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Open up your heart
and just let it begin
(K. Perry)
and just let it begin
(K. Perry)
Mallory attendait son mec devant le quartier-général de la Maison Eliot.
Son mec. Oui, comme dans 'son petit-ami'. Parce qu'au cas où vous sortiez de cryogénisation, vous ne savez pas encore que Mallory Bellwether, autrement appelé le plus grand libertin [drogué génie bipolaire] du campus, était casé. Ce que toutefois nul ne savait pour le moment, c'était qu'il avait même un contrat pour le prouver. En effet, la semaine précédente, il avait été approché par Amalric Prince. Un bizut des Eliot qu'il ne connaissait que de loin mais dont la seule vue le faisait déjà frémir là où vous savez. (Non, pas là. Plus bas. Voilà, là.) Le bellâtre voulait l'engager pour un travail bien particulier. Un travail que peu de personnes doivent exercer sans doute. Il voulait qu'il devienne son petit-ami. Mallory - qui ne croyait pas aux miracles – s'était fait expliquer ce qu'il pensait être toute l'histoire : a priori, les parents d'Amalric avaient décidé que leur fils n'était pas assez raisonnable et voulaient le voir casé. Ce dernier avait pensé que s'exhiber au bras d'une personne déjanté comme notre petit rouquin était la meilleure chose à faire pour respecter leur volonté tout en cherchant à se venger.
Alors, vous allez me dire, c'est de la prostitution. Vous avez raison. Cependant, pour Mallory, c'était encore pire que ça ! Parce que leur petit couple n'était que pour la galerie ; il n'y aurait donc pas de fraternisation sous les draps. Et quand on a un petit-ami qui ressemble à Amalric Prince, franchement, ne pas passer à l'acte, c'est juste du gâchis ! Cela dit, il aurait fallu être stupide pour refuser le marché – et les notes de Mallory en cours prouvaient tous les jours que c'était loin d'être un de ses défauts. Cela aurait été stupide, d'abord, parce que le job était vraiment super bien payé et que ses frères restés à Chicago avaient encore besoin de toute l'aide financière qu'il pourrait leur envoyer. Ensuite, parce que parader au bras de ce mec-là, ça devait quand même donner une sensation de puissance assez incroyable.
Il en plaisantait dans sa tête mais, tandis qu'il patientait dans le froid de l'hiver, Mallory avait quand même l'estomac un peu noué. En grandissant, il avait essayé d'ignorer qu'il avait un cœur tendre de romantique – parce que, croyez-moi, cela ne vous est d'aucune aide dans la banlieue sud de Chicago – mais maintenant qu'il était à Harvard, dans un cadre plus calme et distingué, il l'avait un peu redécouvert. Et il n'était définitivement pas sûr de pouvoir jouer la comédie du transis amoureux avec une personne qui lui faisait réellement de l'effet. Il ne faudrait pas qu'il perde de vue le fait que, quand Amalric lui adresserait un sourire, ce serait pour le jeu. Quand il lui prendrait la main, ce serait pour le jeu. Quand il le prendrait dans ses bras, ce serait pour le jeu. Quand il l'embrasserait, ce serait pour le jeu. Rien ne serait jamais réel et cela ne servirait à rien de vouloir qu'il en soit autrement, car son partenaire n'était même pas gay. En fait, Mallory se demandait même si son Prince allait réussir à prendre sur lui et à se comporter avec lui comme il se comporterait avec une jeune femme. Il avait un peu de mal à l'imaginer à vrai dire.
Une boulette de papier atteignit le Bellwether sur la tête et il ne se donna même pas la peine de se retourner tandis que des Eliots s'éloignaient en direction des bâtiments de l'université. Il était assez connu parmi les bleus. Il fallait dire aussi qu'il était toujours au premier rang des Mathers pour faire des conneries et que ces dernières étaient souvent dirigées vers cette Maison. Il n'y avait qu'à voir leur président qui l'avait élu comme punching-ball officiel et qui lui brisait un os ou deux quand l'occasion se présentait. Évidemment, il avait fallu qu'Amalric soit un Eliot.
Enfin, la porte s'ouvrit sur la personne qu'il attendait et Mallory retint son souffle. C'était idiot mais, depuis qu'il savait qu'ils allaient jouer au petit couple, il le trouvait encore plus beau. Ce qui allait commencer à être carrément illégal. Toutefois, c'était sa démarche qui avait d'abord attiré son attention la première fois. Il avait un charisme à couper au couteau et une manière de se déplacer qui le nommait propriétaire des lieux. Un genre d'assurance royale qui obligeait à se retourner sur son passage. Et sa mâchoire... Sa mâchoire ! Si bien dessinée, légèrement carrée, et toujours pourvue d'une barbe de deux ou trois jours à peine. Mallory avait immédiatement eu envie de la souligner de baisers. Ses yeux étaient également une attraction à part entière. Leur couleur, un bleu glacé saisissant, et leur expression de calme avant la tempête.
Nerveux, Mallory faillit s'allumer une clope mais se ravisa. Tiens, il ne savait même pas si Amalric fumait. Il faudrait qu'il le lui demande. Il n'avait pas encore déménagé chez lui mais c'était prévu dans le contrat qu'il avait signé. Nul doute que son partenaire serait étonné de le voir arriver avec pour seuls bagages, un sac à dos, un sac de couchage et quelques bouquins. Étonnamment, ce qui fit passer son stress fut de relever les yeux vers Amalric qui était maintenant arrivé jusqu'à lui et de voir qu'il semblait lui aussi un peu paniqué. Mallory se décolla du lampadaire où il s'était adossé et fit juste un pas dans sa direction tandis qu'un sourire en coin commençait à étirer ses lèvres. Peut-être qu'il allait pouvoir s'amuser un peu de cette situation en fait. Pourvu que, pour une fois, le destin ne lui rende pas la monnaie de sa pièce.
Il leva la main et attrapa le blouson d'Amalric au niveau de son abdomen pour le tirer un peu vers lui. Ils avaient prévu de passer la journée ensemble à se montrer sur le campus. C'était donc le moment de vérité. Le jeu commençait ici.
« Quoi ? J'ai pas droit à un bisou, ... mon Prince ? » souffla malicieusement Mallory en plongeant ses yeux rieurs dans ceux de son partenaire.
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