Un diamant d'innocence [Coopian

Me faire pardonner. C’est l’idée qui guide mes pas en ce jour de Black Friday, me faire pardonner pour le fichu Parents day. Pourtant je continue à maintenir que je n’étais pas en tort, que c’est le dénommé Sheng qui a totalement pété les plombs. Que je n’ai été qu’une victime de sa … frustration. Je ne trouve rien d’autre comme explication. Parce que je me suis renseignée, il est toujours en couple et toujours bien dans sa relation. C’est en tout cas ce qu’a affirmé celui qui partage sa maison avec sa petite amie. M’enfin, peu importe en réalité, parce qu’il n’en reste pas moins que maintenant, je me dirige vers une bijouterie pour tenter de trouver un cadeau unique pour Annalyne Malcolm la tyrannique, et que je n’ai aucune fichue envie d’y aller.

Parce que ça fait clairement partie des choses que je déteste. Faire les boutiques. Me mélanger, j’évite les foules et je suis plus douée pour négocier par écrans interposés. Alors à l’intérieur de la boutique, je ne sais pas ce que je fais, je tourne en rond sans vraiment rien regarder. Je doute d’ailleurs de ma mission, de son utilité. Ma mère a arrêté de me parler, de toutes façons… Je ne suis même plus sûre qu’un bijou sera la bonne solution. C’est sans y réfléchir que je m’accoude à un présentoir, ce qui me vaut le soupir d’une vendeuse, je lui en sers une œillade digne d’une chieuse, et me contrefous de la silhouette à proximité, c’est sur les différentes bagues que mon regard finit par se poser. Jetant instinctivement mon dévolu sur l’une d’elles. Parfaite. « Je la veux. » désigne l’anneau du doigt, sans m’être rendue compte que j’avais parlé à haute voix.

Mes prunelles redessinent les contours de l’anneau, et peut-être qu’il n’est pas vraiment à l’image de ceux que ma mère affectionne porter, mais il ressemble à ceux que je pourrais aimer, si avoir des milliers de bijoux m’intéresser. Alors c’est pour elle, mais c’est surtout un bout de moi. Même si je ne suis pas certaine que la symbolique, Annalynne la comprendra.

Alors je soupire, dans l’attente de voir une vendeuse se faufiler jusqu’à moi, maudit le fait qu’il y ait tant de personnes présentes dans cette boutique pour cette journée. Mon aller-retour, il semblerait qu’il va s’étirer. Au moins le temps que je me préoccupe de celui qui vient de s’adresser à moi d’un simple, « Laquelle ? » je les tourne vers lui, mes prunelles. Néanmoins, lorsque je le reconnais, c’est instinctif, mon envie de l’envoyer chier, « Qu’est-ce que ça peut te foutre ? » Parce que si je suis en conflit actuellement avec ma génitrice, j’estime que c’est sa faute – et potentiellement à mon manque de savoir-faire en termes de communication – mais je préfère largement le blâmer, « Tu veux peut-être me demander de t’épouser ? » puisque je porte sa progéniture, pas vrai ? Sheng, tu veux un secret ? Je préférais quand tu te contentais de jouer avec mon frère. Si seulement je savais avoir autant de bouche pour répondre à ma mère.

Aucune réponse ne vient et pour le coup, j’estime que je lui ai fait fermer, ce coup-ci, la grande bouche qu’il n’avait pas pu s’empêcher d’ouvrir lors du parent day. J’en détourne le regard de sa silhouette, et pianote nerveusement sur le bord le temps d’attendre qu’une vendeuse ne se décide à accéder à m requête. « Ta mère prend tout trop à cœur. » A l’évidence, je me suis trompée. Ses lèvres ne savent apparemment pas rester scellées. « Et elle devrait plus te faire confiance, » J’en exulte un rire mauvais, acceptant de reposer sur lui mes prunelles mordorées.

Mentalement, je m’interroge tout de même, est-ce qu’il y croit vraiment à ses paroles ? « Bien sûr. » que je crache, un brin, mauvaise. « Parce que c’était la faute de ma mère. » Est-il sénile à ce point-là ? Parce que je pensais que j’avais extrapolé quand je l’avais hurlé. Le hic, dans tout ça, c’est que je n’ai toujours pas compris pourquoi il a fait ça. Mais à défaut de lui demander, je préfère largement balancer. « Je suis prête à acheter tout le présentoir si ça peut t’emmerder. » Dois-je rappeler que je ne suis pas adaptée ? Que mes émotions de petit génie sont délicates à contrôler ? Je ne sais pas réagir comme les autres l’attendent. Que c’est aux savants fous que je ressemble. Et pour une fois ? Utiliser mon argent de petite privilégiée ne me dérange pas.