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La tête à l'envers |Lily & Heather|

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« La tête à l'envers. »
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Lenore Swanson avait toujours été une femme de caractère. Très appliquée (et cela se voyait par exemple à son style vestimentaire très soigné), son éducation lui avait inculqué des principes auxquels elle ne dérogeait que lorsqu’elle l’estimait nécessaire, ayant parfois un mal fou à tempérer la hardiesse de son caractère. Chamboulée par la vision qui s’offrait à elle, la remarque de l’inconnu la rappela à l’ordre sur ses bonnes manières. Dans la précipitation, elle en avait oublié les présentations. « Oui veuillez m’excuser, Lenore Swanson, je suis sa … » Mais elle s’interrompit. Coupée dans son élan par une phrase qui avait failli lui faire avaler sa salive de travers. Non mais, qui était cet homme ? Pour qui se prenait-il, à tenter de l’enterrer vivante ?! Son sang ne fit qu’un tour dans ses veines, et elle sentit le rose lui monter aux joues à la seule pensée que son ex-mari ait pu la faire passer pour morte. Il ne manquait pas d’air ! « Décédée vraiment ? » répéta-t-elle en manquant de s’égosiller dans son émotion de surprise. « Navrée de vous décevoir, mais je suis bien vivante, et Jonathan le sait très bien. Je ne sais pas qui vous êtes pour avancer ce genre de choses, mais sachez qu’on vous a mal informé. » La tonalité sèche de sa voix était devenue sévère, quoique d’un calme absolu. On décelait bien là un caractère de marbre dans une femme qui n’était pas prête à se laisser démonter par un inconnu qui n’avait aucun droit selon elle pour juger qui que ce soit dans cette pièce. « Et je vis à New York. J’ai pris le premier avion que j’ai pu il y a quelques heures quand on m’a prévenue. »

D’un pas feutré, elle s’était glissée auprès de Lily, caressant son front du bout des doigts, les traits visiblement tirés par une inquiétude qui ne cessait de croître au fil des secondes. Calmement elle s’était finalement reculée, ôtant sa veste qu’elle posa avec soin sur le rebord d’un fauteuil. « Sachez qu’il y a toujours deux versions dans ce que peut décider de dire Jonathan. » Elle avait bien insisté sur le terme de « décider ». Parce qu’elle connaissait l’homme, et qu’elle savait pertinemment comment il fonctionnait. Il avait tendance à ne pas trop en dire, pour laisser supposer. Mais ses silences amenaient souvent à des confusions qui avaient par exemple réduit à néant leur couple d’antan. « Qui êtes-vous pour Lily au juste ? » avait-elle demandé, plus par curiosité que par réel intérêt pour la réponse. S’il était resté là toute la nuit, c’est qu’ils étaient un minimum proche. Naissait alors en elle une sorte de suspicion qui s’esquissa sur ses traits. Suspicion qui s’égara vite pour laisser place à une surprise apparente lorsque le tant attendu Jonathan décida de faire son entrée, les traits tirés à l’extrême. Signe qu’il n’avait pas dû dormir depuis de nombreuses heures. « Lawrie j’ai bien eu ton message, merci de m’avoir … Lenny, qu’est-ce que tu fais ici ? » s’était-il arrêté dans son élan, son visage demeurant figé d’un mélange d’effroi, et de colère naissante, alors que la vision de son ancienne femme lui faisait oublier momentanément l’inquiétude qui le rongeait. « Merde, je croyais t’avoir dit de nous laisser tranquille ! » Il avait haussé le ton, visiblement d’humeur colère. Elle avait reculé d’un pas inconsciemment, avant de reprendre les choses en main pour ne pas se démonter. « C’est elle qui m’a retrouvée je te signale !! » -« Quoi ?! Comment ça c’est ELLE qui t’a contacté ?! » - « … »

En fond sonore, Lily percevait une sorte de brouhaha qui ressemblait de loin à une dispute conjugale. Mais les deux voix étaient encore trop lointaines pour qu’elle puisse définir qui était qui. Entre ses paupières, la lumière fébrile lui parut agressive. Elle cligna des yeux, prenant peu à peu conscience qu’elle avait quelque chose dans la bouche. Elle sentait une sorte de tube, collé à ses lèvres, qui descendait le son de son œsophage et qui semblait lui permettre de respirer. Incapable de parler donc, elle ne pouvait émettre que des sortes de bruits étouffés. Rien de tel pour une communication efficace. Quoiqu’il en soit, en prenant peu à peu conscience de son propre état, un élan de panique s’était emparé de ses sens, faisant s’envoler le moniteur à ses côtés qui mesurait son rythme cardiaque.  Dans l’inconscience, sa main perfusée s’était refermée autour d’un avant-bras qui pendouillait à ses côtés. A qui était-il en revanche, impossible de le dire. « Lily ?! » s’était alors exclamé son père en se retournant brusquement, se précipitant vers le lit pour lui prendre la main entre les deux siennes. Avec ses pouces, nerveusement, il dessinait des ronds sur ses paumes, comme s’il tentait de maîtriser ses propres tremblements pour paraître le plus détendu possible. Chose impossible compte tenu des circonstances. « Ça va aller ma puce … Je te le promets … » répétait-il en portant de temps à autre sa main glacée à ses lèvres. A croire qu’il avait du mal à se maîtriser. Il s’était pourtant préparé à ce moment, de nombreuses fois. Mais entre la réalité et l’expectation, il y avait toujours un monde.

