give me another chance | Kaleigh & Elie

« C'est faux. Je ne peux pas tout te dire. J'aimerais, crois-moi. J'aimerais vraiment... »
Je lâchais sa main et passait les miennes dans ma chevelure, avant de les mettre devant ma bouche et de les laisser reposer sur mes cuisses. Je ne comprenais pas Kaleigh. Quel était l’intérêt de me confier qu’elle avait un secret si elle faisait ensuite de faire machine arrière et se rétractait ? Me torturer encore plus ? Est-ce que c’était une nouvelle façon pour me rendre folle ? Ne se doutait-elle pas que ces mots risquaient de me ronger si ils n’étaient pas suivis d’un aveu ? Je ne savais plus quoi dire, plus quoi faire. Je la regardais, alors qu’elle fuyait mon regard. Que pouvais-je de toute façon faire à part attendre ?
« J'ai besoin de savoir quelque chose Elie. […] Est-ce que tu regrettes de m'avoir trompée ? »
Pourquoi revenait-elle sur une question, comme une rengaine alors qu’il était question d’elle quelques secondes auparavant. Est-ce pour brouiller les pistes ?
« Je veux dire... quand tu as dit... […] ... que tu as pris ton pied... tu regrettes de m'avoir trompée, je le sais. Mais est-ce que tu regrettes d'avoir couché avec... […] Lui. […] Je t'en prie, j'ai besoin de savoir. »
Ses yeux à présent me fixaient alors que sa voix tremblait et n’était plus qu’un souffle lorsqu’elle prononça son dernier mot. Je fermais les yeux et me laissa retomber en arrière sur le lit. En image, je nous revis avec William ce soir là, nous cherchant, nous embrassant, nous déshabillant le plus rapidement possible pour pouvoir profiter du contact avec la peau de l’autre, avant d’atteindre l’extase ensemble, à l’unisson. Mes regrets étaient apparus après, une fois l’adrénaline retomber. Car pendant qu’il me touchait, je n’avais pensé égoïstement qu’à mon propre plaisir. Pourquoi Kaleigh cherchait-elle à savoir ce détail qui semblait si insignifiant à mes yeux ? L’alcool désinhibe c’est bien connu, nous lève nos barrières, mais ne change pas fondamentalement notre comportement. Donc non, je ne regrettais pas de l’avoir laissé me faire du bien. Sans lui, j’aurai été seule, et la rupture avec Kaleigh aurait pu être encore plus dure à supporter. Je pris une grande inspiration, et rouvrit à nouveau les yeux.
« Ce que tu me demandes n’a rien à voir avec notre conversation, tu le sais ? »
Je laissais passer quelques secondes, puis tourna ma tête vers elle pour voir sa réaction.
« Si tu ne me dis pas vraiment ce qu’il se passe ensuite, je partirais. Parce que je ne peux pas m’empêcher de chercher ce qui te rend comme ça actuellement. Ca va me rendre folle. »
Sans m’asseoir complètement, je relevais juste un peu le buste en m’appuyant sur mes avant-bras.
« Tu connais déjà la réponse, elle était dans ta question. J’ai eu du plaisir, donc en un sens, je regrette et pas de m’être laissée allée avec lui.»

(Invité)

