(+ Caleb) I trust you, that's why

C’est étrange, mais Eventine n’aurait pas cru ne serait-ce qu’une seconde revenir un jour à la Lowell House dans pareilles conditions. Plus tôt dans la matinée, le jeune prince avait appelé Caleb au téléphone afin de savoir où il se trouverait dans l’après-midi, et si d’aventure il avait quelques instants à lui accorder… le beau brun n’avait aucune intention de s’éterniser, pas alors qu’il avait encore des millions de paperasses à remplir tendant vers la même confession désagréable qu’il se devait de faire à son meilleur pote. « J’en connais un qui ne veut pas se planter à ses partiels » fanfaronna-t-il avec cet habituel sourire de cabotin sur les lèvres, cheveux en bataille, habillé toujours de manière aussi classe alors qu’il approchait de celui ayant partagé pendant trois ans la même chambre à la Lowell House. « Quoi de neuf mon vieux ? Juste les révisions, ta p’tite femme va bien ? » lâcha-t-il sans même savoir que Caleb s’était engagé avec Thaïs et qu’ils allaient devenir parents.

A défaut de réviser à la bibliothèque, je m’étais réfugié à la Lowell House pour être tranquille et ne pas être déconcentré par Thaïs. Ma fiancée n’avait pas besoin de le vouloir pour m’allumer alors comme je connaissais assez bien mes réactions, je m’isolais totalement de cette tentation. Alors quand mon meilleur ami me demanda s’il pouvait me parler, je lui offrais naturellement de me rejoindre à notre confrérie. Et c’est ce qu’il fit, me sortant pour la peine de mes révisions. « Si je me plante, mon père me trucide et puis je dois assurer pour mon gosse » lui répondis-je avec un léger sourire. « Et toi, t’es pas en train de réviser espèce de glandeur ? » lui demandais-je avec amusement tandis que je me renfrognais contre le dossier de ma chaise. « Mise à part un mariage futur et un gosse comme tu le sais, pas grand-chose. Thais va bien, elle râle parce que sa poitrine a doublé de volume mais bizarrement, c’est pas pour me déplaire » rigolais-je comme un con. « Et toi ? En dehors de ton violon ? Quoi de neuf ? Toujours pas de petites copines à l’horizon ? »

« Depuis quand je suis un glandeur, moi ? Je te signale que je travaille comme un forcené monsieur je n’ai pas les yeux en face des trous ! » protesta-t-il aussitôt non sans s’asseoir sur un fauteuil juste en face de Caleb, s’affalant à moitié dessus puisqu’ici, il n’avait personne à impressionner. « TU VAS TE MARIER ET PONDRE ?! Figure-toi que ta petite femme est venue me trouver, récemment… pour me proposer un duo musical. C’est qu’elle en a dans le ciboulot, tu as choisi une perle ! » reprit-il d’un petit air malicieux car il avait adoré échanger avec l’irlandaise, elle était littéralement passionnante et il avait bu ses paroles. « A vrai dire pour l’instant j’ai tellement de chats à fouetter que les femmes, on va dire que ce n’est pas le plus urgent. Mais dis-moi, si je te demandais un service, est-ce que tu serais prêt à me le rendre sans sourciller ? » ajouta-t-il mystérieusement, son ton étant devenu soudainement extrêmement sérieux.

« Tu sais que j’adore t’emmerder et te traiter de glandeur a le don de te faire chier, pourquoi m’en priverais-je ? » plaisantais-je avec un léger sourire en coin. Eventine était l’un de mes rares amis avec qui j’osais me montrer tel que j’étais réellement et non cet homme froid et insensible au demeurant. Il était mon ami non, il était mon meilleur ami avec Aidan et Charlie bien que je ne voyais plus beaucoup ce dernier ces temps-ci. « Techniquement ce n’est pas moi qui vais pondre mais Thaïs et oui je vais me marier ! » annonçais-je fièrement comme toujours car j’étais bel et bien fier de me marier à une femme pareille alors que mon meilleur ami l’apprécie ou du moins partage une bonne opinion sur elle, c’était juste le summum. « Je suis pas con, j’ai choisi la meilleure ! Et tu as accepté ? Elle est foutrement douée de ses doigts et y a rien de pervers dans ma phrase… Je l’ai écouté et vu joué…Tu serais le plus con des hommes de refuser pareille collaboration » lui dis-je en l’observant avec un œil assez noir car fallait pas croire, je défendrai toujours ma femme quoiqu’il arrive. « Euh ouais d’ailleurs, j’ai un truc à te demander aussi » grimaçais-je par la suite.

