home is where you are (isaiha)

Baptiste n'était pas sérieux lors de sa demande pour être mon cavalier au bal. Je suis donc là, dans un lieu que je ne connais pas entourée de gens que je ne connais pas et je me sens mal à l'aise. Mes yeux mes brûlent et je me suis retenue de pleurer toutes les larmes de mon corps face au jeune Archibald. Quel connard ! Je le déteste ! Oui, carrément. Je prends un verre d'eau sur sa table. C'est peut être même son verre mais je m'en fiche pas mal. Je ne suis pas sa cavalière officielle, il n'y a donc pas de tables ni de chaises pour moi. Mon corps tremble et avant de craquer pour de bon, je sors de la salle de bal. Il faut que je sorte, il faut que je parte, il faut que je rentre chez moi d'une manière ou d'une autre. La tenue que je porte, je l'ai fais moi même. Une petite jupe sympa, un haut noir et j'ai acheté une paire de talons sur lesquels j'ai du mal à marcher, je dois bien l'admettre. Je descends rapidement les marches, tanguant un nombre incalculable de fois. Je sanglote et le verre que j'ai en main m'échappe. Je suis mal, terriblement mal. En bas des marches, je regarde à droite et à gauche. Je capte le regard d'un jeune homme et mon coeur rate un battement. " Isaiha... " Soufflais-je en courant vers lui et lui sautant dans les bras, pleurant comme une gamine. C'est ce que je suis de toute façon...

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Cette ambiance festive, cette foule, cet amas de frivolité le rendait malade et l’oppressait. Isaiha regardait ces hommes et ces femmes dans leur habit d’apparait avec froideur et lassitude. Son monde lui manquait : sa maison, sa famille et surtout le calme de la campagne de l’Ohio. Ici, il n’y avait rien de bien ni de bon pour lui. C’était un monde à part qui lui donnait envie de prendre ses jambes à son cou et retourner voir les anciens pour les supplier d’accepter sa pénitence. L’amish n’aurait jamais quitté son foyer, son avenir si ce n’était pour une bonne raison : ses sœurs. Sa famille était brisée depuis de trop longues années pour qu’il reste à nouveau passif. Cela avait été Kathleen puis Casey. Cette seconde perte avait été la perte de trop. Comment vivre sans sa jumelle ? Impossible, impensable même. Alors, comme à son habitude, il se laissa guider par cet instinct qui le ramenait toujours vers cette même personne, sa moitié, le reflet de son miroir. Où était-elle ? Son ventre se tordit comme s’il souffrait le martyre. Casey était-elle blessée ? Souffrait-elle ? Son inquiétude montra d’un cran et il pressa le pas jusqu’à ce que son regard ne croise le siens. Le temps se figea et reprit son cours que lorsqu’elle lui eut sauté dans les bras. Aussitôt les siens se refermèrent sur elle, la gardant prisonnière tandis qu’il plongeait sa tête dans ses cheveux. « Casey… Ma Casey » murmura-t-il au comble de l’émotion tant leurs retrouvailles le remplissait de joie. « Que t’arrive-t-il ma sœur ? Pourquoi est-ce que tu pleures ? Es-tu souffrante ? » lui demanda-t-il aussitôt en posant la berçant contre son torse.

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Quand tout ça se passe, je me dis que j'ai vraiment été bien idiote de croire que Baptiste n'était pas un garçon comme les autres, qu'il était quelqu'un de bon et absolument pas un con. Mais visiblement... Visiblement, il a préféré une belle brune aux formes avantageuses plutôt que moi et ma robe faite mains. Je m'en veux. Je m'en veux d'avoir été aussi idiote et d'en oublier Ethan qui m'attend à la maison. Mais plus les jours passent et moi je crois que je vais rentrer. Cependant, je suis terriblement mal à ce moment même, tellement mal que je ne rêve que d'une chose : rentrer et pleurer devant des vidéos youtube. Je ne me suis jamais sentie aussi mal et là, c'est pire que tout. J'ai l'impression de couler et j'essaye de me retenir de pleurer, de crier, de m'énerver. Je n'ai jamais ressenti de telles émotions, je suis folle, en colère. C'est donc ça la colère... Quand je vois Isaiha, j'ai un léger moment d'hésitation. Il est parti ? Pourquoi ? Isaiha ne quitterait jamais la communauté. Ça a déjà été difficile pour moi mais alors pour lui... Je lui saute dessus et éclate en sanglot dans ses bras. C'est la dose d'émotions de trop. " Tout va bien Isaiha... " Soufflais-je en restant contre lui, mes pieds ne touchant pas le sol. Un des jumeau Buchanan a été élevé aux protéines et l'autre... On sait pas trop. " Que fais-tu ici ? " Demandais-je en reposant les pieds par terre. Je le regarde et déglutis. " Maman est ... " Ma voix tremble et je le regarde, les yeux pleins de larmes, prête à pleurer encore un peu plus.