Ses mots m'arrachèrent un sanglot. Mes yeux restèrent étrangement secs, comme vidés, épuisés. Certes il aurait été facile de lui en vouloir pour cette confession, mais il était plus difficile d'admettre que je fus soulagée de l'entendre d'elle car je n'aurais eu de cesse de la titiller pour qu'elle l'admette. Ceci ne m'empêcha pas de sentir mon cœur se briser à nouveau, comme lorsque j'avais découvert qu'elle m'avait trompé. Je me redressais, m'asseyant sur mon lit, me sentant comme une étrangère dans ma propre chambre. « C'est tout ce dont j'avais besoin de savoir. » Elie-Sara avait été franche, honnête, je devais l'être à mon tour. Je devais mettre fin à ce mensonge, je devais arrêter avant que l'une d'entre nous ne puisse s'en remettre, avant que je ne puisse m'en remettre mais j'avais la curieuse impression que je n'en serais pas capable, de toute manière. Comme si j'étais définitivement et profondément liée à elle, comme si j'avais au plus profond de moi trouvé ma perle rare. La personne capable de faire chavirer mon cœur, capable de tout. « Il y a quelqu'un d'autre dans ma vie, Elie. » Dis-je, m'apprêtant à me faire insulter de tous les noms, pourquoi pas giflée. Ses quelques mots m'avaient écorché la bouche, comme s'ils me faisaient à moi aussi du mal, comme si j'avais été trompée, dupée moi-même. J'hésitais à prononcer les derniers, peur de l'achever, peur d'achever notre relation, la trouille bleue de la voir détaler, pourquoi pas me demander mon bracelet et l'arracher de mes mains lorsque je serais allée le cherche dans le placard et repartir avec en me fusillant de ses yeux meurtris. Je ne pouvais me résoudre à lui faire ça, à lui causer de la peine. Tout comme je ne pouvais me résoudre à lui mentir, à lui cacher ce secret qui me rongeait jusqu'au point de m'en faire perdre la tête. Je compris alors que mon incapacité de garder ce secret venait du fait que j'étais réellement tombée amoureuse d'Elie et qu'il ne s'agissait pas là de vulgaires sentiments, d'un quelconque attachement aussi profond soit-il, il s'agissait de l'amour, du seul, du vrai... j'explosais soudainement. « L'homme que tu as vu le soir de la Saint-Valentin s'appelle Sasha. C'est mon petit-ami. » Le feu me montait aux joues, je ne savais soudainement plus ce que j'attendais d'Elie, d'un nous deux dont la perspective s'effaçait à mesure que les minutes passaient et finalement de la vie elle-même. Ma sexualité avait remis beaucoup de choses en cause, notamment la perception que j'avais de moi, mes relations interpersonnelles et avait expliqué pas mal de réactions et de choses s'étant passées dans ma vie. Je ne pouvais quitter Sasha, tout comme je ne pouvais laisser partir Sara. Je regrettais de l'avoir trahie, je regrettais d'être entrée dans sa vie. Je regrettais tout. De l'histoire du ballon à aujourd'hui. Tout. Absolument tout.

(Invité)

« Il y a quelqu'un d'autre dans ma vie, Elie. »
« Quelqu’un d’autre ? »
Incrédule, je me contentais d’abord de bêtement répéter sa réponse. Avant de tilter. Quelqu’un d’autre dans sa vie, le secret avec lequel elle me tenait en haleine depuis dix bonnes minutes. Quelqu’un d’autre dans sa vie ? Depuis notre rupture ? Ce qui expliquerait en partie son attitude de ses derniers jours. Ou depuis plus longtemps ? D’un coup, des tas choses me traversèrent l’esprit, des « indices », des petits détails qu’elle cachait, sur lesquels elle était évasive .. non, ce ne pouvait être possible, elle n’avait pas pu jouer double-jeu depuis deux mois. C’était humainement impossible.
« L'homme que tu as vu le soir de la Saint-Valentin s'appelle Sasha. C'est mon petit-ami. »
« Pardon ? »
Mes yeux s’écarquillèrent et je me relevais complètement, abasourdie, choquée. C’était le pire scénario possible. Et d’un coup, une rage sourde monta en moi. J’avais la mâchoire serrée. J’avais eu en quelque sorte une « bonne » intuition le soir du bal quand je les avais vus, la façon dont il la tenait, dont elle le regardait … dire qu’elle m’avait assuré, les larmes aux yeux, que ce n’était qu’un ami. Qu’elle m’avait dit que je me faisais trop d’idées, que je déduisais des choses fausses. Dire qu’elle m’avait reproché d’avoir passé une nuit, une seule nuit, avec un autre homme, alors qu’une rupture avait été évoquée deux heures plus tôt. Dire que j’avais culpabilisé des jours entiers pour elle, car je savais qu’elle souffrirai de mon aveux. Dire que je l’avais suppliée de me laisser la revoir, de me laisser une chance. Tout ça n’avait été que comédie, elle avait joué avec moi. Mais il était hors de question que je m’abaisse à me battre avec elle, je n’avais aucune envie d’une scène de ménage, aucune envie de cris, ni de larmes.
« Je ne sais même pas quoi dire là … »
J’étais incapable de rester assise. Je me levais, faisant les cent pas dans la pièce, réfléchissant à la meilleure chose à faire, soupesant mes sentiments pour elle, pesant le pour et le contre de la moindre phrase que je pourrais prononcer …

