Azmy - I'm not jealous

Merde, merde, merde. J'étais en retard. Très en retard, trop en retard. La faute à mon jean qu'avait pas voulu s'fermer. J'crois que j'avais pris du cul ou quelque chose comme ça. Bref, j'avais fini par enfiler un collant et une tunique, moins contraignant. Et maintenant, j'me retrouvais à courir à travers les rues pour pas manquer mon cours. Dix minutes de retards et j'serais refusé et.. Bah, j'étais déjà à douze, autant dire que c'était mal partie. Bref, j'tentais le tout pour le tout franchissant les portes de l'université à toute vitesse. Tommy sur la droite. La salle de cours un couloir plus loin. Tommy sur la droite avec une nana. Fuck off. Je tapais un stop en plein milieu revenant sur mes pas. Pourquoi ça m'énervait d'ailleurs ? Stupide. Je remettais mes cheveux en place regardant blondie à moitié affalé sur un des casiers tentant probablement de charmer Tommy avec ses battements de cils. Rêve meuf, rêve. Pour la peine je m'incrustais entre les deux me servant de mes fesses qui avait légèrement prit en volume pour la pousser. C'était un gentil "casse toi" en fait. Et j'regardais Tommy avait mon air étrange. C'était bizarre parce qu'en fait, c'était probablement la première fois que je le voyais en dehors du théâtre. C'est qui "elle" ? Et j'accentuais bien comme si je considérais plus l'intrus comme une chose. Ou une grosse vache, façon de voir les choses.

Elle était arrivée tellement vite que Tom n’avait pas remarqué sa présence au début. Elle s’était positionnée pile au milieu de lui et de la blonde avec qui il parlait, lui offrant une expression qu’il avait du mal à déchiffrer. Il n'avait jamais remarqué à quel point elle était petite de taille; à côté il semblait géant. Encore une chose qu’il découvrait en la regardant dans le monde réel. Il était sûr que si elle devait l’embrasser, là tout de suite, elle devrait se mettre sur la pointe des pieds. D’ailleurs elle devait légèrement lever la tête pour le regarder dans les yeux. La blonde derrière elle, avait un air confus sur le visage mais elle se contenta de faire un signe de la main à Tom avant de s’en aller. Il remit toute son attention sur Azraël. ”Oh, salut, Az”, il répondit doucement avant de mettre ses mains dans ses poches. ”C’est-c’était ma partenaire de laboratoire”, il avait parlé de biochimie avec elle mais c’est sûr qu’elle avait essayé de le draguer aussi. Ça, il n’allait pas le préciser. Il ne savait pas pourquoi d’ailleurs. ”Ça va? Il y a un problème?”, il avait demandé calmement avec un petit sourire qu’il n’avait pas pu empêcher.

Bref, je l'aimais pas. C'est tout. C'était physique en fait. Et puis elle était proche de Tommy alors forcément, j'pouvais pas l'apprécier. Pas quand elle battait des cils devant lui comme si ça pouvait le faire craquer. Est ce que ça le faisait craquer d'ailleurs ? Parce que moi, j'trouvais ça stupide. Et j'avais pas envie qu'il craque sur la première blonde décoloré. Jalousiiiiiiie. ”Oh, salut, Az” Ouais ouais, fais comme si y avait rien, t'as raison. ”C’est-c’était ma partenaire de laboratoire” Et depuis quand on roucoule avec sa partenaire de laboratoire ? Hein ? Non mais vraiment. J'poussais un soupir tentant de ne rien montrer mais, rien que le fait que je me pointe ici coupant court à leurs discussion prouvait que ça m'posait problème. ”Ça va? Il y a un problème?” Ravale ton sourire Tommy, c'est absolument pas amusant. Pourquoi y aurait un problème ? que je répondais haussant les épaules. Ouais, pourquoi ? Et j'continuais à le fixer, gardant la tête levée vers lui. Non mais pourquoi avait-il fallut que je ne fasse que la taille d'un polly pocket, c'était contraignant en vrai. Tu m'évites ou j'me fais des idées ? Mais j'crois bien qu'il m'évitait.

