You are my father, but you abandoned me | Kaleb & Nikolaï

Il n'a jamais oublié ma mère, pourtant il n'a pas perdu de temps pour fonder une nouvelle famille, loin d'elle.. Par la suite il me fit savoir que je n'avais pas à me rendre responsable de la mort de ma bien-aimée et que ça ne m'aidera pas à avancer.. Mais je ne mérite pas d'avancer. Contrairement à certaine personne, je ne pourrais jamais la remplacer par une autre. Disais-je en faisant très clairement référence à ma mère, même si au fond je ne me voyais très clairement jamais retomber amoureux, je ne peux pas.. Je n'ai pas le droit. Il me fit ensuite savoir qu'il aimerait apprendre à me connaître et faire partie de ma vie, cette vie tellement pourrie depuis des années, cette vie qui à chaque fois qu'elle commence à s'ensoleiller, redevient sombre en un instant. J'hochais les épaules l'air nonchalant, toujours aussi sur les nerfs même si j'essayais de garder au mieux mon calme. Vous voulez me connaître ? Très bien, je suis le pauvre gars qu'on appelle 'Le bâtard' depuis ses huit ans car il était le seul de sa classe à ne pas connaître son père. Je suis le gars qu'a vécu toute sa vie avec sa mère et qui ont galéré comme des chiens pour vivre avec le peu d'argent qu'on avait. Je suis le gars qui aujourd'hui vit avec la mort de la femme qu'il aime sur la conscience et qui s'interdit le droit d'aimer. Je suis le gars qui se bouffe la vie à faire un job de merde pour payer son loyer au risque de finir à la rue.. Alors vous voulez toujours faire partie de ma vie de merde ? Disais-je avec un rictus de dégoût sur le visage, car cette vie de merde, je l'ai en partie eu à cause du manque de figure paternelle dans ma vie, du moins selon moi.

Il voulait comparer nos deux relations amoureuses, sauf qu'elles n'avaient absolument rien en commun, parce que lui, on lui a arraché celle qu'il aimait, moi j'ai choisi de la quitter. Ce n'est pas du tout la même chose. C'est pas du tout la même chose. Moi j'ai choisi de la quitter et même si ce n'est pas ce que je voulais au fond, je savais qu'elle ne saurait pas m'attendre quand je partirais dans des missions périlleuses durant des mois, alors j'ai choisi une femme qui le pourrait. Pour preuve, me défunte femme faisait aussi partie de l'armée de l'air, mais là encore je crois bien qu'il ignorait tout ça, mais qu'importe il avait totalement le droit de m'en vouloir. Il enchaîna d'ailleurs en me faisant part que sa vie avait été misérable durant toutes ces années où je n'avais pas été là, seulement il se plaignait bien trop et même si c'était mon fils, je ne pouvais pas le laisser dire ça. J'ai fait la guerre et je suis pas commode, faut pas me chercher sur ça, même avec mes enfants Ta vie de merde ? Il me semble que tu es dans une excellente université, que tu n'es ni affamé, ni sans famille, ni dans un pays en guerre, ni obligé de te battre à 5 ans alors que tu sais même pas ce que la mort veut dire. Tu peux facilement remonter la pente, faut juste le vouloir et avoir un peu de courage. Et je serais là pour toi. Ca sonnait bizarre, parce que j'avais gardé le même ton froid et limite réprobateur sur mes derniers mots, mais c'était loin d'être le cas, je voulais juste qu'il arrête de se morfondre.

Je ne comprenais pas grand-chose à ce qu'il me racontait, sur une femme qui pourrait le suivre dans des missions périlleuses, mais je n'avais pas envie d'en savoir davantage, car ce qu'il me disait m'agaçait de plus en plus, j'avais besoin de temps pour avaler cette nouvelle et plus je parlais avec lui, plus je lui en voulais d'avoir quitté ma mère avant ma naissance. Il me sortit ensuite un speech comme quoi ma vie n'était pas à plaindre et qu'il serait là pour m'aider à remonter la pente, je roulais des yeux avant de lui répondre. Gardez vos remontrances pour votre fille, ça marche pas avec moi. Disais-je en le regardant dans les yeux. Non il ne va pas commencer à me faire la morale, je sais qu'il y a des millions de personnes dans des situations plus précaires que la mienne, est-ce pour autant que je devrais aimer ma vie actuelle ? Non, car la seule personne qui arrivait à me l'ensoleiller n'est plus de ce monde. Je ne passe pas mon temps à pleurer, mais faut pas me demander de sourire à longueur de journée en disant que ma vie est belle. Je me tournais doucement, continuant à parler à mon père de dos. Je dois bosser, j'ai un frigo à remplir. Et à moins que vous ayez besoin d'un taxi et que vous payez avec un gros pourboire, je crois que nos chemins se séparent là. Disais-je froidement, même si au fond nos chemins sont très loin de se séparer, étant donné qu'il reste mon professeur et qu'il n'allait certainement pas lâcher l'affaire si facilement, du moins s'il tient réellement à moi comme il le dit si bien depuis tout à l'heure.

Finalement c'était bien moins catastrophique que je ne l'avais imaginé. J'avais au moins pu lui expliquer les grandes lignes, même s'il était loin de les accepter et surtout de m'accepter moi, mais je ne m'attendais pas à avoir ses faveurs dès la première fois non plus, c'est bien quelque chose à faire sur la durée parce que j'ai tout de même était absent pendant près de 23 ans, et ça se rattrape pas en quelques minutes. Alors je ne rajoutais rien à ses dires, préférant le laisser partir, parce que je ne le comprenais que trop bien. Je m'en voulais même de lui avoir fait savoir qu'il y avait bien pire situation que lui, il ne m'avait certainement pas bien compris, mais maintenant c'était trop tard et j'espère pouvoir me rattraper prochainement. De toute façon je le verrais bien en cours, mais je lui laisserais le temps dont il a besoin pour venir vers moi, parce que avec toutes ces nouvelles, je ne referais pas un pas vers lui tant qu'il ne le voudras pas, tant qu'il ne sera pas prêt, je suis prêt à attendre le temps qu'il faudra pour mon fils.