June & Aidan ☼ I'm the flame and you're the fire

La journée était plutôt morose, de ces gris qui vous laissent endormi. Aidan s'était pourtant extirpé comme il avait pu de son lit, mais son état d'esprit était aussi sombre que le ciel qu'il avait contemplé en se levant. Il n'avait pas grand projet de sa journée hormis d'aller crayonner quelques esquisses dans le parc une fois un café avalé. Il n'avait pas goût du travail en atelier et lui préférait bien souvent le plein air. Même si les conditions climatiques ne le permettaient pas toujours. Le Peintre savait que ce serait là une des dernières journées où il pourrait profiter de l'extérieur et malgré son humeur terne, il était décidé à en profiter. Sa main attrapa la poignée du Luna Caffe dans lequel il avait ses habitudes. C'était donc sans un regard à l'environnement du commerce qu'il se dirigea vers le comptoir, ses cheveux en bataille, ses lunettes sur le bout du nez vêtu d'un simple débardeur et d'une chemise, ainsi que d'un jean dans lequel il chercha quelques billets au niveau de la poche arrière. « Salut. » balbutia-t-il « Un  Latte Grande s'il te plaît. » Le serveur enjoué était entrain d'amorcer la conversation lorsqu'un rire attira son attention parmi son marasme de réflexions engluées. June.  

Il y a une semaine j'avais tout simplement récidivé, j'avais recommencé de faire le genre de bêtise que je m'étais pourtant interdite. J'avais couché avec Aidan, je m'en voulais vraiment, le pire dans l'histoire était sûrement que j'avais des sentiments pour ce type. Oui ce type qui s'en fou de tout et qui se fou surtout de moi. Je lui en veux énormément de jouer avec moi de la sorte, il sait depuis le départ que je suis entrain de m'attacher à lui mais il ne veut qu'une chose de ma part : du sexe. Cela me fait de la peine car je sais qu'on pourrait partager pleins de choses, hier j'avais reçu quelques messages de sa part et je n'avais pas été adorable avec lui, je l'avais plutôt envoyé baladé comme il le faisait constamment avec moi. Mais je souffrais plus que lui, il m'avait demandé de l'oublier et ce serait tellement plus facile si c'était si simple. Ce matin un garçon de ma promo m'avais proposé d'aller boire un café, j'avais entendu dire qu'il voulait coucher avec moi car il avait eu écho de mes performances sexuelles. Soit je n'avais pas du tout envie de coucher avec lui mais j'avais quand même accepté le café histoire de me changer les idées. Nous étions allés dans son café préféré et nous avions été servis, nous étions entrain de parler d'un de nos cours lorsqu'Aidan arriva. Je murmurais alors à mon collègue : « Embrasse moi... ». Je vis bien qu'il ne comprenait pas grand chose mais il tentait tout de même sa chance avant que je change d'avis, je sautais sur l'occasion pour prolonger le baiser et me faire remarquer de la part d'Aidan, il voulait jouer, on allait jouer. 

C'était le son de sa voix qui l'avait attiré. Autrement et surtout en matinée comme présentement il aimait à déambuler au milieu d'un nuage d'indifférence. Ce rire, il se rendait compte qu'il l'appréciait particulièrement. Toute cette histoire entre June et lui le contrariait. D'autant plus depuis les textos de la veille, l'échec se martelait en écho à ses tempes. Et il n'aurait su trop dire ce qu'il se passa en lui lorsqu'il la vit avec ce garçon. Un espèce de bouillonnement qui se mit à déborder quand elle posa sa bouche sur celle du demeuré. Oui, il ne valait guère mieux à ses yeux... mais elle non plus finalement. Où était ses beaux discours d'engagement lorsqu'elle échouait à la première difficulté dans les bras d'un autre ? Il lui offrait son amitié puisqu'il ne pensait pas avoir d'amour, pour n'importe qui finalement... et même si elle le méritait sans aucun doute, il s'en pensait incapable naturellement. Mais elle poussait ses limites, l'emmenait là où elle ne voulait pas aller et lui reprochait après coup. « Comment tu vas ? » les paroles du serveur le détournèrent un peu de sa fureur.  « Bien, je te remercie et toi ? » Il n'écoutait même pas ses réponses. Il hésitait entre partir sans un mot ou dire sa façon de penser... Non il n'allait pas être gentil et ça ne lui ressemblait pas vraiment. Il s'approcha de la table des deux tourtereaux et y déposa son gobelet. « Salut June, je vois que ça va pas si mal finalement ? » Son sourire s'étala provocant. « J'étais pas si difficile à oublier tu vois. » Sa main s'empara du Latte et il but une gorgée, ne prêtant que peu attention à la chaleur de la boisson.

