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Au moins avait-il le don de me faire sourire, oubliant de ce fait la morosité d'une soirée à laquelle je n'avais jamais eu plus envie de m'éclipser. « Je suppose que tu as raison. » M.&A. était une entreprise qui avait la côte. Florissante et mystérieuse tant au niveau des divers domaines dont elle se préoccupait que du fonctionnement en lui-même. Sans entrer dans l'illégalité, Amoun avait fait en sorte que tout ce qui concernait son empire n'en sorte jamais, et encore moins sur le devant de la scène. Avait-il quelque chose à cacher ? Cela ne m'étonnerait pas, mais étant encore nouveau, je n'en savais pas plus que ce que mon associé m'en avait précisé. Quoiqu'il en soit, j'étais comme...indifférent aux commentaires de Jon. Loin de me mentir concernant le danger que je pouvais désormais courir à visage découvert, ma préoccupation principale était la santé et le bonheur de Lily. Les miens semblaient n'avoir plus aucune importance, comme si je les avais définitivement oublié de l'équation. En outre, quiconque s'attaquerait à moi risquait également les foudres de mon associé, et bien que cela me fasse presque sourire de le reconnaître, je déconseillerai à quiconque, agents, tueurs à gage, et même Dieu à personne, de se frotter à un homme tel qu'Amoun D. Montou. Si d'ordinaire l'inquiétude de Jonathan flattait mon ego, il pouvait s'apercevoir ce soir de mon aveuglement. Ce fut tout juste si je compris son allusion. Focalisé sur la grande salle, je ne réfléchissais plus à rien d'autre qu'à ce couple qui m'exaspérait au plus haut point, délaissant les fondements même de la logique.
Soudain, la question fut posée, et je gardais intérieurement une réponse qui pourtant, me brûlait les lèvres. Immobile, contemplant devant moi celle pour qui j'avais décidé de tout plaquer, un soupir s'échappa à peine de ma gorge alors que mes mâchoires se contractaient. Je détestais devoir mentir à Jon. Il était plus qu'un ami à mes yeux, comme un père. Mais je savais aussi quels risques je prenais si l'homme en venait à apprendre toute la vérité. « J'en avais assez de reproduire les mêmes erreurs. J'avais besoin de changements. » Ma tête s'abaisse, je vide les ultimes gouttes de champagne avant de lâcher avec gravité. « Je l'ai fait pour une femme. » Le sujet était clos. Après avoir lâché une telle bombe, je savais que Jon me poserait des questions, ou tenterait de deviner de qui il pouvait s'agir, peut-être même douterait-il de ma parole puisqu'il ne m'avait jamais vu au bras de qui que ce soit depuis Catherine. Tant pis. Tant mieux. Je n'avais pas menti, j'avais simplement omis certaines parties de l'histoire. En attendant, les raisons évoquées par Jon me firent presque rire alors que je jetais un coup d'oeil à Amoun qui se pavanait et faisait rire son public à quelques mètres de là. « Je laisserais les galas et les courbettes à mon associé. C'est son domaine de prédilection, après tout. » rectifiais-je avec humour. Force est de constater cependant qu'il n'avait pas tort. Cette vie inconnue à laquelle j'aspirais aujourd'hui divergerait totalement de celle que j'avais vécue. Pour le meilleur...ou pour le pire. « Désolé de te décevoir, mais j'ignore tout de sa vie depuis les ...deux derniers mois écoulés. » soupirais-je en fronçant les sourcils. Soit, depuis notre séparation officieuse pour faire court. Quoiqu'il en soit, surpris que Jon ait remarqué notre bonne entente à Lily et à moi, je remerciais les cieux que son observation n'ait pas poussé plus loin son raisonnement. Peut-être était-ce une forme de déni si on y réfléchit bien. Etre aveugle parce qu'on refuse de voir l'évidence. Ecoutant attentivement, un sourire fugace étreint mes joues à l'annonce de ce que je qualifierais de « promotion » dans sa carrière d'artiste. J'ai toujours pensé qu'elle y parviendrait. Et je n'en étais que plus heureux que son avenir professionnel débuta ici à Boston, plutôt qu'à New-York là où sa mère avait si souvent tenté de l'entraîner. « Oh, en es-tu sûr ? Un grand gaillard comme toi doit avoir quelques cartes dans sa poche qui sauraient facilement effrayer même les plus courageux, j'en suis persuadé. » plaisantais-je en faisant implicitement référence à ses manières pas toujours très délicates d'aborder les sujets, et les gens.
