On fait ce qu'on doit pour ne plus tomber, c'est toucher du bois parfois même prier ♥ PRIALYA

Depuis que Caly était venue et m'avait annoncé la nouvelle, je ne parvenais pas à savoir comment le dire à Priape mais d'un autre côté, je ne pouvais pas ne pas lui dire. Il devait le savoir, il devrait être au courant et à mon avis ce n'était pas la blonde qui allait lui dire. Pourquoi elle était venue me le dire à moi ? Je ne savais pas, mais peut être que c'était pour que je le dise à Priape ou parce qu'elle savait que je ne pourrais pas faire autrement que de lui dire ? Je n'en savais rien fait. Sauf qu'aujourd'hui je ne pouvais plus tenir j'avais besoin de lui dire et le jeune homme devait arriver vers vingt heures, je l'attendais impatiemment d'autant plus que j'avais eu pas mal de contractions ces derniers temps et que les monitorings même s'ils restaient bon pouvaient flancher à tout moment. Je voulais donc faire un peu un point avec lui si le bébé devait pointer son nez sous peu. Lorsque la porte s'ouvrit mon visage s'illumina d'un sourire comme si j'avais vu le messi roger ou dieu, mais non ce n'était que Priape. « J'ai une faim de loup si tu savais ! » Je tends mon front sur lequel je sais qu'il va venir déposer un baiser, plus intime qu'un baiser sur la joue entre amis, moins engageant que de viser la bouche. « Ta journée s'est bien passée ? » Non je n'allais pas directement l'attaquer avec ça ! Je voulais prendre le temps, de trouver les mots encore.

Talya & Priape
   

mise en page par .Stay Away

Le texto commande de pizza de Talya m’avait fait rire. Elle avait la dalle et une pause dans son régime –repas sous vide- de l’hôpital lui ferait surement du bien. J’arrivais donc devant sa chambre pour ma visite quotidienne avec dans le bras le carton fumant d’une bonne pizza dont l’odeur devait mettre l’eau à la bouche de tous les autres patients du service. Je toquai et entrai dans la chambre. « Le livreur de pizza est arrivé ! » La jeune femme se redressa un peu dans le lit en me faisant savoir qu’elle avait une faim de loup. « T’en connais beaucoup des femmes enceintes qui attendent le huitième mois pour faire des caprices de grossesse ? » demandai-je sur un ton taquin en posant le carton sur l’adaptable avant de m’avancer jusqu’à elle et de déposer un baiser sur le front qu’elle me tendait, presque sans m’en rendre compte, ce petit geste, pourtant pas anodin, étant devenu presque comme une habitude entre nous. Elle me demanda comment c’était passé ma journée. « C’était plutôt calme, j’ai fini à midi. J’ai pu bosser un peu ma thèse l’après midi. » répondis-je avant de lui retourner la question tout en m’asseyant sur un bout de son lit : « Et toi alors ? A part cette faim d’ogre, quoi de nouveau ? » Elle avait apparemment des choses à me dire, mais comme elle avait pu constater mon côté angoissé elle avait bien précisé dans son sms que ça ne concernait ni elle, ni nous, ni le bébé, d’où mon apparente décontraction pour le moment.

J'étais heureuse en voyant Priape. Je me demandais qui des deux étaient le plus heureux : mon coeur de voir l'homme que j'ai ou mon estomac de voir la pizza que Priape amène ? Après son baiser tendre sur mon front il ne tarde pas de me taquiner. Moi un caprice ? J'y pense et en fait oui s'en est un, et c'est en effet le premier, je n'ai jamais rien demandé à mon ex petit ami au niveau culinaire. C'est assez surprenant mais au moins il ne pourra pas dire que je lui ai demandé des trucs fous. « Caprice facile en plus pas vrai ? J'avais jamais pensé au fait que je n'ai pas eu d'envie pendant cette grossesse... Il s'est passé trop de chose j'ai surement pas eu le temps ! » Les pots de glace sont descendus dans mon congel, ce sont accumulés dans ma poubelle mais ça c'est récurent. « Tu me la feras lire ? » Je n'avais pas envie de lire un pavé mais lire petit à petit c'était faisable, ça lui serait surement d'une meilleure aide en plus puis moi ça pourrait m'aider pour quand je devrais passer par là. « J'ai un truc à te demander Priape, enfin un truc à te dire, enfin je sais pas trop par ou commencer et comment te le dire... » Je prends une grande inspiration, il a posé ma pizza, elle est donc en sécurité, je peux lui dire et je n'ai pas envie de trainer, surtout avec la deuxième chose que j'ai à lui dire. « J'aimerais qu'on mette Caly en deuxième marraine du bébé... Elle est venue me voir, tu comptes vraiment énormément pour elle et j'aime sa manière d'être avec le bébé et moi... Puis elle n'aura jamais la chance d'avoir un enfant alors vraiment j'aimerais qu'elle puisse profiter de la première année de notre bébé à fond au moins... » C'était bizarre dis comme ça non ? Juste un petit peu parce qu'au final je ne lui ai pas dit le fond du problème, son cancer et l'épée de damoclès qu'elle a au dessus de la tête.

