(+ Eventine) Je perds les mots et mon coeur quand je te vois

« Minou reviens ! Allez ce n’est pas drôle, je n’ai pas envie de grimper dans cet arbre, je vais me casser le cou que tu seras déjà redescendu ! C’est pas juste, grand-mère me laissera jamais repartir si tu retournes pas sur ses genoux espèce de bouillotte ingrate » suppliais-je depuis dix bonnes minutes le chat de ma grand-mère aussi caractériel qu’ingrat. Je ne voulais pas monter dans cet arbre mais que pouvais-je faire d’autres ? Grand-mère me tannerait jusqu’à ce que je craque et j’avais bien trop de partiel à réviser pour me permettre une telle flexibilité dans mes révisions. « Tu… Tu m’enquiquines ! » râlais-je tout bas avant de me reculer pour prendre de l’élan et de sauter sur la première branche. Heureusement que je n’étais pas bien lourde car je réussis non sans mal à me hisser sur celle-ci mais après, l’affaire se corsa. Je n’étais ni gymnaste ni équilibriste et en prime, j’avais le vertige. Le chat du sentir que j’étais au bord du malaise car je sentis son regard machiavélique sur moi avant qu’il ne redescende souplement au sol. « Je… JE TE DETESTE MATOU INGRAT !!! REVIENS ICI TOUT DE SUITE QUE JE TE BOTTE LE CUL SI FORT QUE LES CROQUETTES TE REMONTRONT AU CERVEAU » hurlais-je avant de me raccrocher au tronc. « Au secours… aidez-moi ! » gémis-je de peur en fermant les yeux. Dans quels ennuis m’étais-je encore fourrée ?

Lire un bouquin pieds nus dans le jardin, sans relever le nez et surtout en restant torse nu malgré la température. Oh il avait tout de même fallut que le jeune prince éviter les remontrances de Gauthier mais maintenant que c’était chose faite, il se baladait comme un saint en sentant le gazon chatouiller délicieusement ses pieds, l’air passablement concentré par sa lecture… du moins jusqu’à ce qu’un cri féminin ne l’en extirpe et ne l’oblige à courir jusqu’à l’arbre d’où celui-ci émanait. « Ne bougez pas ! » s’exclama-t-il d’un ton sérieux et presque autoritaire alors qu’il déposait son bouquin contre une racine de l’arbre, grimpant avec l’agilité d’un chimpanzé jusqu’à se placer contre une branche solide, voisine à cette de cette demoiselle dont le visage ne lui était pas inconnu. « Donnez-moi votre main, je vais vous aider à descendre… doucement. » D’accord s’il rompait son royal cou ce serait la fin du monde mais autant ne pas partir sur un résultat aussi défaitiste, n’est-ce pas ?

Oh non qu’est-ce que j’avais fait pour mériter ça ? J’étais une pauvre étudiante consciencieuse et non une garce sans cœur alors pourquoi avais-je un karma aussi pourri ?! Aucune idée mais si quelqu’un trouvait une façon ou une autre de me tirer d’affaires, j’étais preneuse. Pour l’heure, je me retrouvais coincée sur une branche d’arbre avant qu’un sauveur ne vienne justement à mon secours. Oh mon dieu… C’est monsieur mon prince comme j’avais l’habitude de le surnommer dans ma petite tête blonde. « Vous… vous êtes torse nu » balbutiais-je aussitôt en plaçant une main sur mes yeux en rougissant. Je ne devais pas regarder, c’était inconvenant mais il était si bien bâti dans un même temps que je ne pus m’empêcher d’écarter quelques doigts. « J’ai…J’ai le vertige ! » bafouillais-je en essayant de ne regarder que sa main mais avec un corps comme le sien, c’était presque mission impossible. Ciel, il me demandait quand même de le toucher, moi qui rêvait de lui depuis des années sans oser l’embrasser même dans mes rêves les plus fous. Je tendis néanmoins une main tremblante vers lui. « Vous pourriez appeler.. les secours votre altesse » me mordillais-je la lèvre en rougissant plus fortement encore.

Eventine ne put décemment s’empêcher de lever légèrement les yeux au ciel. « N’escomptez pas que j’aille jusqu’à mon dressing pour enfiler quelque chose, votre branche aurait tout le temps de craquer même sous votre poids » reprit-il avec un sérieux quasi professionnel bien qu’il n’ait jamais vraiment pris de cours de secourisme ou travaillé dans une caserne de pompiers par exemple. « Ne faites pas de manières et attrapez pas main sans cacher votre vue de préférence, sans quoi vous risquez d’être tombée et de vous rompre le cou avant même que quelqu’un ait pu vous sortir de là, moi ou quelqu’un d’autre » reprit-il sans froideur, cherchant à lui faire changer d’avis en s’approchant le plus possible mais si elle ne le regardait pas, diantre, ils n’étaient pas sortis de la berge… il tenta de sauter sur une autre branche mais le résultat fut le même : sans sa pleine coopération, ils seraient encore là cette nuit, s’ils ne tombaient pas avant. « Faites-moi confiance ! »

Il était là, torse nu et il me parlait à moi, sa femme de chambre/cuisinière/bonne/fan de première heure. J’avais envie de crier, de sautiller sur place, de m’évanouir mais j’étais tellement intimidée par lui –sans compter que je n’arrivais pas à le regarder dans les yeux ; que je restais prostrée sur ma branche. « J’ai totalement confiance en vous votre altesse… C’est juste… » murmurais-je avant de m’interrompre. Je voulais dire que ce n’était pas convenant mais je risquais de l’énerver déjà qu’il avait eu la gentillesse de grimper et d’essayer de m’aider. Je poussais un soupire, le regardant en rougissant avant de glisser ma main dans la sienne et de le laisser me guider jusqu’à la terre ferme. « Merci votre altesse… Vous m’avez sauvé la vie alors si je peux vous remercier d’une manière ou d’une autre, je le ferais. Vous n’avez qu’à me dire et j’obéirais monsieur mon prince… Euh je voulais dire votre altesse ! Voilà votre altesse c’est ce que je voulais dire » paniquais-je en étant rouge comme une tomate de m’être ainsi vendue devant lui. Quelle gourde, quelle idiote, quelle honte surtout