« ...depuis Sergueï. » terminais-je à sa place en plissant le front. Evidemment que j'étais au courant, et il le savait pertinemment. Depuis la fois où ces tueurs nous avaient poursuivi, mettant la vie de Lily et la mienne en danger, lorsqu'il avait dû la protéger, Jon savait forcément. Pourtant, nous n'en avions jamais discuté, comme si le sujet si sensible soit-il, relevait également d'une forme de...faute professionnelle. Une erreur de parcours. « Elle m'en a brièvement parlé. » précisais-je calmement. « Mais je ne crois pas qu'elle sache toute la vérité au sujet du décès de ce jeune homme, est-ce que je me trompe ? » finis-je par lui demander en le fixant droit dans les yeux. Sans l'accuser de quoique ce soit, mes intentions étaient pourtant claires : la vérité éclaterait un jour ou l'autre, alors tant qu'à porter ce fardeau, je veux bien t'aider à soulager son poids en te prêtant l'oreille, au moins pour ce soir. Quant aux fréquentations de Lily, ses doutes, que je perçus très distinctivement m'obligea à contourner la question, encore une fois. « Si elle avait une relation avec cet O'Brien ? Oui, tu seras le premier au courant, promis. » Avec l'égyptologue certes, avec les autres peut-être si tant est que certains détails me déplaisaient. Avec moi...non. Car si je venais d'apprendre que l'âge du compagnon de sa fille représentait tout pour Jonathan, le problème résidait ailleurs. Ce n'était tout simplement pas à moi de lui annoncer ma relation – fanée certes quoique mes sentiments pour elle furent toujours aussi vivaces – avec Lily. Lorsque, et si la jeune femme était prête à le faire, un jour ou jamais, je respecterai son choix et la soutiendrai, quoiqu'elle décide. En attendant, je me taisais, affichant un sourire exagéré à mon ami afin qu'il comprenne que la simple hypothèse de ma jalousie était totalement ridicule à concevoir, alors qu'intérieurement je parvenais non sans peine à contrôler les battements d'un cœur devenant peu à peu d'une sensibilité que je jugeais grotesque et démesurée. Fort heureusement, la conversation changea rapidement d'objet. « Je doute que vous vous entendiez mais soit, je veux bien te le présenter si c'est ce que tu souhaites. » soupirais-je en lui jetant un regard en biais. Plus insistant à propos de sa conquête rencontrée par hasard quelques mois auparavant, je l'observe sans oser l'interrompre ou intervenir dans un débat que je jugeais stérile. Personnellement, ma réaction avait été plus poussée que celle qu'il avait eue auprès de Susan. Lorsque j'avais appris ma paternité, j'avais ni plus ni moins manqué d'étrangler Grace, sa mère. Bon, il faut avouer aussi que Paris m'avait raconté une partie de son enfance, ce qui avait largement compté dans la balance. Quoiqu'il en soit, je comprenais parfaitement la réaction de Jon, autant à l'égard de Susan qu'envers Alysse. Manquant de préparation, et vu le caractère rebelle de la jeune femme, il ignorait sans doute comment l'approcher.
Gordon et Margaret dans la place, je lève les yeux au ciel en me demandant quelle affreuse nouvelle allait encore venir gâcher ma journée, alors que ma mère, fidèle à sa nature protectrice et bout-en-train, grondait gentiment Jon avant de courir vers Lily. « Margaret. » Elle avait toujours préféré qu'on l'appelle par son prénom qu'en la qualifiant de « madame ». Elle disait avoir l'impression de rajeunir ainsi. Nous laissant ainsi régler nos comptes en posant un dernier regard équivoque à son tendre époux, ce fut Lily qui la réceptionna quelques secondes plus tard, surprise sans nul doute de voir débouler une tornade blonde au milieu de la piste. « Ma chérie, vous êtes radieuse, et cette robe...elle vous donne un charme fou ! » commença la matriarche en retenant ses mains pour mieux étirer ses bras et ainsi mieux l'observer sous toutes les coutures. Une main qui ne manqua pas de se poser sur sa joue, y apposant une caresse furtive comme l'aurait fait une mère avec sa fille. « Ce vieux truc ? Oh, merci mon chou, c'est adorable. Oui Gordon doit être quelque part. Lorsque je l'ai laissé, il discutait avec votre père. Charmant personnage lui aussi. Si seulement il arrêtait de m'appeler « madame Austen » je suis certaine que nous nous entendrions à merveilles ! » s'exclama Margaret avec un grand sourire conquis avant de jeter un bref coup d'oeil à Jorah pour se retourner finalement vers lui, tendant délicatement sa main dans sa direction. Entre temps, je la rejoignais, plus parce que la compagnie de mon père me hérissait les sens que par volonté réelle. Posant