i will try to fix you (Baby)

Ca m’embêtait de voir la jeune femme baisser les bras, parce que je savais que même si elle le voulait vraiment, elle ne pourrait pas oublier Val. C’était de Valentin Spinelli dont on parlait là, pas le genre de mec qu’on oublie en un claquement de doigts, sinon cela ferait surement longtemps que la blonde aurait opté pour cette option. «  Mais si tu as le choix… Calme toi Baby. » fis-je en l’attirant un instant contre moi pour la serrer dans mes bras, espérant calmer un peu ses sanglots. « Je sais que t’en as marre mais crois moi, ça peut marcher vous deux. Et ça vaut surement le coup de ne pas lâcher. » expliquai-je avant de relâcher la jeune femme. Depuis le temps que je les voyais interagir l’un avec l’autre, j’y croyais moi. Et puis le grand amour, avec un grand A, c’était bien l’alliance du feeling, de la complicité, avec de l’attirance. C’était probablement ce dernier élément qui manquait encore pour ouvrir les yeux à Valou et quel meilleur moyen de le faire que de le rendre jaloux ? Baby avait déjà essayé apparemment. Elle me raconta  et je l’écoutais avec attention, mon sourire s’élargissant au fur et à mesure de ses paroles, un petit rire s’échappa même lorsqu’elle me confia le coup de la capote. Elle n’avait pas réalisé ce que ça signifiait ? C’était pourtant clair. Mais allons-y, démontrons lui qu’il y a matière à creuser : «  Prenons un exemple : moi, je t’aime bien. On peut dire qu'on est amis en quelque sorte toi et moi. Et bah si tu me racontes tes aventures sentimentales, je serais heureux pour toi dans la mesure où tu gardes les détails pour toi hein... J’serais content que tu sois pas seule tu vois ? » Je marquais une courte pause, pour voir si elle commençait à saisir ma théorie. Je poursuivais ensuite : « Donc, en toute logique, si Val pète un câble comme ça, c’est qu’il y a surement quelque chose à creuser là dessous… Il a vraiment voulu péter la gueule du mec ? Sans savoir qui c’était ? » Je voulais pas trop m'avancer non plus, mais pour moi cette anecdote était très révélatrice. Enfin sauf si Baby avait été raconté qu’elle couchait avec son pire ennemi, parce que  là ça justifierait sa colère...  « Oh mais tu sais quoi, tu devrais carrément lui faire croire que c'est un pote à lui. Parce que s'il arrive pas à se réjouir de te voir en couple avec un type qu'il apprécie, là on sera sûr qu'il se voile la face sur ses sentiments... »

Je savais même pas pourquoi je m’en mêlais, moi qui avais le don de m’énerver dès qu’on s’immisçait dans mes affaires de cœur. Peut être que c’était justement parce que leur histoire datait de 7 ans, peut être que j’estimais que Baby avait assez fait preuve de patience, que sa ténacité prouvait bien qu’elle méritait mon meilleur pote. Je voulais tellement le savoir heureux… Puis surement aussi que j’avais été un cupidon dans une autre vie. En tout cas, ça ne pouvait marcher que si j’arrivais à remotiver la blondinette en face de moi. Et à force de persuasion, je réussis à susciter son intérêt. Je secouais la tête alors qu’elle me faisait part de son avis : le coup de la capote qui était de trop. « J’suis pas sûr que ça soit juste ça… Il se doute bien que tu vas pas entrer au couvent. » Un ami, c’était censé se réjouir de voir ses potes profiter, faire des rencontres, se mettre en couple… Ma petite expérience m’avait appris qu’un ami qui se montre trop réticent devant la nouvelle histoire de sa BFF, c’était qu’il y avait anguille sous roche. Avec Talya et Matthéo j’en savais quelque chose. Et sans m’en rendre compte, avec mon raisonnement à deux balles, me voilà embarqué dans un plan qui me dépassait déjà : « Ha, non non non… » rétorquai-je dans un premier temps en imaginant très bien la colère de Valou et son poing qui risquait de finir dans ma figure. Je m’étais déjà assez pris de coup comme ça ces derniers temps.  « Non, n’insiste pas. J’veux pas d’histoire avec Val, puis tu sais c’est compliqué pour moi en ce moment… » Je voyais déjà le bazar que ça serait si ça revenait aux oreilles de Talya… Mais d’un autre côté, qui pouvait résister à ce regard là ? C’est qu’elle était douée cette petite. « Arrête ça Baby. » fis-je en me masquant les yeux de ma main comme pour résister à ses petits yeux implorants, avant d’écarter les doigts pour la voir de nouveau : « T’as quoi en tête exactement ? »