Dieu existe ! Cette demoiselle finit par accepter d’attraper sa main et de se laisser guider jusqu’à la terre ferme, bien que le jeune prince ait cru qu’il lui faudrait argumenter comme un forcené pour obtenir finalement satisfaction… la voir mettre sa panique de côté pour adopter une réaction plus calme lui arracha un sourire et c’est avec souplesse et précaution qu’il la ramena bientôt sur la terre ferme avant que celle-ci ne se lance dans une véritable diarrhée verbale qu’il ne put arrêter avant qu’elle ne se stoppe d’elle-même. « Et moi qui pensait que j’étais un stressé de nature… vous devriez respirer déjà pour comment avant même que de vouloir me remercier, sans compter que je n’ai pas fait cela pour obtenir quelque chose en retour, je ne suis pas quelqu’un d’intéressé » reprit-il non sans ramasser son bouquin, à savoir les trois mousquetaires d’Alexandre Dumas, en lui offrant un léger sourire, amusé par ses paroles. « Vous ne vous êtes pas fait mal au moins ? »

« Oh mais je n’ai pas dit que vous étiez une personne intéressée votre altesse, ce n’était pas mon intention mais c’est juste que je souhaiterai vraiment vous remercier et puis, ce n’est pas comme si vous étiez obligé… Enfin je ne veux pas dire que vous n’aimez pas aider les autres et que c’était une corvée… Oui, je crois que je devrais être moins stressée monsieur » soupirais-je en plaquant mes mains sur mes joues chaudes à force d’être rouge comme des tomates bien mures et prêtes à être dégustée. Il allait me prendre pour une folle à bavasser de la sorte mais il m’impressionnait tellement et me retrouver aussi proche de lui dans cette tenue… Mon dieu mais pourquoi étais-je sortie précipitamment de ma chambre sans songer à mettre un pantalon au lieu de mon shorty habituel. Il faisait si chaud dans la dépendance de grand-mère que je restais toujours plus ou moins débraillée. « Non monsieur. Je… Vous savez j’ai l’habitude.. Euh pas de me retrouver dans les arbres mais de me faire un peu mal.. Et vous ? Vous ne vous êtes pas blessé ? »

Plus les secondes filaient sur l’horloge du temps et plus cette pauvre demoiselle semblait prête à exploser, si Eventine ne se basait que sur le rose lui montant aux joues. Il avait follement envie d’en rire mais cela n’aurait pas été charitable de sa part : on ne moque pas une demoiselle, leçon numéro un de Gauthier et si celui-là le prenait à ne pas respecter de telles choses, il était bon pour un sermon capable de lui coller mal au crâne pour trois semaines… très peu pour lui. « Je confirme, essayez de fermer les yeux, d’inspirer et d’expirer profondément à plusieurs reprises, il paraît que ça aide » lui conseilla-t-il non sans faire joujou avec les pages de son énorme bouquin, qu’il avait lu au moins quinze fois mais le passionnait toujours autant. « Je suis un rock n’ayez crainte, j’ai déjà fait tellement pire dans ma vie… mais pendant que je vous tiens, seriez-vous prête à organiser un repas de mariage ? »

Eventine comme j’aimais l’appeler dans l’intimité de ma tête me conseilla de fermer les yeux, d’inspirer et de respirer. Je m’employais donc à le faire quand je me tordis la cheville très légèrement sur la racine, lui atterrissant promptement dans les bras. « Vous sentez bon… » bafouillais-je légèrement en me mordillant la lèvre pour mieux m’écarter. Je me sentais gourde mais tellement heureuse d’avoir été un instant dans ses bras que je n’arrivais pas à en vouloir pour une fois à ma maladresse. « Veuillez m’excuser… vous disiez ?! Organiser un repas de mariage… C’est pour la jeune femme blonde qui vient souvent vous rendre visite ? » lui demandais-je par curiosité craignant tellement qu’il me réponde oui. Il n’était quand même pas amoureux d’elle n’est-ce pas ? Ce n’était pas possible d’avoir autant la poisse ? « Je ferais tout ce que vous jugerez bon de me demander votre altesse. Combien de personne assisteront aux festivités ? » l’interrogeais-je.

Eventine retint de justesse un éclat de rire en voyant Mikhaila lui atterrir dans les bras après avoir trébuché sur une branche épaisse de l’arbre. « Je vous remercie pour ce délicat compliment mais j’espère que vous êtes assurée, je ne suis pas sûr que vous finissiez l’année en un seul morceau ! » ne put-il s’empêcher de plaisanter de bon cœur car ce n’est pas avec lui qu’elle vivrait ses plus grands moments moroses. Il trouvait la vie bien trop courte pour cela et puis… l’épée de Damoclès au dessus de sa tête et de son cœur lui donnait plus envie encore de savourer chaque jour. « Vous avez l’œil, c’est bien pour ma partenaire pianiste, elle s’appelle Thaïs O’Neall. A priori ce sera un petit comité, pas plus d’une douzaine de personnes. Je suis désolé, je n’ai pas encore tous les détails, ils arrivent au compte goutte… mais je vais mettre Gauthier à contribution, vous ne serez pas toute seule dans cette entreprise. »