« J’avais oublié que tu étais le digne inventeur de la loi de l’emmerdement maximum ! » répliqua-t-il aussitôt, se lançant de bon cœur à pieds joints dans leur joute verbale habituelle, qui lui avait d’ailleurs manquée pendant les fêtes. Mais Caleb avait eu son programme et Eventine le sien, il allait donc sans dire que les faire coïncider n’aurait pas été envisageable une minute. « Tu ne fais définitivement pas les choses à moitié en tout cas ! Fière de toi je suis cher padawan ! » Que Caleb soit plus âgé, le jeune prince s’en moquait comme de sa première tenue d’apparat. « Déconne pas : ta femme venait juste de prononcer le mot « piano » que je disais déjà oui. Surtout que je l’avais déjà croisée en fait, au conservatoire de Paris… elle était venue pour un échange, je t’ai déniché la photo d’ailleurs, matte Thaïs à seize piges ! » Eventine lui tendit la photo d’une irlandaise passablement souriante, les cheveux légèrement en bataille, faisant l’andouille derrière un piano. « Commence avec ta demande, j’enchaînerai ! »

« Tu me tues poto d’avoir oublié ça de moi ! On se voit plus assez souvent pour que tu ais des pertes de mémoire de la taille du canyon ? Tu as rencontré quelqu’un ? Il s’appelle comment ? Je le savais que tu avais appris ma récente relation avec Aidan ! Tu me tues Ev’… Je pensais notre histoire bien plus forte que cela ! » plaisantais-je comme un con, chose que j’étais souvent lorsque j’étais seul avec Ev ou avec Aidan. Le pire, c’était lorsque nous étions tous les trois réunis en même temps. Il valait mieux se tenir loin de nous. Je profitais néanmoins de l’occasion pour lui parler non seulement de mes fiançailles avec Thais mais aussi de notre enfant à naitre. Je fis une légère révérence pour le remercier avant de rigoler lorsque justement le sujet se tourna vers ma chère et tendre. [color=#604D76] « Ah ouais… Tu sais que cette photo est collector n’empêche ?! » Rétorquais-je en regardant avec tendresse la bouille de ma fiancée. Elle n’avait pas trop changé, toujours ce même sourire. [b] « Ok… Et bien comme tu connais un peu Thais, tu ne diras peut-être pas non mais voilà… Nous aimerions nous marier le plus rapidement possible avant son accouchement et je me demandais si ce n’était pas possible de faire une cérémonie intime chez toi ainsi qu’une petite fête. Nous serions en petit comité il va de soi. Et toi ? Tu voulais me demander quoi ? » demandais-je relativement mal à l’aise de demander ainsi en quelque sorte la charité.

« Moi, rencontré quelqu’un ? Heum oui pour tout avouer… il s’appelle Stradivarius et que veux-tu, nous vivons un amour démesuré, à tel point que je pense même à l’épouser ! » A petit con, petit con et demi et Caleb était très bien placé pour savoir que le jeune prince ne serait jamais le dernier en la matière, bien au contraire. Il s’éclatait par avance de la poursuite de leur conversation, du moins jusqu’à ce qu’il ne lui avoue la chose le tracassant. « Je te l’offre ! Comme ça, tu pourras l’utiliser lors d’un chantage éventuel… » reprit-il avec malice, non sans que son expression redevienne légèrement plus sérieuse à la demande de son pote Lowell. « Bien sûr ! Hey c’est de ton mariage dont on parle, pas de la soupe populaire du coin, j’ai deux cent quatre vingt trois pièces dans ma petite bicoque et un terrain à faire friser la tonsure d’un moine ! Je te mets Gauthier à ta disposition, tu voudrais le faire pour quand ? » Eventine était presque tenté de s’en tenir au mariage de Caleb et point barre… mais il manquait de temps. Hors de question que d’être lâche cette fois-ci. « Moi, et bien c’est moins agréable comme sujet. Disons que j’ai une insuffisance cardiaque… qui date. Je l’ai mise très longtemps de côté, trop longtemps sans doute, et elle me rappelle à l’ordre. Possible qu’un de ces quatre je doive être opéré. Et si c’est le cas, j’ai envie que tu sois ma personne à prévenir en cas d’urgence. Je n’ai pas envie de demander à quelqu’un d’autre… »