« Je vois que vous êtes tous là. Bonjour. Je suis le docteur Stevenson. » Arrivé d’on ne sait où, un médecin en blouse blanche, visiblement plus spécialisé que celui auquel ils avaient eu affaire plus tôt dans la soirée. « C’est moi qui vais m’occuper de votre fille pendant son séjour ici. Nous avons contacté son médecin référent à Boston, mais malheureusement il n’a pu se déplacer. Mais il m’a bien expliqué son cas, ses antécédents, et sa pathologie, et je ferais en sorte que tout aille bien pour elle. » Les présentations solennelles faites, le père avait l’air d’un scepticisme absolu. « J’aimerais vous parler s’il vous plaît, dans mon bureau. La famille uniquement. »  Précisa-t-il alors que son regard bifurquait sur Lawrence, et qu’il emboîtait le pas aux deux « parents » pour aller dans son bureau.


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Un sourire en demi-lune mais non visible puisque dissimulé par la pénombre étreignit mes lèvres au moment précis où ma cible fut touchée. Apparemment, Lenore Swanson éprouvait quelques difficultés à conserver son calme, et l'effet avait été désiré. Cela me permettait de mieux jauger la femme qui se tenait devant moi, et, très sincèrement, de pouvoir apprécier un spectacle amusant après l'inquiétude que Lily avait su susciter en moi. Indifférent à son timbre de voix glacial, je ne dis mot, me contentant de l'observer toujours et encore, enregistrant chaque information qu'elle me procurait involontairement. Finalement, mes mains se serrèrent brutalement en un poing ferme, lorsque ses pas la rapprochèrent de sa fille. Allez savoir pour quelle raison la méfiance s'empara de moi, quoiqu'il en soit je ne l'avais plus quitté des yeux jusqu'à ce que Jonathan ne débarque dans la chambre. L'écoutant sans l'interrompre et surveillant chacun de ses gestes comme si je craignais qu'elle ne fasse du mal à Lily, je ne sus comment répondre précisément à la question qu'elle me posa alors. Qui étais-je pour Lily au fond ? Un ami ? Me croirait-elle si je le lui annonçais ainsi ? Après tout, j'étais peut-être un peu trop âgé pour en faire partie. Un compagnon d'armes de son paternel alors ? Je doute qu'une telle réponse lui fasse plaisir. Mais le sujet n'était pas là. Elle ne m'avait pas seulement demander de décliner mon identité, mais ce que je représentais pour sa fille. Pour tout dire, je n'en savais rien. Sans doute la jeune femme me considérait-elle comme une sorte d'oncle de substitution ou de figure plus ou moins autoritaire. En y réfléchissant bien, aucune de ses deux positions ne me satisfaisait vraiment. Je gardais donc le silence, bientôt interrompu par l'arrivée de Jon. Tiens, apparemment, je m'étais effectivement trompé. Le ton monte, et, je ne saurais l'expliquer, mais mon siège fut aussitôt abandonné tandis que mes doigts avaient enlacé le bras de Lily pour être certain qu'elle était toujours présente, et que surtout, rien ne pouvait lui arriver. Il s'agissait de ses parents, certes, mais qui sait combien leurs retrouvailles pourraient la blesser ?

Ne me sentant pas le droit de les interrompre mais refusant catégoriquement de quitter la chambre pour les laisser seuls avec la jeune convalescente, je suis le deuxième à voir que ses paupières se sont relevées. Un soupir discret de soulagement embaume mon torse et je ne peux m'empêcher de remercier Morphée de l'avoir libéré. Entre temps, un jeune médecin fait son apparition pour les enlever l'un après l'autre, jusqu'à ce que je ne sois plus que seul avec Lily dans la pièce. Un dernier regard à Jon lui fait la promesse que je la veillerais jusqu'à son retour avant que la porte ne se referme sur lui.

Plusieurs minutes passent, sans que je n'ose interrompre le silence qui s'installe. Faisant remonter mes anciennes douleurs, je décide de les garder pour moi le temps que Lily soit remise et mes doigts viennent délicatement effleurer le contour de son visage de poupée avant de disparaître.  « Comment te sens-tu ? Sais-tu où tu te trouves ? » Ma voix est calme, presque un murmure pour ne pas la brusquer. Mon regard est une caresse fugace pour qu'elle ne craigne ni la nuit, ni le silence.


