« Dans les hôpitaux, ce sont plus les visiteurs que les malades qui font des gueules d'enterrement. » ▬ Apple

Pour certaine personne, voir Andy pleurer serait jouissant, mais pour moi, c’était tout l’effet contraire. Je n’arrivais pas à voir mon ami comme étant une mauvaise personne, malgré que l’on ne provienne pas du même monde. Il releva sa tête d’un coup, ses yeux étaient tout rouge et vitreux et je me suis tout à coup sentie vraiment, vraiment très mal d’avoir été froide avec lui tout à l’heure lorsque je lui ai demandé de quitter.

- Tu... Je croyais que tu dormais...

J’agitais la tête de gauche à droite. Je ne dormais pas… et pas la peine de dire pourquoi. Il était rentré dans ma chambre d’hôpital et je l’avais entendu. Andy se levait et prit place sur le lit, à côté de moi. Je me tassais légèrement pour lui donner plus d’espace et j’analysais chaque mouvement qu’il faisait. Soudainement, il attrapait ma main et ce fut la première fois depuis l’autre nuit que je n’avais pas de pensées malsaines.

- Apple, j'ai eu des nouvelles de Cora...

J’ai tout de suite su ce que ça voulait dire. Ça ne pouvait être rien d’autre. Andy n’aurait jamais pleuré pour un bras cassé… Elle était soit dans le coma, soit parti à tout jamais. Je sentis mon cœur se déchirer, mais je préférais espérer que ce soit beaucoup moins grave que je le pense. Je me redressais afin de m’asseoir, en ne le quittant pas des yeux.

- Qu'est-ce qu'il y a ? elle ne va pas bien.. ?

Ce n’était pas de sa faute. Il n’a peut-être pas répondu aux appels mais j’aurais dû empêcher Cora de conduire, même si elle n’avait pris qu’une gorgée d’un verre. Je n’aurais pas dû la laisser écouter la musique à un volume excessivement élevé… bref. Ce n’était pas de la faute d’Andy, surtout si en fait, la raison pour laquelle il n’a pas répondu au téléphone c’était moi.

- Elle... n'a pas survécu.

Ces mots auraient pu être comparés à une bombe. Je le savais, je l’avais devinée mais je n’arrivais pourtant pas à m’y faire. Je repensais soudainement au moment où j’étais dans la voiture et qu’elle ne répondait pas à l’appel. Je repensais au moment où elle se vidait de son sang, où j’aurais dû m’apercevoir qu’elle n’était plus là.

Je baissais les yeux afin de regarder nos mains et serrait la sienne, en commençant à trembler… Je me sentais mal, vraiment très mal… Puis je me suis mise à pleurer en silence, mettant ma main libre sur ma bouche. C’était horrible… mais elle est sans doute partie sans souffrir. Morte sur le coup. Je levais les yeux vers Andy et éclatait en sanglot. J’en avais mal au ventre.

Je regrettais énormément. Parce que c’était mon amie et parce que ça aurait pu être évité. L’un des derniers souvenirs que j’aurai d’elle c’est de lui avoir foutu mon poing à la gueule parce qu’elle avait embrassée Ocean. J’aurais tellement aimée une réconciliation complète… et qu’on puisse en profiter… Mais nous n’avions pas eu le temps nécessaire.

Il avait du courage… parce que si ç’aurais été moi j’aurais probablement laissé le médecin l’annoncer. C’est le genre de chose auquel il est humain d’avoir peur de dire et de réaliser. Cora était décédée. Nous avions eu cet accident et ça aurais pu être moi. L’autre voiture impliquée aurait pu frapper le côté passager auquel j’y étais assise mais ce fut le côté de mon amie…

Andy lâcha ma main et me prit dans ses bras. Sans me poser de question, j’encerclais mes bras à sa taille et posais ma tête sur son épaule… Nous étions là à pleurer dans les bras de l’un de l’autre, il caressait mon dos et cela m’aidait à me sentir réconfortée… du moins, le plus possible.

