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Thaïs avait déjà pleinement conscience que l’indifférence apporte la pire des blessures. Elle en était la victime chaque jour : on la bousculait, on l’ignorait, ou pire on se moquait pour bien lui faire comprendre qu’elle ne serait jamais que le bas de la chaîne alimentaire, un tout petit rien du tout dans un océan d’égoïsme prodigué par les autres âmes qu’elle avait le malheur de croiser. La jolie irlandaise ne s’en sentait pas seule pour autant : elle se savait entourée de personnes méritant son amitié, et qui avaient toujours été là lorsqu’elle en avait eu besoin… et inversement, bien entendu. « Je l’ignore depuis six ans maintenant et je me doute que si elle réagit aussi violemment, c’est parce que ça la fait chier… je sais aussi qu’on est mieux seul que mal accompagné mais bordel, se dire que c’est mieux d’ignorer sa propre famille, je finis par trouver ça grave ! Il y a six ans je m’en foutais, je devais réapprendre à vivre complètement, notamment à me diriger, à cesser d’avoir des crises d’angoisse à la simple idée d’être dans le noir sans arrêt ou même à lire le braille… mais aujourd’hui que mon quotidien est plus stable, ça me retombe sur le coin de la gueule. D’un côté il vaut mieux que je ne côtoie pas cette malade des boyaux de la tête, et de l’autre ça m’emmerde parce que je croise plein de gens qui sont raccords avec leurs familles, notamment mon partenaire de danse, Caleb… et pas moi. Mais je ne peux même pas dire que quelque chose ne tourne pas rond chez moi puisqu’en l’occurrence, ce n’est pas de chez moi que cela vient. » Au final, Thaïs avait la très fâcheuse impression de se plaindre sans arrêt, et ce constat ne la fit que soupirer plus bruyamment encore. Si seulement tout ceci avait une fin qui n’était pas supposée être douloureuse… « Ça va toi, au fait ? Assez parlé de mes conneries… »
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