walk the line (alaska)

Rester ou partir ? C'était la grande question du moment. J'avais même fait une liste sur papier des pour et des contre. Pourquoi partir ? Parce que j'allais être maman, que je n'avais plus avoir autant de temps devant moi, que je ne pouvais plus donner de mon temps à ma confrérie, que je ne faisais plus la fête autant qu'autrefois. C'était tellement différent aujourd'hui que plus le temps passait et plus je pensais à mes premiers pas dans la vie active. Pourquoi rester ? Les mathers étaient ma deuxième famille, ceux qui m'avaient adopté il y a quelques années de ça et bordel, je tenais tellement à eux. Alors voilà, c'était un vrai dilemme. Je prenais le temps d'y réfléchir, mais j'avais tout de même décidé de terminer le semestre dans la confrérie. D'ailleurs, ce soir là, je quittais les bâtiments après m'être assuré que rien d'anormal s'y passait. Marcher et prendre l'air allait me faire du bien, en fait, marcher était devenue ma seule activité physique et marcher était un bon moyen pour développer la réflexion. J'avais matière à penser avec ce qui arrivait dans mon couple. Mon petit ami pétait totalement un plomb, tellement que je n'osais pas lui dire que parfois il me faisait peur et ma fille grandissait de jour en jour, laissant très peu de temps avant son arrivée. Mon écouteur s'échappa de mon oreille, me faisant grogner au passage mais aussi me permettant d'entendre des pas à quelques mètres de moi. « Aaron ? Qu'est-ce que tu fais là ? » lui demandais-je sur le même ton qu'une maman qui découvrait que son petit avait fait le mur en pleine nuit.

Je marchais, quittant la mather house pour retrouver mon appartement. Bientôt, j'allais avoir du mal à faire la route à pied, d'ailleurs, je me demandais si je n'allais pas me trouver un bus u un taxi pour terminer la route. Et puis, par la suite, je ne ferais plus la route du tout, au moment de l'accouchement, je serais certainement trop fatiguée pour aller jusqu'à l'université à pieds toute seule. Mais bon, j'avais encore un peu le temps d'y penser et sincèrement marcher comme ça, ça maintenait en forme surtout que je ne pouvais plus vraiment faire de sport. Bref. Je marchais et je tombais sur Aaron qui ne semblait pas vraiment en forme. Je n'avais pas fait attention qu'il était absent tout à l'heure, avant de partir. J'étais surprise de la croiser et de le voir... tituber. « Alaska ? » J'haussais les sourcils. Bien vu l'ami. Qui d'autre ça peut être à vrai dire ? « J'sais pas, on est où ? » - « À quelques rues de la Mather House. » que je répondais faiblement. En fait, il est... « T'es rond comme une queue de pelle ou c'est moi ? » Réponse : ce n'est pas moi. Je laissais échapper un soupir avant de me rapprocher de lui. « Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Je vais te raccompagner. ». Toute façon, je pourrais toujours appeler un taxi pour rentrer chez moi.

« Quoi ? » J'haussais les sourcils en le regardant. C'est vrai qu'utiliser des expression de merde face à un mec bourré, c'était pas la meilleure solution. Je souriais en le regardant, autant le prendre de cette manière toute façon. Autant sourire face à son état pour que ça semble bien moins tragique. « Ah ouais.. j'ai bu. » Et pas qu'un peu apparemment. « J'ai cru comprendre... » Est-ce qu'il y avait une raison au moins ? Pour être dans un tel état ? Il marchait, mais il n'avait pas l'air de trop savoir où il allait et j'aimais pas tellement laisser mes amis comme ça, enfin, je suppose qu'il ferait pareil pour moi. Je l'aidais à se remettre en marche, le soutenant comme je pouvais même si au fond, je savais très bien qu'il était capable de se débrouiller. S'il tombe sur des mecs et qu'il se fait casser la gueule, je m'en voudrais de l'avoir lâché à quelques rues de la mather. « Parce qu'il faut une raison de boire  » - « J'sais pas. Généralement, quand on a aucune raison de boire, on est plutôt joyeux. Tu ressembles à un zombie, à un mec tragique qui marche tout seul dans la rue pour montrer aux autres à quel point il est nul » lui confiais-je dans un haussement d’épaules. « Qu'est-ce qu'il y a ? »