« Je savais que tu me trompais ! J’espère que tu as honte de toi ! J’aurais du le comprendre la première fois où je t’ai vu avec cet archer… Tant pis, je vais devoir me consoler dans les bras féminins de Thaïs ! Par ta faute, la communauté homosexuelle d’Harvard a perdu un étalon » rétorquais-je avant de me marrer. Putain que ça faisait du bien de relâcher la pression et de jouer aux cons avec un pote. Un très bon pote, un excellent même puisqu’il me fournissait une arme de chantage. « That’s my boy ! » m’exclamais-je en lui serrant la main de bon cœur avant de tout simplement lui soumettre ma faveur. Je me sentais un peu mal à l’aise n’ayant pas pour habitude de réclamer de l’aide ou de profiter d’une amitié pour obtenir ce que je désirais mais il s’agissait de mon mariage comme le souligna très justement Eventine. « L’idéal serait dans un mois ! Je dois encore m’arranger pour trouver un traiteur etc. Te marie jamais, c’est une organisation de tarés ! » râlais-je même si ma petite sœur m’avait fait une liste de choses à faire pour m’aider mais elle était longue comme le bras que j’en étais désespéré. « Attends… C’est quoi ces conneries ?! » fronçais-je les sourcils alors qu’Ev’ m’annonçait la pire nouvelle de mon existence. C’est pas possible, tout le monde passait sur le billard autour de moi. « Tu sais que je dirais oui à tous les yeux bandés mais c’est quoi cette histoire ? Tu es malade depuis quand ? »

« La communauté homosexuelle va prendre des kilos en se consolant dans le chocolat ! » répliqua-t-il aussitôt non sans le gratifier d’un sourire cabotin, comme à chaque fois qu’il sortait une connerie plus grosse que lui. « Pour me marier faudrait que je trouve la femme, à moins que je ne marie avec moi-même, ce qui impliquerait moins d’organisation! Mais un mois, c’est noté. Gauthier sera sûrement d’une bonne aide pour ton orga, justement… pour ça que je le mets à ta disposition » reprit-il, ne souhaitant même pas savoir combien d’heures Caleb devait s’user les yeux rien que sur les propositions de traiteur. Pour l’heure, il avait d’autres chats à fouetter, comme de s’exprimer sur un pan relativement secret de sa vie et qu’il aurait préféré conserver dans l’ombre. « Depuis ma naissance. Il ne faut pas se demander pourquoi dès que je fais un jogging, je mets des jours à m’en remettre ! J’ai juste besoin de ton oui Caleb, c’est tout. »

« Que veux-tu c’est une grande perte pour l’humanité mais surtout pour les femmes ! C’est le jeu ma pauvre Lucette » répliquais-je avant de me marrer comme un con. « T’es quand même un ami comme on en fait plus ! Libère toi quand même un… Tu as un mois pour te trouver une cavalière… Genre, baisse la tête et ramasse la première malheureuse qui se pavane à tes pieds pour attirer ton attention » rigolais-je, adorant faire chier mon meilleur pote sur toutes les nénettes lui courant au cul et elles étaient nombreuses. Toutefois, le temps était à l’orage ou plutôt aux mauvaises nouvelles. Eventine m’apprenait pour sa maladie avant de me demander d’être la personne à prévenir en cas d’urgence. « Je ne sais même pas pourquoi tu me poses la question, tu sais très bien que c’est oui d’office ! Avec Aidan, tu sais que c’est à la vie à la mort ! Lowell for life mec »