El baile de Boston {Jales et Alejandro}

Selon Jales, l'amour nous tombe dessus sans prévenir. Alejandro pour sa part croit en réalité que c'est un peu plus prévu que cela, mais c'est vrai qu'on peut trouver la bonne personne là où on s'y attend le moins. Pourtant, Alejandro a espoir depuis son arrivée à Harvard de trouver la femme qu'il lui faut. Il avait cette incroyable façon de toujours, ou presque, parvenir à ses fins. Un vrai Ortega.

-Je suis d'accord avec ta mère.

Répondit-il quand même. Jales tenait beaucoup à elle, elle qui était décédée, d'après ce qu'il avait cru comprendre. Car même si cette mère était sa mère adoptive, elle demeurait tout de même sa mère, le lien du sang ne fait pas tout.

La discussion continuait et en affirmant qu'il aime les défis plutôt que les jeux faciles, il sous-entendait qu'il n'aime pas les femmes faciles et ne s'amuse pas à jouer de son côté au mec qui couche à gauche et à droite. Oh, à 17 ans, il a eu une période, c'était la découverte du sexe quoi, mais depuis, il s'est calmé un peu, il s'est "fidélisé", comme il aime à le penser.

Quelques instants plus tard, un homme venait interrompre les discussions de manière à tout le moins impolie et Alejandro géra la situation et tenta surtout de protéger Jales, qui semblait craindre cet homme et qui aussi avait refusé la moindre de ses avances. Faut dire que ce mec et Alejandro sont tous les deux dans deux catégories très différentes. D'ailleurs, une fois l'homme partit, il essayait de rassurer Jales, qui semblait sceptique et qui doutait de mériter mieux.

-Je le crois, c'est tout.

L'Espagnol semblait sûr de lui et certain de ce qu'il disait. Jales cachait donc une jeune femme fragile et qui doutait d'elle derrière ce caractère plein de franchise et d'intrépidité. C'était amusant, ce petit paradoxe, intéressant aussi. Elle prouvait qu'elle avait des failles et cela ne la rendait que plus humaine, plus belle.

En revanche, lorsqu'elle vint pour payer les deux consommations, Alejandro s'interposa avec un sourire amusé. Il justifiait que c'était lui qui invitait, insistait à répétition, parlait même que d'où il vient, un homme est bien mal s'il ne peut payer le verre de son invitée. Si Jales insiste autant que lui, il finit par céder, mais à contrecœur et il donnera même l'impression d'être attristé. Au contraire, s'il paie, il semblera soulagé et heureux de le faire.

Manteau noir ample sur le dos, il était dans la limousine et un certain silence s'y installait tandis qu'ils prenaient la route de Cambridge et du campus de Harvard. Silencieux pour une bonne partie du trajet, il se mit à parler des vacances à venir, au Spring Break. Alejandro parlait de peut-être retourner en Espagne, à moins qu'Harvard n'organise une autre grande sortie/voyage. Si la destination lui plait, il avisera. Garée devant la Cabot House, la limousine s'arrêtait et Jales lançait une idée. Alejandro eut un petit sourire.

-Si, bien sûr. Si tu pouvais m'offrir un café, ce serait encore mieux.

Ajoutait-il de manière détendue. Il donnait son congé au chauffeur, il prendra un taxi pour revenir et sortait de la voiture pour raccompagner Jales et passer encore une heure environ avec elle.

Alejandro ne s'attendait pas finir la soirée à la Cabot House, pas plus qu'il ne s'attendait à ce que le courant passe si bien entre Jales et lui. Un peu plus tôt, il avait accepté à contrecœur de la laisser payer, puisqu'en retour, il pourrait lui offrir un café, proposition qu'il avait aussitôt accepté. D'ailleurs, parlant de café, il en voulait bien un, tant qu'à passer une heure à la maison Cabot. Le café lui rappelait son pays et le réchauffait aussi, ce qui est pratique vu les températures hivernales de ce coin du monde!

Debout dans la cuisine, il ne s’assoirait pas tant que Jales ne sera pas assise. Il était légèrement appuyé contre un comptoir et observait la blonde préparer le café.

-Comme je te disais, ma décision n'est pas prise et je ne sais pas si Harvard fera un voyage, où cela aura lieu. Si c'est un pays chaud et si je sais que je serai bien accompagné, j'irai, sans aucun doute!

Sa décision dépendait donc de quelques facteurs. Lorsque le café fut prêt, la tasse servie, il remercie Jales, en espagnol, un réflexe, mais aussi, Alejandro aime bien conserver un peu de sa langue natale. Du reste, une fois sa cavalière assise, il put s'asseoir aussi.

On sait qu'Alejandro ira finalement au voyage du Spring Break, tout comme il ira au Brésil avec les Eliots, mais au début du mois de février disons, cela n'était pas encore prévu dans son esprit. Sa mère le réclamait aussi et il aimerait bien voir son grand-père, lui dire que tout se passe bien pour lui aux États-Unis, que ses études progressent. D'un autre côté, dans un monde idéal, ce serait bien qu'il n'arrive pas seul en Espagne. Or, s'il veut avoir quelqu'un à ses côtés un jour...

