(MAXYM) i play no games i need you.

Depuis mon retour il y a plusieurs mois de cela, je squattais le petit appartement de mon patron à la boite de nuit et je mangeais ce que je pouvais bien me payer avec le pourboire que je faisais. Parfois quand j’avais un peu de chance je rencontrais un mec sympa avec qui je passais la nuit et qui m’offrait un nouveau lit. J’avais conscience que ce n’était pas le grand luxe mais ça me convenait, au fond j’avais pas besoin d’avoir le château de mon enfance pour être heureuse. Le truc, c’est qu’il y a toujours le risque que du jour au lendemain je me retrouve à la rue. Comme ça venait d’être le cas. Le connard avait foutu le camps de la ville sans prévenir, me laissant avec une nouvelle patronne qui ne m’aimait pas du tout et sans toit pour la nuit. Génial. J’aurais pu aller chez Maxine sans problèmes mais avec Adriel je n’étais pas certaine d’être tellement à l’aise… Il me restait donc une option. Ma meilleure amie, Maxym. Elle avait une maison assez grande pour accueillir une famille de réfugiée et je pouvais compter sur elle pour ne pas me prendre par pitié. Une seule nuit, voilà tout ce que j’avais besoin pour me figurer une nouvelle tournure. Je détestais avoir à demander l’aide de qui que ce soit, généralement je m’en sortais à merveille toute seule, mais là je ne voyais pas d’autre solution avec le froid hivernal. J’attendais gentiment dans ma voiture pleine de boite que madame finisse par revenir à la maison.

Maxym sort. Trop. C'est trop tout ça, McAllister, même pour toi. Dernièrement, elle s'est même rendue à une soirée de la mather house, histoire de se prouver qu'elle pouvait le faire. Tu sais, aller là où il est aussi. Tu sais, réussir à faire la fille qui s'en fout complètement, qui est plus forte que ça. Demoiselle se dit que plus elle évite de penser, mieux c'est. L'alcool aide, beaucoup, les autres aussi, les hommes qui recommencent à frôler sa peau, sa liberté qui se réveille doucement. Difficilement. Heureusement qu'il y a des filles comme Agathe, qui lui permettent de se rappeler comment ça marche, le vrai célibat, celui qu'on connaissait avant qu'un homme vienne bouleverser mon équilibre. Maxym rentre tard donc. De toute façon, y a personne pour l'acceuillir. Elle n'y arrive plus, à voir ces murs vides. En sortant ses clés, en passant la porte de son taxi, regarde vite fait la voiture garée devant chez elle. Bug un instant. Puis tape contre le parre-brise avec sa clé, s'affalant contre la voiture. Hurlant surement plus que nécessaire : « Qu'est-ce que tu fous ?! » Je vois bien Agathe à travers, et franchement, j'vois pas ce qu'elle fout là. D'habitude on se voit ailleurs, souvent là où elle bosse. Pas franchement là où elle vit, parce que c'est... bah, pas digne de McAllister quoi.

Est-ce que j'avais peur de me sentir jugée ? J'en savais trop rien en fait. Mon style de vie n'avait jamais été celui de Maxym, elle qui avait l'habitude du luxe et des beaux habits. J'avais toujours renoncer à cela malgré l'argent de mes parents et j'avais un dédain évident de ces gosses de riches. Pourtant elle avait un truc de différent des autres bleus chez qui elle squattait autrefois. Elle avait... Une certaine compréhension du reste du monde et je l'en aimais que plus fort. Puis j'avais l'impression que ma présence allait lui faire du bien à elle aussi car je ne savais pas tout ce qui c'était passé dans sa vie dans la dernière année mais elle avait bien changé de celle que j'avais connu. Elle était brisée, froide, mais pas parce que ça lui plaisait de l'être. Je n'osais pas questionner sur le pourquoi du comment toutefois je détestais ça. La voir pleine de neige affalée sur ma voiture ça j'adorais cependant. Ouvrant seulement la vitre pour conserver ma chaleur je ne me gêne même pas pour crier : « Je planifie mon cambriolage. T'es mignonne tu me laisses faire quand même ? »

Si vous connaissiez bien McAllister, vous sauriez qu'il n'y a rien de contre-nature à cette entente entre les deux femmes. Maxym avait toujours voulu être intégrée par les classes moins aisés, c'est elles qui n'avaient pas voulu de sa personne. Rejetée par plus pauvres. Ca avait surement conditionné son acceptation à l'adhésion à la Eliot House, alors qu'elle aurait pu refuser ça auprès de ses parents. Les années avaient fait qu'elle n'avait pas pu continuer à faire semblant. Que des amitiés comme celle avec Agathe primaient d'avantage. Cette fille, une riche parmi les paumés, qui renonce aux moyens offerts, qui attend dans sa bagnole froide. J'aurais aimé avoir ce courage tu sais, faire comme toi. Mais je veux le cabinet, et au fonds, j'aime cette aisance que je critique. « Je planifie mon cambriolage. T'es mignonne tu me laisses faire quand même ? » Bordel, j'sens même pas le froid, c'est magnifique. J'fais tomber de la neige dans la voiture en posant mes mains sur la vitre ouverte. « Je te conseille la chambre du fonds, y a pleins de robes sympas. Et sûrement un ou deux tee-shirts à toi. » Que je t'ai piqué un jour, j'en suis fière ouais. « Tu fais une brocante ? » Le regard qui file sur les cartons dans la voiture, le sourire amusé.