Il n'était pas un cas non plus. Il avait juste bu et je n'aimais pas voir mes amis tristes. Parce qu'Aaron avait l'air triste, j'vous assure. Il avait un petit côté tragique, le genre de gars qui a bu pour oublier. Il n'est pas minable, mais il avait quand même du mal à savoir où il était alors que la mather n'était vraiment pas loin. « Comment ça fait d'être.. parent ? » J'ouvrais la bouche sans parler. J'étais surprise par sa question. Qu'est-ce que ça fait d'être parent ? Aucune idée. Pour le moment, j'étais juste une femme enceinte. « Euh... Je ne sais pas.. Repose la question dans quelques mois. » Deux mois pour être exact. Enfin, j'avais changé déjà. J'étais déjà maman pour le coup, je me préoccupais déjà plus que de raison. « Regarde-moi.. tu me vois père ? » Qu'est-ce que je devais répondre à ça ? Je m'arrêtais et je lui faisais face, un léger sourire aux lèvres. « Pourquoi pas ? Tu sais, c'est pas si terrible. » Petit haussement d'épaules et je me remettais à parler. « Tu as mis une fille enceinte ? » que je me risquais à lui demander. Si c'est ça, fallait qu'il voit avec elle. Sinon, il allait avoir plusieurs mois pour se faire à l'idée, d'ici la naissance. Nan ?

C'était toujours bizarre de tomber sur un pote ivre alors que toi, tu profites simplement de la soirée pour rentrer à la maison après la journée de cours. Il n'était pas tellement tard non plus, j'veux dire, je rentrais plus tard que d'habitude, mais nous n'étions pas en pleine nuit non plus. J’insinuais par là que ce n'était pas tellement le moment d'être ivre, encore fallait-il qu'il y ait un moment pour ça. Je ne perdais pas de temps pour questionner Aaron, lui demandant ce qu'il faisait là et surtout ce qui n'allait pas pour être dans un état pareil. Il n'était pas pitoyable, mais ça se voyait que ses motivations à boire n'étaient pas joyeuses. Il n'avait aucune idée d'où il se trouvait exactement, mais je supposais qu'il aurait fini par trouver la Mather House. Le champion n'avait qu'à lever la tête pour repérer la tour. Je m'approchais de lui pour le soutenir un peu et je me proposais de le raccompagner afin qu'il rentre sans problème. La discussion prenait une tournure étonnante à laquelle je ne m'attendais pas du tout. « Tu te sens prête ? » - « Oui » répondis-je sans hésitation. J'étais prête même si j'avais terriblement peur. J'avais surtout peur de l'accouchement et la possibilité que tout se passe mal. Mais en contrepartie, j'étais impatiente de rencontrer ma fille et je savais déjà que je m'en occuperais sans mal. Quant à Aaron, ses questions étaient vraiment bizarres. Est-ce qu'il ferait un bon père ? Oui, je suppose. Je n'en sais rien à vrai dire. « Faudrait déjà que j'arrête de boire. C'est ce que je croyais, il y a un an... et en fait, j'suis bien le père. J'ai une fille, d'un an. » Je n'arrivais pas à cacher ma surprise pour le coup. Quelle nouvelle, ça ne devait pas être facile à accepter. « Tu sais, les bêtises quand on a une telle motivation qu'un enfant à venir, on les oublie rapidement. » La drogue, l'alcool et les sorties, c'était déjà loin derrière moi. Ça l'était pour ma fille, si elle n'était pas là, je ne verrais certainement pas les choses du même œil. « Et pour ta fille.. c'est une bonne nouvelle, non ? Tu vas pouvoir la voir ? Tu verras, ta vie va changer. » Puis, je suis sûre qu'il fera un bon père.