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« La tête à l'envers. »
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Le regard de la jeune femme bifurqua vers le plafond. Puis vers la fenêtre à gauche. Ses paupières étaient d’une lourdeur terrible, et les soulever à chaque battement de cils requerrait une force et une concentration absolue. Se sentant comme emprisonnée entre tous les fils qui partaient ici et là de son corps, murée dans un silence imposé qui lui permettait au moins de respirer, elle avait l’impression d’être un être tentaculaire, dont des bras visqueux partaient du corps ici et là pour se nourrir d’on ne sait quoi. Ne sachant pas si elle était tout à fait réveillée, ou si tout ce vacarme autour était le fruit de son imagination, une voix douce, et connue, guida son regard jusqu’à son détenteur. Comment elle se sentait ? Au meilleur de sa forme. Non, franchement, elle n’avait jamais été en meilleure forme. Si on oubliait le tuyau dans sa gorge qui l’empêchait de parler, la faisait à moitié baver, les effets encore clairement visibles d’une dose de morphine intense qui lui donnait l’impression d’avoir à la fois une gueule de bois abominable, et le sentiment d’être allongée sur un nuage de mousse, franchement, elle se sentait prête à aller courir un marathon. Quant au lieu où elle se trouvait … A sa question son regard se fit circulaire. Oui, elle savait où elle était. Et la blancheur javellisée des murs autour d’elle lui faisaient froid dans le dos. Toute sa vie, elle avait l’impression d’avoir passé plus de temps entre des murs d’hôpitaux, à se faire piquer et examiner dans tous les coins, qu’à profiter de la vie au dehors. Et ce sentiment s’était accru depuis plusieurs mois, de manière considérable. Le seul bref instant de liberté qu’elle avait pu ressentir, c’était avec Heather, sur ces routes sinueuses et désertiques, avec de parfaits inconnus qui n’avaient cures de leurs vies et de leurs aspirations. Depuis … Plus rien n’avait de sens à ses yeux.  Visiblement dans un entre-deux pendant quelques instants, elle posa longuement son regard sur Lawrence, le détaillant comme si elle était sur le point de se rendormir. En réalité, une tristesse absolue venait de l’envahir en se disant que de par les choix qu’elle avait fait, non seulement elle avait réussi à le décevoir, mais aussi, qu’elle ne le reverrait peut-être plus. Il y a quelques mois elle n’aurait jamais pensé que son point de vu ait tant d’importance pour elle, et qu’elle puisse trouver en lui une sorte de rempart contre un monde qui parfois, l‘effrayait totalement. Peut-être même que jusqu’à cet instant, elle ne s’en rendait pas compte. Mais alors que le silence pesait dans la pièce, l’idée lui paraissait limpide, claire comme de l’eau.

Doucement, sa main se referma autour de la sienne, et son regard changea, passant de la tristesse à une sorte de supplication muette. Comme si elle lui demandait de la pardonner de lui avoir causé tant d’ennuis, mais aussi, comme si elle avouait qu’elle n’en pouvait plus. Qu’elle était arrivée au bout de ce qu’elle pouvait endurer d’un point de vue à la fois physique et moral. Depuis des années elle était épuisée, vivant dans un corps qui ne lui appartenait plus vraiment, souriant alors qu’elle en avait rarement envie. D’une façon ou d’une autre, cela devait cesser. Elle ne pourrait pas rester ainsi, sa vie ne dépendant que du bon vouloir d’une machine à laquelle elle était raccrochée. A cette pensée, une larme roula le long de sa joue, et elle ferma de nouveau les yeux, sa main quittant celle de Lawrence pour se réfugier péniblement sous la couverture.

« Comment ça vous ne pouvez rien faire pour contourner ça ?! » se fit entendre dans le couloir. La voix de Jonathan, l’air furibond qui venait de sortir du bureau du médecin contrarié. « Jon … Calme-toi … » répétait Lenore qui en réalité, ne faisait qu’aggraver la situation. « Elle est trop jeune pour avoir pris cette décision ! Je suis son père c’est à moi de … » - « Votre fille a vingt-quatre ans monsieur, ce n’est plus une enfant … Elle avait le droit de … » - « Il n’est pas question que … Que … » Son poing avait heurté avec violence le mur de plâtre, trouvant dans cette violence subite un moyen d’extérioriser la colère et le chagrin qui l’animait. Les mains contre les lèvres, il avait étouffé un sanglot, n’y tenant plus. Retrouvant peu à peu son calme après la tempête. Repoussant son ex-femme qui tentait vainement de le calmer, il était finalement revenu dans la chambre, l’air ahuri, et un brin défait. « Lawrence, je peux te parler ? » Il attendit que l’homme le rejoigne dans le couloir, caressant avec nervosité sa barbe en faisant les cents pas. Il préférait en parler avec Lawrence qu’avec Lenore, avec laquelle le dialogue était rompu depuis longtemps. Et puis, comme il avait toujours été là pour veiller sur sa fille depuis qu’il était arrivé à Boston (chose qui lui paraissait un peu étrange d’ailleurs), il lui devait bien ça. « Elle a demandé à ne pas être maintenue en vie … » Il maugréa un instant entre ses dents, s’arrêtant sur ce qu’il venait de dire, comme s’il comprenait enfin la signification des mots prononcés. « Il y a quelques semaines, elle a signé une clause, dans laquelle elle demande à ne pas être réanimée, ni maintenue artificiellement en vie au-delà du délai obligatoire si … S’il lui arrivait quelque chose … Tu étais au courant de ça ? » Les poings serrés, tendu à l’extrême, s’il n’avait pas eu un minimum de self contrôle il l’aurait déjà saisit à la gorge pour lui tirer les vers du nez. « L’état actuel des choses est que soit elle reçoit une greffe dans les dix jours à venir, et elle a une chance de s’en sortir. Soit ils la débrancheront quand elle sera prête à … Oh bon sang comment a-t-elle pu prendre cette décision sans m’en parler avant ?! » Les yeux tiraillés entre la colère, l’incompréhension, et une souffrance naissante absolue, il savait pertinemment qu’il n’avait pas les moyens (financiers bien sûr) de faire pencher la balance en leur faveur. A moins d’un vrai miracle ou d’un coup de chance, il ne pouvait rien faire. « Je peux l’aider Jon, tu le sais. » Une voix fluette, sortie de nulle part. Celle de Lenore. « J’ai les moyens de l’aider. » - « T’as jamais été là pour elle, et c’est maintenant que toi, et la fortune de ton vieux mari boursoufflé de prétention, vous voulez participer ?! Et après, ce sera quoi le prix à payer ?! Un repas de famille pour Thanksgiving un an sur deux, et le privilège de vous caresser dans le sens du poil ?! » - « T’es vraiment impossible !! C’est MA fille aussi ! Et je suis aussi bouleversée que toi de la voir dans cet état !! Tu ne vas quand même pas lui ôter une chance de vivre parce que tu es trop pétri d’orgueil pour accepter mon aide ?! » Furieuse, elle l’avait même frappé au torse avec son poing. Lui se retenait pour ne pas lui en coller une en retour. Débat stérile, le retour. En attendant les infirmières faisaient tampon, hésitant à intervenir, ou à attendre que l’orage passe. Et Lawrence qui se retrouvait entre les deux comme un drapeau blanc sur un champ de bataille.