En tout cas, Jales semblait tenir à ce qu'il vienne et le jeune homme fit un sourire qui semblait presque dire, à lui seul, qu'il irait sans doute. Pour le reste, elle était curieuse, comme lui, de savoir où le voyage aurait lieu. Le jeune homme prit une petite gorgée de café après s'être assit et s'être départi un instant de son manteau aussi pour le laisser contre le dossier de la chaise.

-Tu aimes voyager?

À l'entendre parler de ce voyage avec une certaine hâte, il devinait que oui, sans doute. Cela est aussi son cas. Voyager est pratiquement une deuxième nature chez lui. Après tout, Alejandro a même son propre voilier, son ultime passe-temps.

Jales ne savait pas si elle aimait voyager, mais elle en rêvait, carrément. Pour un homme qui a voyagé toute sa vie et qui a dû parcourir la moitié du globe, il pouvait comprendre que d'autres rêvent d'une telle vie et si évident qu'il avait les moyens de réaliser le rêve de Jales, mais il n'était pas seulement question de cela. Sourire aux lèvres, il la regardait, l'écoutait parler aussi, avec attention.

-Il y a des pays que tu aimerais voir plus que d'autres?

Bientôt, Jales revint sur le sujet du Spring Break. Elle avait vraiment hâte à ses vacances et cela se comprenait. Être étudiant implique beaucoup de travail et on n'a probablement pas autant d'occasion de se lâcher qu'on le voudrait. Alejandro comprenait bien et lui aussi se tenait tranquille, consacrait beaucoup d'efforts et de temps à ses études, alors ce Break était le bienvenue pour lui aussi et il espérait en profiter.

-Comme je te comprends et je suis comme toi, enfin, je crois. Quand je bosse, je bosse dur, mais quand enfin je peux me reposer, faire se dont j'ai envie, je ne me prive pas et mon côté latin, carpe diem, reprend facilement le dessus.

Ce qui n'est pas une mauvaise chose si vous voulez son avis. Maintenant, il imagine que s'ils sont tous les deux au Spring Break, ils passeront bien quelques moments ensemble. Alejandro ne se doutait pas encore qu'en fait, en quelques semaines, Jales et lui se seront tout de même beaucoup rapprochés.

Jales raconta à Alejandro son voyage à Paris, interrompu par la maladie de sa mère adoptive. Un moment difficile, sans aucun doute et il vit bien le regard de la blonde vaciller un petit instant. Lui aussi tient beaucoup à sa famille, ses parents, mais lâcherait-il ses études, Harvard pour aller à leur chevet? Il ne savait pas, s'avouait-il. En revanche, un voyage à Paris, certainement. Il a déjà été tant de fois dans cette ville, tandis que Jales rêve d'y retourner, ce qui le fit doucement sourire et il hocha de la tête, sans poser plus de question ou insister sur ce sujet, trop heureux de la voir se confier à lui.

Puis, elle reprenait sur ce rêve qu'elle avait, de voir Paris, de pouvoir prendre son temps la prochaine fois. Alejandro écoutait toujours attentivement et laissait Jales parler. Ce qu'elle disait était bien plus intéressant, touchant même, que ce qu'il pourrait dire lui-même. La blonde parlait ensuite de sa dévouement à l'étude, une activité à laquelle elle mettait beaucoup d'effort, un point commun avec lui, qui prenait le travail et les études très au sérieux, peut-être un peu trop, enfin, parfois, c'est ce qu'une part de lui disait, pensait.

-Ou bien faire un petit tour à la bibliothèque.

Ajoutait l'Espagnol, puisque c'est à cet endroit qu'ils se sont revus, enfin, de manière plus substantielle dirons-nous. Puis, il enchaînait, de manière un peu plus discret, réservé peut-être, Alejandro n'était pas le genre d'homme qui aime parler de lui. Oh, il ne dirait pas qu'il cultive le mystère, mais sa vie n'était pas centrée sur lui-même, tout simplement et une part de sa personne est réservée. Par exemple, on en sait peu sur sa vie amoureuse.

-Comme toi, je consacre aussi beaucoup de temps, d'énergie aux études. Je me dis parfois que c'est un dur moment à passer pour avoir les compétences qu'il me faut pour plus tard et puis, étudier à Harvard est un privilège en soi, je veux dire... nous sommes entouré de l'élite du monde...

Même si parfois, on voit des gens agir et on se permet d'en douter, mais même l'élite est humaine, avec tous les défauts qu'on connait à l'Humanité et c'est bien connu, les personnes de grandes qualités ont souvent, aussi, de grands défauts.

-Tout ça pour dire que c'est important d'en profiter quand on a des vacances.

Avec tout cela, Alejandro finissait bientôt sa tasse de café et l'heure avançait.