que mes appels sont interdits, pas mes sms ! » reprit-elle en levant les yeux au ciel pour mieux l’attendre de pied ferme et constater qu’il revenait avec un sourire niais sur les lèvres. « Bon anniversaire en retard mon ange… j’espère que ça te plaît. Garde bien le bon, je ne pourrai pas t’en refaire un autre si tu le perds ! »

« Mouais, là j’ai juste envie de dire joker » plaisantais-je bien que je commençais moi-même à me sentir fatigué depuis un jour ou deux. J’avais mis cela sur le compte du stress de ces dernières semaines mais j’avais beau dormir, je n’arrivais pas à me refaire mon capital sommeil sauf qu’il était bien sûr hors de question d’en parler à Anna. Elle avait d’autre souci en tête et moi, j’étais bien trop satisfait d’entendre que les sms étaient autorisés. « Ah ah ! On va pouvoir sextoter en paix, enfin une bonne nouvelle. Alycia était une amie que j’ai perdue de vue, elle s’est mariée et a eu une ribambelle de gosses mais avant cela, c’était une très grande championne de patinage » lui répondis-je avec une certaine tendresse dans la voix. De temps en temps, cette femme me manquait mais elle était définitivement heureuse où elle était alors je n’avais pas de regret. Tout comme je n’avais aucun regret de l’avoir abandonné quelques minutes histoire de satisfaire ma curiosité légendaire. « Tu peux être certaine que je vais même aller le faire plastifier pour ne pas l’abîmer ! » plaisantais-je. « Merci petit cœur d’y avoir pensé ! Cela fait belle lurette que je ne fêtais plus mon anniversaire »

« Sextoter ? J’ose espérer que tu ne comptes pas inclure les mms dans l’équation car je crains fort de ne pas être réellement à mon avantage » avoua-t-elle en soupirant légèrement. « Laisse-moi deviner : en prime d’être une véritable championne de patinage, elle est ton modèle car elle a eut une grande famille ? Je plaisante, tu m’as convaincue avec grande championne. Je suis honorée d’appeler notre fille comme elle » reprit-il d’un petit air malicieux sans préciser, bien que ce soit presque évident, qu’Anna adorait ce prénom. Elle se serait immédiatement opposée à la chose dans le cas contraire. « C’est justement parce que je me suis doutée que tu ne le fêtais plus depuis des lustres que j’ai voulu marquer le coup… et n’aie crainte, j’ai une plastifieuse à la maison ! Ceci dit Thaïs a prévu quelque chose pour toi également, il faudra que tu lui demandes ce que c’est par contre, je ne suis pas habilité à te le dire et tu ne peux pas me torturer pour le savoir… »

« C’est fou les idées que tu me donnes ! Va pas te plaindre si je fais des conneries, tu me les souffles » plaisantais-je non sans lui sourire légèrement. Il commençait à faire chaud dans ce couloir où c’était une impression. J’avais la désagréable impression que ma chemise me collait dans le dos. « Tout de suite ! Non elle n’a jamais été mon modèle… je ne suis pas le genre d’hommes à prendre aisément quelqu’un pour modèle… Les miens sont morts depuis des lustres » lâchais-je en faisant référence aux grands de ce nom qui avaient marqué l’histoire. En parlant d’histoire, cet anniversaire allait rester gravé dans ma mémoire. « Rahh vous avez décidé de me torturer toutes les deux hein ?! » râlais-je mais c’était avant tout pour camoufler tout le plaisir que j’éprouvais à cet instant précis. J’avais toujours été un grand pudique devant l’éternel me cachant le plus souvent derrière mon humour pourri et mon attitude désinvolte qui énervait tant les gens. « Tu devrais aller t’allonger, tu es de plus en plus pâle »

« Dois-je comprendre que je ferais mieux de me taire ? » Décidément, Anna n’aurait pas cru que Samuel puisse prendre pour argent comptant la plupart de ses paroles : à ses yeux, sextoter en mms était inutile vu la tête de zombie qu’elle se payait… on oubliait le glamour pour l’instant, il n’était vraiment plus d’actualité, dans le cas de la jolie russe en tout cas. « Je plaisantais chéri… par contre je ne peux pas parler à la place de Thaïs mais je crois qu’elle prend cela comme un petit jeu, histoire d’égayer le fait que c’est ton anniversaire et que tu mérites donc d’être gâté. » A ceci près qu’Anna n’avait aucune intention de s’allonger, surtout pas dans un moment pareil car cela voudrait dire cesser de lui parler. Sans aller jusqu’à dire qu’elle allait bien, elle pouvait au moins tenir le coup encore un peu… « Chéri, tu as l’air d’être en nage… est-ce que tout va bien ? Tu devrais te faire examiner ! »