LUDWICK&RUBEN. first night.

Vingt-deux heures d’avion et quatre heures de voyage une fois sur place, je peux vous dire que ça fatigue ! Ruben avait passé la plus part du voyage à dormir, écouter de la musique et embêter Ludwick, son meilleur ami, à côte de qui il avait fait le voyage. D’ailleurs, c’est ensemble qu’ils ont décidé de passer leur première nuit au Kenya. Ils avaient découvert le village tout l’après midi, et essayé de discuter un peu avec les habitants – surtout les enfants – venus à leur rencontre. Le premier dîner local avait été.. particulier ! Il fallait dire que Ruben était difficile en ce qui concernait la nourriture, c’est d’ailleurs ce qui lui faisait le plus peur au moment de partir. Enfiiiin, après une journée, il allait retrouver un lit, un vrai ! Je rêve de cette nuit depuis que j’ai posé le pied sur le continue, t’imagines même pas ! dit-il en retirant son pantalon et son tee-shirt, se retrouvant en boxer dans la petite pièce qui leur servirait de chambre pendant quelques jours.

OH MY GOD. L'Afrique, le Kenya, tout ici semblait exotique, magnifique et tellement mystérieux. Si ce continent me m'avait pas interessé dans mes années adolescentes, j'en voulais découvrir d'avantage maintenant. Après la rencontre avec Simba, la mascotte des Quincy et partenaire de Jack, il y a des mois, je voulais en savoir plus. La faune, la flore, les habitants et coutumes. Cependant, avant cela, il fallait endurer les vingt-deux heures d'avion. Assis aux côtés de Ruben, j'avais passé mon temps à jouer à la DS ou dormir lorsque je n'étais pas embêté par Mr. Après avoir découvert le village et conversé avec quelques enfants, il était l'heure d'aller dormir. La nourriture lui avait semblé étrange, bonne mais étrange. Très différente que la gastronomie américaine ou encore polonaise. Ahaha, tu vas pouvoir avoir ton petit confort, grosse marmotte ! Je suis encore tout excité, ce n'est pas encore pour tout de suite, le sommeil. déclarai-je, tout en me déshabillant pour finir en boxer. Détournant le regard, je finis par reluquer Ruben tout en lui disant d'une voix faussement perverse Mais c'est qu'il est pas mal, le Ruben, à croquer même ! avant de finir par pouffer de rire. Ouais, il était pas mal mais il était aussi mon meilleur ami. Toutes ces années vécues nous avaient rapprochés et nous voilà à partager une chambre à l'étranger. Ça me rappelle quand t'étais venu à la maison ! Une chambre pour deux, aha.

En temps normal, Ruben était le genre de garçon inépuisable, infatigable. Mais là, toutes ces heures d’avion assis sur un seul siège l’avaient vraiment fatigué. Il se déshabillait prêt à bondir dans son lit et dormir à points fermés pendant au moins douze heures. C’était sans compter sur Ludwick qui partageait sa chambre cette nuit, et celle d’après, et encore c’elle d’après.. en fait celle des quatre premiers jours. T’as intérêt d’me laisser dormir, sinon j’t’assomme à coup de topinambour ! Ou de bananes, ou de n’importe quoi qu’il pourrait servir à assommer son meilleur ami pour les douze prochaine heures. Il s’installa en tailleurs sur son lit, se recouvrant de sa couverture. Il avait pris l’habitude d’entendre les commentaires du Dunster sur sa bogossitude et autant vous dire que ça ne lui faisait plus rien aujourd’hui. Au début, il avait peur. Peur qu’il lui saute dessus en pleine nuit – même s’ils n’habitaient pas ensemble, Ruben était persuadé qu’il aurait pu venir jusque chez lui. Ressorts pas les souvenirs toi ! On avait quoi.. quinze ans ? Putain ça fait des années ça ! s’exclama-t-il en repensant à la correspondance qu’ils avaient entretenus.