(Invité)

Je ne m'attendais pas à ça. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle se lève pour faire les cent pas, je ne comprenais pas sa réaction, je ne comprenais pas son attitude. Au fond, j'aurais préféré qu'elle me gifle, qu'elle m'insulte, ça m'aurait au moins conforté dans l'idée que je comptais pour elle, encore pour elle assez pour déchainer sa colère. Là, j'avais seulement peur, peur qu'elle ne s'arrête de marcher pour éclater de rire et me dire que à quel point j'étais une belle salope, une menteuse de première et que sa nuit avec son inconnu avait été plus merveilleuse que toutes nos nuits passées ensemble, qu'elle se rendait maintenant compte qu'elle ne m'aimait plus, qu'elle s'était leurrée. Ou que le peu de sentiments qu'elle éprouvait pour moi ne s'évanouisse sous cette bombe. Me levant à mon tour, je n'osais l'approcher, prenant la parole, chose que j'allais peut-être regretter plus tard. « Je suis désolé, je suis vraiment, vraiment désolé. » Que pouvais-je ajouter ? Que je ne comprenais pas moi-même ? Que je ne comprenais pas ce qui m'avait poussée à agir de la sorte ? Que je l'aimais malgré tout ? J'ignorais même si elle croirait mes dires, si elle accorderait du crédit à mes excuses. « Je n'sais pas pourquoi j'ai fais ça Elie. » Dis-je simplement, sentant la pression monter comme pressée par un compteur qui, au bord de l'explosion finirait par faire partir Elie en claquant la porte. « J'sais juste que... que... » Ses mots avaient toujours du mal à sortir de ma bouche, je me sentais si petite, si intimidée face à eux, si nerveuse à l'idée qu'ils n'aient plus d'impact ou ne soient plus partagés, peur de ses mots eux-mêmes. « Je t'aime Elie. S'il y a une chose à laquelle tu dois croire c'est ça, je t'aime Elie-Sara. » Je m'approchais doucement. « Je t'aime vraiment. » Je sentais ma voix déraillé, entrecoupée par des sanglots silencieux qui me prenaient à la gorge. Je la regardais dans les yeux, m'attardant dans les siens, essayant de croiser une dernière fois son regard, essayant de déceler son amour pour moi, essayant malgré tout de rêver à un éventuel nous futur. « Crois-moi. » J'attrapais sa main, voulant à tout prix un contact physique avec elle, espérant de tout mon cœur qu'elle ne me repousse pas, me demandant ce que j'attendais de cette conversation car je ne pouvais ni rester avec elle ni lui dire au revoir avant qu'elle ne m'adresse au moins un sourire, avant d'être sûr... sûr de quoi ? Qu'elle m'aimait toujours pour simple consolation.

(Invité)