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Revoir Casey était l’un de ses désirs les plus ancrés dans son cœur, dans sa tête. Depuis son départ, il n’était plus qu’une loque, un homme incapable d’être heureux. Sa jumelle était vitale à son existence et il le comprenait d’autant mieux maintenant qu’elle était dans ses bras. Toutefois, l’entendre pleurer, la savoir aussi triste brisait son cœur. Ce monde était trop violent pour sa douce jumelle. Casey ne devait pas y passer une seule minute de plus mais comment lui faire comprendre ?! Comment la convaincre ? Elle n’avait pas hésité à se lancer dans cette mascarade de bal, lui faisant comprendre que comme Kathleen, elle avait peut-être renoncé à leur mode de vie. « Non tout ne va pas bien car si c’était le cas, tu ne serais pas en train de pleurer » répliqua-t-il en fronçant les sourcils. Il ne voulait aucun mensonge entre eux, pas après tout ce temps passé loin de l’autre. Avec douceur, il la laissa redescendre sur le plancher des vaches, caressant simplement ses joues pour y effacer toute trace de larmes. « Maman n’a rien… Sa santé ne s’améliore pas mais elle est stabilisée d’après le médecin » la rassure-t-il tout de suite afin de ne pas l’inquiéter. « Je suis venu te chercher Casey. Tu as trop tardé dans ce monde, il est temps de rentrer à la maison ma sœur » lui dit-il avec conviction teintée de cette tendresse qui perdurait toujours entre eux. Casey était son point faible, la seule chose capable de le faire quitter sa communauté, lui, l’amish le plus convaincu.

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" C'est rien, je te jure Isaiha... C'est juste que je pensais venir au bal avec mon ami Baptiste et en fait il a invité une autre fille " Soufflais-je en baissant les yeux. Un ami, oui. Parce que j'avais toujours un fiancé qui m'attendait en Ohio même si je doutais fortement y retourner un jour... J'ai mis du temps à m'adapter, ça n'a pas été tous les jours facile mais tout va bien mieux à l'heure actuelle et je ne pourrais pas repartir me couper du monde. Parce que c'est ce qu'on est au final, coupés du monde. J'avais pris l'habitude d'aller en cours, de travailler, de rire, de me faire des amis, de découvrir de nouveaux visages tout le temps... Qu'est-ce que c'était agréable. Et puis, la découverte d'internet a été une pure merveille, vraiment. Je ne suis pas née avec comme tous les jeunes de mon âge mais je m'y suis vite fais, peut être un peu trop vite d'ailleurs. Je le regarde et souris légèrement. " Ouf... J'ai cru que maman était morte " Confiais-je rapidement. Je l'écoute et fronce les sourcils. " Mais non Isaiha, je ne rentre pas. Je n'ai pas encore retrouvé Kathleen " Je ne l'ai pas revu mais je l'ai retrouvé il y a quelques jours. Enfin, c'est elle qui m'a retrouvé pour tout dire, sur internet. Comme quoi internet fait des choses merveilleuses. " La vie ici est difficile au début mais on finit par s'habituer et... J'ai eu peur au Rumspringa parce que j'étais trop jeune mais je suis tellement bien ici " Et retourner là haut, me limiter... Je n'en suis pas capable. Cinq mois loin de chez moi et j'ai tout oublié. C'est... choquant.