@Lawrence H. Austen
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Certes, la question pouvait paraître stupide si l'on considérait l'état déplorable dans lequel elle se trouvait. Evidemment que physiquement, Lily n'était pas au meilleur de sa forme, mais à la question de savoir si elle allait bien, j'entendais surtout du point de vue psychologique, si elle s'était plus ou moins remise du choc de la confrontation avec ces types, si elle avait envie de s'exprimer sur un sujet quelconque, si elle s'inquiétait quant à son...avenir.

Lorsque ses doigts se refermèrent sur les miens, un soupir de soulagement m'envahit et je ne pus retenir un sourire de contentement étirer mes lèvres. Son regard, je le reconnaissais. Pas d'elle, mais je l'aurais reconnu entre milles. C'était celui avec lequel Catherine s'adressait à moi après une énième dispute. Conscient sans comprendre totalement la peine que ressentait la jeune femme, je lui fis mentalement mes excuses pour mon comportement digne d'un père pour sa fille, soit, un rôle qui ne serait jamais le mien. Elle était jeune, sensible. La jeunesse vous fait commettre bon nombre d'erreurs, et c'était bien normal. Je n'avais pas à lui en vouloir d'avoir risqué sa vie. Je faisais bien pire au quotidien et je n'avais même pas son excuse.

Finalement, la porte s'ouvre brusquement. L'air à la fois contrarié et abasourdi, je retrouve Jon, pâle comme un mort. Son intonation, et surtout le fait qu'il m'appela par mon prénom lui me surnommait toujours 'gamin', ce qui avait le don de m'horripiler, m'informe de la gravité de la situation et du mal qui le ronge alors. Sans me départir de mon calme, j'abandonne Lily, déposant un baiser fugace sur le sommet de son crâne, indifférent à l'incompréhension de sa mère quant à mon geste, et le rejoins dans le couloir. Droit comme un I, je patiente, le temps qu'il se reprenne et me dise enfin où se situait le problème. Lorsqu'enfin j'apprends la nouvelle, mes lèvres se scindent irrémédiablement, devenant une fine ligne blanche barrant mes joues. Deux bouffées d'air, l'une par le nez, l'autre par la bouche m'aide à retrouver un semblant de contrôle alors qu'intérieurement, je suis ébranlé. Pourtant, je n'ai toujours rien dit. Mon esprit travaille, à cent à l'heure. Je calcule, conçois, comprends, sans accepter sa décision. « Non, je l'ignorais. » énonçais-je alors qu'il m'interrogeait. Et ce n'était pas parce que j'avais le sentiment de finir en tartare si j'avais dit que oui, j'étais au courant, mais parce que Lily avait semble t-il caché ce fait à l'ensemble de son entourage. Et pour cause. Animé par une tristesse sans nom, mes iris retrouvent leur couleur d'origine lorsqu'il poursuit. Ainsi, elle n'est pas condamnée. Il y a...une autre solution. Un choix. God, thanks. En proie à la réflexion, j'ai les oreilles distraites et n'entends que la fin de ses tourments, obligé alors de réagir. « Parce que tu aurais accepté, Jon ? Si elle te l'avais demandé, tu aurais accepté son choix ? » lui demandais-je à la fois sévère et sérieux. « Non, tu n'aurais pas pu. Personne ne l'aurait fait. Parce que nous l'aimons et que nous espérons. T'es-tu seulement déjà demandé ce qu'était son quotidien avec cette bouteille d'oxygène qu'elle emmène partout où elle va ? Ses regards sur son corps ? Les jugements, les rumeurs, les rires quand elle traverse les couloirs de l'université ? La solitude de ne pouvoir en parler à personne par crainte de se voir cataloguer. Le fait de penser qu'aucun homme ne s'intéresserait à une jeune femme à la santé aussi précaire ? » grognais-je en me souvenant de la conversation que j'avais déjà eue à ce sujet avec Lily, et que je ne parvenais toujours pas à concevoir par ailleurs.