Il avait cet air indifférent et nonchalant sur le visage qui lui était propre, pourtant, il était loin de l’être. Elle le perturbait, elle l’avait toujours perturbé. Et lorsqu’il la voyait comme ça, clairement irrité par la proximité qu’il avait eu avec quelqu’un d’autre, il ne pouvait pas s’empêcher de sentir un truc bizarre au fond de lui. Comme une sorte de soulagement. Il n’était pas intéressé par la blonde de toute façon. Elle essaya de ne rien montrer mais son soupir l’avait trahi. Tom la connaissait, il l’avait observé, il connaissait ses tics. ”J’sais pas”, il haussa les épaules, sachant exactement qu’elle savait ce qu’il voulait dire. C’était fou comment leurs discussions n’évoluaient jamais comme un constant déni de la réalité. Il la fixait avant de répondre. Elle l’évitait aussi, c’était un fait. Ils en étaient tous les deux conscients. ”Tu te fais rare toi aussi.” Non. Ne rejetes pas la faute sur elle. ”Y’a juste beaucoup de bosse avec la fin du semestre, c’est tout”, c’était à moitié vrai. Il avait passé des heures à la bibliothèques, des nuits blanches à réviser mais il avait aussi fait attention à ce que Az ne soit pas dans les parages. ”Tu vas bien?” Bizarrement, elle lui avait manqué. Plus que ce qu’il avait pensé.

Tout comme je le faisais en fait. Parce que ouais, moi aussi je l'avais évité. Jusqu'à aujourd'hui. Jusqu'à ce que je le vois avec cette fille et que ça m'agace au plus haut point. J'aimais définitivement pas ça. J'aimais pas le voir avec une autre alors que.. J'avais probablement pas mon mot à dire sur tout ça. Mais ouais, ça me fâchait et j'étais même pas en mesure d'expliquer pourquoi. ”J’sais pas” Et comme toujours, le dialogue de sourd. Les réponses qu'on évitaient, qu'on ne voulait pas dire. J'savais pas combien de temps on pouvait tenir comme ça mais à l'évidence, on était tout les deux plutôt doués. ”Tu te fais rare toi aussi.” Lève les yeux au ciel et esquisse un sourire ironique. C'était trop facile de me mettre en position de fautive. C'était pas non plus comme si j'avais délibérément cherché à ne pas le voir. Ou peut être que si, inconsciemment. ”Y’a juste beaucoup de bosse avec la fin du semestre, c’est tout” Ouais, c'est tout. Et pourquoi la réponse ne me convenait pas alors ? Je vois. Réponse montrant explicitement que ça ne te convenait pas. ”Tu vas bien?” Ça va que tu répondais du tac au tac sans pour autant lui retourner la question. Et maintenant ? Chacun de son côté ? Comme à chaque fois ? Non, j'avais pas envie. Alors j'faisais glisser ma main jusqu'à la sienne effleurant doucement sa peau avant de juste enserrer mes doigts avec les siens. T'as cours là ?

C’était comme un jeu à qui aller craquer en premier. Ou qui allait être le plus courageux. Il était courageux, Tom, c’était pas le problème. Il y avait juste quelque chose qui l’empêchait de se lancer. Il ne voulait pas perdre leur amitié, et si ça ne marchait pas? Qu’ils finissaient par pas s’entendre, qu’ils ne soient pas fait pour être ensemble, juste pour jouer de la musique et s’regarder bizarrement de temps en temps? Il n'avait jamais vu Az sous cet angle là et maintenant que c’était le cas, il ne savait pas trop quoi en penser, à part qu’elle était énervée et que ça lui plaisait pas. Elle glissa sa main vers la sienne et il ne pouvait plus la quitter du regard, plongeant ses yeux dans les siens. Pourquoi? Pourquoi ça me fait cet effet quand tu m’touches? Elle lui demandait s'il avait cours. Ouais, dans deux minutes. ”Non.” Il ne retira pas sa main, profitant du contact de sa peau sur la sienne. ”Ouais, sortons d’ici”, ont commencé à les regarder bizarrement de toute façon. Il voulait être le seul à apprécier sa beauté.

Arrête. Arrête d'agir comme ça. Ouais, j'devais arrêter. Stopper de le regarder de la sorte, de le toucher dès que j'en avais l'occasion. C'était nocif au fond. Parce qu'il y avait toujours cette absence de parole qui n'aidait pas, ce problème qu'on avait tout les deux pour s'exprimer et ce silence qu'arrangeait rien à notre situation. C'était triste au fond. Mais j'pouvais pas m'en empêcher. C'était le même sentiment qui m'avait fait faire demi tour quelques minutes avant quand mon regard avait croisé le sien, le même sentiment qui m'avait mis en colère parce qu'il était avec une autre, le même sentiment qui faisait que je lui prenais la main maintenant comme si c'était normal. Comme si j'avais le droit d'agir comme ça. ”Non.” Cette fois, j'souriais vraiment. Peut être bien qu'on l'aurait pas cette stupide conversation. Qu'on y arriverait juste pas mais il était libre et j'savais que j'pouvais l'avoir pour moi pendant quelques temps. Mieux que rien diras t'on. ”Ouais, sortons d’ici” J'hochais la tête en accord avec lui. Sortir d'ici, s'retrouver en tête à tête. Juste lui et moi, ça sonnait comme un bon plan. Et toujours ma main dans la sienne, je l'entraînais à l'extérieur sans me soucier des regards et des rumeurs qui risquaient de voir le jour. regarde Az tiens la main de Tommy, tu crois qu'ils sont ensemble ? Ouais, je les entendais venir de loin les questions et je m'en fichais, j'voulais juste être avec lui maintenant. Y avait pas à chercher plus loin. J'dois te parler d'un truc. On était à l'air libre et je l'avais entraîné derrière le muret, là où je me planquais pour étudier quand le temps était clément. Prenant place sur le tas d'herbe à disposition, j'lui faisais signe de s'asseoir aussi. J'suis enceinte.

