MELODIE-BROWYN SALKANOVIC ► Dakota Fanning

 Cher journal,

Je trouve cela stupide de me livrer à du papier, c'est vrai, Madame Schnedër me connaissait mal finalement. Moi, Mélodie, résoudre mes problèmes à coup de crayon? Je ne crois pas, non. Il m'en faudra plus. Pour écrire quoi d'abord? Salut, j'm'appelle Mélodie et hier j'ai eu mes règles? C'est pathétique et pourtant, je suis toujours assise sur cette chaise, à espérer que la roue tourne, que les temps changent. Je n'ai qu'une envie: être heureuse. Mais je n'ai pas à me plaindre puisque des tas d'enfants aimeraient vivre dans les mêmes conditions que moi, à ce qu'il parait. S'ils savaient ce que j'endure depuis la perte de ma mère, ils se tairaient je pense.  

Bon, je ne vais pas m'attarder longtemps sur le sujet et je vais me présenter, qu'en dis-tu? Que suis-je bête, tu n'es qu'un livre, tu ne pourras pas me répondre !

Je m'appelle Mélodie-Browyn; je reconnais que ce prénom est assez spécial, je ne sais pas comment mes parents l'ont choisi. Personnellement, je préfère Mélodie, Mél' ou Mélo. Mon deuxième prénom est Katarina, en hommage à ma grand-mère paternelle. Lui, mon nom de famille, typiquement slave est Salkanovic, mais il se prononce "Salkanovitch". Mon père se prénomme Ulrik Salkanovic, un honnête homme au premier abord, une personne sadique quand y on regarde de plus près. Il est né en Serbie, tout comme moi. Ma défunte mère, elle, s'appelait Sarah Tellier et est née à Cassis dans le sud de la France. Tu ne peux pas savoir à quel point elle me manque.. Je n'ai pas de frère ni de sœur, je suis fille unique, et même si j'étais le seul enfant à la maison, je n'étais pas pourrie gâtée. Nous vivions dans une maison délabrée au cœur de Belgrade. C'était difficile pour ma mère qui devait s’acclimater au mode de vie des Serbes.        

Comme je l'ai précisé plus haut, mon père était un homme abjecte, mais j'étais à l'époque trop jeune pour m'en rendre compte. Je voyais souvent ma mère infestée d'hématomes, d'yeux au beurre noir, de bleus. Je l'entendais souvent hurler, pleurer, supplier et aujourd'hui, je regrette, de ne pas avoir agi. Je regrette de ne pas avoir prévenu quelqu'un. Je la voyais périr à vue d’œil mais, moi je croyais que la situation était normale. Je ne savais pas que c'était passible de prison.

Les années ont passé, j'avais gagné en maturité et mon père en force. J'étais âgée de tout juste seize ans et me trouvais en Première Littéraire dans un lycée publique de Belgrade. Je révisais ce jour là, du moins, j'essayais d'apprendre une pièce de théâtre. Tu sais, cette histoire d'un crétin et d'une crétine qui ne peuvent pas se voir à cause de leur famille respective? Oui, Roméo et Juliette ou une niaiserie par excellence.  L'amour c'est vraiment une belle connerie, tu ne trouve pas? Tu aimes, tu espères, tu espères, tu souffres, c'est mathématique. Malheureusement, je peinais à me concentrer tant le bruit de fond que générait une dispute au rez de chaussé m’accommodait.

Je posais donc les vers de Shakespeare sur mon bureau et descendis les marches avec prudence, de manière à paraître inaudible. Je me souviens avoir entendu mon père jurer en Serbe et ma mère le supplier de se calmer.

La tension montait au fil des secondes, j'te promets, j'en avais froid dans l'dos. Puis, comme par miracle, je n'entendis plus rien, enfin, plus rien, j'ai parlé trop vite.

Un coup de feu retentit et le bruit fut tellement strident que j'eus l'impression d'avoir les tympans déchirés. Il l'avait tué, il.. Il l'a tué, tu m'entends ?! Excuse-moi, je tache tes feuilles, sur le coup aussi, j'ai pleuré, je crois.

J'avais à peine eu le temps de jeter un regard à sa dépouille que je sentis une main agripper fermement mes cheveux et me traîner dans sa chambre. Je savais ce qu'il aillait me faire mais j'm'en fichais, il m'avait enlevé ma mère. Les larmes coulaient le long de mes pommettes et rien que pour ça, je reçu une gifle. J'avais envie de lui crier mon dégoût, ma haine, j'lui crachais même en plein visage mais rien n'y faisait, il était en train de me prendre mon innocence, il était en train d'abuser de moi.

Ça a duré un laps de temps, jusqu'à ce que je finisse le lycée et que j'obtienne une bourse pour Harvard. J'vais t'confier un truc, mais tu ne dois en aucun cas le répéter. Il continu de me faire subir ce genre de sévices, lorsque je retourne en Serbie durant les vacances ou quand il vient me rendre visite afin de "s'assurer que mes études se passent bien". Malgré tout, je réussi très bien à dissimuler ce lourd secret qui me pèse et à paraître forte pour les autres.       


En ce moment, je suis un cursus Théâtre/Philosophie; je t'avoue que c'est un peu dur mais je fais tout pour y arriver. C'est la seule chose qui me fait tenir de toute manière.

Bon, je vais m'arrêter là, je dois réviser pour mes partielles.