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Cela devait bien faire quelques semaines que j'étais de retour à Harvard. J'étais peut-être bien heureuse d'avoir réussi à remettre les pieds sur le campus sans trop de problèmes d'administration, quoique... Le fait que j'aie partiellement perdu la vue ne m'était pas très bénéfique : j'avais eu toutes les misères du monde à convaincre le Doyen ou du moins, ses secrétaires, de me laisser retourner à la Mather House. Mes crises ne m'aidaient pas non plus. Rares étaient les fois où j'arrivais à dormir en paix. Maintenant, depuis mon accident, presque tous les matins, je me réveillais avant même que le soleil ne se lève : en somme, je n'arrivai à dormir que quatre ou cinq heures, sans plus. Et mon corps ressentait les effets négatifs que ce manque de sommeil provoquait. Avant que je ne dorme ou pendant mon sommeil, je me débattais, tout en faisant une crise de colère, de panique et de larmes à la fois. Heureusement que je n'avais pas de colocataire pour le moment : elle m'aurait directement jetée hors de la chambre à coups de pieds au cul.
Ce soir, j'avais donc décidé de reprendre l'une de mes très vieilles habitudes, au moins pour une fois. J'avais changé, certes, et en mieux. Du moins, je me sentais changer de plus en plus, au niveau du caractère et de mes agissements. Je prenais de moins en moins de drogue, puisque les médicaments que je prenais étaient puissants. L'alcool que j'ingurgitais à haute dose normalement diminuait de plus en plus, car j'avais déjà bien du mal à me situer et à ne pas me prendre les pieds dans n'importe quoi dès que je faisais un pas, et boire pendant des heures et des heures pour s'amuser comme une folle, comme je l'avais toujours fait, me tuerait bien vite en une soirée... Pourtant, ce soir, me libérer un peu de tout ce poids m'aiderait vraiment. C'est pourquoi je m'habillai de manière sexy afin de sortir au Lord Hobo. Comment arrivais-je à me situer? La plupart du temps, je me fiais à mon chien qu'on m'avait heureusement assigné pour m'aider. Il m'était d'une compagnie indispensable, maintenant. Mais non, ce soir, j'avais demandé à mon frère d'être mon lift, afin qu'il me transporte en voiture jusqu'au Lord Hobo. « Oui, bien sûr frérot, je vais faire attention... T'en fais pas, j'ferai pas la folle. » Et il partit. C'est donc pour me changer les idées à fond, ce soir, mais aussi pour tirer un trait sur mon «ancienne vie» que j'allai m'installer avec précaution au comptoir du bar, tout en me guidant de mon bâton pour aveugles, et je commandai immédiatement : « Un whisky. Fort! Merci. » Un soupir s'échappa d'entre mes lèvres. Une soirée en solitaire s'annonçait... Une pensée pour Valentin me traversa la tête également. Il me manquait. Mais si je ne voulais pas être blessée face à un possible rejet de sa part, je devais résister à m'attacher trop. Même si c'était déjà fait...
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