Par mes questions, je voulais qu'il comprenne les raisons du choix de Lily. Mon oeil était sûrement plus objectif que celui de son père, après tout, malgré l'attachement indéfectible que je lui portais. « Et si tu aurais été amené, un jour, à prendre ce genre de décisions, elle savait que tu ne te l'aurais jamais pardonné. Lily t'aime plus que tout, elle n'aurait pas pu te faire vivre dans la culpabilité d'une maladie qui la rongeait et qui l'empêchait de vivre comme tous les jeunes de son âge. Tu n'as pas le droit de lui reprocher son souhait, Jon. C'est sa vie, son fardeau. » murmurais-je pour moi-même en sachant qu'à tout moment, l'homme qui me faisait face et se trouvait dans un état proche de l'hystérie pouvait m'envoyer son poing en pleine figure pour se calmer les nerfs. Et vous savez quoi ? Je ne lui en aurais même pas voulu. En revanche, l'intervention de Lenore et la brusque dispute qui s'annonçait entre eux eut le don de m'énerver. « STOP !! » grognais-je en plaçant mes deux mains entre eux deux. « Ca suffit. Votre fille est mourante, et vous n'avez pas trouvé plus intelligent à faire que de vous disputer comme des chiffonniers !! » maugréais-je en leur jetant tour à tour un regard noir. « Madame Swanson, avec tout le respect que je vous dois, puisque votre ex-mari refuse votre aide financière, permettez-moi. Je sais que vous ignorez tout de moi, et je suppose que l'amitié que je partage avec lui ne vous encourage pas à me faire entièrement confiance. Toutefois, je puis vous promettre que je tiens sincèrement à Lily, autant que vous. » expliquais-je à voix basse avant de reporter mon attention sur Jonathan. « C'est moi qui paierais les frais de l'opération, avec ton consentement, évidemment. » annonçais-je avec diplomatie. « Votre place à tous les deux est aux côtés de votre fille. Allez-y, je m'occupe de la paperasse. » leur indiquais-je en m'enquérant déjà des formalités auprès du médecin.


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« Bien sûr que non ! » avait-il répondu de manière tonitruante à sa question. Une évidence pour le père qu’il était, et qui ne voyait rien si ce n’est le chagrin et la crainte qui étreignait son cœur. Son regard se noyant dans le vide alors que le discours résonnait dans ses oreilles comme un bourdonnement, il se frotta la barbe, puis ses cheveux négligemment arrangés. « Tu as raison … Je le sais mais … J’aurais aimé qu’elle n’ait pas à prendre cette décision. La prendre pour elle aurait pour moi été une torture, mais ça aurait été mon devoir. Elle s’est infligé un poids pendant des mois dont j’ignorais … Si … Si j’avais su … » Il n’avait pas terminé sa phrase. Au fond, il ne savait pas tellement comment il aurait réagi en d’autres circonstances. Il réalisait seulement dans son cœur de père que la toute petite fille qu’il pensait avoir élevé durant toute sa vie avait grandi. Grandi suffisamment en tout cas pour assumer toute seule des choix et des responsabilités que certains adultes fuyaient toute leur vie. Et lui, par son silence, ses absences répétées, et sa mauvaise humeur constante depuis des mois à la voir faiblir, il n’avait pas su prendre sur lui pour choyer, et conserver cette complicité qu’ils avaient autrefois. Pour ça, il ne se le pardonnerait jamais. Il s’était finalement un peu calmé, trouvant suffisamment de sens dans les paroles de son ami pour ne pas trop flancher. Mais sa voix tremblait malgré tout. Ils avaient toujours été ensemble tous les deux, un vrai binôme. Certes l’éducation qu’il lui avait fourni était très loin d’être irréprochable, ais il avait fait ce qu’il avait pu avec ce qu’on lui avait donné. Et jamais sa fille ne l’avait déçu. Agacé, tourmenté au plus haut point, exaspéré, oui, mais déçu, jamais.

En pleine dispute avec son ex-femme qui avait le don de lui faire hérisser les poils du corps comme un chat devant une menace hostile, la remarque de Lawrence le fit se calmer aussitôt, comme s’il réalisait brusquement leur bêtise. Mais ils étaient vraiment à bout de nerfs. La nuit avait été très longue pour tout le monde. « Non Lawrence ce n’est pas à toi de … » - « Il n’est est pas question ce n’est pas votre rôle ! » avait pesté Lenore en coupant la parole de Jon sans une once d’hésitation. L’air furibond, Jon avait serré le poing, faisant inconsciemment craquer ses phalanges. Cette femme le rendait fou. Au sens propre, et littéral du terme. L'air réfléchi pendant un instant, il la poussa légèrement vers l’arrière, s’avançant vers Lawrence en abaissant légèrement la tête. « Je te rembourserai. En intégralité. Je t’en fais la promesse. » Il savait que c’était la meilleure solution. Si Lenore contribuait au rétablissement de Lily, elle se sentirait toujours redevable envers elle, et il ne voulait pas qu’elle se sente contrainte de quoi que ce soit envers cette mère qui avait toujours été absente pour elle. Si c’était Lawrence, elle ne serait pas forcément au courant. Ce serait un accord tacite entre les deux hommes. Et il savait qu’il pouvait lui faire confiance. Il ne comprenait pas bien la raison et l’étendue de son geste, mais il lui en serait éternellement reconnaissant. « Merci … Gamin. » avait-il murmuré, affichant volontairement un sourire en coin en demi-lune. Peut-être que cela ne suffirait pas. Peut-être qu’elle mourrait pendant la transplantation, et que cela s’arrêterait ainsi. Mais au moins elle aurait une chance.

Acquiesçant finalement, s’armant de sérénité et de self-contrôle, Jon finit par rejoindre Lily à l’intérieur de sa chambre, laissant Lenore sur le pas de la porte. Lenore qui se permit d’interpeller Lawrence en le saisissant par l’avant-bras. « Vous n’êtes pas obligé de faire ça vous savez. C’est une responsabilité qui va vous enchaîner à cette famille sans que vous le souhaitiez forcément … » Elle n’avait pas tort pour le coup. Connaissant le caractère de Jon, il se sentirait toujours redevable envers lui. Même Lily si elle venait à l’apprendre. « Je peux … » Elle n’avait pas terminé à sa phrase, comprenant à son regard que la discussion n’était pas très ouverte. « Comme vous voulez … » finit –elle par dire avec tristesse, voyant une chance, ou plutôt un moyen de réconciliation avec sa propre fille s’éloigner doucement, en prenant l’allure d’un homme aux yeux clairs ténébreux qui ne lui inspirait pas confiance.