« Hum, toutes ses précédentes relations ont été un échec cuisant : soit la nana l’a trompé, soit elle s’est barrée, soit c’est lui qui trompait… » Enfin bref, y’en avait pas eu une pour rattraper les autres, et je disais ça en toute objectivité puisque certaines avaient été mes amies. « J’suis pas dans sa tête mais j’imagine que c’est plus facile de se voiler la face, de se convaincre de l’absence de sentiment, de vouloir préserver votre amitié… » La facilité oui… Et aussi la peur de souffrir à nouveau, ou pire encore de faire souffrir… Mais pour cela, c’était surement trop tard. Et pour redonner de l’espoir à Baby, j’essayais de souligner que les réactions de Val étaient disproportionnées. Ma réflexion sembla faire germer un plan dans l’esprit de la blondinette : elle clarifia ce qu’elle avait en tête. « Il aura une réaction oui : il va me tuer. Tu feras bien graver sur ma tombe : ci gît Priape Zacharias, un gentil garçon qui voulait juste aider… » fis-je sur le ton de l’humour même si dans le fond, avec un tel plan, je risquais surement d’en voir de toutes les couleurs avec mon meilleur pote. Mais l’idée était bonne, logique en tout cas : normalement, si Val s’imaginait vraiment qu’il y avait une histoire entre sa meilleure amie et moi, il devrait surement se réjouir SAUF si il avait enfoui des sentiments plus qu’amicaux pour la jeune femme au fond de lui. J’hochais donc la tête : « Oui, tu seras fixée c’est sur. » Et moi je serais mort. « Mais comment on procède pour qu’il nous –surprenne- ? Parce qu’il faut pas qu’il ait l’impression que c’est une mise en scène… » J’avais pas clairement dis oui encore, mais c'était tout comme.

Bien sûr, elle le savait. Elle les avait vécu comme moi toutes ces ruptures : en mode il faut sauver Valou… On en avait consommé de l’énergie et de la bière à tenter de lui remonter le moral après que chacune de ces gonzesses se soient échappées avec un morceau de son cœur. Peut être qu’il était trop blessé, trop rafistolé de partout, pour pouvoir aimer à nouveau ce pauvre cœur. Mais je voulais y croire. Ce n’était pas terminé, non non. Je n’avais pas dit mon dernier mot. Et le plan qui s’échafaudait peu à peu promettait de révéler au grand jour les véritables sentiments de l’italien. « Tu veux qu’on parie ? » relançai-je alors que Baby émettait de gros doute sur sa réaction que, de mon côté, j’imaginais très violente. La blondinette n’avait pas encore le scénario précis, mais elle me voulait moi en acteur principal. J’étais déjà bien trop impliqué de toute façon. J’hochais la tête : «C’est d’accord, oui, faisons ça… » Oh mon dieu, dans quoi je venais de m’embarquer. « Je te préviens tu mets pas la langue hein… » Parce que déjà qu’imaginer embrasser quelqu’un d’autre que Talya, c’était encore compliqué pour moi alors qu’il s’agisse en plus de Babylone que je connaissais depuis un moment maintenant, ça me faisait vraiment bizarre.

« Un dîner dans un grand restau ? » Allez, autant mettre la barre bien haut. Puis si ça pouvait redonner un peu confiance à Baby en nos chances de réussite, tant mieux. Enfin, l’idée d’échanger un baiser avec la demoiselle ne me réjouissait pas vraiment, et pas uniquement parce que je redoutais la réaction de mon meilleur pote, aussi parce que ça risquait de me faire bizarre. « J’ai pas dit ça, j’ai pas parlé de sale c’est juste que… Ca va être étrange quoi, toi et moi, comme ça… » rétorquai-je. « Et c’est pas pour te vexer… N’importe quel autre mec de ce campus serait ravi de t’embrasser Baby… » Elle avait un charme fou, le fait qu’elle en ait si peu conscience la rendait encore plus séduisante d’ailleurs. Mais ce détail n’enlèverait rien à l’étrangeté de la situation. Et pourtant, pas question d’avoir l’air de deux ados prépubères qui échangeaient leur premier bisous. Et puis un petit smack timide du bout des lèvres n’allait surement pas convaincre l’italien. « Faut que ça ait l’air réaliste quand même… » Et plutôt que de continuer de parler du baiser en lui même, visiblement cela ne me mettait pas super à l’aise, je parlais plutôt du lieu et des circonstances : « On devrait se retrouver au Bukow’, il y va souvent le jeudi soir… On guette son arrivée et dès qu’on le voit arriver, on se lance. Histoire qu’il ait vraiment l’impression de nous surprendre –par hasard- » Parce que si l’un de nous lui filait rencard quelque part, ça risquait de paraître louche.