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"Mais putain, tu penses que j’suis con au point de rien comprendre Rox’ ? Tu penses que j’suis pas capable que savoir que t’as eu ta vie jusqu’à aujourd’hui ?" Je sens la colère qui manque de l'étouffer et moi, je le regarde, terrifiée. Toute ma rage contre Caleb, contre moi-même, toute cette colère ne compense pas cette terreur que j'ai d'avoir tout foutu en l'air. Je secoue la tête, toujours plus vigoureusement, pour arrêter Callum qui parle, qui gronde et pour chasser les larmes qui perlent au coin de mes yeux, je veux pas qu'il me prenne pour une gamine pleurnicheuse. Je veux être forte, assumer mes conneries, mais je peux pas, je sais pas faire. "Et je l’sais que t’es pas parfaite ! Tu ronfles, t’as la fâcheuse manie de toujours repasser derrière moi quand je range quelque chose ici, tu t’lâches pas parce que t’as toujours peur que ça affecte Jane, tu laisses toujours des cheveux dans la salle de bain, tu changes jamais le rouleau de papier toilette quand il est fini.. ! Je l’sais tout ça et ça m’a jamais empêché de tomber amoureux d’toi Roxanne !" Je me retrouve dos au mur, coincée par Callum qui me domine de sa hauteur. "amoureux de toi." Mon coeur cogne tellement fort contre ma poitrine, il pourrait la trouer, la déchirer. Je l'aime, lui aussi, il m'aime. La première fois qu'il me le dit. Je me hais de lui faire ça. De nous faire ça. Je fais semblant d'être une adulte, de pouvoir protéger ceux que j'aime mais je nous entoure de mensonges, je fuis et je nous fais du mal. Ses mains viennent se poser sur mes joues, il doit sentir mes dents claquer sous ses doigts. Il secoue la tête. Est-ce que j'arriverai un jour à retrouver sa confiance ? Je te mens pas Callum cette fois, promis je le ferai, promis on le verra plus jamais. Je veux y croire. Je pose ma main sur son torse qui n'a jamais semblé si menaçant. Mes yeux embués tentent de trouver les siens mais il secoue la tête toujours plus violemment, je me mords la joue furieusement. "Non. Caleb on le verra toujours parce que c’est le père de Jane. Alors règle ton divorce avec lui, trouvez un système de garde qui vous convienne à tous les deux, une pension, n’importe quoi, j’m’en fou ! Mais règle cette histoire une bonne fois pour toute et rappelle moi quand tout sera terminé !" Je me fige, je sais pas quoi dire. Il me laisse seule. Seule dans mes mensonges. La main de Callum qui entourait mon visage se retire, je sens son buste s'échapper de sous mes doigts. Je le vois se glisser dans la cuisine, à travers l'embrasure de la porte. Moi je reste plantée là, pantelante, raide contre le mur. Ma tête est en bordel, que des émotions contradictoires. Je veux que tout ça s'arrête, que Callum sorte de la cuisine et puis me dise que toutes ces histoires, on les réglera ensemble. Si on fait ça à l'amiable, Caleb et moi, ça ne sera l'affaire que de quelques pénibles semaines. Et Callum me reviendra. Peut-être que c'est ça, le plus heureux scénario. A l'amiable ? Mais je peux pas, pas à l'amiable, je peux pas. Je respire profondément, pour calmer mon coeur emballé et mon souffle saccadé. Je pousse la porte de la cuisine et je vois Jane qui gazouille dans les bras de Callum. Les voir tous les deux, le petit bonheur de ma vie, ça manquerait de me faire changer de décision, de pas lui dire ce que je m'apprête à lui dire. Pour préserver ce petit bonheur. "T'as raison, faut que je sois totalement honnête avec toi.Je suis désolée, je veux pas que tu... J'ai confiance en toi." Je suis figée dans le cadre de la porte, j'ose pas m'approcher ni de Jane, ni de lui. J'ai les yeux rivés sur le bout de mes pieds, je peux pas croiser son regard. "Je peux pas faire ça à l'amiable, Callum. Je veux le faire, le divorce, mais pas à l'amiable. Je peux pas." Je me mords les lèvres pour arrêter le tremblement de mon menton qui fait sauter ma voix. "Il est mauvais. Il faut qu'il parte loin, qu'il ne revoit jamais Jane, parte très loin." Mes jambes tremblottent, je me fouille, tente de rassembler tout le courage en moi. De sortir ces mots qui m'arrachent les lèvres : "On peut le traîner devant la justice, faire un procès, avoir la garde pleine, on peut le faire." Je dis on. On, c'est pas Callum et moi. Pas Jane et moi. On, c'est moi et Roxanne Bates-Edelstein, celle qui s'est pris des coups de poing dans le visage et de genoux dans le ventre. La femme de Caleb. "Il... Il m'a battue, avec ses poings, frappée... Je me suis enfuie..." Je finis par lâcher, d'une voix tremblante, à moitié étouffée, à peine audible. Une grimace déforme mon visage, mon front se plisse, puis je suis secouée par des sanglots. Je cache mes yeux de ma main, morte de honte, tenant à peine sur mes jambes dans le cadre de la porte. Ces mots, même après les avoir répétés en boucle dans des groupes de soutien, ces mots font mal. Comme un coup dans la mâchoire.
désolée pour le pavé
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