When the world has dealt its cards If the hand is hard, together we'll mend your heart.

Je n’ai pas vraiment compris ce que je foutais là en fait, à flâner dans les couloirs d’Harvard à la recherche d’un truc à faire. J’aurais pu rentrer à ma chambre, j’aurais pu aller faire un tour dehors, les cours étaient finis et je restais dans l’enceinte du bâtiment cherchant quelque chose à faire, pourtant il n’y avait rien, absolument rien. Je pensais même être la seule, mais ça c’était avant, avant que j’entende cette musique qui émanait de je ne sais où, je me dirigeais suivant le son, curieuse de savoir qui pourrait écouter ça dans Harvard alors que les cours sont finis. J’arrivais face à de grandes baies vitrées, les yeux écarquillés face à ce spectacle qui se présentait à moi. Il sautillait partout, dansant comme un fou avec un parapluie plein de peinture dans sa main. J’l’observais me retenant de rire. J’savais que les artistes étaient tous un peu taré mais j’pensais qu’il y avait une limite à cette folie. J’poussais la porte sans faire de bruits, m’appuyait contre le mur et le regardait faire. Rory avait dû prendre un truc pas net pour en arriver là. En calbut un parapluie à la main, jetant de la peinture un peu partout, nouvelle façon de repeindre la salle polyvalente sans doute. « hm .. hm … » J’toussotais afin de lui faire comprendre qu'il n'était pas seul, j'n'allais pas le laisser encore plus longtemps faire ce truc vraiment très étrange, j’avais bien ris mais lui avait perdu toute crédibilité à mes yeux. « Rory … ? J’peux savoir c’que tu fous en fait ?... »

J’l’observais de haut en bas, me pinçant les lèvres, c’était quand même assez drôle de le voir dans cette posture. " Je colle une énorme Quenelle à ma prof d'art ça se voit pas? " j’arquais d’abord un sourcil, ce mec était fou, complètement fou, je mêlais mon rire au sien, nous rions ensemble comme des cons. " Et toi qu'est-ce que tu fous encore ici à ct'heure ci? Ça m'étonnes de toi...»... Ça c’est de la question, si seulement je le savais j’aurais pu lui répondre, mais hors là j’errais sans but, sans raison, j’haussais les épaules « Rien, j’ai pas envie d’rentrer.. J’sais pas pourquoi … enfin. » et voilà paye ta honte Cheyenne j’passe un peu pour une fille étrange, enfin pour le coup il ne peut pas m’dire que j’le suis, ça serait juste pas crédible alors j’relève la tête et j’souris. J’ai même pas relevé le mini-pic qu’il m’a lancé, j’le remarque maintenant, j’mets mes mains sur mes hanches, arque un sourcil et le regarde avec insistance « Ça t’étonnes ? Et... j’peux savoir pourquoi quand même ? » Bien sûr que je ne suis pas vexée, bien sûr que ça m’fait plus marrer qu’autre chose, bien sûr que ça me touche pas mais j’fais semblant parce que c’est tellement plus drôle de faire croire à quelqu’un qu’on lui en veut.

Lui autant que moi savait que cette mine de boudeuse n’était qu’une supercherie, supercherie qui ne marchait pas le moins du monde d’ailleurs, à croire qu’il commençait à me connaître, à mon plus grand regret. Il s’approchait de moi me pointant avec son pinceau, non pas sur moi cette peinture j’me crispais baissant la tête pour qu’il ne m’en mette pas sur le visage. " Ca m'étonnes du faites que toi ! Mangeuse de Shokobon à temps partiel oses venir me reluquer en plein boulot alors que d'habitudes tes dehors avec danser et chanter pour finir tes mois! Alors HEIN! Excuse-moi de douter de ta venue ici! " J’relevais la tête vers lui et me prenait un coup de pinceau sur la joue, putain je n’l’avais pas vu venir celle-là, il l’avait compris, il s’était mis à courir à travers la pièce je lui courrait après, tel des gosses. « Alors toi, attends que j’t’attrape ! » J’courrais derrière lui avec l’espoir de lui faire payer son geste, mais vous savez ce qu’on dit ; l’espoir fait vivre, enfin là il fait plutôt souffler l’espoir. " De Toute façon tu m'auras jamais! Tu es trop faible face à mon intelligence suprême " Mais il le faisait exprès l’enculé ! J’courais encore plus vite que lui, j’étais à deux doigts de l’avoir « Crois-le ! Intelligence suprême mon cul » je riais et j’essayais de courir en même temps, putain quel con ce mec ! Je n’ose même pas imaginer ce qu’aurait pu penser quelqu’un qui serait passé par là nous voyant courir l’un après l’autre. PUTAIN DE CLOPES, un jour j’arrêterais, ouais, ouais, un jour, mais pas demain, j’ai encore un paquet plein, l’excuse à deux francs qui veut bien dire qu’on est pas prêt d’arriver. Le rire n’aidait pas, plus je riais plus je manquais d’air. J’m’arrêtais telle une faible boudant à moitié « Tu fais chier, ça part j’espère » disais-je en me frottant la joue à deux doigts de m'arracher la peau.

