in the shadow of your heart ► (sixoghan)

C'était toujours lorsque je m'attendais à une soirée des plus platoniques qu'on me prenait par surprise. J'aimais bien être dans mon lit, à regarder Jimmy Fallon sur mon portable, je pouvais me détendre après une semaine plutôt intense. Mon internat n'était pas toujours de tout repos même si apprendre la médecine, et aider les gens étaient plutôt gratifiants, c'était aussi épuisant d'enchaîner les heures de garde et de faire le tour de l'horloge avant de pouvoir enfin fermer les yeux. D'ailleurs, mes paupières se fermaient d'elles-même, sans que je ne puisse avoir le controle sur ses dernières et j'étais en train de sombrer dans un sommeil des plus profonds lorsque mon téléphone sonna. Je pris soin de regarder qui avait l'audace de m'appeler à pareille heure et constatai que c'était Sixtine. Mais pourquoi elle m'appelait dabord? « Allo? Il y a quelque chose qui ne va pas? Pourquoi tu m'appelles ? » Sixtine éclate de rire et je fronçai les sourcils. « Je voulais juste entendre ta voix beau brun.. » Je clignai des yeux, plutôt incertain d'avoir bien entendu « Quoi? Sixtine, va te coucher il est tard et puis t'as une longue semaine qui t'attend .. » Je raccrochai sans plus tarder. Qu'est-ce qui lui prenait? Je mis les cinq prochaines minutes à me remettre de son coup de téléphone et j'en mis cinq autres pour me décider à la rejoindre dans sa maison. J'enfilai ma veste en cuir et me dirigeai à pied vers les Dunster. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre mais quand j'arrivai, j'entendis de la musique. Une fête. Voilà ce qui se tramait ici. En quel honneur ? Je n'en savais trop rien mais quelque chose me disait que je n'allais pas tarder à le découvrir. J'entrai sans problème dans la demeure des Dunster puisqu'il y avait beaucoup d'achalandage dans le hall d'entrée. Parmi les gens déjà présents, je recherchais ce visage si singulier, qui hantait parfois mes pensées ces derniers temps. Je souris aux gens qui me regardaient et puis je la vis, elle parlait, un verre à la main avec une amie ou une connaissance, cela m'importait peu. Je soupirai longuement. J'osais espérer l'impossible , mais je savais qu'il y avait de l'alcool dans ce verre. Je m'avançai donc vers elle et lui tapotai doucement l'épaule « C'est donc pour ça que je te trouvais bizarre, t'es ivre Six' ?  » mon regard était noir de jais, assombri par mes propres sentiments. J'étais son médecin, enfin son interne attitré mais mon patron me laissait souvent m'occuper de nos patients réguliers sans y mettre son grappin. Sixtine était une de celles-ci. Mais, elle était bien plus que ça, bien plus qu'une patiente j'entends par là. Et quand je la voyais s'auto-détruire comme ça alors qu'elle devait se battre et maintenir sa bonne santé, ça me rendait malade.

Même si j'avais essayé de rester chez moi, je n'avais pas pu, pas en l'entendant. J'avais soupçonné la chose, comme si j'avais eu un sixième sens. Puis sans vraiemnt réfléchir je m'étais précipité ici, inquiet. Mais je ne devais pas être ainsi, je devais pas me soucier d'elle. Elle était JUSTE une patiente et moi j'étais juste son interne, voilà tout. Et pourtant voilà mes pas qui foulaient le sol à sa recherche. Quand mes yeux se posèrent sur elle, je soufflai un bon coup. La belle se leva pour me faire face. « Bon je te le concède tu n'es pas ivre mais tu n'es pas supposée boire de l'alcool.. » Elle me toise de ce regard que je lui reconnaissais aussitôt. Elle était d'une arrogance, je roulai des yeux .« Tu te fous de moi? On dirait que tu parles comme si boire de l'alcool n'était rien, mais il peut entrer en conflit avec certains de tes médicaments, c'est hyper dangereux. » Je haussai les épaules et puis je plongeai mon regard dans le sien, comme elle venait de le faire je me suis dit que je ne me gênerais pas. J'étais un peu froissé. Je ne voulais pas qu'elle soit encore plus malade qu'elle ne le soit déjà.« Et puis c'est quoi cette fête?  » demandais-je alors que j'abaissais mes gardes, d'un ton un peu plus doucereux. Mon regard, lui, cependant était encore dur. Comme un père qui grondait sa fille. C'était plus fort que moi, d'agir de la sorte. Trois mois que je la côtoyais à tous les jours et que j'apprenais à la connaître. Sous cette façade explosive se cachait une femme de coeur, et cette femme m'avait touché. Je ne voulais pas qu'il lui arrive quoique ce soit. J'étais donc accouru en recevant son appel. Même si elle ne m'avait rien demandé. Parce que je ne peux réprimer mes besoins, mes besoins de la protéger, c'était curieux!