« Je suis désolée, je suis vraiment, vraiment désolée. »
Je n’avais pas envie de la regarder, mes yeux restés rivés au sol. Depuis une semaine, je croyais que j’étais la pire personne au monde. Honteuse, je n’avais pas donné signe de vie à William alors qu’il était une personne vraiment charmante que j’aurai appréciée revoir en tant qu’ami. Je dormais mal depuis près de 10 jours, laissant les cernes s’accumuler sous mes yeux, cernes que j’avais de plus en plus de mal à dissimuler. Et elle avait quelqu’un d’autre dans sa vie. Elle m'avait menti en me regardant droit dans les yeux.
« J'sais juste que... que... […] Je t'aime Elie. S'il y a une chose à laquelle tu dois croire c'est ça, je t'aime Elie-Sara.»
« Et lui ? Il ne connait pas mon existence non plus je pense … »
Pourquoi je commençais aussi à penser à ce garçon comme à une autre victime ? Il était la personne qui m’avait en quelque sorte pris Kaleigh, qui pouvait s’afficher en publique avec elle, l’embrasser par surprise en sortant des cours, l’inviter au restaurant et au cinéma, et lui tenir la main, car ça passait tellement mieux de son point de vue qu’un couple lesbien. J'étais jalouse, horriblement jalouse. Il n'avait pas intérêt à me croiser dans les prochains temps.
« Tu éprouves quoi pour ce Sasha ? »
Je regrettais cette question à peine posée. Je n’avais pas envie de savoir. Je ne voulais rien savoir de lui.
« Non réflexion faite, ne dit rien. Je ne veux pas savoir. »
Je ne m’étais pas aperçue qu’elle s’était levée du lit et qu’elle s’était approchée de moi. Elle me surpris en prenant ma main dans les siennes. Elles étaient glacées, tout comme les miennes.
« Crois-moi. ».
Je supportais son contact quelques seconds avant de m’en dégager et de lui tourner le dos. Je n’étais pas partageuse. J’étais exclusive quand j’étais en couple. Je ne pouvais pas la prendre dans mes bras si je me demandais si elle l’avait vu avant, si ils s’étaient enlacés, embrassée. Si ils avaient fait l’amour. J’en eu la chair de poule à l’image que je devais parfois passer après lui, me couchant là où il était allongé quelques heures plus tôt, embrassant les lèvres qu’il avait déjà embrassées. Son histoire, ce n’était pas juste une nuit. Ce n’était pas qu’une erreur de parcours …
« C’est moi ou lui ! »
Je ne voulais pas pleurer. Je ne voulais pas me montrer faible. Et pourtant, mes yeux recommencèrent à me piquer, et de grosses larmes roulèrent sur mes joues encore roses et humides des précédentes.

(Invité)

« Et lui ? Il ne connait pas mon existence non plus je pense … » Je déglutis. Si Sasha l'apprenait, sa réaction serait beaucoup plus virulente que celle d'Elie, j'avais soudainement peur de m'en prendre une, de me prendre bien plus qu'une gifle. Peur qu'il casse tout dans la chambre parce qu'on avait pour habitude de se lancer des choses à la figure. Peur qu'il ne se mette à fouiller partout dans la pièce pour trouver un indice qui le mènerait à la personne qui avait volé mon cœur. Je l'imaginais déjà chercher dans mon placard et y trouver le magnifique bracelet qu'Elie m'avait offert, le jeter par la fenêtre, pourquoi pas l'emporter avec lui et le jeter sur la route avant de l'écraser avec sa voiture... dans quel pétrin m'étais-je fourrée bon sang. « Tu éprouves quoi pour ce Sasha ? Non réflexion faite, ne dit rien. Je ne veux pas savoir. » Je décidais d’honorer sa demande, même si je savais qu'une femme qui se respecte se contredit et attend peut-être inconsciemment qu'on lui réponde. Ce que je ne pouvais faire. Je ne pouvais pas lui dire ce que je ressentais pour Sasha, d'une parce que parler de lui l'aurait tout bonnement blessée et ensuite parce que je ne savais moi-même pas ce que je ressentais pour lui. Le fait de m'imaginer rompre avec lui m'était impossible, j'en déduisais alors que je devais l'aimer, d'une manière ou d'une autre même si la réponse était beaucoup moins évidente que lorsqu'il s'agissait d'Elie. « C’est moi ou lui ! » L'ultimatum était tombé. Sanglant, implacable. Je ne pouvais choisir, tout comme je ne pouvais la choisir elle. J'ignorais pourquoi parce que je savais pertinemment que les sentiments que j'éprouvais pour la jeune étudiante étaient bien plus forts que ceux que je ressentais pour le jeune homme.