Comme tout étudiant d'Harvard, oui j'avais eu des préjugés sur son statut social, son choix de confrérie, son mode de vie. Seulement j'avais fini par passer outre ces préjugés parce que je n'étais pas de celles qui se ferment aux autres. On ne connait pas le parcours de tous et chacun au simple croisement d'un regard et parfois on peut être assez surpris d'apprendre à connaître ceux qui nous entourent. McAllister elle avait su me surprendre. Je laissais rarement les gens prendre une grande importance dans ma vie de peur d'être déçue ou de les décevoir mais avec elle je n'avais pas l'impression que ce risque là existait. Autant on pouvait sembler différentes, autant on se ressemblait d'une manière que l'on a peine à s'imaginer et c'est ce qui fait que notre relation là elle est solide, indestructible. « PUTAIN MAX ! » Que je lui cris dessus quand elle laisse tomber de la neige à travers l'ouverture de ma fenêtre. Génial maintenant je suis toute froide et humide. Tu ne pourras même pas en profiter, quel dommage. Au moins maintenant je peux l'imaginer porter mes tee-shirts comme s'il s'agissait d'un trophée qu'elle s'était mérité. « L'Eliot ne kiffe pas mon appartement ? » Si mon ton se veut amusé, il est aussi totalement sincère. Maintenant tu sais pourquoi je suis là, parce que je suis pitoyable au point de dormir dans ma voiture. Ce qu'elle a de la classe ta meilleure amie pas vrai ?

On se pardonne nos différences, ce qu'on ne supporterait chez personne d'autre. On s'aime pour ça aussi. L'essentiel, c'est qu'on est là l'une pour l'autre, qu'importe la situation. On se sauvera l'une l'autre, ça j'en doute pas. Elle sera la main tendue quand je tombe. Et je serais la sienne, solide et solidaire. « PUTAIN MAX ! » C'pas grave si je te congèle les cuisses avec ma neige, et que le pire, c'est que ça me fait un peu rire. Surtout quand tu te mets à râler. « Ouiiiiiiii mon Agathe chérie ? » Large sourire, Maxym en fait trop exprès. Comme si mes mains ne s'étaient pas posées là volontairement, avec comme but ultime ce résultat actuel. « L'Eliot ne kiffe pas mon appartement ? » D'un air légèrement railleur, la belle passe à un plus sérieux, son regard insistant sur l'arrière de la voiture. Sérieusement ? La demoiselle comprend, avec un peu de retard certes. Mais elle saisie que sa meilleure amie habite ici, là, dans cette boite de métal. « Tu t'es faites virer ? » J'rigole plus vraiment. « Non sérieusement, tu dors là dedans ? » Se penche à l'intérieur de la voiture pour voir les cartons. « T'as.. un plan ? » T'as souvent un plan, même s'ils sont toujours foireux. Genre ma rue c'est une étape ou la destination finale ?

L'amour qu'on trouve dans les livres, celui où un prince charmant vient sauver la pauvre princesse de la solitude dans son château, j'en crois moins que rien. Si on a de la chance peut-être finirons nous un jour par trouver une personne avec qui ce ne sera pas trop pénible de partager notre vie, qu'on endurera jour après jour, malgré les hauts et les bas. Quelqu'un avec qui on se réveillera quand on sera trop vieux pour se souvenir de son propre nom. Mais c'est pas donné à tous. Ceux qui n'auront pas cette chance n'ont quand même pas tout perdu s'ils ont une amitié équivalente à la nôtre dans leur vie. Notre amitié, je l'aime, et pour moi ça vaut bien plus que tous ces contes de fées à la noix. T'es là, tu le seras toujours, il y a une petite voix en moi qui me le dit. C'est bien la seule raison pour laquelle ne te pardonne de m'avoir fait prendre conscience du froid horrible de la neige buuuuuh. « Joue pas l'innocente, je me vengerai ! » C'est de bonne guerre, quand le moment sera venu tu risques peut-être de te réveiller avec une tête de licorne dans ton lit. Ce jour là c'est clair que tu vas penser à moi et à ce que tu viens de faire. Seulement ce n'est pas tout de suite le moment de sa, parce que j'ai un peu besoin de ton hospitalité dans l'heure. J'ai toujours un plan chère Maxym, j'ignore juste si vraiment il va te plaire. Je finis enfin par sortir de mon abri de fer pour faire ma demande de manière un peu plus officielle. « C'est pas moi qui s'est fait virer, c'est mon coloc qui s'est barré. Je t'avoue que l'idée de vivre toute seule me tente pas trop alors... Voilà, c'est sa mon nouveau plan. » Je lance un regard furtif vers ce qui se trouve derrière nous : ta belle grande maison. On sent malgré tout la gêne qui prends place dans ma voix car jamais je n'aurais cru avoir à lui demander une telle chose. « Je me suis dit que tu devais avoir peur de rester là toute seule donc je pourrais peut-être te tenir compagnie une nuit ou deux. »