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Ce n’était pas rien, un homme qui prend un engagement se devait de le tenir. « Un ami n’est pas supposé vous faire pleurer. Je n’aime pas cet homme que tu considères comme un ami tout comme… tu es fiancée Casey, tu ne peux pas…enfin tu ne peux pas te montrer frivole avec un autre homme » fronça-t-il les sourcils. Ses propos pouvaient sembler archaïques, totalement déconnectés de la réalité mais il avait été élevé ainsi. Un homme se doit de respecter une femme et de prendre pour épouse celle que les anciens lui auront désigné. Le concept de l’amitié homme/femme ou même des relations épisodiques lui était totalement étranger -bien que pour le premier, il commençait doucement à appréhender la chose grâce notamment à sa colocataire Lana. Casey semblait avoir totalement oublié d’où ils venaient et malgré lui, cela lui brisait le cœur car peu à peu, il commençait à se demander s’il n’allait pas devoir oublier jusqu’à son existence. Ce serait si douloureux, si difficile. « Si tu vas rentrer, maman te réclame constamment ! Nous rentrerons tous les trois ensembles. Il est temps de réunir notre famille » lui dit-il presque avec une supplique dans la voix. Casey lui expliqua alors que la vie dans ce monde était difficile mais qu’on finissait par s’y habituer. « Arrête, tu parles comme ceux qui ont quitté la communauté… Ne vois-tu pas que nous n’avons pas notre place dans ce monde ?! Combien d’hommes doivent te faire pleurer pour que tu comprennes que tu seras toujours un agneau au milieu d’une bande de loups affamés ? » lui demanda-t-il en posant ses lourdes mains sur ses épaules frêles, son regard ancré dans le siens.

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" Mais je ne suis pas frivole ! C'est un copain Isaiha. On allait au bal en amis et j'aurais pu rencontrer ses amis " Et m'en faire un peu plus que ce que j'ai à l'heure actuelle. Manque de bol, il en avait invité une autre et moi, j'étais toute seule comme une conne. " J'aime toujours Ethan tu sais mais ça ne veut pas dire que je n'ai pas le droit d'avoir des amis garçons... Ils ne sont pas tous comme tu le crois " Bon, c'est le cas de la majorité des étudiants mais il y en a qui ne passent pas leurs journées à s'envoyer en l'air et à être débile comme leurs pieds. Visiblement Baptiste est un beau parleur mais je ne l'aurais jamais vu de la sorte si je n'étais pas venue au bal et tout ce qui va avec. Je le regarde et déglutis. " Mais j'ai pas envie de rentrer... Je... J'ai découvert des tas de choses ici, toute seule, comme une grande. Je n'ai plus de corvées, je peux... Je peux faire tout ce que je veux " Et découvrir la liberté, il n'y a rien de plus déstabilisant et de perturbant mais qu'est-ce que c'est agréable. Je suis tellement bien ici, je ne veux plus partir, jamais. J'ai critiqué Kathleen, je lui en ai voulu mais je crois que j'ai compris pourquoi elle n'est jamais revenue. Je le regarde et me retiens de pleurer à nouveau. Il a raison, je le sais. " Il y a des gens qui en valent la peine Isaiha ! Maxwell est très gentil, il n'est pas comme ça " Même si en y pensant, il a essayé de me draguer comme pas possible au début mais je n'avais pas trop compris ses intentions. " Et si je rentre, je serai quoi ? Le loup dans la bergerie " Soufflais-je. Parce que ces quelques mois ici m'ont changé et bien comme il faut...

