(+ Septembre) Coïncidences, coïncidences...

Bien souvent, les amis de Thaïs la considéraient comme une folle échappée de l’asile, mais il ne fallait y voir là qu’une blague de potaches et non une expression à prendre au premier degré. Ceci étant, le nombre de séjours à l’hôpital qu’elle faisait s’avérait si impressionnant que même la jolie blonde finissait par considérer que chaque nouveau phénomène pouvait être considéré comme un effectif voyage jusqu’à l’asile le plus proche. Aujourd’hui ? Bah, on l’avait simplement renversée en voiture, parce qu’elle avait traversé sans vraiment faire gaffe ni aux bruits environnants ni aux gens autour d’elle qui auraient pu la renseigner sur la position du feu au passage protégé… il ne s’agissait là que de légères commotions mais comme l’irlandaise était aveugle ET enceinte, tout le monde en faisait immédiatement un patacaisse. « Vous êtes quand même bouchés à l’émeri, faut que je vous l’dise en Klingon que je vais bien ? JE VAIS BIEN BORDEL ! » vociféra-t-elle alors qu’on la conduisait tout de même à une chambre en attendant de pouvoir l’examiner. Ce n’est qu’une fois seule en présence d’une autre patiente qu’elle se calma aussitôt : « Désolée d’avoir crié, mais ils sont sourds comme des pots ici… »

Du jour au lendemain, on t'avais change de chambre. Pourquoi, personne ne t'avais donné de raisons? Apparemment parce que ton etat s'etait stabilisé et que donc, il ne fallait plus que tu sois sous surveillance permanente. En verite, ca voulait aussi bien dire que tu n'etais plus de service. T'aimais vraiment pas comment cet hopital te traitait. C'est comme si les patients n'etaient que des objets, du salaires, de l'argents. La societe d'aujourd'hui avait bien change et esperer pour des personnes qui se souciaient reellement de l'etat d'un patient, c'etait bien rare. Une autre personne arriva alors dans ta chambre, criant un peu au scandale, pretextant qu'elle allait bien. Tu ne dis rien, attendant qu'elle se calme et d'ailleurs elle s'excusa meme. C'etait polie, au moins elle etait pas folle. "Je suppose que tu n'aimes pas l'hopitaux." Lui dis-tu calmement. Qui aimait ca de toute facon? A part les medecins peut-etre.

Thaïs soupira à de nombreuses reprises, se sentant si oppressée entre ces lieux qu’elle n’avait aucune idée du moment où elle craquerait pour de bon… mais ce moment allait arriver, à n’en point douter. Sa cécité la poussait à se remémorer seulement la couleur de ces affreux murs d’une couleur blanche maladive, et son odorat plutôt développé, quant à lui, ne pouvait l’empêcher de sentir la nausée monter à cause de cette affreuse odeur d’eau de javel. « Je déteste, à vrai dire » avoua-t-elle non sans lui montrer sa canne d’aveugle. Thaïs n’avait pas été victime d’un accident quelconque mais cela ne lui faisait pas remonter d’excellents souvenirs pour autant. « Je te rassure je ne vais pas péter une durite c’est juste que je n’ai rien de grave donc je serais très bien chez moi plutôt que dans cet asile de fou… désolée que ce soit tombé sur toi ! Je m’appelle Thaïs. »

Quand la jeune fille te dit qu'elle detestais les hopitaux, tu ne pouvais que la comprendre. Tu detestais cet endroit, cet odeur, ces murs, tout cet endroit, il te rendait mal et tu n'avais qu'une envie, c'etait de sortir ici rapidement. Seulement, tu savais que tu allais y rester quelques temps. Tu avais perdu un enfant, deja ca, c'etait un gros truc et apres ton instabilite psychologique et physique t'allait clairement te couter deux semaines a l'hopital. Tu ne voulais vraiment pas. C'est pour cela que tu n'avais pas voulu aller a l'hopital apres ta semi-tentative de suicide. Elle te faisais un peu sourire cette fille, elle etait un peu comme une distraction, quelque chose qui arrivait a te faire oublier un peu ta perte. Elle se presenta, et te dit qu'elle s'appellait Thais. "Moi c'est Septembre, enchantée." Toi et ta politesse qui etait limite nouvelle. Avant t'aurais surement sortie une connerie dans le genre, maintenant c'etait different. Tout etait different.

Cette demoiselle en face d’elle ne semblait pas bien bavarde mais Thaïs ne lui jetait pas la pierre : elle ne pouvait pas la voir de ses propres yeux ni se rendre compte du potentiel état dans lequel elle se trouvait. Cette fameuse Septembre était-elle reliée à des dizaines de fils ? Avait-elle des perfusions ? Ou un fil à oxygène ? Bref la jolie blonde pouvait se permettre de tout imaginer mais malgré le fait qu’elle ne s’exprime qu’avec une ou deux phrases courtes sans agrémenter la chose d’un plus long discours histoire de faire la conversation, Thaïs n’avait pas dit son dernier mot : elle détestait par-dessus tout le silence, qu’elle trouvait gênant, et puis elle restait la positivité et l’optimisme incarné. « De même, enchantée Septembre, tu as un joli prénom d’ailleurs ! Je ne sais pas pourquoi tu es là mais tu as peut-être besoin de te reposer, dis-le-moi si tu trouves que je parle trop. Au pire, j’irai sûrement explorer l’hôpital jusqu’à ce qu’ils me ramènent pour la énième fois à mon lit » plaisanta-t-elle sans perdre son sourire une seconde.