Quelques bonnes heures s’étaient écoulées. Lily était à présent bien réveillée, quoiqu’encore largement sous les effets de la morphine. Qui plus est, respirer à travers ce tube lui demandait une énergie qu’elle n’avait pas forcément. Son père était assis à ses côtés, tenant l’une de ses mains dans les deux siennes. Le visage contre le rebord du lit, il s’était endormi.  Il n’avait pas fermé l’œil depuis deux jours, rien de surprenant à cela. Lenore, elle, était partie boire un café au rez-de-chaussée. Regardant distraitement par la fenêtre, somnolant à moitié, Lily observait les variations de luminosité au dehors, en se disant que cela ferait un joli tableau. Ses doigts caressaient lentement, dans un rythme régulier et inconscient, les cheveux de son père. Comme si c’était elle la mère, cherchant à lui insuffler de l’apaisement. En entendant la porte s’ouvrir et grincer, machinalement son index s’était porté lentement devant ses lèvres, mimant un « Chut », pour ne pas que l’arrivant ne le réveille.  


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Je comprenais mieux que quiconque ce que Jonathan était en train de me dire, ce qu'il s'infligeait consciemment. J'avais comme lui, été père, et je me reprochais toujours aujourd'hui de ne pas avoir été présent lorsque je le pouvais encore. Combien de fois avais-je songé que tout aurait été différent si je ne passais pas mon temps à l'écart de ma famille plutôt qu'à les aimer et à jouer mon rôle de mari et de père ? Combien de fois ais-je songé que j'aurais pu éviter l'accident qui leur a ôté la vie ? Les psychiatres n'avaient rien changé à ma peine, ni au raisonnement logique qu'ils avaient tenté de m'enseigner. Ce n'était qu'un accident. Aucun chef de famille n'aurait accepté qu'il s'agissait d'un simple accident alors qu'il se sentait coupable de son absence. Oui certes, ce fut un regrettable accident, mais j'y avais survécu, et là se situait le principal problème. Là se trouvait la faille qui me brisait depuis près de trois ans maintenant.

A leurs réactions, surtout à celle de la mère de Lily, mon regard se fit aussi dur que du marbre et mes mâchoires aussi crispées qu'un dragon qui s'apprête à enflammer un bûcher. Pardon ? Mon...rôle ? et quel était mon rôle exactement pour cette femme ? Que savait-elle de moi sinon ce qu'elle avait sous les yeux depuis...quoi...une heure maintenant ? Heureusement, mon éducation m'interdisait de l'apostropher comme elle venait de le faire pour moi. D'autant plus qu'il s'agissait d'un membre de la famille de Jon et de Lily, et que je pensais d'abord à eux, à la peine que Lily ressentirait si je me montrais trop brusque vis à vis de cette étrangère, au risque qu'elle disparaisse définitivement de sa vie. « Hum. » fut la seule réponse - grondement pour être plus précis - qui s'échappa de ma gorge à la proposition de remboursement de Jon. Ais-je la tête d'un créancier ? Je ne le faisais pas seulement pour lui ou elle, pour être tout à fait sincère et ce que je ne leur avouerai jamais, c'est que je tenais bien plus à Lily qu'ils voulaient bien le croire. Sans doute que son père me considérait comme son compagnon d'armes et le 'gamin' qui avait su faire rire la petite fille aux couettes en la faisant sauter sur ses genoux à une lointaine époque. J'avais appris depuis longtemps à me méfier de mes sentiments.

Un soupir entendu, faisant mine d'exaspération lui répondit alors qu'il me traitait inmanquablement de 'gamin', en disparaissant derrière la porte de la chambre de sa fille. Profitant de son absence - du moins je le supposais - sa mère quant à elle fit la bêtise de retenir mon avant-bras alors que je m'éloignais pour remplir les diverses formalités nécessaires à la survie de Lily. Un coup d'oeil à son endroit l'avertit que je n'hésiterai pas à me montrer moins gentleman si elle s'avisait de recommencer. « J'ai bien compris, madame Swanson. » répliquais-je aussitôt en retirant mon avant-bras de sa poigne. « Tout comme vous devriez enfin comprendre que je ne le fais pas par obligation, mais par affection pour un homme que j'estime et une jeune femme que...à laquelle je suis profondément attaché. » murmurais-je en lui tournant définivement le dos pour me diriger vers le médecin qui attendait, patient, la fin de notre discussion dont semblait avoir profité chacune des infirmières présentes dans le couloir. « Vous devriez la rejoindre. » énonçais-je quelques secondes plus tard en signant le premier formulaire d'une longue liste fastidieuse et parsemée de termes médicaux dont je ne comprenais pas grand chose. « Si elle a repris contact avec vous, je suppose qu'elle souhaiterait que vous soyez près d'elle en ce moment, qu'importe ce qu'en penserait son père ou...moi. » Non, je ne souhaitais pas qu'elle se rapproche de Lily pour la simple et bonne raison qu'elle l'avait abandonné alors qu'elle n'était qu'une enfant, et que de revenir auprès d'elle me paraissait suspect. Ceci dit, Lily avait souhaité la retrouver, et par respect pour la jeune femme, pour un bonheur qu'elle méritait amplement, je n'avais pas l'intention de me mettre au travers, même si je comptais bien me renseigner sur cette femme, qu'importe la confiance que lui accordait sa propre enfant.