« J’avoue que c’était pas trop compliqué… » C’était pas la barquette de fraises, en plein hiver, au milieu de la nuit quoi. Je n’avais pas trop galéré pour lui trouver l’énorme et copieuse pizza dont elle rêvait. En tout cas oui, pas d’envie et de caprice pendant cette grossesse pour mon ex, en même temps nous n’avions rien fait de manière –classique- alors c’était presque logique qu’elle échappe aux envies typiques. Je lui racontai comment j’avais occupé ma journée, et elle me demanda si elle pourrait lire ma thèse. « Tu sais que ça va surement être très long et très chiant ? Mais oui, je te la ferais lire, tu feras ma correctrice. » Plus il y avait de paires d’yeux à la lire, et moins les fautes pourraient s’y glisser. J’ouvris le carton de la pizza, libérant un nouveau vent d’odeurs alléchantes, je saisis le couteau et m’activai à la découper tout en écoutant Talya. Elle avait un truc à me demander, son début d’explication me fit abandonner ma tâche de découpe pour relever les yeux vers elle. Je posai le couteau, et me concentrai sur ses paroles, ma curiosité piquée au vif. Elle commença alors à me dire qu’elle voulait qu’on choisisse Caly en deuxième marraine. Elle voulait sérieusement que mon ex grand amour soit la marraine de notre bébé ? J’étais un peu scotché et son explication accentua mon incompréhension. « Comment ça –jamais la chance d’avoir un enfant- ? » Ok j’avais refusé de lui faire ce gosse qu’elle voulait tant l’an dernier, mais elle avait finalement reconnu que c’était une bonne chose, que ce projet bébé n’était que l’expression de son profond mal être, et désormais elle allait mieux, elle était en couple avec un autre. Elle pourrait peut être avoir un jour un bébé avec son nouveau copain, si il ne lui refilait pas une nouvelle fois la syphilis, des morpions ou une autre cochonnerie du genre bien sûr. Bref, je fronçais encore plus les sourcils en écoutant Talya me parler de –profiter de la première année à fond-, j’étais largué là. « Qu’est-ce que tu me racontes Talya, je comprends rien… »

« Je savais que j'aurais dû demander plus compliqué, que t'étais le genre à relever les défis ! » Je lui adresse un clin d'oeil, ma grossesse a été un véritable défi depuis le début alors un peu de plus ou un peu de moins nous n'étions pas à cela près, cependant, je tenais quand même à préserver Priape, je ne voulais pas qu'il finisse sur les rotules avant même que le bébé ne soit né. « Fais moi la lire au fur et à mesure, petit bout par petit bout... Mais le thème m'intéresse alors même si c'est long, ça passera bien en lecture du soir ! » Comme si j'allais avoir le temps d'ouvrir un bouquin le soir dans mon lit, non je serais tellement claquée de mes journées d'étudiante en médecine et de maman à deux cents pourcents ne me laisseraient pas deux minutes de repris dans mon lit sans que je ne m'endorme. Puis le sujet épineux de Caly vint sur le tapis, je ne savais pas trop comment l'aborder, trop comment faire passer le message et l'idée de la deuxième marraine était peut être le mieux, enfin selon moi. Cela attisa la curiosité de mon ex petit ami qui voulait comprendre. « Elle va mourir Priape... Elle a une tumeur avec trop de risques d'opération, elle ne veut pas se faire opérer... » Mes pupilles sont fixées dans les siennes mais à la fin de ma phrase elles se dirigent vers mes mains qui se tordent dans tous les sens. Lorsque je les relève c'est pour ajouter : « Les médecins ne lui donnent même pas un an... »