J’avais accepté l’invitation du jeune homme de ma promotion certainement pour m’éviter d’être seule car je savais que seule, je déprimerais. Maintenant j’étais entrain de boire un café avec lui, autant dire que ça ne me passionnait pas. Il était gentil mais beaucoup trop intéressé par le sexe pour me plaire véritablement. Aidan été arrivé et la première chose que j’avais fait c’était faire en sorte que le jeune homme en face de moi se jette sur moi. C’est ce qu’il c’était appliqué à faire, alors qu’Aidan arrivé vers moi avec une remarque assassine. Contrairement à ce que je pensais ça semblait plus l’embêtait qu’il ne semblait le prétendre qu’en effet je fasse semblant d’avoir tourné la page aussi vite. Je demandais au collègue de ma promotion : « Excuse moi, tu pourrais aller me chercher des petits cakes dans le magasin d’à côté, je crois que nous avons des choses à régler avec Aidan… ». Le jeune homme parti laissant la place à Aidan qui allait très probablement pouvoir s’assoir en face de moi car il n’y avait aucun magasin de cake dans le quartier. Je lui répondis sèchement : « A quoi tu joues Aidan, tu sais très bien que ce que tu dis est faux… ». Oui, au fond de moi j’avais mal et qu’il prétende le contraire me vexer.  

Le pauvre garçon qui l'accompagnait fût vite envoyé aux oubliettes. Il ne savait pas trop pourquoi elle avait réagit de la sorte ni lui d'ailleurs, le fait est qu'ils se retrouvaient de nouveau seuls tous les deux. Leur relation aurait tout à fait pu être rebaptisée l'histoire sans fins. Un rictus d'ailleurs se peignit sur son visage à cette réflexion et aux mots de June. C'était presque involontaire mais son visage s'assimilait bien à une tête à claques. « Je ne crois que ce que je vois et en l’occurrence, tu ne semblais pas en proie au désespoir. Du moins pas à celui que je pensais. » Ultime provocation de sa part, et il en essuierait peut être la trace, mais les mots s'étaient enfuis de sa bouche, téméraires affronteurs, révélateurs d'une pensée bien plus sombre. Sur ses paroles, il prit son gobelet et porta le café à sa bouche, ne sachant si il devait partir ou attendre une nouvelle réponse de June.

Je soupirais lorsqu’Aidan me dit qu’il ne croyait qu’en ce qu’il voyait, pourtant j’étais bien mal en ce moment. Il m’avait fait du mal et j’avais l’impression que je recommencerais à faire n’importe quoi vu la façon dont il me traitait. J’aurais cru qu’avec le temps il finirait pas s’attacher et qu’on serait heureux ensembles mais non, il jouait avec moi et c’était tout. Je lui répondis alors : « Y a une autre expression qui dit : Que les apparences sont trompeuses, ça te dis quelque chose ? ». Oui, j’essayais d’être honnête envers lui. J’aurais pu faire la fille qui s’en foutait complètement de lui mais non, je n’en avais plus la force je crois. Je lui demandais alors, agressive : « Mais qu’est ce que tu t’en fous Aidan au juste ? Hein, t’es jaloux ou quoi ? ». Je savais qu’il n’était pas jaloux car il ne tenait pas à moi mais son expression le laisser penser. Je ne sais pas pourquoi il le faisait à part pour m’embêter.  

Il savait même pas pourquoi il était là à lui faire la leçon. June lui avait fait comprendre qu'il pouvait aller se faire foutre lors de leur dernière conversation, et jusque là il s'était contenté de faire ce qu'elle lui avait demandé mais de la voir avec ce mec ça l'avait énervé. Il comprenait pas vraiment pourquoi c'est pas comme si il réfléchissait souvent à ses actes, mais lorsqu'elle lui parla de jalousie, une amertume lui vint en arrière gorge. Il était tout sauf un mec jaloux, il se foutait habituellement de ce que pouvaient bien faire les nanas avec lesquelles il fricotait, mais c'est juste que là après ses grands discours sur une histoire sérieuse et engagée, il avait comme l'impression qu'elle se foutait de sa gueule. « Trompeuse ou pas trompeuse, c'est pas la question, mais pour une fille qui veut quelque chose de sérieux, tu me sembles pas prendre le bon chemin si tu vois ce que je veux dire. » Un connard, un parfait connard voilà ce qu'il était. « Mais après tout, comme tu le dis si bien, ce que tu fais ne me regarde pas. On est rien l'un pour l'autre pas vrai ? » Inutile de continuer davantage, les embrouilles c'était pas son truc et avec June ça finissait toujours de la même façon. « Sur ce bonne journée. » Et sans un mot de plus, il tourna les talons. Fuir c'était sans doute encore la meilleure option...