d'abord les yeux sur Jorah, je déviais ensuite vers Lily, laquelle j'admirais discrètement en appréciant tout particulièrement sa toilette, et ses iris d'émeraude dans lesquels j'avais si souvent voyagé. « Lily... » murmurais-je à mon tour sans sourire, mais sans pour autant montrer nul signe extérieur de colère. A vrai dire, elle s'était envolée à l'instant même où je m'étais approché. Je la fixais maintenant avec une attention nouvelle. Comme un spectateur qui observe un tableau, cherchant à deviner les intentions de l'artiste, étudiant chaque détail pour les graver dans sa mémoire et soupirer devant une beauté qu'il ne saurait jamais reproduire à l'identique. « Monsieur O'Brien. Merci beaucoup monsieur, c'est un plaisir de faire votre connaissance. » minauda ma mère en souriant de toutes ses dents à l'Egyptien. « Mon chou, vous avez de la chance et beaucoup de goût pour la gent masculine. Ce garçon est tout à fait charmant...et terriblement attirant. » chuchota t-elle ensuite à l'oreille de la jeune femme en passant un bras attentionné autour de sa taille. Ne vous y trompez pas. Si Margaret Austen possédait de nombreux défauts, parmi lesquels son instant surprotecteur qui avait tendance à étouffer son entourage, son incapacité à voir le mal qui pouvait exister en chacun de nous, ou encore son caractère impétueux voire excentrique, elle n'en était pas moins une femme qui prenait grand soin de ceux qu'elle estimait digne de faire partie de ses fréquentations. Son intérêt pour Lily ne fut donc motivé que par l'envie de l'aider, de la conseiller, de l'écouter en règle générale, car elle avait compris depuis longtemps, au détour de nos discussions à propos de la mère biologique de Lily, que cette dernière avait sans doute manqué d'une épaule sur laquelle s'appuyer en cas d'incertitudes. Une épaule éminemment féminine.
Tout au long de leurs échanges, je n'avais pas loupé une miette du spectacle, comme si mes pieds et mon attention refusaient catégoriquement de s'occuper autre part. Ce n'est que lorsque Jorah m'interpella que je détournais les yeux, non sans une forme de lassitude muette. « Les nouvelles vont vite par ici. Puis-je savoir d'où vous tenez cette information ? » répondis-je, presque avec sarcasme. Les journalistes. Je ne voyais que cette bande de rapaces pour faire circuler un renseignement aussi rapidement. A moins que ce ne soit Amoun lui-même qui ait décidé de jouer les pigeons messagers. Quoiqu'il en soit, sa question me laissa perplexe l'espace de quelques secondes. Et je n'eus pas le temps de confirmer ou non, que Lily intervint, visiblement attérée d'apprendre la nouvelle de ma reconversion professionnelle. « Depuis que tu es devenue...restauratrice au musée de Boston...attends...oui je crois que ça s'est passé plus ou moins à la même période. » répliquais-je ironiquement. Pouvait-elle m'en vouloir alors qu'elle-même m'avait caché sa nouvelle profession ? Non, certes non. Sauf qu'à défaut de lire de la colère, de la déception voire de la tristesse dans les yeux de la jeune femme comme je m'y attendais alors, ce fut la peur qui s'imprima dans mon esprit, alors que mes sourcils s'incurvaient tandis que je tentais d'identifier ce qui pouvait bien avoir causé une telle réaction chez la jeune femme. Ce ne pouvait être le métier en soit. Etre entrepreneur vous faisait prendre bien moins de risques que la profession d'agent secret. Mais alors quoi ? La réponse vint quelques secondes plus tard. Pardon ? Elle avait...discuté avec Amoun ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? Le geste de Jorah, qui soit dit en passant ne m'avait pas échappé, combiné à la nouvelle ne fit que renforcer mes doutes. Je connaissais Amoun, mieux que n'importe qui. Je savais de quoi il était capable. C'était donc ça. Ce regard qu'il m'avait jeté lorsque Lily avait fait son entrée tout à l'heure. Il avait compris. Sans rien dire, sans oser, il avait compris et avait décidé d'agir. Sans m'en informer. Et connaissant son tempérament et celui de Lily, je me doute que l'échange, s'il fut fructueux pour l'Egyptien, dût être terrible à endurer pour la jeune femme. « Mais qui est cet homme que tout le monde semble connaître ? Ton père lui-même m'en parlait lorsque nous sommes arrivés ! » s'étonna alors ma mère en me regardant, incrédule. Gordon le connaissait...comme c'est étonnant. Encore un autre secret de polichinelle je présume. « Veuillez m'excuser. »