Me tournant le dos, je sentis un sanglot me secouer toute la poitrine, l'air semblant manquer dans la pièce. « Elie... » J'arrivais à peine à prononcer son nom, à peine à rester debout tant mes jambes semblaient faibles, pareilles à de la guimauve, menaçant de céder d'une seconde à l'autre. « Elie, ma Elie, je suis tellement désolé. Tu n'imagines pas à quel point... je t'en prie... » Je me décidais à lui faire face, découvrant ainsi son doux visage baigné de larmes. Je fus choquée pendant un temps, témoin de la douleur que je venais de causer à mon petit ange, responsable de sa peine et de ses larmes que jamais je n'aurais voulu voir couler, que jamais je n'aurais voulu provoquer. « Je t'aime. » Je me rapprochais et fus prise d'une pulsion que je ne désirais aucunement réprimer, agrippant à sa taille et l'embrassant avec fougue.

(Invité)

Pour moi, les gens qui sortaient avec deux personnes à la fois, et qui arrivaient à faire qu’aucune des deux ne s’en rende compte, ça n’existait que dans les films. Pas dans la réalité. Comment n’avais-je pas pu voir ça ? Comment avait-elle fait pour que jamais je ne la croise en compagnie de ce Sasha ? Je comprenais maintenant pourquoi elle ne voulait pas qu’on se voit en public en journée, qu’on prenne des repas ensemble. Pourquoi on ne se voyait que dans sa chambre ou dans la mienne quand nos colocataires respectives étaient absentes. Je me sentais bête. Je me sentais trahie. Je me sentais impuissante, en colère, perdue. Trop de sentiments se mêlaient en quoi. J’aurai pu me recroqueviller sur moi-même, dans un coin et me prendre la tête entre les mains. Kaleigh me parlait, j’entendais sa voix, mais je n’arrivais pas à comprendre les mots qu’elle prononçait. Ma vue se brouillait de plus en plus, car les larmes n’arrêtaient plus de couleur, j’étais comme une fontaine.
Kaleigh se mit face à moi, mais je refusais de la regarder, préférant fixer ses chaussettes blanches que son visage. J’aurai peut-être du, car je ne la vis pas approcher, et fut surprise quand elle m’attrapa par la taille et se jeta sur mes lèvres. Passé les premières secondes de surprise, où je la laissais faire sans pour autant entrouvrir mes lèvres, je posais mes mains sur les siennes pour lui faire lâcher prise, et l’éloigner. Je n’avais pas envie d’elle. Ou plus. Je n’avais pas envie qu’elle m’approche, qu’elle me touche. J’avais besoin de prendre mon temps, de réfléchir, et surtout, je voulais qu’elle choisisse, vraiment. Car je ne pouvais pas être avec elle si elle était avec quelqu’un d’autre. Ce serait devenir sa complice, et je me refusais à cela.
« Tu dois choisir Kaleigh ... »
Ma gorge était serrée, j’arrivais à peine à parler, ma voix ressemblait à un murmure.
« Parce que je ne peux pas ... »
Je m’éloignais d’elle, m’appuyant sur le mur le plus éloigné. Le plus sage aurait surement été de prendre mes affaires et de partir. Partir le temps de me calmer, de reprendre mes esprits, de réfléchir à tête reposée. Mais quelque chose me retenait ici, mes sentiments pour elle. Il aurait été tellement plus simple qu’ils disparaissent d’un coup suite à la révélation de ce secret, mais ils étaient toujours là, et c’étaient bien eux qui étaient responsable de ma crise de larmes.