« Si t’avais demandé trop compliqué je serais jamais arrivé à 20h aussi… »Alors que là, me voilà, à l’heure, accompagné d’une délicieuse pizza. Parfois dans la vie, il valait mieux ne pas trop en demander. « Ok, pas de soucis, on fera comme ça. Je te ramènerais mon ébauche d’intro la prochaine fois, tu pourras commencer ta lecture. » Au moins elle allait bien dormir avec ma thèse en livre de chevet. Mais la conversation prit un tout autre tournant : Caly. J’avais pas soupçonné un seul instant sur c’était de mon autre ex que Talya allait vouloir me parler. Ses propos étaient flous, incompréhensibles pour moi. La blondinette reprit alors, d’une manière beaucoup moins détournée, plus directe : Caly allait mourir. Elle avait une tumeur. J’entendais à peine le reste, concernant l’opération, son refus, le pronostic réservé qu’on lui donnait. J’étais juste abasourdi. Je restais d’abord muet, le visage figé, comme si les informations ricochaient dans ma tête sans vouloir être intégrées par mon cerveau. Puis après de longues minutes de silence assommé, je finis par sortir de ma torpeur pour reprendre, sur un ton bien plus agressif que je ne l’aurais voulu : « D’où tu tiens ça ? Tu racontes n’importe quoi… » Comme si c’était le genre d’info qu’on pouvait inventer… Mais j’étais sidéré, je me voilais la face : c’était surement plus simple de faire comme si c’était un mensonge.

« Mais si ! T'aurais eu trop peur de contrarier mes hormones de femme enceinte ! » Je lui tire la langue comme les enfants. C'est pas mal d'avoir cette excuse quand on s'énerve, quand on a des réactions extrêmes ce qui n'était pas rare chez moi à cause de Priape en même temps il ne me ménageait pas vraiment sur ce point là, ou alors si il tentait de le faire mais la découverte n'était que plus rude après alors la crise était pareille. « Cool, j'aurais de quoi occuper mon temps intelligemment ! » Parce que je sais regarder la télé, faire des jeux, potasser pour ma cinquième année, mais vraiment je ne sais pas si ça a un sens, si j'y arriverais alors parfois je baisse les bras, mais ça ne dure que quelques secondes. Enfin là, la thèse de Priape m'intéressait vraiment et le sujet était d'actualité puisque j'avais l'impression que la leucémie devenait moins rare, tout en nuançant énormément mes propos. Mais ce n'était quand même pas de cette maladie que je voulais parler avec Priape. Caly était passée, nous avions bien parlé, trop même et je savais maintenant des choses que Priape devait savoir. Je ne savais pas vraiment comment lui dire alors j'avais choisi de ne pas passer par quatre chemins, même si j'avais essayé. Sa réaction me surprit, il insinuait clairement que je racontais n'importe quoi. Après la surprise, ce fut l'agacement qui s'afficha sur mon visage avant de me renfermer complètement. « Je t'ai fait venir avant tout pour te dire ça parce que j'aurais pu me passer de la pizza même si j'en avais très envie mais je raconte n'importe quoi. Très bien. A demain Priape. » Quel intérêt de passer plus de temps avec une femme qui ne fait que mentir, qui ne raconte que des conneries ? Je ne voulais pas le retenir plus longtemps. « Oui parce que demain sept heures il faut que tu sois là, les médecins ont décidé de programmer la césarienne. » Dans cette ambiance ça allait être gai.

