in the shadow of your heart ► (sixoghan)

Je savais qu'elle me repousserait, je savais qu'elle le ferait d'instinct mais je ne savais pas quand... Je m'approchais dangereusement de sa personne et elle ne broncha point, ce qui me rassura. Ces trois derniers mois nous avaient beaucoup rapprochés, elle et moi. J'avais vu cette fille dans ses plus mauvais jours et je l'avais vu blaguer et sourire quand ça allait un peu mieux. J'avais été non seulement le médecin attitré à son dossier, mais encore un confident, un ami, un psychologue même parfois. Sixtine n'était pas quelqu'un de facile à vivre, ni même quelqu'un qui se livrait dans de grandes confidences mais elle se sentait bien avec moi, je le voyais dans ses yeux. Je ne cessais de penser à cela lorsqu'une envie m'obséda. Un besoin irrépressible. J'avais vraiment envie de savoir.. De savoir ce qui l'avait poussé à pianoter sur son clavier de téléphone mon numéro alors qu'elle avait tout pour occuper son esprit. Ça m'obsédait même, ça me démangeait et quand elle me dit qu'elle ne savait pas, je ne la crus pas, pas instantanément du moins. «Parce que tu n'as qu'à le dire, que tu voulais me voir et que je te manquais » et ouais, j'avais osé. Pourquoi je me gênerais après tout? Je la vis se mordre les lèvres et cela me rendit dingue, vraiment dingue. Je passai une main dans mes cheveux. Elle me manquait déjà. Je sais bien qu'il ne fallait pas parler de la sorte mais j'étais malheureux quand elle n'était plus dans les parages, quand je ne pouvais plus m'occuper d'elle. Dans ma tête, j'étais soulagé de la voir doucement guérir et ne plus être hospitalisée était en soi un miracle,mais d'un autre côté, ne plus aller dans sa chambre lors de ma tournée quotidienne me manquait terriblement. J'avais pris l'habitude d'aller lui parler en dernier, pour avoir le maximum de temps avec elle. Ce serait de mentir que de me dire insensible à son charme. « J'ai beau t'en vouloir d'être aussi insouciante, je suis content de te revoir » Je ne me dérobais pas, moi.

Je faillis sursauter lorsqu'elle me nomma par mon nom complet, même que je grimaçais lorsque j'entendis le prénom Jules sortir de ses douces lèvres. Je détestais ce prénom, et elle le savait. Je lui fis un de ses regards, je crois qu'elle avait compris.  Elle me poussa de son index, pour que je lui fasse de l'espace, mais moi j'avais pas envie de lui donner de l'espace, je voulais lui bouffer son air. Elle se lanca dans un long monologue que j'écoutai en ne détournant point mon regard. « Je suis un grand garçon, je sais ce que je fais... » Elle avait marqué une pause et me fit des aveux remarquables, j'étais étonnée qu'elle aille droit au but, jouant avec la franchise. Était-ce l'alcool qui la rendait aussi bavarde? Sans aucun doute... Mais j'aimais qu'elle révèle ce qu'elle ressentait à mon égard. J'étais une bouée de sauvetage, elle était accrochée à moi, je repassais ces mots dans ma tête et putain comme cela sonnait bien. Un sourire esquissa mes lèvres, je ne parvenais pas à dissimuler ce que je pensais, tout se lisait dans mon regard, dans mes expressions faciales, bref je dégageais tellement beaucoup. « T'es devenue une amie davantage qu'une patiente et je sais que tu m'as appelé parce que t'avais besoin de me voir, tu l'as dit toi-même t'es accrochée à moi.. » disais-je en rompant la distance qui s'était installée entre nous deux. Je replaçai une de ses mèches derrière son oreille d'un geste plein de douceur et de tendresse. Il y a des lustres que je n'étais plus son médecin.