Au cours de la soirée, j'avais appris que l'opération serait réalisée dans une semaine, environ, et qu'il y avait des chances, infimes mais bien présentes, que Lily n'y survive pas en raison de son état de santé jugé alarmant. Evidemment, j'avais gardé mon calme, avant d'aller souffler plusieurs fois dans les toilettes, devant un lavabo et un miroir immaculé, cherchant à dissimuler ma peur de la perdre et ma colère latente. Ces russes, qui qu'ils soient, ne perdaient rien pour attendre. Résolu à les exterminer l'un après l'autre parce qu'après tout la faute leur en revenait, je rajustais mon col devant le miroir, retrouvant l'impassibilité qui me caractérisait en apparence, et prenait la direction de la chambre de Lily, ayant un sourire amusé devant le spectacle de Jon, les cheveux en pagaille en train de somnoler sur le ventre de sa fille qui elle, ne bougeait pas d'un cil pour éviter de le réveiller. Attendrissant. Mais, lorsque tout irait pour le mieux, cette preuve de son amateurisme me servirait de moyen de chantage et d'amusement gratuit lorsqu'il oserait à nouveau me qualifier de 'gamin'.

Me rapprochant du lit, je m'assois sur une chaise qui trainait à l'écart, observant sans parler pendant plusieurs minutes, le calme de la pièce dont les rideaux tirées empêchaient encore la lumière du jour de perçer.


© belzébuth


@Lily-Rose S. Hopkins
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« La tête à l'envers. »
heather & lily



Lenore avait paru contrariée, visiblement dans un entre deux qui ne lui permettait ni d’avoir une vraie place auprès de sa fille, ni auprès de sa propre famille. Elle était venue par principe, et par obligation. Aussi parce qu’elle essayait de trouver des moyens de se rapprocher de sa fille, tout en sentant que plus le temps passait, plus il était difficile de rattraper le temps perdu. Surtout en cet instant, où l’avenir était si incertain. Peu encline à faire face aux problématiques en les prenant à bras le corps, elle ne pouvait pour autant se résoudre à fuir comme elle l’avait fait autrefois. Du moins, pas tout de suite. De plus en plus soucieuse par rapport aux fréquentations de sa fille (décidément, cet homme lui rappelait par certains aspects Jonathan, surtout le côté un peu froid et hostile), elle se disait que Jon ne serait pas assez fou pour la laisser fréquenter un autre agent, qui comme lui, devait être armé d’un sang-froid à la fois troublant et dangereux. Rien que pour cela, elle s’était décidée de les garder à l’œil. Au cas-où.

Songeuse, dans un demi-sommeil un peu comateux, Lily avait parfois l’impression de rêver. Elle voyait des images défiler sous ses paupières, qui n’avaient évidemment aucun sens. Pendant un long moment elle avait pensé à Heather, à sa santé, si elle allait bien … Et à Sachka aussi, dont les protestations bougonnes lui manquaient. Le seul avantage de cette situation était le fait qu’elle pouvait réfléchir, intérioriser à un point qu’elle ne distinguait plus vraiment la différence entre absence, et réalité. L’intermède avec les russes, toute l’histoire qui l’avait amenée à cet hôpital, son cerveau l’avait volontairement mis de côté. Comme si se rappeler de la poigne de leurs agresseurs, et de leur œil livide, étaient des détails que son mental refoulait consciencieusement pour s’en sortir. Quant à Lawrence, un instant elle avait revu entre ses paupières cet être mécanique, d’une précision chirurgicale, qui s’abattait sur la chair comme un rapace sur sa proie, et qui en un retournement de cervicale, vous faisait passer avec une facilité déconcertante entre vie, et mort. En revoyant les images de la nuque disloquée de l’un des hommes, une sueur froide glissa le long de son échine. Terrifiant. Préférant refouler ces images qui la terrifiaient au plus haut point par leur violence, elle ne pouvait pour autant s’empêcher de se remémorer un visage. L’un des deux hommes. Celui que Lawrence avait refroidit d’un tour de main. Elle avait longuement observé son visage dans la mort, et avait aperçu au loin un sentiment de déjà-vu. Comme si leurs chemins s’étaient déjà croisés, il y a plusieurs années, en des terres plus froides et plus hostiles que celles de l’Amérique. Pourtant elle était incapable de se souvenir où elle l’avait vu, avec qui, et pour quelle raison.