Non, je n'avais pas réalisé qu'on se trouvait dans sa chambre, en fait je ne réalisais rien du tout. Il n'y avait que nous deux, depuis que j'étais entré. J'avais même pas remarqué que son amie avec laquelle elle conversait quelques minutes plus tôt était partie en s'éclipsant subtilement. Elle avait peut-être pressenti les choses. Peut-être croyait-elle que ça allait chauffer. Elle n'avait pas tord. Deux explosifs dans la même pièce, cela pourrait engendrer un cataclysme. « Tu ne comprends donc pas... » Je me pris la tête entre les mains, la secouant négativement de surcroît. Non, elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait rien. Il ne s'agissait pas d'un inconfort. On parlait du cancer, le cancer était un meurtrier. Un puissant meurtrier qui plus est. Elle jouait avec le feu et elle savait et ça me faisait suer.« On fait ça pour ton bien... » disais-je en la fixant du regard. Je n'avais aucunement l'intention de le détourner d'ailleurs, je voulais que ça l'intimide, et même peut-être un peu, que ça la consume entièrement.« En quel honneur?  » demandais-je en parlant clairement de cette fête. Ses paroles pleine d'amertume me fit l'effet d'une giffle mais je me gardai bien de le lui dire. À l'instar de cela, je me mordis rageusement les lèvres et grommelai entre mes dents « C'est pas moi qui suit malade. J'aime les fêtes, je les adore même mais toi, pour le moment, t'es pas autorisée à boire. Alors .. » Je lui arrachai le verre de ses mains et en jetai le contenu dans sa poubelle. Elle ne manqua pas de me signaler son mécontentement mais je m'en fichais. Je fermai les yeux. « Allez viens, on va prendre l'air.. Si tu veux me faire une scène aussi bien le faire quand personne ne regardera »

Je me retins d'éclater de rire de la voir aussi indignée que je lui aie retiré son verre d'alcool. Tant pis pour elle, elle jouait trop avec le feu et à force de jouer avec ce dernier on finissait toujours par s'y brûler. « Effectivement je ne me gêne pas... »  Et pourquoi le ferais-je d'ailleurs? Je le regardais, le dos bien droit , j'avais l'air indestructible mais au fond de moi, j'étais fragile, sensible à ce qu'elle me disait, et à ses réactions - que je trouvais franchement exagéré - Réagissait-elle toujours ainsi lorsqu'on prenait soin d'elle. Ces trois derniers mois m'ont appris que si, elle le faisait pour se protéger, parce qu'elle avait peur, qu'elle était tétanisée. Et ça se comprenait, après tout , le cancer c'était pas quelque chose d'habituel surtout pas à son âge. Il y a mille et une façon de célébrer ta victoire contre ta maladie tu sais.. » mon regard s'adoucit alors qu'autrefois il était si dur si hostile. Mais comme toujours quand je baissais ma garde, Sixtine faisait tout pour que je le regrette... Je soupirai longuement « Ce que tu peux être entêtée parfois, Sixtine » Je levai les yeux au ciel et puis je la fixai longuement. Je crus rêver lorsqu'elle mit la clé de  sa chambre dans son profond décolleté. J'écarquillai dabord les yeux de stupeur. Mais pourquoi? Voilà le seul mot qui me venait en tête pourquoi? Elle aurait pu me laisser partir pour que je lui fiche la paix , à la limite on aurait pu discuter tranquillement à l'extérieur mais non Sixtine Errington était une maniaque du contrôle. Elle devait toujours avoir le dernier mot de l'histoire. Je souris, visiblement amusé par ce geste que je n'aurais jamais cru capable de faire quoiqu'avec elle tout était possible « Tu sais que je peux venir la chercher hein? » disais-je en arquant les sourcils, d'un ton un peu plus rauque qu'à l'habitude.

Avant tout le reste, il fallait comprendre qu'entre elle et moi il y avait une connexion que je n'arrivais pas du tout à comprendre - et j'étais persuadé qu'elle non plus n'y parvenais pas. Depuis le tout premier jour , j'avais su que cette fille n'était pas comme les autres.. Arrogante et incroyablement énervante, plusieurs devaient la haïr pour son tempérament explosif mais moi, moi j'étais resté, j'étais resté jusqu'au bout. Avec mon supérieur, on avait été aux petits soins avec elle, même si elle refusait de me faire confiance elle avait fini par démontrer des signes de faiblesse. Elle avait commencé à s'adoucir en ma présence. Et puis quand enfin on se lia d'amitié, une amitié étrange presqu'illicite, je lui avais donné mon numéro en lui rappelant qu'elle pouvait m'appeler en tout temps, jour et nuit, que je serais là pour elle. Et voilà que la brunette m'avait appelé, à une heure tardive en ce vendredi soir, pour je ne sais quelle raison.« Tu oses me défier? » je fis claquer ma langue d'un air joueur dans ma bouche et j'avançai doucement vers elle. Je jubilais face à son expression apeurée et je devais lutter corps et âme pour ne pas faire éclater au grand jour mon ultime hilarité. « Pourquoi tu m'as appelé Sixtine? » demandais-je en plongeant intensément mes yeux dans ses prunelles dorées. J'avais besoin de comprendre pourquoi elle avait eu envie, alors qu'elle était entourée de ses meilleures amies, de me parler à moi plutôt qu'à n'importe qui d'autres. J'étais maintenant à son niveau, enfin c'est vite dit, elle est si minuscule que je la dépasse de presque deux têtes.