Terrifiante, dérangeante et insidieuse, ma colère venait de monter en flèche à l'évocation de son prénom. Comment avait-il osé ? Je n'avais pas besoin de plus d'informations pour comprendre qu'il l'avait menacée. Psychologiquement sans doute pour commencer, c'était sa méthode d'approche favorite. Et si la démonstration ne suffisait pas, le couperet tombait. Un, puis deux, trois, jusqu'à ce que... non, pas cette fois. Sûrement pas avec Lily. Marchant à vive allure en traversant la salle avec assurance et détermination, mes doigts agrippèrent son avant bras aussitôt que je le vis, l'obligeant à me suivre en le traînant jusqu'aux toilettes pour hommes, sans faire attention aux convives dont certains causaient déjà sur la scène qui venait d'avoir lieu sous leur nez. « Oh oh, doucement cow-boy, je peux savoir où on va ? » Une fois certain qu'il n'y avait personne dans les toilettes alentours, je me retournais pour lui faire face tandis qu'il s'occupait de rajuster sa veste et ses manches devant le reflet que lui renvoyait le miroir. « Franchement, si tu avais envie d'un tête à tête en amoureux, il te suffisait de le dire trésor. » susurra t-il avec un sourire carnassier alors qu'un coup de poing phénoménal et inattendu atteignait au même moment sa mâchoire inférieure. « Ne t'avise plus jamais, de menacer Lily-Rose Hopkins, tu m'as bien compris ? PLUS JAMAIS, AMOUN ! » grognais-je en attrapant son col pour le plaquer contre le mur de derrière. « Et je te défends de prétendre le contraire, je sais que tu lui as parlé tout à l'heure. J'ignore ce que tu lui as dit, mais elle était terrifiée. Je te jure que si tu l'as touché... » Un violent coup de poing dans les côtes venait de me faire reculer de plusieurs pas en arrière. Instinctivement, mes bras se rapprochèrent de mon visage, prêts à lutter. De son côté, l'Egyptien n'avait plus rien de l'homme charmant et séducteur d'il y a quelques minutes. Son regard s'était assombri, ses poings refermés sur eux-mêmes, son front se plissait à vue d'oeil. En fait toute son attitude dénotait celle d'un animal prêt à fondre sur sa proie et à la déchiqueter jusqu'à ce que mort s'en suive. « Tu sais très bien que si je l'avais touché, elle ne serait plus là pour en parler. » souligna très justement l'homme en frottant sa mâchoire douloureuse. « Oui, je lui ai effectivement touché deux mots, à cette petite. A propos, qu'y a t-il entre vous au juste ? Ton comportement me prouve que cette fille si ordinaire te tient à cœur, alors pourquoi est-ce cet Egyptologue qui l'accompagne ce soir ? Papa et maman se seraient-ils disputés ? » se moqua t-il en haussant les sourcils. « Je ne plaisante pas, Amoun. Je t'interdis de t'approcher d'elle. » repris-je en gardant les yeux rivés sur lui. « Très bien, je vais te faire une promesse, si ça peut te faire plaisir Law'. Je te promets que tant que cette fille ne te fera pas souffrir, il en ira de même pour moi, cela te convient ? Ca me paraît raisonnable, non ? » souffla t-il en repoussant mes deux bras en position de défense pour poser une main sur mon épaule. « Ma vie privée ne te concerne en rien. » rétorquais-je en grondant. Ce qui évidemment, eut pour effet de le faire rire comme si cette simple idée était inconcevable et absurde. « Que tu crois, chéri. Tu sais bien que je ne peux m'empêcher de m'intéresser de trèès près à ta vie privée. Intime même, devrais-je ajouter. » souffla t-il près de mon visage, avant de fronçer les sourcils et de poser une main contre ma joue. « Veux-tu que j'appelle un médecin pour tes côtes ? » Cette fois, il paraissait sincère, cherchant déjà à tâter la peau sous mon costume alors que je le repoussais vivement en arrière. « Je n'ai pas besoin de toi, je vais très bien. Va t-en. » soufflais-je en m'installant derrière un lavabo pour me passer quelques gouttes d'eau sur le visage. « Très bien, c'est toi qui vois. En attendant, passe une bonne soirée. Oh, et une dernière chose...si je ne peux pas m'approcher de ta copine, essaie au moins d'avoir la ligne privée de son cavalier. J'aimerais beaucoup m'entretenir avec lui. Qui sait, nous aurons peut-être des intérêts communs tous les deux... » me souffla t-il en riant de son allusion perverse avant de disparaître.
Une fois dehors, respirant un bon coup, il lui fallut à peine deux secondes pour retrouver sa bonne humeur, et de chercher du regard celui de Lily jusqu'à ce qu'il le trouve, s'en imprègne et de son index et du majeur, de lui glisser un baiser du bout des lèvres avant de rire aux éclats et de s'éloigner pour de bon à l'autre bout de la salle.
AVENGEDINCHAINS
@Lily-Rose S. Hopkins
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