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Elle aimait Ethan mais n’avait pas l’intention de rentrer. En somme, elle le chargeait d’annoncer à son fiancé qu’elle déshonorait sa famille en préférant vivre dans un monde bourré de vice plutôt qu’auprès des siens, de sa communauté. « Faire tout ce que tu veux mais cela signifie renoncer à Ethan, à nos parents ainsi qu’à notre lien ma sœur. Cela signifie que tu n’assisteras pas à l’enterrement de ta propre mère parce que cette liberté t’est bien plus précieuse ? » lui demanda-t-il avec amertume et tristesse. Il avait quitté la communauté pour ramener ses sœurs et voilà qu’elle lui annonçait que finalement, elle se fichait bien d’eux car elle jouait avec ce nouveau jouet qu’était le monde moderne. « Tu préfères ces English à ta propre famille, voilà ce que je constate mais c’est une phase.. Tu comprendras bien vite que tu n’as pas ta place dans ce monde. Notre communauté est mal perçue ici… Ils vont te prendre pour une idiote et se servir de ta naïveté et de ta gentillesse. Il n’y a que de la souffrance dans ce monde » persista-t-il en secouant la tête. Il avait été si heureux de la retrouver et voilà que son cœur saignait car il comprenait combien un fossé s’était crée entre eux depuis son départ. « Si tu rentres, tu seras accueillie avec amour, tu reprendras le cours de ta vie et tu épouseras Ethan. Il te respectera et te rendra heureuse puis nous pourrons vieillir côte à côte comme nous l’avons toujours été » tenta-t-il de la convaincre.

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Je le regarde et ouvre grand la bouche. " Mais elle n'est pas morte ! " Et puis, je ne renonce à rien du tout.. J'ai juste envie de rester ici un peu plus longtemps et de profiter de tout ça. Peut être que je finirai par en être dégoutée et par rentrer de moi même. Renoncer à Ethan, à ma famille, je l'ai déjà fais mais Isaiha ? Je ne pourrais pas, je le sais. La preuve, on a échangé quelques lettres les premières semaines de mon départ, ce n'est pas pour rien non ? C'est mon frère mais je l'aime plus que tout au monde, il est mon tout, mon binôme, ma force et ma faiblesse. " Ce ne sont pas des English comme tu dis. On est en Amérique Isaiha " On a pas changé de continent non plus. Je sais qu'il a raison mais je ne veux pas l'avouer, c'est trop difficile pour moi. " Et tu ne penses pas que j'ai envie de changer ça ? De changer la façon dont les gens nous voient ? Kathleen s'est adaptée pourquoi pas nous ? " Étais-je entrain d'envier ma soeur ? Oui, un peu. Je le regarde et fais un léger pas en arrière. " Bien sûr... Je l'entends mais... On peut très bien vivre ici l'un à côté de l'autre " Soufflais-je en baissant le regard. Je doute qu'il ait pour idée de rester là et d'abandonner sa fiancée. " Où vos-tu ? " Demandais-je en fronçant les sourcils.

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« Pour le moment mais tu sais combien sa santé est fragile » poursuivit-il sur le même ton en usant ou abusant de la fibre sentimentale pour lui faire prendre conscience tout ce qu’elle avait à perdre. Leurs parents avaient été déshonorés depuis la fuite de Kathleen puis celle de Casey. Ils ne survivraient pas à la perte d’un autre enfant. Pis, Isaiha leur avait promis qu’il reviendrait et reprendrait sa place auprès de la communauté mais également d’Anna. Sa fiancée avait placé sa confiance en lui, il ne pouvait la trahir même si dire adieu à Casey serait comme s’arracher le cœur. « Ils sont étrangers à notre communauté » répondit-il en secouant la tête de droite à gauche. Sa jumelle était aussi butée que lui par moment mais il ne pouvait tirer un trait sur elle, comme ça du jour au lendemain. Il avait besoin d’un peu de temps pour la convaincre tout simplement. « Kathleen nous a abandonné Casey ! Elle a tourné le dos à la communauté… Elle a brisé le cœur de notre mère et le nôtre au passage. Tu as envie d’être comme elle ? » lui demanda-t-il en ne supportant presque pas son léger pas en arrière. Elle s’éloignait déjà de lui. « Ma place est auprès de notre famille et d’Anna… Je suis simplement venue te convaincre de revenir avec moi. S’il te plait Casey… ne me demande pas de choisir entre eux et toi, tu es ma sœur jumelle… On s’est promis de ne jamais se séparer » lui dit-il en la regardant avec tristesse. « Je loue une chambre non loin du campus à une étudiante » marmonna-t-il car il avait conscience que de vivre dans le même appartement qu’une femme était pour le moins inconvenant.

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