Nostalgie quand tu nous tiens. Presque dix ans que nous nous connaissions. Et pourtant, qui aurait pu le croire ? Un Polonais avec un Australien. A l'époque, tout cela m'avait semblé extrêmement bizarre, me foutant dans un mal être. Un correspondant, c'est quelqu'un avec qui tu devais sortir tandis que je voulais seulement rester dans mon lit, à jouer à la PlayStation. Ahah, ouaip, neuf ans ! J'étais stressé par ta venue, genre, j'pensais que tu allais manger que du kangourou. Et difficile d'en trouver en Pologne. SO CLICHE, je le savais ! Cette vague de souvenirs me provoqua un bref sourire. Tout comme Ruben, je m'installa sur mon lit, n'hésitant point à m'envelopper de ma couverture. Seuls dans la chambre, ils étaient tous les deux. Et qui dit cela, signifiait aussi l'intimité pour les sujets sérieux. Sérieux ? Le Kenya, c'est vraiment génial. dis-je en regardant le plafond avant que ma tête se détourne brusquement vers mon meilleur ami. Mes sourcils prirent un mouvement faussement pervers quand je prononçai avec mon accent Encore plus, lorsqu'il y aura une certaine Quincy dans les parages... Ça crevait les yeux que le tatoué ait des sentiments pour la rousse, Athina. L'amour semblait être un élément conducteur dans nos vies, c'est d'ailleurs ce qui nous permet de vivre et de continuer à avancer. Et j'en étais sûr, Ruben s'était fait prendre le sien.

Neuf ans. Wow, Ruben avait quinze ans à l’époque et Ludwick n’en avait que treize. Des puceaux quoi ! Quoi que, Ruben avait déjà embrassé, il sortait avec son Olive chérie à l’époque. La parfaite petit Olive, parfaite peste oui ! Sérieux ? Tu m’avais jamais dit ça ! T’étais un malade, t’as vraiment pas changé d’ailleurs ! rigola-t-il en lui balançant son oreiller. Ruben était loin de manger des kangourous, ils les élevaient. D’ailleurs, son Olaf lui manquait terriblement, vivement le prochain voyage pour qu’il le retrouve, ainsi que ses parents of course. Ludwick le faisait rire, tout le temps, pour un rien. Mais là, c’est un rire gêné qu’exprima le Dunster lorsque son meilleur ami évoqua une certaine Quincy. D’ailleurs, dans la lumière tamisée de la chambre on pouvait presque voir les joues de Ruben rougir. Oh, n’importe quoi toi ! dit-il tout penaud, secouant la tête négativement. Bon en fait, il n’avait pas arrêté de penser à la jolie rousse… il avait même été déçu de ne pas la voir aujourd’hui et avait plus que hâte d’être à demain. Peut-être était-ce aussi pour ça qu’il souhaitait vite se coucher.

Je me mis à pouffer de rire face à la réplique de Ruben. Héhé, en Pologne, on avait certains clichés des gens du sud et sans détour, on pouvait attribuer avec des stéréotypes, des particularités natales. Et à treize an, forcément, je croyais encore à trop de choses surréalistes et utopiques. Douce innocence. Et me voilà au présent, toujours en bonne entente avec mon correspondant, qui est devenu mon meilleur ami. Ce garçon qui est amoureux d'une fille ... mais qui veut pas l'avouer, ou du moins le cacher. Ayant rattrapé son coussin, je lui relançai en pleine figure ; Prends-moi pour un esquimau russe ! dis-je. Fallait être aveugle pour ne pas le voir, surtout lorsqu'on connaissait Ruben comme s'il était ton frère jumeau. La rousse, il l'avait dans l'esprit, il arrivait pas à s'en débarrasser parce que d'une manière, il éprouvait une forme d'addiction. T'sais, la discrimination contre les roux, c'est terminé depuis un bout de temps. D'ailleurs, maintenant, tout le monde veut être roux en y pensant ! Et puis, quelque part, c'était mignon les amoureux, pourquoi en avoir honte ? Hormis quand on s'appelle Ludwick, comme moi.

L’oreiller que Ruben avait lancé en pleine face de Ludwick lui revint. Il l’attrapa en plein vole et se bloqua contre son torse nu. Athina. Pouah, cette fille lui retournait la tête ! Lorsqu’il était avec elle, il priait secrètement pour que le temps s’arrête et qu’elle ne rentre jamais chez elle. Il l’aimait vraiment beaucoup, il l’aimait tout court peut-être. Eh ! J’aime les roux. dit-il en souriant bêtement. Traduction ? J’aime Athina. Et y’avait pas à nier, tous les deux feraient un jolis petit couple, la rousseur de la Quincy s’accorderait à merveille avec les yeux verts de Ruben. Tu vois, la dernière fois que j’ai ressenti ça pour une fille, c’était avec Olive. dit-il en se mordant la lèvre inférieure. Ses ex ? Il n’en avait pas eu beaucoup depuis son arrivé à Harvard… Mais pour le peu qu’il avait réussi à conquérir il n’avait jamais ressenti ce qu’il ressentait par le simple fait de voir la jolie Quincy.

