(wildt) first meeting or ... date?

Heureusement que j’avais encore un peu de temps avant les examens, et que je n’en avais pas beaucoup. Étant en dernière année, la plus part de mon travail se résumait à mon mémoire. J’en avais tout de même, et j’allais y travailler, comme je le faisais à chaque session d’examens. Pour être honnête, j’étais déjà quelques peu excitée à l’idée de finir mes études en mai, d’être diplômé de mon double master, surement major de ma promotion. Je n’avais pas encore décidé si je ferais un doctorat, ou si j’entrerai dans la vie active, ou si je n’irais pas au MIT. Je n’arrivais pas à me décider, et je me disais que j’avais encore un peu de temps pour réfléchir. Avec Willow, nous commencions de parler d’autres choses, de nos enfants. Peut-être que ça serait la seule discussion que nous allions avoir, nos enfants. J’étais maladroite, ne sachant vraiment pas quoi dire. « Ne t’excuses pas ! Ce n’est rien. Je suis contente qu’ils soient en bonne santé pour le moment. » Avoir des enfants prématurés étaient toujours difficile et source d’inquiétude. Je pris une gorgée de mon café. « Il doit avoir cela de sa mère? » Je venais de mettre les pieds dans un sujet sensible, sans même le savoir.

Parler avec quelqu’un que je ne connaissais pas était difficile pour moi. Je ne suis pas très bien en small talk, je passe rarement du temps à parler à des gens que je ne connaissais pas. Je faisais énormément d’efforts pour ne pas prendre mes jambes à mon cou et de m’en aller en courant. Je devais faire un effort, ne serait-ce que pour Briony, ou même pour moi. Si je continuais sur ma voie, j’inquiéterai mes proches, mon tuteur, mes meilleurs amis, et je voulais éviter cela. Parler avec Willow, et aller boire un café avec lui, était donc un pas vers la guérison. Je devais faire des petits pas. Je reprendrai peut-être contact avec mon psychologue aussi. Willow me parla d’Alon, ainsi que de sa mère. Je m’en voulais d’avoir évoqué le sujet. C’était un sujet délicat, et j’avais maladroitement ouverte d’anciennes blessures. Sans trop réfléchir, je mis ma main au-dessus de la tienne. « Je suis désolée. Je ne voulais pas ouvrir un sujet sensible. Je suis sûre qu’elle serait fière de votre fils. » Lui dis-je avec un petit sourire, retirant cependant ma main, me rendant compte de mon erreur inappropriée.

Pour la première fois depuis l’incident, je venais de faire un pas vers un inconnu, quelqu’un que je ne connaissais pas plus que cela. J’imagine, que c’était une bonne chose. Je ne savais pas ce qui m’avait poussé à le faire? La compassion? Ou le fait que je ne comprenne que trop bien ce que c’était que perdre une vie pendant l’accouchement. Je me disais chanceuse, d’avoir survécu, d’être revenue parmi les vivants. Ce n’était pas le cas de la mère d’Alon. Elle devait être une femme extraordinaire. Willow était courageux de s’ouvrir à moi, de me parler de ce qui faisait mal, de ce qui le tourmentai depuis maintenant trois ans. J’aimerai avoir autant de courage que lui, de m’ouvrir sur mes douleurs, ma souffrance, mes démons. Pourtant, je n’y arrivais pas. Je n’avais pas cette force. Je me suis toujours débrouillée toute seule. même avec Elios, je ne m’étais pas ouverte à lui directement. Je gardais tout pour moi jusqu’à exploser. « Mais est-ce que cela fait vraiment moins mal? La douleur ne va pas partir, les faits ne vont pas partir, que la personne qu’on aimait autre chose plus que tout n’est plus là, et qu’importe nos efforts, elle ne le serait jamais. » Je partais dans une tirade philosophique, remplie de questions rhétoriques auxquelles je ne voulais même pas de réponses.

Avant mon agression, j’étais quelqu’un d’ouvert, qui sortait pas mal, qui s’amusait et qui ne faisait pas trop attention à l’opinion que les autres faisaient de moi. Aujourd’hui, j’étais une toute personne. Je ne sortais que très peu, prenait très peu d’initiative pour rencontrer de nouvelles personnes, et tous mes essais avaient failli. Après l’incident au Drink début octobre, je m’étais dise que j’étais pas encore prête. Pourtant, j’étais là avec Willow entrain de discuter. C’était un bon début, je suppose. Je l’écoutais attentivement. Ce qu’il disait était vrai. On ne pouvait pas vivre dans le passé. Je ne pouvais plus rester là à attendre Elios. Le père de mes enfants ne m’appartenait plus, et il était temps que je lâche prise bien que cela faisait mal. Je ne savais même pas quoi répondre. J’étais gênée. J’avais la sensation d’être entrer dans un territoire qui ne m’appartenait pas, qui était sacré pour Willow, et moi, je n’étais qu’une inconnue. Une silence gênant s’installa entre nous, sans que je ne sache comment le briser. Je me contentais de regarder ma tasse, pensive.

Je sentais que parler de ma petite-amie maintenant morte depuis trois ans, allait mettre un froid entre elle et moi. La preuve en image et en son, aucun mots ne sortaient plus de notre bouche. Je me contentais de jouer avec ma tasse tout en me réchauffant les mains. Elle était au moins au courant maintenant pour l’histoire d’Alon et la mienne. Je n’en parlais à personne en général mais je l’avais fais avec Feldt, allez savoir pourquoi elle et pas quelqu’un d’autre. Je me doutais que cela allait mettre un froid, mais ne t’inquiète pas je vais de mieux en mieux, je vis avec simplement. dis-je en souriant légèrement. Je préférais parler car même si je n’étais pas si bavard que cela, ça me gênait tout de même de ne rien dire surtout après ce genre de discussion. Sinon avec le père des jumeaux, cela s’est passé comment ? Autant aller dans ce genre de sujet jusqu’au bout.

Je ne savais plus quoi dire. Un silence gênant et pensant venait de s’installer entre moi et Willow. J’avais l’impression d’avoir touché à quelque chose de secret, et pourtant, je me sentais honorée qu’il m’en parle, de son ex, et de ce qui lui était arrivé. Personnellement, je n’étais pas sure que je puisse le faire comme cela, de parler d’Elios comme cela. Après, il n’y avait rien de secret non plus, une partie de notre relation avait fini dans la presse à scandal. « Je suis désolée. Je voulais vraiment pas rentrer dans quelque chose qui fait mal. J’sais pas trop quoi dire. » Je prenais une gorgée de mon café, évitant son regard, surtout quand il me demanda comment cela s’était passé avec Elios. Je restais silencieuse pendant un moment, me demandant jusqu’à où je devrais aller, dans quel détail devrai-je mentionner. « On s’est rencontré à une soirée où je travaillais, et on a un peu trop fêté, et puis voilà. On a décidé de les garder. Je n'avais pas le coeur à avorter. On était pas ensemble, c’est seulement après la naissance des jumeaux qu’on s’est trouvé. Et puis un jour, il a disparu comme cela, sans un mot. Depuis, c’est tendu, comme tu as pu voir. » J’omis beaucoup de détail. Ma relation avec Elios était si compliquée, que j’avais peur qu’il me prenne pour je ne sais quoi.