- Je suis désolé...

Il n’avait pas à l’être. Ce n’était pas de sa faute ! Je le serrais un peu plus fort et continuais de pleurer pendant plusieurs minutes, jusqu’à n’en plus avoir la force. Je me calmais enfin mais restait dans ses bras en reniflant.

- Ç'aurais pu être moi... Prononçais-je, à voix basse avant de poursuivre. Elle n'a pas souffert, j'le sais. Ça s'est passé trop vite.

J’avais eu peur, tellement peur… Mais tout ça était maintenant terminé, j’étais au lit, qu’importe le lit c’était. Cette journée allait finalement se terminer pour moi, elle m’a paru très longue. Puis une pensée m’est venue en tête… Dieu merci. Merci d’avoir fait en sorte que j’étais dans la voiture avec elle. Que j’ai été là ou non, Cora aurait conduit seule jusqu’à cette fête et en serait revenu probablement dans le même état ou encore pire si je n’aurais pas fait le chaperon. Si je n’avais pas été là, Cora aurait probablement vécu ses dernières instantes toute seules…

Andy se redressa et planta son regard dans le mien, avec un tout léger sourire. Je me pinçais les lèvres et il m’essuyait les joues, pour casser mes larmes.

- Je sais que ça doit être dur, mais tu devrais te reposer, tu auras une longue journée demain et avec ce qu'il vient de t'arriver, tu as bien besoin de repos...

J’hochais la tête. Il avait raison, je devais dormir… mais lui aussi. Je me demande s’il est insomniaque, du coup. La dernière fois il n’avait pas réussi à dormir avant un moment, et ce soir, il était encore debout pour répondre à l’appel. Je passais moi-même le revers de la main sur mes joues et m’allongeait à nouveau, silencieuse. Après quelques secondes de silence, le dos tournée à Andy, je chuchotais.

- En fait Andy... je marquai une pause J’ai jamais compris ceux qui ont essayé de me faire croire que tu n’avais pas de cœur. Je me retournais vers lui afin de le regarder et lui sourit. .. J'crois qu'ils n'ont jamais prit la peine d'apprendre à te connaître...

Faites qu’il ne quitte pas… Je m’en voulais de l’avoir fait fuir tout à l’heure et maintenant que j’avais une chance de me rattraper, je voulais la saisir. J’ai d’abord essayée de le retenir avec mon compliment et étonnamment, ça avait fonctionné. Andy n’était pas le genre de mec qui raffolait de ce genre de moment, du moins c’est ce que j’avais cru comprendre depuis le temps. Peut-être que ce moment était différent, parce que tous les deux sommes triste d’avoir perdu une amie…

Puis, il retirait ses chaussures. Mon cœur a manqué un bond, voire deux : j’étais vraiment surprise de voir qu’il allait rester plus longtemps. Il s’installa à côté de moi, allongé et je me retournais vers lui tout doucement pour que ça me fasse moins mal.

- Tu sais... Je n'ai pas envie qu'ils me connaissent. Mon cœur est bien caché et ne s'ouvre qu'à une poignée de personnes. Et tu fais partie de ces gens que j'aime, Apple.

Depuis notre rencontre Andy n’avait jamais réellement dit quelque chose comme tel à mon égard. Je lui souris. Bien sûr que j’étais contente ! Voire touchée. Venant de lui, je me sentais même fière et c’était important pour moi. Parce que comme il le dit, seulement quelques personnes ont droit à son amitié. La rareté attire.

Je décidais de ne rien ajouter. Je voulais profiter de ces paroles un peu plus longtemps… Je m’allongeais à nouveau et fermai les yeux doucement. Quelques minutes par la suite, je me glissais dans ses bras en posant ma tête sur son épaule et délivrais à voix basse :

- .. Ça te dérange ?