Appel masqué (a) : Cole ► Lucky

Je le sentis à son souffle, au rythme de sa respiration qui changea, au tremblement dans sa voix lorsqu'elle reprit la parole. Aussi grinçant que j'avais pu essayer d'être en évoquant son robinet et la possibilité qu'elle avait de se laver le mains pour ensuite raccrocher, ça ne marchait pas pour diluer le reste, l'aveu à demi mot de la vraie raison de mon appel : le manque d'elle, l'envie de l'entendre. Je devinais ses sanglots à travers mon portable et ma gorge se nouage, alors qu'un sourire triste étirait mes lèvres en entendant ses paroles suivantes. Elle se justifiait en évoquant qu'elle n'avait pas pu rester impassible, à attendre que je la quitte, alors elle avait pris les devants en me larguant... Elle n'avait plus confiance. Mensonges et magouilles en tout genre l'avaient usée. J'avais trop tiré sur la corde, sûrement. Comme toujours... Elle annonça alors son intention de raccrocher et je ne pus m'empêcher de la stopper : 《Attends Lucky...》 Laisse la raccrocher, t'as proféré tes petites menaces, t'as fait ton grand méchant loup, tu l'as fait pleurer t'as gagné... 《Tu vas salir ton téléphone...》 soufflai-je sur un ton plus doux, le sarcasme ayant disparu de ma voix, cherchant juste un nouveau prétexte pour prolonger encore un peu cet appel. 《 C'était vrai... Ce que je t'ai dit, sous cette douche pendant le spring break, c'était vrai. Les laisse pas te faire douter de ça. Me laisse pas te faire douter de cela.》 Parce que je me connaissais... Je savais ce que je comptais faire, ce qu'elle risquait d'en penser. Mais c'est justement parce que ça avait compté que j'avais autant ce désir de vengeance.

Au moment où j'allais raccrocher, il me stoppa en me demandant d'attendre et moi je remettais rapidement le combiné sur mon oreille pour écouter une dernière fois. Vraiment, on avait l'air pathétique tous les deux. Nous n'étions pas capables de préserver notre amour, au lieu de ça, nous nous rendions encore plus malheureux. J'avais tellement mal que je savais que cette décision était la plus difficile et la plus insurmontable qu'il me soit donné de prendre de toute ma vie. C'était une excuse, le chocolat sur mes doigts... Tu l'sais. Avouais-je mélangeant mes pleures et un petit rire. Puis lorsqu'il m'avoue avoir été sincère sous cette douche durant le spring break, je craque une nouvelle fois, mais en silence. Il me demande de ne pas le laisser me faire douter de ça. Je reste un instant prise dans ce tourbillon de doute, dans cette voix qui me murmure que j'ai toujours voulu les entendre de sa bouche et aujourd'hui que je peux enfin, tout s'acharne contre nous. Qu'est-ce que je peux lui répondre ? Quand la peur m'envahit. An-han... Bonne nuit Cole. Et mon doigt glisse enfin sur la touche raccrocher. Je serre mon portable dans ma paume en baissant ma tête, fondant en larmes et me lâchant complètement, car jusque-là, je me suis trop retenue à jouer les indifférentes.