Non, je n'étais sûr de rien. À vrai dire, avec Sixtine tout n'était que confusion. Avec elle, je nageais en eau trouble et je me sentais égaré, perdu. Quand je la regardais dans ses yeux, je m'y perdais. Je ne pouvais plus faire la différence entre le bien et le mal. Je haussai les épaules « J'aimerais bien te dire que je suis sûr de moi mais non je ne le suis pas. Mais j'aime prendre des risques... » Je sais que je joue à un jeu dangereux. Je sais que je devrais pas, que je risquais de m'y brûler que je risquais gros et pourtant , pourtant, l'attirance était là, et elle l'a toujours été. Dès le premier regard, j'suis tombé sous son charme, son charme indéniable. Et même si cette fille était parfois tellement difficile à suivre, j'aimais le fait qu'elle représente un défi, j'aimais le fait qu'elle soit difficile d'approche. Mais je commençais à la cerner. Je la connaissais depuis seulement trois mois, j'avais pourtant l'impression de la connaitre depuis toujours. Puis, je la vois sursauter lorsque je plaçai une mèche derrière son oreille, je souris,  amusé qu'un geste aussi anodin puisse lui être aussi toxique « Arrêter quoi, Six'?  » je me mordis les lèvres, je faisais le sot mais je savais très bien de quoi elle parlait. Elle n'aimait pas que je lui bouffe son espace, elle n'aimait pas que je la touche parce qu'elle n'avait plus le contrôle, et elle détestait cela. Elle ne voulait pas s'accrocher, disait-elle, elle ne le pouvait pas, soufflait-elle. Est-ce qu'elle pensait à Tessa? « Tu ne peux pas être simplement une amie? J'veux pas être seulement l'interne de service qui s'occupait de ton dossier tu comprends, je veux faire partie de ta vie, je veux.. qu'on soit amis voilà, je ne sais pas quoi dire d'autres! » Et si je m'approchais encore un peu... et si je jouais encore avec le feu? Mon corps tout entier se mouva vers elle, comme si elle était un champ magnétique, et moi un aimant. Il ne fallait pas, non...

Je passe ma main dans mes cheveux, nerveusement. Ce qu'elle pouvait être déstabilisante parfois. « Putain, Six' tu me prends au dépourvu là, je sais pas quoi te dire.. » je me mordis les lèvres. Je sais , je sais ce qu'elle veut. Je le veux aussi, d'une certaine façon. Je sais qu'on est pas que des amis, qu'on a dépassé ce stade dès que j'ai posé mes yeux sur sa si belle personne. Le coup de foudre qu'on dit. Oh oui, le coup de foudre. « Mais c'est mal... On peut pas avoir plus » J'essayais de me convaincre mais même pour moi, ça sonnait faux. Nous étions les seuls à nous mettre des bâtons dans les roues. Les seuls maîtres de notre histoire. Si on avait envie d'aller plus loin, il suffisait de sauter le pas. Elle disait vouloir plus, quel sombre idiot, pourquoi tu ne te jettes pas sur elle? Tu l'aimes bien non? T'es qu'un idiot voilà tout! Je me désespère, franchement je me désespère. Mais l'alcool lui déliait la langue, j'pouvais pas en profiter. J'étais trop gentil, trop bon, trop trop trop. MERDE! T'es si proche que je  peux sentir ton odeur sucrée mélangée à celle du rhum. Putain, j'ai envie de t'embrasser là, maintenant. À cet instant tu explosas ta rage mais je vins t'attraper, par le poignet avant que tu ne détaches entièrement de moi je glisse une main contre ta nuque « NON! NE PARS PAS » J'attire son visage contre le mien, et puis merde, je laissais tomber mes remparts et doucement, très doucement je vins effleurer mes lèvres sur les siennes sans toutefois les embrasser. j'avais peur, peur de souffrir comme un merdeux, comme avec Tessa, mais j'avais peur, peur qu'elle ne soit plus dans ma vie, peur de la perdre. Cette peur là était bien plus grande que tout le reste. C'était ce qui me poussait toujours vers elle.

Non, je ne savais pas ce que je voulais, je me sentais partagé entre deux idéologies, deux modes de pensées. Je ne voulais pas répéter mes erreurs du passé et je ne voulais plus souffrir. Plus jamais. « Je ne l'ai jamais su avec toi, Six. » c'était bien vrai. Je n'ai jamais su sur quel pied danser avec elle. Pourtant je voyais bien que l'attirance était partagée alors pourquoi hésitais-je encore? Elle se détacha de moi et je ne pouvais le supporter. Je la saisis par la nuque, encore indécis j'avais effleuré mes lèvres sur les siennes. Je me doutais bien que je ne pouvais plus reculer. La brunette profita de l'occasion pour sceller ses lèvres sur les miennes, prolongeant le baiser en douceur.  « c'est de ta faute, je ne peux te résister » Puis je l'écoutai, je l'écoutai me parler du fait qu'elle ne pouvait se battre sur deux fronts. Elle avait raison, je le sais. Je détournai mon regard, c'était trop pour moi. Même sous influence de l'alcool, elle parvenait à avoir toute sa lucidité. Elle était ce dont j'avais besoin. Elle se mit à parler de Tessa. Non. Pas elle, pas ça. Je détestais qu'on parle d'elle. On me l'avait arraché injustement et évidemment, je ne voulais pas que ça se reproduise avec elle. Elle relève mon menton du bout de ses doigts, je soupire, je parviens enfin à prendre la parole, après une longue période de mutisme « Pourtant j'ai tout de même l'impression de revivre ce qui s'est passé. J'ai toujours un faible pour ce qui me fera souffrir, on dirait bien »  je haussai les épaules. J'ouvris la bouche à nouveau, Je passais une main maladroite dans ses cheveux, du bout de mes doigts, je les touchais. « Et si on y allait en douceur? »