J’aimais pas perdre, je détestais ça mais fallait se faire à l’idée, je ne pouvais pas rivaliser face à Rory. " Fumer c'est mal tu sais?" putain combien de fois par jour on me la sortait celle-là, aucune idée sans doute beaucoup trop, j’haussais les épaules en rétorquant « Fumer ça détend ! » un petit sourire sur mes lèvres. Il s’approchait de moi, j’eus un mouvement de recul, j’le sentais pas le con, qu’est-ce qu’il préparait encore ? J’fermais les yeux, me crispant, essayant de le repousser, j’voulais ne pas me retrouver avec un autre truc sur la gueule. Au final, j’sentais un bout de tissu humide, "Bouge pas! je vais te l'enlever, c'est de la gouache ca part facilement à l'eau.." J’ouvrais les yeux, il était là à enlever la peinture qu’il m’avait mis sur le visage quelques minutes auparavant, c’était un peu gênant, j’évitais d’le regarder dans les yeux, dirigeant mon regard vers le plafond, le mur face à moi, le parquet, la fenêtre de l’autre côté de la pièce, j’étais fuyante et c’était flagrant. Mais je n’avais jamais été à l’aise lorsque j’étais proche des hommes et ça depuis que j’avais découvert ce truc qui faisait de moi quelqu’un de bizarre. J’devais m’attendre à une connerie, c’était Rory, le mec le moins sérieux au monde, un con qu’on adore, un con qui nous fait marrer, le con cool quoi. " Mangeuse de Phallus !! " J’écarquillais les yeux très surprise, la dernière chose à laquelle je m’attendais venant de sa part. Il savait que je n’étais pas le genre de fille normale, il connait mon « problème » si on pouvait appeler ça comme ça, je savais pourtant que son « mangeuse de phallus » n’était pas censé me faire de la peine et pourtant ça m’pesait tellement de ne pas être comme tout le monde. J’faisais mine de rire à sa connerie pour ne pas péter l’ambiance.

J’avais voulu sourire pour cacher le sentiment que j’avais à l’intérieur de moi pourtant j’avais gardé cette sale manie d’inscrire mes émotions sur mon visage bien souvent sans que je puisse y faire quoi que ce soit. Il posait sa main sur ma joue, il m’avait grillée, sourire à la con qui marche jamais quand il faut " Excuse-moi je n’aurais pas du te dire ça... ", J’esquissais un sourire « T’en fais pas. » J’savais bien qu’il n’avait pas dit ça dans le but de me faire du mal, j’suis même sure qu’à cet instant il m’voyait comme une personne normale et au final ce n’était pas si mal. J’pense que la vérité était que je n’avais jamais pu me faire à cette idée. " Tu sais Cheyenne, ce n'est pas une tare ce que tu es... je l'ai été je le sais mieux que qui conque... Sache que un jour tu trouveras la personne! La personne qui te redonnera gout à ce qu'on appelle les sentiments ! " J’souriais une nouvelle fois, ça m’gênais un peu de parler de ça, je n’étais pas le genre de fille à parler de ses problèmes, des choses qui la tracassait alors quand quelqu’un m’en parlait j’avais tendance à sourire sans rien dire évitant d’offrir à l’autre une raison de continuer cette discussion. « Sinon, tu m’expliques ce que t’étais en train de foutre à part la quenelle à ta prof, t’avais l’air à fond dans c’que tu faisais. » Je n’étais pas des plus douée pour les changements de conversation soudain mais merde.