« Essaie plus dur la prochaine fois, on verra si j’arrive à remplir la mission… » rigolai-je alors qu’elle me tirait la langue. Après avoir plaisanté sur ses caprices et parlé brièvement de ma thèse, je sentis une certaine tension s’installer entre nous alors que Talya se lançait et abordait le sujet dont elle souhaitait me parler : Caly. La révélation de sa maladie me laissa d’abord stupéfait, puis très vite ce fut l’énervement qui gagna sur la stupéfaction. Ca ne pouvait pas être vrai. Pas Caly. Le changement de ton qui s’était opéré de mon côté à cette annonce fut contagieux et Talya se ferma complètement à son tour. Si elle m’avait fait venir c’était pour me parler de la tumeur de mon ex, pas pour la pizza, mais vu que je pensais qu’elle racontait n’importe quoi, elle me salua d’un –à demain- qui ne fit qu’accentuer un peu plus mon exaspération. J’allais protester quand elle reprit la parole, m’assénant une autre nouvelle, comme un nouveau coup de poing en plein ventre. Et oui, les mauvaises nouvelles ne viennent jamais seules…  Demain sept heures, les obstétriciens avaient décidé de césariser Talya. Nouveau choc. Nouvelle sidération. Mes yeux fixant le vide, mon cerveau avait juste un instant cessé de fonctionner je crois. C’était trop… Trop d’informations, trop de révélations, trop de malheurs en perspective… Comment j’avais pu croire que tout irait bien ? Comment j’avais pu être aveugle à ce point ? Me laisser bercer par un espèce d’optimisme mielleux. Rien ne va jamais bien. C'était pourtant cela que j'avais appris de la vie. Parce que si on m’avait déjà pris ma sœur, mon frère, on ne pouvait certainement pas laisser mes ex, deux des personnes les plus importantes de ma vie, tranquilles. J’enfouis mon visage dans mes mains, essayant de reconnecter mes neurones, de trouver les bons mots à dire, je ne réussis qu’à marmonner : « Ca va aller, tout va bien se passer… » Mais j’étais loin d’être convaincant.  

La révélation de la maladie de Caly avait donné à Priape un ton cassant et satirique que je détestais, il ne me croyait pas et préférait penser que je mentais. Comme toujours dirons nous. Je pouvais presque être habituée à cela, mais non, on ne s'habitue jamais à être la menteuse de service alors que c'est n'est pas dans sa nature. Bref. Il pensait ce qu'il voulait, il pouvait très bien partir comme la compagnie d'une menteuse diplômée n'était pas souhaitable. Il fallait juste qu'il sache être présent le lendemain à sept heures. On m'avait annoncé la nouvelle il y a à peine quelques heures et je n'avais pas encore eut le temps de réaliser, de m'en remettre, mon bébé allait naitre en avance, bien en avance, quelques jours avant les 34 semaines qui étaient un peu la sécurité. J'étais encore choquée par cette annonce et pas du tout préparée alors je ne pouvais pas le rassurer, et après ces mots je n'en avais aucune envie. Je préférais garder le silence et laisser mon regard errer dans le vide. Qu'est ce que je pouvais répondre à ça ? Est ce que j'avais envie de répondre ? Non. Je laissais s'inquiéter, sans partager son inquiétude, j'étais complètement refermée, bien joué Priape.

Le visage enfoui dans mes mains, j’essayais de chasser les idées noires qui s’insinuaient en moi… Le cancer de Caly, la césar de Talya, notre bébé préma… Bordel, il était où le mieux là dedans. Ca allait bien se passer, j’essayais d’écrire mentalement une fin où tout se terminait finalement bien, mais j’étais bien trop abattu pour m’en convaincre. Je relevai finalement la tête, libérant mon visage. Mon regard croisa celui de Talya qui semblait vide. Le silence avait gagné la pièce. Je ne pouvais pas aborder le sujet Caly, j’avais la gorge nouée rien que d’y penser. Il fallait que je parle à la principale intéressée, savoir ce qu’il se passait, pourquoi elle ne m’avait rien dit… Mais pour la naissance imminente de notre enfant, c’était bien de Talya que j’allais devoir obtenir les infos. Vu l’heure, les médecins n’étaient plus disponibles pour répondre à mes questions. « Qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi ils décident d’un coup de la césarienne ? Je pensais que ça allait mieux tes contractions… » Je voulais comprendre, quelle était soudain l’urgence à faire naitre le bébé alors que tout semblait bien se passer ces dernières semaines.