Je me mis de nouveau à rire lorsqu'il avoua aimer les roux, tel un bêta. Pour voir Ruben dans un tel état, je me doutais que cette histoire devait être prise très au sérieux. Dans la vie, on avait le droit à plusieurs amours. Les crush, les coups de coeur et les gens qui nous rendent addicts de leur personne. Mon premier amour, ça a été Leevy-Jeff. Et dès que j'avais eu mon premier baiser avec cette fille, j'avais envoyé une tonne d'SMS à Ruben pour lui dévoiler tous les détails. J'en avais été accro, un peu trop et c'est pour cela que ça avait fini avec une rupture déprimante. Et depuis, je ne m'étais seulement amusé, la plupart de mes conquêtes étant des hommes, parfois des femmes. Ouaip, je comprends. Et puis, j'suis sûr, qu'elle en pince pour toi aussi. Regardes-toi, musclé, tatoué, tu peux avoir qui tu veux dans la poche, suffit de sortir les bons mots ! J'en étais persuadé, cette histoire se finirait par une déclaration, par un oui. Après tout, pourquoi penser à du négatif ? Et puis, maintenant, nous sommes au Kenya. La nuit étoilée devait être belle à contempler. T'es au Kenya, mec ! Si t'as pu réussir à venir jusque là, tu réussira à voter tes grosses ventouses sur son corps. Mon ton sérieux disparaissait au fur et à mesure pour laisser place à une ambiance enfantin et ironique.

Musclé, tatoué, plutôt pas mal en son genre, c’est vrai que Ruben attirait quelques regards sur son passage. Il pourrait en profiter et ramener chaque soir une nouvelle demoiselle chez lui et s’enivrer d’un plaisir sans fin, mais ce n’était tellement pas son genre. Non, Ruben était plutôt le genre de garçon qui faisait attention avec les filles, il n’avait pas envie qu’on dise de lui qu’il était un connard, comme tous les autres. Parait que les bons mots ça vient tout seul, on verra bien. dit-il en adressant un clin d’œil à son meilleur ami. Oui, il comptait bien parler à Athina cette semaine, persuadé que le charme de l’Afrique l’aiderait beaucoup. Ses ventouses, traduction : sa bouche. Ah, Ludwick et ses expressions à deux francs six sous.. Ruben lui tira une grimace avant de rire, il avait tellement raison pourtant. En tout cas, il espérait qu’il puisse avoir raison. Azi, comme si j’attendais que ça… dit-il en regardant son ami du coin de l’œil. AH ! Mais oui j’attends que ça ! dit-il en riant. De toute façon, il pouvait rien cacher à Ludwick, il le connaissait par cœur !

Ralala, si je devais élire la personne avec qui je passais le plus de temps à rire, Ruben gagnerait avec brio la palme d'or. Sans difficulté, on pouvait mettre un peu d'humour dans un sujet amplement sérieux. Je croyais en lui, en sa force, et je m'en doutais que ça finirait bien. Il fallait de l'attente, de la patience. Et parfois, lorsqu'on y pense pas trop, on obtient plus rapidement ce qu'on voulait. D'un côté, je restais gêné. Tout le monde autour de moi s'attardait à une personne, flirtant avec elle pour qu'un couple fleurisse quelque temps après. Et puis, il y avait moi qui n'avait personne. Ou presque dans son cœur. Pas de coup de coeur, juste des histoires assez compliquées, dans lesquelles mon esprit était totalement perdu et confus. Royce, Andrea et surtout Camille. Peut-être qu'un jour, j'aurai le droit à cette putain d'histoire d'amour tranquille ? Baillant, je passai ma main sur ma bouche. La nuit semblait pleine. Tu veux qu'on joue à un jeu ? Genre action, vérité ou une connerie de la sorte ? déclarai-je. Un peu de piment, ça ne fait jamais de mal et peut-être que de part et d'autres, des petits secrets seraient dévoilés.