J13 - Join us (Isaac)

Mes pommettes rosirent un peu alors qu’il soulignait ma façon enthousiaste de raconter mon séjour. « C’est tout moi ça, quand j’aime c’est à 200%... » Malheureusement c’était valable pour les voyages et aussi pour les garçons, ce qui m’avait valu déjà plusieurs chagrins d’amour à mon actif. Mais je préférais nettement parler de mon expérience péruvienne que de mes déceptions sentimentales c’est pourquoi j’enchainais ainsi : « J’espère pour toi que tu iras un jour, c’est vraiment à voir ! Y’a un pays où tu aimerais particulièrement aller ? » J’adorais découvrir de nouveaux endroits alors j’aimais beaucoup échanger sur ce sujet avec les gens que je rencontrais surtout quand ils semblaient tout aussi intéressés que moi. D’ailleurs, il m’informa que ses parents vivaient en France. « Oh ça doit être un pays super. T’y es déjà allé je présume ? » Bah oui si sa famille résidait là bas il avait du s’y rendre déjà. « Ils te manquent pas trop par contre ? » Moi qui avais perdu mon père et dont la mère ne voulait plus entendre parler, j’étais très sensible au sujet famille. D’ailleurs quand il me parla de son frère, un sourire étira mes lèvres : « Vous êtes juste tous les deux ou tu as d’autres frères et sœurs ? Moi j’aurais tellement aimé en avoir… » Même si j’adorais mes grands parents, je n’avais qu’eux et cela me manquait de ne pas avoir de fratrie avec qui partager tous mes tourments familiaux… J’ignorais encore qu’en réalité, j’avais une sœur sous mon nez à Harvard depuis le début de mes études.

J’hôchais la tête en écoutant ses deux propositions de réponse. « Oh j’aimerais tellement voir Londres. » J’approuvais également pour la Norvège : « J’ai vu des photos des fjords, ça donne envie ! » Bon en fait, j’avais envie de tout faire, tout voir. J’avais soif de découvrir de nouveaux horizons, mais pour le moment j’allais devoir rentrer à Cambridge et reprendre les cours. Le jeune homme me parla alors de ses origines françaises. « Et tu t’es bien habitué aux Etats-Unis ? Ton pays natal te manque pas trop ? » En tout cas, il semblait s’être parfaitement adapté. Il avait donc un frère ici et avait découvert l’existence d’un demi frère. Pour moi, c'était du positif. « Tu dois te sentir moins seul comme ça non ? » Il avait au moins des membres de sa famille près de lui.

Isaac semblait bien supporter l’éloignement avec sa famille et puis il avait adopté les états unis et s’y plaisait. En même temps, faire ses études à Harvard c’était une chance pour nous tous. Par contre l’histoire avec son demi frère semblait compliquée. C’était pas un re mariage ou quelque chose du genre, parce qu’il l’avait appris que récemment et que le garçon avait 20 ans. Je grimaçais un petit peu : « Oh, je vois… Si tu préfères pas en parler je comprendrais…» Je voulais pas le mettre mal à l’aise, puis les tensions familiales je connaissais alors je pouvais bien le comprendre.

Une expression de compassion attristée se dessina sur mon visage alors qu’il semblait vraiment déboussolé par cette histoire de famille. « Je suis désolé Isaac… J’imagine qu’après ce qu’il s’est passé au sein de ton couple, ça doit être une complication de plus dans ta vie… » Mais le jeune homme n’en perdait pas son sourire. Je vins un instant déposer mon index aux creux des fossettes que son sourire dessinait sur ses joues en lui confiant : « C’est dingue comment tu fais ça ? Ce sourire ? Je voudrais avoir cette force moi. » D’avancer, de pas se laisser atteindre par les événements.

J’étais impressionnée par ce sourire, coûte que coûte, cette force qui se dégageait du jeune homme. « T’as une bonne philosophie de vie j’aime ça… » fis-je en souriant à mon tour. « En tout cas j’espère que les histoires de familles vont s’arranger… Et peut être tes histoires de couple aussi. » J’imagine qu’il allait avoir besoin de temps : et pour accepter son demi frère, et pour oublier la trahison de sa petite amie.