Tirée de ses pensées, et du même coup, du demi-sommeil par la présence de Lawrence installé sur une chaise à ses côtés, elle lui adressa un regard entendu. Difficile de communiquer quand on vous ait ôté l’usage de la parole. Aussi se contenta-t-elle de rester silencieuse. Il avait l’air épuisé. Si elle l’avait pu, elle lui aurait dit de rentrer, et d’aller se reposer. Que tout irait bien. C’est dans ce temps de latence que le docteur Stevenson avait décidé de faire sa réapparition, comme une trombe, légèrement essoufflé. « Messieurs, Miss Hopkins, j’ai une très bonne nouvelle ! » - « Quoi ? Quoi ? Qu’est-ce qui se passe ?! » Jon avait légèrement sursauté, se redressant comme un I d’un seul coup, la marque de la couverture sur la joue gauche, et la mine déconfite par un sommeil peu réparateur. « L’hôpital de New York vient de m’appeler, et nous avons un greffon. Compatible avec votre groupe sanguin qui plus est. Ils seront transportés dans les heures à venir, et nous pourrons débuter l’opération demain matin. » Les yeux devenus ronds comme des soucoupes, Lily s’était concentrée de toutes ses forces pour canaliser son énergie, et se redresser légèrement sur son lit. « Si vite ?! » s’était époumoné Jon en se demandant intérieurement si c’était vrai, ou non. « Oui c’est un cas exceptionnel, et vraiment une chance. D’habitude le temps d’attente est extrêmement aléatoire. » - « Ça, je sais … » bougonna Jon avec ironie en se rappelant que cela faisait bien dix ans que Lily était sur liste d’attente, sans succès.  Quant à l’intéressée, intérieurement, elle avait envie de disparaître au fond de son lit. Une chance ?! Il appelait ça une chance ? Parier sur le décès d’un individu n’avait rien d’une chance selon elle. Parce que si un greffon était disponible, cela signifiait bel et bien que quelque part, à New York, une famille venait d’être brisée. Pourtant, elle avait eu un léger soubresaut en son for intérieur, comme un regain d’énergie face à la perspective que, peut-être, elle aurait droit à un lendemain, voire un surlendemain. Et à cette pensée sa main avait serré un morceau du drap, y trouvant comme un réconfort inconscient. « Vous êtes d’accord pour que nous pratiquions l’opération ? » - « Bien sûr qu’elle est d’accord ! » Réponse tonitruante du père qui prenait la question presque comme un affront. « Heu … Oui pardon, je te laisse répondre … » Après une hésitation, un regard vers Lawrence un peu inquiet, et vers son père qui allait finir par faire un arrêt, elle finit par hocher la tête, bien que la perspective de se faire ouvrir en deux transversalement, vider d’une paire d’organes vitaux, pour en mettre d’autres à la place qui si ça se trouve seraient rejetés par son corps, lui donnait envie de partir en prenant ses jambes à son cou. Mais enfin, au point où elle en était, de toute façon … « Parfait ! Nous reviendrons vers vous aujourd’hui pour vous faire passer des tests et examens. C’est une opération très lourde que vous allez subir, nous devons au mieux préparer votre corps à l’intervention. » Elle hocha mécaniquement la tête. « Ah, et votre mère m’a chargé de vous dire qu’elle repasserait dans la semaine. Des obligations familiales l’ont obligée à repartir pour New York. » Jon ne dit rien, mais son poing se serra visiblement. Lily, elle, se contenta de fermer les yeux un instant, autant par dépit que par déception. Comme quoi, les gens ne changeaient jamais vraiment, quoiqu’ils en disent. « Lily, concentre-toi sur toi aujourd’hui. Le reste … C’est secondaire. » Elle hocha la tête de nouveau, esquissant un faible sourire qui parut assez lamentable. Il avait raison. « Oui, votre père a raison. D’ailleurs, messieurs, vous devriez aller vous reposer. Lily va être très occupée aujourd’hui, nous allons passer la journée à la préparer, et vous ne pourrez de toute façon pas être présents pendant les différents examens. Je vous conseille de dormir. Demain, la journée risque d’être longue. Nous vous appellerons, au moins vous monsieur (en parlant de Jon), pour vous dire quand les greffons seront arrivés, et l’opération prête à être lancée. »

Le lendemain.


Il n’était pas loin de 9h du matin. Son père, devant le pas de la porte de sa chambre, faisait les cents pas en se grattant légèrement la barbe. Sa mère avait rappelé, informant les médecins qu’elle ne pourrait pas revenir pour l’opération, mais qu’elle demandait à être prévenue lorsque celle-ci serait terminée. Pendant ce temps-là, à l’intérieur, une infirmière était en train d’aider Lily à ôter le bandage qu’elle avait autour des côtes, ainsi que sa blouse pour pouvoir enduire la majeur partie de son corps d’une lotion désinfectante destinée à ôter de son corps un maximum de bactérie. Frissonnant en sentant le liquide légèrement jaunâtre recouvrir sa peau nue, l’infirmière lui passa finalement une blouse par les bras, essayant de rassembler ses cheveux qui n’en faisaient qu’à leur tête. « Dis donc, c’est une sacrée tignasse que vous avez là. » osa-t-elle dire pour détendre l’atmosphère. Ce qui eut pour effet de faire sourire légèrement Lily qui voyait bien que ses cheveux ne rentraient pas dans la taille standard de bonnets hospitaliers. Finalement, allongée sur le brancard, une perfusion dans chaque bras, elle était prête à partir. Ne manquait plus que le feu vert de l’anesthésiste et du chirurgien pour y aller. « Ça te va pas mal le petit bonnet là. » la taquina son paternel avec un air très sérieux, voulant lui-même probablement désacraliser le rituel en tripotant le dit bonnet avec son index. « Hein ? Qu’est-ce que t’en penses gamin ? » ajouta-t-il en se tournant vers Lawrence. Lily leva les yeux au ciel, le fustigeant du regard avec un sourire. Ils avaient de la chance que ce tuyau l’empêche de parler. Qu’ils en profitent, qu’ils en profitent. Et il faudrait vraiment qu'elle parle à son père concernant ce surnom de "Gamin". Elle avait beau trouver cela très drôle, il allait finir par s'en prendre une, s'il continuait à l'appeler ainsi.




@Lawrence H. Austen
©️ ACIDBRAIN
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