Je sais pas ce que je veux. J'veux que tu sois heureux, je veux l'être aussi. Je sais que c'est pas comme ça que ça marche, qu'on y arrivera pas de cette manière. Mais j'en ai marre tu vois, de faire comme si, de te dire que je serais ton amie parfaite et que c'est le passé, j'en ai marre de jouer sans jamais gagner. De provoquer ta peau sans atteindre tes lèvres. Alors voilà. Et maintenant ? Je fais ce qui est le mieux, je fais comme toi, j'essaye. Je tiens quelques secondes avant de revenir me coller à ta silhouette. Ridicule. On est deux gamins et on sait pas ce qu'on fait. On est peureux et faibles. On a peur de demain, d'être seuls, de la douleur qui attend qu'on baisse les yeux pour nous sauter sur le dos. Puis tu te tournes, et j'aime pas ce regard, la tristesse l'habite, le ternissant. C'est pas comme ça que ça devrait se passer, mais on sait très bien qu'il n'y a aucun happy end pour nous. C'est pour les autres. D'autres combinaisons. Toi et elle par exemple. Je sais que ça commence à te ronger, doucement, et j'espère juste réussir à ralentir le processus. Un peu. Pour qu'on respire un moment, avant d'être plongé la tête sous l'eau. Combien de temps ça va nous prendre pour que le fleuve soit à nouveau tranquille ? On est allé trop loin, sûrement, j'en sais rien. On a toujours repoussé les limites, comme si rien n'était assez grand pour nous. « J'peux rester jusqu'à demain. » Un sourire de gamine se trace sur ses lèvres, d'heureuse tourmentée. Soulagée surtout. Comme si quelques minutes, heures de plus, allaient résoudre tous les problèmes. Emmène moi où tu veux, je suis nos mains. Je sais rien faire d'autre, de toute façon, que de rester dans ton paysage. « J'vais ranger ça. » Tu t'affaires, et moi j'reste plantée au milieu du salon. Faut que je le dise : « J'attends rien de plus. » Sa voix s’éclaircit, et semble se perdre dans la pièce. Le regard fixé sur l'homme, un pas qui s'en approche. J'ai déjà eu trop, et je vais le payer. Mais ça serait mentir que de dire que je ressens une once de regret. « Antwan, j'attends rien de toi. » J'te demande rien, je suis une grande fille qui a arrêté de rêver depuis longtemps. Je ferais de mon cœur un secret absolu, faut pas que t'ai peur de ça. Sauf quand t'es là, il a tendance à vouloir s'exprimer cet imbécile, il déborde dans mes billes qui s'animent, mon battant qui s'énerve et ma peau qui te cherche. D'ailleurs, se rapproche encore, attrapant la bouteille à moitié pleine pour la poser sur le bar. « J'avais même pas espoir que tu débarrasses la table, alors tu sais. » Un espèce de sourire se place, espiègle. On souffrira demain, ça c'est une promesse, mais on est pas obligé de prendre de l'avance. Je cherche tes yeux, je veux les rendre plus heureux. « Toujours partant pour la plus grande chambre ? » On revient en arrière, comme si les lèvres ne s'étaient pas accordées, comme si j'avais pas des désirs d'encore.