"Peur ? C'est ca ton argument premier, que j'ai peur toute seule ?" Mes lèvres sont moqueuses, comme si c'était d'une absurdité absolue. Mais tu sais Agathe, t'as pas vraiment tord. J'ai pas peur de ces murs, j'ai peur du silence qui l'abrite maintenant. J'ai peur qu'elles me manquent, que je me sente seule. Je ne l'aime plus cette maison, sans personne avec qui m'affaler dans les trop grands canapés. Tout paraît désert, quand on a connu le bruit et les gamins qui courent. Alors oui, j'ai peur de la solitude désormais. Un peu comme toi, qui fuit celle de ton appartement miteux. "Ce qui est sur, c'est que je vais pas te laisser dormir dans ta bagnole. Elle est super moche en plus." Ouvre grands les yeux, en regardant ce tas de taule. Ouais, comme si c'était le plus grave dans le fait de dormir dans sa voiture. "Y a 3-4 chambres de libre, t'auras qu'à choisir celle qui te plait. Et on verra quand j'en aurais marre de toi." Qu'elle balance avec un sourire taquin perché sur sa bouche. Ou quand toi t'en auras marre de mon caractère pourri. Parce qu'on s'adore en dehors, mais au quotidien, qu'est-ce que ça peut donner ?

Une excuse, il m'en fallait certainement une pour pouvoir demander à Max ce que je voulais lui demander sans pour autant passer pour la paumée qui a besoin de sa meilleure amie. C'était pas un rôle qui me plaisait vous savez. Donc voilà c'était peut-être pas la meilleure approche possible mais au moins ça avait eu l'effet désiré. « Ouais t'as bien entendu. » Au moins elle ne m'a pas encore rit au nez donc c'était bon signe, elle s'inquiétait même de ma qualité de vie. Ma voiture c'était comme un bébé pour moi : pas la plus belle, certainement pas la plus luxueuse, mais j'avais traversé tellement de chose avec elle que s'en devenait quasiment sentimental. Combien de fois elle m'avait servi de logis exactement ? Plus que je ne saurais m'en rappeler. Toutefois puisque la McAllister accepte que ce ne soit pas le cas pour les prochains soirs, je laisse couler le commentaire, m'attardant plutôt sur la suite. « Ça me va comme arrangement ! Par contre faudra voir pour des règles. » Parce que je ne sais pas tout ce que tu fais de tes temps libres mais je n'ai pas envie d'avoir 50 Shades of Grey en direct dans la maison pendant que j'essaie de réviser. Il est maintenant temps de verrouiller les portes du tas de taule pour discuter au chaud de ce qui en sera.

 « Ouais t'as bien entendu. » Hausse les épaules, t'façon tu peux utiliser toutes les excuses que tu veux, ça reviendra au même. J'te laisserais pas en galère, tu le sais bien. Tu le savais avant de me demander, tu le savais en venant devant chez moi. Aucune surprise. J'le ferais quasiment pour n'importe qui, alors imagine pour toi, ma meilleure amie. J'te dis pas que ton nom va aller directement sur la boite aux lettres, mais la porte t'es ouverte. La question du temps se posera ensuite. « Ça me va comme arrangement ! Par contre faudra voir pour des règles. » S'écarte de la bagnole pour laisser la blonde en sortir, haussant un sourcil. « Tu squattes chez moi et tu veux en plus m'imposer des règles ? » Je reconnais bien là le culot d'Agathe, mais à ce stade ça me fait sourire. « T'es pas maniaque ? Parce que j'ai viré la femme de ménage. » Je l'adorais, hein, mais ça me met un peu mal à l'aise d'avoir une personne qui nettoie mes culottes, tu vois. Arrivée à la porte, l'ouvre en grand, lui faisant signe de rentrer. « J'espère que ça t'iras, vu que t'es habituée au luxe.. » Se moque un peu, de ses lèvres rieuses. « Et donc, ces règles ? » Ca m'intrigue, cette histoire.