(Invité)

Me repoussant, je sentis mon cœur se briser à nouveau alors qu'elle s'éloignait, s'appuyant contre le mur. Elle ne me regardait pas, m'évitant visiblement. Ses larmes coulaient le long de ses joues, silencieuses et je la dévisageais en guise de réponse, coupable et impuissante. Si j'étais capable de lui faire du mal, étais-je dans la capacité de la rendre heureuse ? Pouvais-je inverser la tendance ? Après une telle épreuve, un tel secret, étions capable de surmonter ça ? Ou mes infidélités reviendraient-elles sur le tapis dès que nous aurions un différent. Je passais la main dans mes cheveux, pensant que ce geste habituellement relaxant me calmerait mais en vain, j'abandonnais. « Elie... » Je ne peux pas, c'est impossible. Je ne peux quitter Sasha, pour une raison que j'ignore et que tu ne pourrais comprendre, pensais-je, jugeant néanmoins que la réponse en plus de ne clarifier aucunement la situation ne ferait qu'empirer les choses. J'aimais Elie. Et j'aurais aimé que cela suffise. Que notre amour puisse subvenir au reste, que nous n'ayons à nous soucier que de ça. « Franchement... » Dis-je, la raison prenant à nouveau le pas sur le reste, sur mes sentiments. Je m'approchais lentement vers elle afin de ne pas la brusquer, de peur qu'elle ne veuille plus m'écouter et décide de s'en aller. « Est-ce qu'on peut surmonter ça ? Est-ce qu'on en sera capable ? C'est la question que je me pose... » Certes ça ne répondait pas à son interrogation mais peut-être que sa réponse répondrait à la mienne. Je n'étais cependant pas en mesure de négocier, d'attendre d'elle quelque chose mais j'hésitais finalement à rompre avec Sasha car je m'imaginais perdre Elie et je ne me voyais plus respirer, rire, vivre sans elle. C'était stupide. J'étais indépendante. Et je détestais ça. « Je t'aime Elie, j'aurais aimé que ça suffise... » Inconsciemment et dans mes paroles, je lui donnais une réponse. Peut-être était-ce parce que le mot rupture ne voulait pas sortir de ma bouche, parce que la quitter était jusqu'à présent trop abstrait à mes yeux mais que la voir me repousser me faisait prendre conscience de la chose, qu'un nous ne tenait plus qu'à un fil. Je me demandais si rompre avec mon petit-ami serait la solution, si Elie arriverait à passer à autre chose et à m'aimer, tout simplement ou si elle finirait par mettre un terme à notre relation, ne pouvant gérer ce que je lui avais caché.

(Invité)

« Est-ce qu'on peut surmonter ça ? Est-ce qu'on en sera capable ? C'est la question que je me pose... »
La même question me trottait dans la tête, auquelle s’ajoutait celle où je me demandais si je pouvais lui faire confiance à nouveau, si je ne deviendrais pas jalouse dès que je la verrais regarder quelqu’un d’autre, si je n’allais pas commencer à la suivre, à épier ses moindres mouvements et à me rapprocher d’un état de folie. Je fermais les yeux, espérant que si le noir m’entourait, au moins mes sanglots se calmeraient. Car j’étais pour le moment incapable de prendre mon souffle. Je crois que j’avais besoin d’une preuve que je pouvais lui faire confiance, quelque chose qui m’assurerait qu’elle ne serait qu’à moi, que personne ne se mettrait entre nous.
« Je crois …. » Il fallait que je me calme. « Je crois que j’ai besoin d’un peu de temps … » J’espérais que quelques jours suffiraient car d’un coup, j’avais peur qu’elle se dise que je ne voulais pas d’elle si je tardais trop à me décider, à ne garder que ce Sasha si je n’arrivais pas à prendre une décision. Je pris une grande respiration.
« Mais je suis incapable de te partager. »
Si elle me voulait, si elle m’aimait, si elle tenait vraiment à moi, il ne devait y avoir que moi dans sa vie. Ou je me ferais une raison, et j’essayerai de l’oublier. Car je n’avais pas changé d’avis, je ne me voyais pas devenir une simple amie pour elle, il y avait trop de passion quand on se voyait, trop de sentiments pour que je ne la vois que pour sagement et prudemment papoter. Comme je le pus, j’essayais d’essuyer mes larmes et je me tins face à elle. Elle n’avait pas bougé, et me regardait. Elle devait attendre une autre réponse, un oui ou un non. Mais j’étais pour l’instant incapable de la lui donner.
« Je sais que je tiens énormément à toi, c’est la seule chose dont je suis sure pour le moment. »
Je m’approchais de la porte. Elle me suivit du regard. J’enroulais à nouveau mon écharpe autour de mon cou, et passa mon manteau. Je me rendis compte que je n’avais pas remis mon gilet, et qu’il était toujours posé sur la table de nuit. J’hésitais, mais je le laissais là où il était.
« Je … tu … »
Je ne trouvais rien à dire. Rien qui aurait pu l’aiguiller sur mon état d’esprit actuel. Je ne savais pas si j’allais la rappeller. Si j’avais envie qu’elle me recontacte. Si j’avais besoin d’une semaine sans nouvelle, ou si j’allais avoir envie de la voir demain.

