that awkward moment when... (Alaska)

Finalement, heureusement que j'étais tombée sur Priape en me rendant à cette réunion des drogués anonymes - parce qu'au fond, c'est un peu le même principe que pour les alcooliques quand on y pense vraiment -. S'il n'avait pas été là, qui m'aurait sorti de cette pièce ? Le responsable du rendez-vous aurait été capable d'appeler les pompiers en constatent que j'étais en train de faire un malaise sur ma chaise. Nous avions donc évité la catastrophe, j'allais pouvoir rentrer chez moi sans que personne n'ait vent de cette histoire. Je savais que ma réputation de junkie allait exploser tôt ou tard, mais pas de cette façon... Vous imaginez l'article de CS : "Alaska Hamilton, junkie au bord de l'overdose à une réunion des drogués anonymes". Cela ne donnait pas envie. Je suivais le jeune homme jusqu'à la sortie, profitant de l'air frais, espérant que cela allait me redonner des couleurs. Une fois dans la voiture, Priape reprit la parole, me proposant de m'accompagner chez le médecin. Le sujet était sensible. Je n'avais pas envie d'être un poids pour quiconque et je ne voulais pas avoir besoin d'aide. Dépendre de quelqu'un : non merci. Je venais de le faire pendant plus d'un mois, ça m'avait suffi. « T’es pas stupide, tu es paumée… Réfléchis-y et tiens moi au courant… » Je pince une nouvelle fois mes lèvres en le regardant avant d'hocher positivement la tête. « D'accord, je vais y réfléchir ! » Ouais, je pouvais au moins faire ça. Cela allait être plus facile de me rendre chez le médecin avec Priape plutôt qu'avec mon père pour ma sœur. Quoique cela ne viendrait même pas à l'idée à mon père de m'y accompagner je pense. Je l'informais sur mon lieu d'habitation, à savoir, la mather house. Je sentais le préjugé arriver. « Et c’est pas trop dur ? » J'hausse les épaules, regardant droit devant moi. « Parfois si... Je suis à la recherche d'une colocation pour déménager. J'en ai peut-être trouvé une... » m'exclamais-je ensuite. J'avais l'impression d'être une mauvaise Mather en disant cela, mais bon, je n'y pouvais rien au fond. Il est vrai que beaucoup de drogue passe entre les mains des mathers, mais pas seulement... « C'est difficile partout ! » concluais-je alors. Faut pas croire, je suis certaine qu'on peut trouver un consommateur chez les Dunsters aussi.

HJ: Désolée pour le retard.

C’était ce dont je devais me contenter : elle allait y réfléchir, c’était déjà mieux qu’un refus tout net. Peut être qu’un jour l’idée de se faire aider aura suffisamment fait son chemin pour qu’elle me recontacte et qu’on consulte ensemble. En tout cas, elle savait désormais que son calvaire, je le comprenais. Et alors que je démarrai le véhicule en l’interrogeant sur son adresse, elle m’informa qu’elle habitait à la mather. Je pris sur moi pour essayer de ne pas afficher une expression réprobatrice. Le cliché des étudiants défoncés H24 au sein de cette confrérie était surement surfait. Seulement, ça restait quand même un nid de consommateurs. D’où ma question. Alaska me raconta alors qu’elle était en train de chercher une coloc. Parce que oui, la solution ne plus vivre en collectivité mais complètement isolée dans un petit appart n’était probablement pas la bonne non plus. Il lui fallait être entourée. De personnes saines. De colocataires présents. Qui sauraient la tirer vers le haut. « Ha oui, tu vas vivre avec Feldt ? » Je supposais naïvement avant de me rappeler qu’avec deux petits en bas âge, la cohabitation ne serait surement pas aisée. «Ou avec d’autres étudiants ? » Puis voilà que mes idées préconçues sur les verts avaient du transparaitre dans ma question, mon interlocutrice trouvant utile de rajouter que c’était difficile partout. « Bah j’connais un couvent pas loin de Boston, je pense que là bas c’est zéro tentation d’aucune sorte… Mais j'suis pas sûr que la tenue des religieuses t’aille très bien par contre… » plaisantai-je avec un petit sourire en coin, histoire d’apporter une note plus légère à la conversation. « Mais oui c’est dur partout… » repris-je plus sérieusement en continuant de rouler en direction de sa confrérie. « Du coup tu as trouvé un appart sur Cambridge ? Boston ? » Je préférais poser des questions moins révélatrices du jugement néfaste qui collait à la peau de la MH, c’était sa confrérie, ses potes, elle devait surement y être attachée malgré la réputation sulfureuse qu’on leur prêtait là bas.

(Invité)