Ça lui a fait le même effet qu’une gifle en plein visage. Il avait senti que c’était sérieux quelque chose dans le ton de sa voix. Un truc, elle avait dit. Pourtant, il n’avait pas vraiment su à quoi s’attendre. Est-ce qu’elle allait finalement en parler, dire ce qu’elle avait sur le coeur? Parce qu’il ne pensait pas être prêt à l’entendre, à lui en parler lui aussi. Et puis elle avait fini par continuer. Sa main dans la sienne était lourde tout à coup, comme un poids sur son corps, l’herbe sur sa peau le chatouillait, le soleil l’aveuglait. C’était un de ces moments. Quand quelque chose change, quand on se prend tout dans la gueule, quand on observe les autres continuer leurs vies autour de nous comme si ça ne les avaient pas affecté, ce qu’on vient tout juste d’entendre. Et puis il s’était rendu compte qu’il n’avait encore rien dit. ”Oh, eum, j'savais pas que tu…” voyais quelqu’un d’autre, qu’il y a un autre gars. Non, ce n'était peut être pas la bonne chose à dire. ”J’veux dire félicitation”, il avait vite rectifié avec un doux sourire. Il aurait pourtant pu juré qu’elle était célibataire. Apparement non. Pourquoi est-ce que ça le rendait malade?

J'balançais ça d'une voix morne. Sans vraiment d'émotion. D'toute manière, c'était pas comme si j'étais heureuse de cet.. Evenement. Bien au contraire. J'voulais pas de tout ça en fait. Ça me tombais sur le coin de la gueule et j'pouvais rien faire contre à part assumer. Et je le disais à Tommy. J'savais pas pourquoi mais j'en avais eu besoin. Pas pour me libérer d'un poids mais parce qu'il me semblait qu'il méritait de savoir. De l'apprendre de ma bouche, par mes mots. Pourquoi ? Je lui devais rien au fond. Mais j'avais l'impression que si, peut être un peu. Et j'avais juste le droit au silence. Silence que je gardais moi aussi. Alors c'était ça ? Pas de réaction, rien du tout ? Ça pouvait durer longtemps en fait. J'aimais pas. Et puis non, il parlait finalement. ”Oh, eum, j'savais pas que tu…” Que je quoi ? J'haussais un sourcil attendant là suite. Y avait bien une suite non ? ”J’veux dire félicitation” J'baissais les yeux mal à l'aise. Merci.. Il était vraiment heureux pour moi ? Non, j'en doutais. J'savais pas. C'est un.. Accident. Je.. Une nuit et voilà. J'voulais pas. J'poussais un soupir incertaine de mes mots. Mais j'voulais qu'il sache au fond que y avait de la place pour lui. S'il en avait envie. Ça fais deux mois, j'viens de l'apprendre et.. J'ai merdé hein ? Et j'avais les mains qui tremblait un peu, le regard perdu. J'avais peur surtout.

Bien sûr que Tom était heureux pour elle. À chaque fois qu’elle souriait il ne pouvait pas s’empêcher de l’imiter, il aimait la voir heureuse. Il savait qu’il n’avait pas le droit de se sentir comme ça mais il ne pouvait pas s’en empêcher. Il voulait ne pas être en colère contre elle d’avoir balancé l’information aussi brusquement, d’attendre de lui qu’il le prenne comme si de rien n’était, comme si ce n’était pas grand chose. Il préférait le savoir maintenant, une partie en lui était reconnaissante qu’elle lui ait dévoilé sa grossesse mais ça ne rendait pas les choses plus faciles. Il détestait la voir comme ça, mal à l’aise, triste, terrifiée. ”Hey”, il pris ses mains tremblantes dans les siennes. ”T’as pas merdé, ça va aller, t’en fais pas.” Il la pris dans ses bras histoire de la calmer. Elle n'avait rien fait de mal, elle n’avait aucun compte à lui rendre, il n’avait pas le droit de la rendre responsable de quoi que ce soit. Il n’arrivait juste pas à réaliser ce qu’elle venait de lui dire.