(Invité)

Ses dernières paroles me rassurèrent quant aux sentiments qu'elle éprouvait pour moi, me donnant l'espoir, aussi infime soit-il, qu'elle puisse me pardonner ou bien accepter un jour ce que je lui avais caché et que nous puissions aller de l'avant, encore fallait-il que je me décide. Si seulement elle pouvait lire dans mes yeux, voir à quel point je l'aimais, à quel point elle comptait à mes yeux parce qu'il n'y avait à mon sens rien de plus vrai dans ma vie que mon amour pour Elie, et c'était bien ce fait qui bouleversait mon existence. J'ai longtemps cru pouvoir contrôler l'intégralité de ma vie, pouvoir continuer à gérer mes relations interpersonnelles mieux que quiconque. La vie à Harvard bousculait toutes mes convictions, ma façon de vivre et de penser. Il y avait d'abord eu Apple qui m'avait fait vraiment réaliser que j'avais un penchant pour les femmes, mon ex petite-amie qui m'avait dupée, Andy que je n'avais pas su gérer et désormais Elie que je n'avais pas non plus réussi à maîtrise, j'avais l'impression que ma vie partait en fumée, qu'elle s'évaporait entre mes doigts et je me demandais pourquoi cette relation remettait tout en cause. Elle remuait des choses que j'étais loin de comprendre, qui me mettait la tête en l'air, les pensées en vrac et me perturbaient au point de faire des infidélités à mon petit-ami. Lui aussi était une victime. Lui aussi ignorait que je l'avais trompé. Et je craignais bien plus sa réaction que celle d'Elie si je lui annonçais que je le choisissais lui, au détriment d'elle. Au détriment de ses deux courts et pourtant si merveilleux et chargés en émotions, mois.

La laissant remettre sa veste et son écharpe, j’oubliais qu'elle avait laissé son gilet sur ma table de nuit, plié par mes soins, trop occupée à l'admirer du regard, à la contempler peut-être pour la dernière fois de ma vie, comme la femme aimante que j'étais, comme la traîtresse que j'étais. Je décidais de ne pas l'empêcher de prendre la sotie, nous avions toutes deux besoin de réfléchir, j'en avais grandement besoin et je voulais aussi attendre de voir la suite des choses, avoir la certitude que l'on pourrait traverser ça ensemble avant de faire quoi que ce soit. Ma manière de raisonner était injuste et égoïste mais qu'y pouvais-je ? Je ne supportais de perdre l'un comme l'autre car tous deux avaient une place bien spéciale dans mon cœur. « Comme tu veux. » Répondis-je dans un murmure avant de balader inconsciemment mon regard sur la porte, non pas parce que je l'invitais à me quitter mais parce que je pensais au moment inévitable ou elle franchirait le seuil de ma chambre, ou je verrais peut-être pour la dernière fois sa silhouette quitter mon couloir, ma maison et peut-être... mon cœur. A cette pensée, je sentis mes jambes flancher à nouveau et je m'approchais d'elle assez rapidement pour la prendre de court, saisissant son visage entre mes mains, lui offrant un baiser, peut-être le dernier.

(Invité)

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