La jeune fille semblait plutot bavarde, contrairement a toi qui ne disait rien. Elle etait plutot jolie, et avait ce cote rayonnant, que toi tu n'avais pas. Tu te demandais, si elle te prenait en pitie d'etre si pale, si maigre, si abimée. Tu n'aimais meme pas toi-meme la vue de ta propre personne, sauf peut-etre cette nouvelle couleur de cheveux. T'as changé, c'est bien ca non, de changer? Alexys t'avait aidé pour cela, ce que tu avais trouvé gentille de sa part, peut-etre que ca va vous rapprocher. Tu secouais la tete alors qu'elle te demandait si tu voulais te reposer. A vrai dire, tu ne fais vraiment que ca, a longueur de journée, rester dans ce lit a attendre que le temps passe, lisant parfois un livre ou regardant la television, mais c'etait jamais sans grand interet. "Non, t'en fais pas. J'suis pas tres bavarde, desolée. Et tu es sûre que tu devrais explorer l'hopital?" Demandais-tu poliment. Tu n'etais peut-etre pas tres bavarde mais au moins tu ne voulais pas la laisser parler dans le vide non plus.

Sans que Thaïs ne dévoile réellement la raison pour laquelle elle n’était pas une fan inconditionnelle du silence, elle écouta les paroles de la fameuse Septembre sans piper le moindre mot ou le plus petit son. Cela ne la dérangeait pas en soi d’avoir à faire à quelqu’un n’étant pas franchement bavard, après tout, elle devait avoir de très bonnes raisons pour ne pas parler énormément mais de son côté, la blondinette demeurant déjà dans le noir le plus complet du matin au soir, il aurait été mal avisé que de la plonger dans le silence en prime. « Ne t’excuses pas tu as sûrement de très bonnes raisons » répondit aussitôt Thaïs pour que son interlocutrice ne ressente pas la plus petite culpabilité à ce sujet. Bien au contraire, c’était son droit le plus strict et loin de l’irlandaise l’envie de la pousser à être autrement. « Heum… à vrai dire raisonnable n’est pas vraiment mon deuxième prénom et puis je n’ai pas envie de rester inactive jusqu’à ce qu’ils me fassent passer des examens pour m’apprendre ce que je sais déjà. « Vous êtes aveugle mademoiselle ! » ouais, sans blague ! »

Pour quelqu'un qui venait d'etre mis en hopital, elle semblait tres jovial et tres optimiste. Peut-etre que c'etait son moyen pour ne pas devenir folle, pour ne pas completement perdre la raison. Seulement, toi, tu n'arrivais pas a adopter ce genre d'attitude. C'etait impossible. C'etait juste vite. Tu n'arrivais meme pas a etre compatissante quand elle disait qu'elle etait aveugle. Oui tu etais desolée pour elle, cela ne devait pas etre facile, mais des sentiments, de la compassion, y avait rien. C'etait le neant pour toi, et ceux depuis maintenant le soir de l'incident alors que tu t'etais reveillée a l'hopital avec une sensation de vide en toi. C'est comme si il n'y avait que un trou noir en toi et rien d'autre. Tu commencais a jouer avec tes mains, ne sachant pas quoi dire. "Il y a peut-etre autre chose." Oui tu etais entrain d'essayer de faire la conversation. Toi Septembre West faisait cet effort pour une fois dans ta vie.

Subitement, Thaïs lança un regard attendri et sincère à l’attention de cette fameuse Septembre qui venait de l’arrêter en cours d’envolée lyrique. Autre chose ? Peu probable, surtout par rapport à sa vue. La jolie blonde ne comprenait surtout pas l’intérêt de tels examens alors qu’il n’y avait aucune raison pour que son quotidien change… vraiment, c’était ridicule et inutile. « Non, sincèrement je ne crois pas. Je ne suis pas médecin bien sûr mais je n’ai pas perdu la vue dans un accident, c’est venu de façon naturelle, à cause d’un glaucome. Cela fait six ans, si jamais il avait du y avoir une amélioration, elle se serait manifestée depuis le temps. Ils me font venir pour rien et j’avoue… que j’ai autre chose à faire. N’y vois pas de l’inconscience c’est juste que je suis fatiguée qu’on me rabâche que je suis aveugle alors que je ne constate que ça toute la sainte journée » avoua-t-elle en toute sincérité, sans chercher à se faire plaindre ou à démontrer une colère n’ayant pas lieu d’être dans la conversation actuelle.

La jeune blonde te parlait de quelque chose et a vrai dire tu ne comprenais pas trop. Glaucome? C'est quoi ca? Tu n'etais pas une scientifique et tu l'as jamais ete en verite. Toi, ta specialité, c'etait l'art et son histoire et tout ce qui allait avec. Tu pourrais parler pendant des heures des mouvements mais quand on t'avait explique ce qui s'etait passe avec ton bebe, tu etais reste blanche d'incomprehension. Enfin, ce n'etait pas vraiment la chose. "Il y a peut-etre de nouvelles techniques. Pour trouver une solution." A vrai dire, tu ne savais pas quoi lui dire. Tu n'avais jamais eu a faire a une aveugle. Le truc bien c'est qu'elle le prenait de maniere positive et ca c'etait un bon point, de ne pas se morfondre quand on a un handicape comme cela. Toi, par contre, c'etait juste le neant concernant ta situation. Il n'y avait rien a faire. Tu devais surement avoir quelque chose, une epee de damoclès qui rodait au-dessus de ta tete vue ta chance.