J’avais embrassé ce garçon juste pour le tester je crois. A croire que ce test avait fonctionné puisqu’il semblait s’énerver de la situation, me disant que mon attitude ne faisait pas sérieuse. Il me faisait d’ailleurs une réflexion en me jugeant, je trouvais ça un peu fort, je ne l’avais jamais jugé je crois même si j’avais toujours trouvé qu’il courrait trop après les filles. Je n’avais jamais rien dit mais lui ne s’en priver pas et cela m’énerver. Je me mis à lui répondre très sèchement : « Je voulais que chose de sérieux avec toi parce que je tenais à toi…mais je me suis trompée alors à quoi bon essayer de construire quelque chose maintenant… ». Je lui en voulais terriblement c’est vrai et je ne comprenais pas pourquoi il m’avait dit que nous n’étions rien l’un pour l’autre. C’est lui qui avait souhaité qu’on ne soit pas engagé dans quelque chose, je lui rappelais alors : « C’est toi qui a souhaité ça Aidan, toi seulement… ». Oui je lui mettais toute la responsabilité sur le dos mais j’avais raison. Je poussais un peu la chaise à l’aide de mon pied avant de lui demander : « Tu veux pas rester ? ». Peut être qu’il pouvait accepter, si jamais il avait envie de perdre un peu de temps.  

Il savait même pas comment il s'était retrouvé dans ce pétrin. On dit souvent qu'il vaut mieux tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler et il aurait mieux fait de prendre conseil de l'adage. Effectivement, il avait dit à June ne rien vouloir de sérieux, alors qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire qu'elle fourre sa langue dans la bouche du premier venu ? Peut-être que le simple fait qu'elle lui martelait d'être attachée à lui, éprouver quelque chose de différent à son égard lui avait donné l'illusion d'être différent, digne d'intérêt finalement. Au fil du temps, il s'était pourtant persuadé d'être un branleur comme un autre, mais la réalité était bien là face à ses yeux aujourd'hui. Implacable. Il avait merdé et c'était trop tard de toute façon. « Tu as raison. J'aurais mieux fait de me taire, tu m'as dit de sortir de ta vie et je me la suis ramené. » Ça ne servait à rien, eux deux, c'était que de la prise de tête et ça pouvait être tellement simple en même temps par moments. Sans doute pour cela qu'ils s'accrochaient. Preuve est lorsqu'elle lui tendit la chaise alors qu'elle venait juste de le jeter. « Il ne vaut mieux pas je crois. » lui répliqua-t-il apaisé et parfaitement sincère. « Tu ferais mieux de rattraper ce gars, il est sans doute plus digne d'intérêt. » Et il lui tourna le dos et attrapa la porte. « Bye June. » De l'air, il lui fallait de l'air.

Je ne savais pas ce qu’Aidan ressentait pour moi mais à mon avis pas grand-chose. Pourquoi avait-il fait tout ça, pourquoi avait-il fait semblant d’être complice avec moi, pourquoi m’avait-il dit qu’on pourrait rester amis ? Je crois que toutes ces questions j’avais préférés les oubliées. Pour me dire que les choses allaient passer et que bientôt je penserais plus à lui. Mais non, Harvard n’était pas assez grand, il ne pouvait pas passer ailleurs, fallait qu’on se recroise. De toute façon c’était une utopie de penser qu’on se verrait plus puisqu’il était dans la même confrérie que moi. Je ne savais même plus quoi lui répondre, j’étais abattue mais en même temps je ne voulais pas le laisser partir. Oui, j’étais bête. Je me sentais idiote. « Pourquoi il ne vaut mieux pas ? Tu en as envie toi ou pas ? ». C’était ça qui comptait en fait, est-ce qu’il voulait qu’on passe un moment tout les deux ou pas, le reste je m’en fichais. Il reparlait du garçon avec qui j’étais précédemment mais ça aussi ça n’avait pas d’importance pour moi, ce n’était pas lui que je voulais. « Mais non, je m’en fiche de ce gars Aidan, tu le sais très bien ! ». J’avais presque envie d’ajouter, que c’était lui qui importait et pas les autres. Je le regardais une dernière fois avant qu’il me tourne le dos : « Tu es sûr que tu veux pas un café ? ».